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09/05/2023 | FRANCE | N°20/12839

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 4, 09 mai 2023, 20/12839


REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 4 - Chambre 4



ARRET DU 09 MAI 2023



(n° , 2 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/12839 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CCKOQ



Décision déférée à la Cour : Jugement du 09 Mars 2020 -Juge des contentieux de la protection de Paris RG n° 11-19-9946





APPELANTE



Société ELOGIE SIEMP

[Adresse 5]

[Localité 4]

N° SIRET : B 5 52 0

38 200



Représentée par Me Nicolas GUERRIER de la SCP NICOLAS GUERRIER ET ALAIN DE LANGLE, avocat au barreau de PARIS, toque : P0208 et assistée par Me Paola BOUVIER D'YVOIRE, avocat au barreau de PARI...

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 4

ARRET DU 09 MAI 2023

(n° , 2 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/12839 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CCKOQ

Décision déférée à la Cour : Jugement du 09 Mars 2020 -Juge des contentieux de la protection de Paris RG n° 11-19-9946

APPELANTE

Société ELOGIE SIEMP

[Adresse 5]

[Localité 4]

N° SIRET : B 5 52 038 200

Représentée par Me Nicolas GUERRIER de la SCP NICOLAS GUERRIER ET ALAIN DE LANGLE, avocat au barreau de PARIS, toque : P0208 et assistée par Me Paola BOUVIER D'YVOIRE, avocat au barreau de PARIS, toque : P0208

INTIME

Monsieur [R] [Z] [D]

[Adresse 2]

[Localité 3]

né le [Date naissance 1] 1939 à [Localité 6] (Algérie)

Représenté par Me Catherine LABUSSIERE BUISSON de l'AARPI G.B AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : A0785 et assisté par Me Florence GOMES, avocat au barreau de PARIS, toque : E1889

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 03 Janvier 2023, en audience publique, devant la Cour composée de :

M. Michel CHALACHIN, Président de chambre

Mme Marie MONGIN, Conseiller

M. François BOUYX, Conseiller

qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l'audience par Madame Marie MONGIN dans les conditions prévues par l'article 804 du code de procédure civile.

Greffier, lors des débats : Mme Gisèle MBOLLO

ARRET :

- Contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Michel CHALACHIN, Président de chambre et par Gisèle MBOLLO, Greffière chambre 4-4, présente lors de la mise à disposition.

EXPOSÉ DU LITIGE

Par acte sous seing privé du 14 février 1985, à effet au 1er mars 1985, la société d'économie mixte de construction et de gestion du secteur des halles, aux droits de laquelle vient la société anonyme Élogie-Siemp, a consenti à M. [Z] [D] un bail d'habitation pour une durée de six ans renouvelable, portant sur le logement situé [Adresse 2], moyennant un loyer mensuel charges comprises de 4 019,63 francs (612,79 euros) payable mensuellement et d'avance.

Le 17 août 2009, l'État et la société de gérance d'immeubles municipaux (ci-après, la SGIM) ont conclu une convention en application de l'article L. 351-2 du code de la construction et de l'habitation dans le cadre de l'acquisition de 43 logements situés [Adresse 2].

Par courriers en date des 10 octobre et 12 décembre 2017, la société Élogie-Siemp a informé M. [D] de l'application du supplément de loyer de solidarité à compter du 1er mai 2018 et lui a demandé de produire son avis d'imposition 2017 sur les revenus de l'année 2016 dans le cadre d'une enquête de ressources.

En l'absence de réponse, M. [D] s'est vu appliquer le supplément de loyer de solidarité maximum d'un montant mensuel de 2 395,70 euros pour l'année 2018 et de 2 431,19 euros pour l'année 2019.

Par courrier du 27 juin 2018, M. [D] a rappelé à la société Elogie-Siemp qu'il occupait les lieux en vertu d'un contrat de bail conclu au mois de mars 1985 qui était régulièrement indexé et a indiqué être âgé de 79 ans.

Le 16 juillet 2018, la société Élogie-Siemp a fait délivrer à M. [D] un commandement visant la clause résolutoire insérée au bail afin d'obtenir paiement de la somme de 7 187,10 euros au titre des loyers et charges impayés.

Les causes du commandement n'ayant pas été réglées dans le délai de deux mois, la société Élogie-Siemp a fait assigner M. [D] devant le tribunal d'instance de Paris par acte d'huissier du 16 juillet 2019 afin d'obtenir la constatation de la résiliation du bail par l'effet de la clause résolutoire ou son prononcé, l'expulsion de M. [D] et sa condamnation à lui verser le solde de l'arriéré locatif ainsi qu'une indemnité d'occupation.

Par jugement du 9 mars 2020, le juge des contentieux de la protection a ainsi statué :

Condamne M. [D] à payer à la société Élogie-Siemp la somme de 8 053,74 euros au titre du supplément de loyer de solidarité impayé entre le 1er mai 2018 et le 30 novembre 2018, avec intérêts au taux légal à compter de ce jour,

Autorise M. [D] à apurer la dette locative précédemment fixée en 24 mensualités de 333,57 euros chacune, en plus du loyer courant, payables le jour d'échéance du loyer, à compter du prochain loyer exigible, la dernière étant constituée du solde de la dette,

Dit qu'à défaut de paiement d'une seule échéance à son terme ou du loyer courant, l'intégralité des sommes restant dues deviendra de plein droit immédiatement exigible,

Suspend les effets de la clause résolutoire pendant les délais accordés sous réserve du respect de l'échéancier,

Dit qu'en cas d'apurement intégral de la dette selon l'échéancier, la clause résolutoire sera réputée n'avoir jamais joué,

À défaut de respect de l'échéancier,

Constate la résiliation du bail convenu entre les parties au jour du premier impayé dans le cadre de l'échéancier précédemment fixé,

Ordonne l'expulsion de M. [D] du local d'habitation situé [Adresse 2], faute pour lui d'avoir libéré les lieux dans le délai de deux mois après le commandement prévu par les articles L. 411-1 et L. 412-1 du code des procédures civiles d'exécution, de ses biens et de tous occupants de son chef, au besoin avec l'assistance de la force publique,

Accorde à M. [D] un délai de 6 mois pour quitter les lieux,

Condamne M. [D] à verser à la société Élogie-Siemp à compter du premier impayé dans le cadre de l'échéancier et jusqu'à la libération effective des lieux, une indemnité d'occupation mensuelle fixe égale au montant des loyers et charges qui auraient été dus en cas de non résiliation du bail,

En tout état de cause :

Condamne M. [D] à payer à la société Élogie-Siemp la somme de 500 euros (cinq cents euros) en application de l'article 700 du code de procédure civile,

Déboute les parties du surplus de leurs demandes,

Condamne M. [D] aux dépens de l'instance comprenant le coût du commandement de payer,

Ordonne l'exécution provisoire de la présente décision.

Par déclaration reçue au greffe le 10 septembre 2020, la société Élogie-Siemp a interjeté appel de cette décision et, dans ses conclusions notifiées le 8 décembre 2020, elle demande à la cour de :

- infirmer le jugement rendu le 9 mars 2020 par le juge des contentieux de la protection de Paris en ce qu'il a débouté la société Élogie-Siemp de sa demande d'application du régime locatif conventionné pour la période postérieure au 25 novembre 2018,

- dire et juger que M. [D] est redevable d'un supplément de loyer de solidarité à compter du 1er mai 2018,

- condamner M. [D] à payer la somme de 49 045,46 euros au titre du supplément de loyer de solidarité dû pour la période allant du 1er mai 2018 au 30 novembre 2020,

- confirmer le jugement pour le surplus,

- condamner M. [N] (sic) à payer à la société Élogie-Siemp la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile outre aux entiers dépens.

Par conclusions notifiées par la voie électronique le 1er mars 2021, M. [D] demande à la cour de :

- déclarer M. [D] recevable et bien fondé en ses demandes, fins et conclusions,

- à titre principal, infirmer le jugement en toutes ses dispositions,

- statuant à nouveau, débouter la société Élogie-Siemp de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

- subsidiairement, infirmer le jugement rendu par le juge des contentieux de la protection le 9 mars 2020 en ce qu'il a constaté l'acquisition de la clause résolutoire visée au bail, ordonné l'expulsion de M. [D] et limité les délais pour quitter les lieux à 6 mois,

- confirmer le jugement rendu par le juge des contentieux de la protection le 9 mars 2020 pour le surplus,

- à titre infiniment subsidiaire, infirmer le jugement rendu par le juge des contentieux de la protection le 9 mars 2020 en ce qu'il a limité les délais pour quitter les lieux à M. [D] à 6 mois,

- statuant à nouveau, accorder à M. [D] 36 mois pour quitter le logement situé [Adresse 2]

- en tout état de cause, condamner la société Élogie-Siemp au paiement d'une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens dont distraction au profit de Me Catherine Labussière Buisson, avocat au Barreau de Paris.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 3 janvier 2023.

A l'audience du 3 janvier 2023, la cour a invité la société bailleresse à préciser le décompte des sommes dues pour les années 2019 à 2021 et a autorisé les parties à lui adresser des observations en cours de délibéré.

La société Élogie-Siemp a envoyé une première note en délibéré le 24 janvier 2023 et diverses pièces.

Le conseil de M. [D], dans sa note en date du 28 janvier 2023, a communiqué l'avis d'imposition 2020 sur les revenus de 2019 pour permettre au bailleur de calculer l'éventuel supplément de loyer pour l'année 2021. La bailleresse a produit un nouveau décompte et modifié sa demande qu'elle évalue à la somme de 32 137,15 euros arrêtée au 1er février 2023 ;

SUR CE,

A l'appui de sa contestation M. [D] fait en premier lieu valoir les stipulations de la convention conclue entre le bailleur et l'État qui imposeraient au bailleur de proposer un nouveau bail qu'il aurait pu refuser, ce qui l'aurait dispensé du payement du supplément de loyer de solidarité.

Il résulte cependant des dispositions de l'article L. 481-2 du code de la construction et de l'habitation que les dispositions relatives audit supplément de loyer sont applicables aux sociétés d'économie mixte, telle que l'appelante, pour les logements faisant l'objet de conventions en application de l'article L. 351-2 dudit code.

L'article L. 441-3 du code de la construction et de l'habitation dispose, depuis la loi n° 2006-872 du 13 juillet 2006, la perception du supplément de loyer crée par la loi n° 96-162 du 4 mars 1996 constituant auparavant une simple faculté, que :

« Les organismes d'habitations à loyer modéré perçoivent des locataires des logements visés au premier alinéa de l'article L. 441-1 le paiement d'un supplément de loyer de solidarité en sus du loyer principal et des charges locatives dès lors qu'au cours du bail les ressources de l'ensemble des personnes vivant au foyer excèdent d'au moins 20 % les plafonds de ressources en vigueur pour l'attribution de ces logements ».

Il résulte de ce texte de portée générale, inchangé depuis la loi du 13 juillet 2006, que les organismes d'habitations à loyer modéré et ceux qui y sont assimilés doivent réclamer le paiement d'un supplément de loyer.

Le supplément de loyer ayant un fondement exclusivement légal, ni la convention conclue avec l'État ni d'autres stipulations contractuelles ne peuvent y faire échec.

Cette première argumentation de l'appelant ne peut donc être retenue.

M. [D] sollicite à titre subsidiaire que le jugement qui l'a reconnu débiteur d'un tel supplément de loyer pour la période antérieure au 25 novembre 2018 soit confirmé ; il soutient que, comme le premier juge l'a décidé, les dispositions de la loi n°2018-1021 du 23 novembre 2018 ayant précisé que les dispositions de l'article L. 441-3 du code de la construction et de l'habitation ne sont pas applicables aux locataires ayant refusé de conclure un nouveau bail en application de l'article L. 353-7 dudit code, le supplément de loyer de solidarité ne lui est pas applicable depuis l'entrée en vigueur de la loi du 23 novembre 2018.

Pour parvenir à cette décision, le premier juge a considéré que cette loi s'appliquait immédiatement aux contrats en cours n'ayant pas épuisé leur effet ; néanmoins il doit être considéré que ces dispositions de ladite loi ne s'appliquent qu'aux conventions conclues postérieurement à leur entré en vigueur, ce qui n'est pas le cas de la convention litigieuse conclue en 2009.

Par conséquent, la société Élogie-Siemp peut réclamer à M. [D] un supplément de loyer en fonction de ses ressources.

S'agissant de la somme due au titre des suppléments de loyers non payés, que M. [D] sollicite que ce supplément de loyer soit fixé à 1 158,64 euros pour le mois de décembre et 12 781,86 euros de janvier à décembre 2019 correspondant à douze mensualités de 1 065,16 euros.

Elles correspondent à celles finalement établies par la bailleresse, laquelle a effectué une rectification sur les décomptes qu'elle verse aux débats, ;

S'agissant du montant du supplément de loyer pour 2020, la somme de 29 493,72 euros qui avait été facturée a été déduite en janvier 2023 et fixée à 8 398 euros pour les 12 mois de l'année 2020.

Il en va de même pour l'année 2021, la somme facturée de 29 600 euros a été déduite du dernier décompte produit et le supplément de loyer est de 8 330,04 euros, le supplément de loyer réclamé en janvier 2022 a également été déduit du décompte du bailleur.

C'est donc la somme de 32 137,15 euros qui reste due par M. [D].

S'agissant de la validité du commandement de payer délivré le 16 juillet 2018, si la somme réclamée était de 7 187,10 euros alors qu'il n'était dû en définitive que 3 175,92 euros, cette circonstance n'est pas de nature à affecter sa validité ;

Le jugement sera donc confirmé en son principe d'acquisition de la clause résolutoire, en l'absence d'autre contestation sur ce point ;

Considération prise des revenus de M. [D], de son âge, de ses problèmes de santé, et du montant de la somme réclamée, il convient de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il lui a accordé des délais de payement suspendant le jeu de la clause résolutoire, délais qui seront de trois années dans les conditions précisées au dispositif.

En raison de ces mêmes considérations, il sera également fait droit à la demande de délai de deux années pour quitter les lieux dans le cas ou les échéances de remboursement de la somme due ne pourraient être respectées et que le bail devait être résilié ;

S'agissant des mesures accessoires, l'équité et la situation économique des parties ne commandent pas de faire application de l'article 700 du code de procédure civile, le jugement sera donc infirmé de ce chef ; quant au dépens, les circonstances particulières de cette affaire justifient que chacune des parties supporte la charge des dépens d'appel qu'elles ont engagés.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

statuant publiquement par mise à disposition au greffe de l'arrêt contradictoire,

- Confirme le jugement entrepris sauf quant au montant de la dette, aux modalités des délais de payement, à la durée du délai pour quitter les lieux en cas de non-respect des délais de payement et à l'application de l'article 700 du code de procédure civile,

Statuant à nouveau et y ajoutant :

- Condamne M. [Z] [D] à verser à la société Élogie-Siemp la somme, arrêtée au 1er février 2023, de 32 137,15 euros avec intérêts au taux légal à compter du 9 mai 2023, date du prononcé du présent arrêt,

- Autorise M. [Z] [D] à apurer cette dette en 36 mensualités, en sus du loyer courant, dans les conditions suivantes :

- les 12 premières mensualités de 600 euros,

- de la 13ème à la 24ème mensualité 800 euros

- de la 25ème à la 35ème mensualité 1 000 euros

- le solde lors de la 36ème mensualité,

- Rappelle qu'aux termes de l'article 1 343-5 du code civil cette décision suspend les procédures d'exécution et que les majorations d'intérêt ou les pénalités de retard ne sont pas applicables pendant ce délai,

- Accorde à M. [Z] [D], à défaut de respect de l'échéancier, dans l'hypothèse où le bail serait résilié et que le bailleur puisse procéder à l'expulsion, un délai de deux ans pour quitter les lieux,

- Dit n'y avoir lieu à l'application de l'article 700 du code de procédure civile au profit de quiconque, tant en première instance qu'en appel,

- Déboute les parties de leurs prétentions plus amples ou contraires,

- Dit que chacune des parties conservera la charge des dépens d'appel qu'elle a exposés.

Le Greffier Le Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 4
Numéro d'arrêt : 20/12839
Date de la décision : 09/05/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-05-09;20.12839 ?
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