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20/04/2023 | FRANCE | N°21/15580

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 9 - a, 20 avril 2023, 21/15580


Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 9 - A



ARRÊT DU 20 AVRIL 2023



(n° , 7 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/15580 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CEI7E



Décision déférée à la Cour : Jugement du 22 juillet 2021 - Tribunal Judiciaire de PARIS - RG n° 11-21-005118





APPELANTE



Madame [S] [K]

née le 26 Juin 1947 à [Localité 7

] (IRAN)

[Adresse 3]

[Localité 6]



représentée et assistée de Me Paul VILLETARD DE LAGUERIE, avocat au barreau de PARIS, toque : G544







INTIMÉE



La société INERIES, société p...

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 9 - A

ARRÊT DU 20 AVRIL 2023

(n° , 7 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/15580 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CEI7E

Décision déférée à la Cour : Jugement du 22 juillet 2021 - Tribunal Judiciaire de PARIS - RG n° 11-21-005118

APPELANTE

Madame [S] [K]

née le 26 Juin 1947 à [Localité 7] (IRAN)

[Adresse 3]

[Localité 6]

représentée et assistée de Me Paul VILLETARD DE LAGUERIE, avocat au barreau de PARIS, toque : G544

INTIMÉE

La société INERIES, société par actions simplifiée prise en la personne de son représentant légal

N° SIRET : 789 070 646 00029

[Adresse 1]

[Localité 5]

représentée par Me Victor BILLEBAULT, avocat au barreau de PARIS, toque : E1209

PARTIE INTERVENANTE

La S.C.P. [G], prise en la personne de Me [U] [G], en qualité de liquidateur de la société INERIES

[Adresse 2]

[Localité 4]

DÉFAILLANTE

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 28 février 2023, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Fabienne TROUILLER, Conseillère, chargée du rapport

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Muriel DURAND, Présidente de chambre

Mme Fabienne TROUILLER, Conseillère

Mme Laurence ARBELLOT, Conseillère

Greffière, lors des débats : Mme Camille LEPAGE

ARRÊT :

- RÉPUTÉ CONTRADICTOIRE

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Mme Muriel DURAND, Présidente et par Mme Camille LEPAGE, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Le 28 septembre 2019, Mme [S] [K] et la société Ineries ont conclu un contrat de travaux portant sur la rénovation d'une salle de bain moyennant un prix total, selon l'appelante, de 6 976,38 euros.

Les travaux ont débuté en novembre 2019 et devaient durer quinze jours.

Mme [K] reproche à l'entreprise de ne pas avoir terminé les travaux commandés en dépit de ses demandes multiples. Elle a fait constater l'état de sa salle de bain par constat d'huissier dressé le 15 juillet 2020 puis a fait appel à une autre société afin de terminer les travaux de rénovation de sa salle de bain, inutilisable depuis le début des travaux.

Saisi le 22 février 2021 par Mme [K] d'une demande tendant principalement à la condamnation de la société Ineries au paiement d'une somme de 3 362 euros en restitution des sommes indûment perçues et d'une somme de 2 000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation de son préjudice de jouissance et de son préjudice moral, le tribunal judiciaire de Paris par jugement réputé contradictoire rendu le 22 juillet 2021 auquel il convient de se reporter, a débouté Mme [K] de l'ensemble de ses demandes.

Le tribunal a principalement retenu que Mme [K] ne rapportait pas la preuve d'un préjudice imputable à une faute de la société Ineries et a constaté que la société Ineries avait réalisé des travaux pour une somme supérieure à l'acompte versé par Mme [K].

Par une déclaration en date du 13 août 2021, Mme [K] a relevé appel de cette décision.

Aux termes de conclusions remises le 10 mars 2022, l'appelante demande à la cour :

- d'infirmer le jugement en toutes ses dispositions,

- de condamner la société Ineries à lui réparer son préjudice causé par l'inexécution fautive des prestations contractuellement prévues,

- de condamner la société Ineries à lui rembourser la somme de 5 929,01 euros correspondant au montant versé pour les prestations non terminées,

- de condamner la société Ineries à lui rembourser la somme de 1 310 euros correspondant à la somme engagée pour terminer les travaux démarrés par Ineries, mais non terminés,

- de condamner la société Ineries à lui rembourser la somme de 2 311,12 euros correspondant aux matériaux et produits qu'elle a été contrainte d'acheter elle-même,

- de commander la société Ineries à lui verser la somme de 10 000 euros en réparation du préjudice subi et causé par l'impossibilité de se laver et de bénéficier de conditions de vie digne pendant près d'une année,

- à titre subsidiaire, de condamner la société Ineries à lui restituer la somme de 3 811,40 euros indûment perçue,

- en tout état de cause, de condamner la société Ineries à lui verser la somme de 7 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- de condamner la société Ineries aux entiers dépens,

- de dire que ceux d'appel seront recouvrés par Me Villetard de Laguerie, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure d'appel.

L'appelante, visant les articles 1103 et 1231-1 du code civil fait valoir que la société Ineries a manqué à ses obligations contractuelles. Elle indique qu'en ne terminant pas les travaux, la société Ineries a manqué à son obligation de résultat. Elle soutient que ce manquement lui a causé un préjudice en ce qu'elle ne pouvait utiliser sa salle de bain durant une année, en ce qu'elle était contrainte à l'âge de 74 ans de se laver chez les voisins, en ce qu'elle a fait appel à un autre entrepreneur pour terminer les travaux et en ce qu'elle a acheté elle-même les matériaux nécessaires à la poursuite du chantier. Elle prétend enfin que le préjudice est imputable aux fautes commises par la société Ineries.

A titre subsidiaire, l'appelante au visa de l'article 1302 du code civil sollicite une condamnation en répétition de l'indu au motif qu'elle a versé la somme de 5 929,01 euros à la société Ineries alors que les travaux effectués représentaient un montant de 2 117,61 euros.

Aux termes de conclusions remises le 6 février 2022, la société Ineries demande à la cour :

- de débouter Mme [K] de l'ensemble de ses demandes,

- de confirmer le jugement,

- de condamner Mme [K] aux entiers dépens,

- de condamner Mme [K] à lui verser la somme de 2 400 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

L'intimée au visa des articles 9 du code de procédure civile et 1353 du code civil soutient que Mme [K] échoue à rapporter les preuves d'un manquement contractuel de la société Ineries.

Elle indique au visa de l'article 1218 du code civil que la pandémie du Covid 19 est un cas de force majeure justifiant le retard des travaux, que l'appelante ne peut lui reprocher de ne pas être intervenue entre le mois de mars et le mois de juillet 2020 et que les travaux n'ont pas repris au motif que les parties avaient mis un terme au contrat suite à un désaccord sur le choix des matériaux.

Elle relève également que Mme [K] ne démontre pas la preuve d'un quelconque préjudice et rappelle qu'elle a renoncé à percevoir le solde des sommes qui restaient dues.

Elle souligne que le quantum des dommages-intérêts réclamés est passé de 2 000 euros à 10 000 euros en appel sans aucune justification.

Par jugement du 4 août 2022, le tribunal de commerce de Paris a prononcé la liquidation judiciaire de la société Ineries et a désigné la SCP [G] en la personne de Me [U] [G] en qualité de liquidateur.

Assigné en intervention forcée par acte remis à personne morale le 15 septembre 2022, Me [G] a indiqué qu'il ne serait pas présent ni représenté en l'absence de fonds.

Mme [K] demande à la cour :

- de voir intervenir la SCP [G], prise en la personne de Me [U] [G], en qualité de liquidateur'de la société Ineries,

- déclarer commune et opposable à la SCP [G], prise en la personne de Me [U] [G], en qualité de liquidateur de la société Ineries, la procédure introduite devant la cour d'appel de Paris par déclaration d'appel du 13 août 2021,

- de constater qu'elle est titulaire d'une créance de 26 550,12 euros à l'encontre de la société Ineries,

- de fixer sa créance au passif à la somme de 26 550,12 euros.

Mme [K] justifie avoir, par acte du 28 juillet 2022, déclaré sa créance à hauteur de 26 550,12 euros.

Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions des parties, il est renvoyé aux écritures de celles-ci, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 24 janvier 2023 et l'affaire a été appelée à l'audience du 1er mars 2023.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Pour débouter Mme [K], le premier juge, au visa non contesté des articles 1103 et 1323 du code civil, a estimé que les travaux réalisés par l'entreprise pouvaient être évalués à 2 824 euros et que seule une somme de 2 441,73 euros avait été versée. Il a également jugé que Mme [K] ne démontrait pas avoir subi un préjudice de jouissance ni un préjudice moral.

L'intimée, qui n'avait pas comparu en première instance, réclame la confirmation du jugement en faisant valoir qu'à l'issue du déconfinement les parties ont mis fin à leur relation contractuelle, qu'il n'est rapporté la preuve d'aucune faute, que le retard dans l'achèvement des travaux a été la conséquence de la crise sanitaire constituant une force majeure, qu'il ne peut lui être reproché de ne pas être intervenue entre mars et juillet 2020 et que l'appelante ne rapporte la preuve d'aucun préjudice.

La cour constate que l'intimée ne produit aucune pièce et n'a émis aucune contestation sur les pièces produites par l'appelante.

Il ressort néanmoins des pièces produites que les parties sont, par devis signé le 28 septembre 2019 portant sur la rénovation complète d'une salle de bain de 3,5 m² au prix de 6 976,38 euros, que contrairement à ce qu'a retenu le premier juge, il est parfaitement justifié que Mme [K] a versé la somme totale de 5 929,92 euros arrêtée au 10 décembre 2019 et il n'est pas contesté que les parties ont mis fin à leur relation, la société Ineries ayant renoncé à réclamer le solde de la facture, soit la somme de 1 046,46 euros.

Il est également démontré et non contesté que la société Ineris a démarré les travaux le 5 novembre 2021, qu'elle a procédé à la dépose des éléments de l'ancienne salle de bain et qu'elle a achevé la pose du carrelage le 24 février 2020.

S'il était annoncé une durée prévisible de deux semaines de travaux, non contestée, les messages des 5 et 7 décembre 2019 prévoyaient une fin de travaux le 19 décembre 2019, ultérieurement et unilatéralement décalée à fin janvier 2020, soit avant le début du confinement.

Les nombreux messages électroniques échangés attestent de l'interruption brutale du chantier, de la gêne et des désagréments subis par Mme [K] qui s'est trouvée, à compter du 5 novembre 2019 jusqu'en juillet 2020 privée de la possibilité d'utiliser sa salle de bain.

Soucieuse de faire avancer les travaux, Mme [K] a, le 16 janvier 2020, saisi un conciliateur de justice, ce qui a permis la reprise des travaux. Il ressort à l'évidence des messages que l'appelante n'a eu de cesse de réclamer la poursuite du chantier. Le conciliateur a cependant rendu un procès-verbal de non-conciliation le 29 janvier 2020.

Contrairement à ce que prétend l'intimée, les désaccords concernant le choix du carrelage datent du mois de janvier 2020, soit avant la période de confinement.

Il ressort du message du 8 février 2020, qu'au vu de la liste des travaux restant à réaliser, l'utilisation de la salle de bain n'était toujours pas envisageable à cette date, le carrelage n'ayant été posé que le 24 février 2020. La société Ineries s'engageait également à réparer le carrelage et le plafonnier détériorés pendant l'intervention.

Une première mise en demeure par avocat a été adressée le 10 mars 2020 et réitérée à l'issue du confinement, le 6 mai.

Aucune pièce ne vient en revanche établir l'existence d'un désaccord relatif au choix des matériaux et rendant impossible la poursuite des travaux.

Comme l'a retenu le premier juge et sans qu'il ne soit contesté, le constat d'huissier dressé le 15 juillet 2020 permet de confirmer qu'à cette date, l'évacuation n'est pas terminée, seul un robinet mitigeur provisoire est installé, à l'exclusion de l'arrivée d'eau et de la colonne hydro massante, la douche ne comporte ni paroi, ni barre de maintien, et aucun mobilier, notamment le meuble vasque, n'est installé. Le rapport note aussi que les travaux électriques ne sont pas achevés et qu'il existe une dégradation du carrelage avant l'accès à la salle de bain et des peintures de l'encadrement.

Il est donc manifeste que les travaux commandés n'ont jamais été achevés, Mme [K] indiquant avoir sollicité une autre entreprise pour les finaliser.

En application de l'article 1231-1 du code civil, le débiteur est condamné, s'il y a lieu au paiement de dommages-intérêts soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, s'il ne justifie que l'exécution a été empêchée par la force majeure.

En l'espèce, avant que ne puisse être invoquée à juste titre la force majeure engendrée par la crise sanitaire, il est manifeste que l'entreprise n'a pas respecté les délais annoncés et qu'elle n'a pas terminé l'exécution des travaux commandés.

Au final, la comparaison du constat d'huissier avec le devis permet d'établir que les prestations fournies par la société Ineries peuvent être évaluées à 2 117,61 euros, alors que Mme [K] lui a versé une somme de 5 929,92. La société Ineries a donc perçu indûment la somme de 3 812,31 euros.

Une somme de 500 euros sera allouée à Mme [K] en réparation de son trouble de jouissance et de son préjudice moral.

Partant, le jugement est infirmé en toutes ses dispositions.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant après débats en audience publique, par arrêt réputé contradictoire mis à disposition au greffe,

Déclare recevable l'intervention forcée de la SCP [G], prise en la personne de Me [U] [G], en qualité de liquidateur'de la société Ineries ;

Déclare commune et opposable à la SCP [G], prise en la personne de Me [U] [G], en qualité de liquidateur de la société Ineries, la procédure introduite devant la cour d'appel de Paris par déclaration d'appel du 13 août 2021 ;

Infirme le jugement en toutes ses dispositions ;

Statuant de nouveau,

Dit que la société Ineries a indûment perçu une somme de 3 812,31 euros et qu'elle doit indemniser le préjudice subi par Mme [S] [K] à hauteur de 500 euros ;

Dit que la créance de Mme [S] [K] s'élève à la somme de 4312,31 euros ;

Dit que cette somme portera intérêts à compter du prononcé de l'arrêt ;

Fixe au passif de la société Ineries la somme de 4 312,31 euros, outre les intérêts au taux légal ;

Y ajoutant,

Condamne la société Ineries aux entiers dépens de première instance et d'appel, dont distraction, pour ces derniers, au profit de Me Paul Villetard de Laguerie, avocat, conformément à l'article 699 du code de procédure civile ;

Condamne la société Ineries à payer à Mme [S] [K] une somme de 2 400 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La greffière La présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 9 - a
Numéro d'arrêt : 21/15580
Date de la décision : 20/04/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-04-20;21.15580 ?
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