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20/04/2023 | FRANCE | N°21/06883

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 9 - a, 20 avril 2023, 21/06883


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 4 - Chambre 9 - A



ARRÊT DU 20 AVRIL 2023



(n° , 11 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/06883 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CDPAV



Décision déférée à la Cour : Jugement du 18 décembre 2020 - Tribunal judiciaire de PARIS - RG n° 11-18-219235





APPELANTE



Madame [D] [S]

née le [Date naissance 12] 1976 à [Localité 16] (78)

[Ad

resse 6]

[Localité 10]



représentée par Me Agnès LEBATTEUX SIMON de la SCP ZURFLUH - LEBATTEUX - SIZAIRE ET ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : P0154

ayant pour avocat plaidant Me Christo...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 9 - A

ARRÊT DU 20 AVRIL 2023

(n° , 11 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/06883 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CDPAV

Décision déférée à la Cour : Jugement du 18 décembre 2020 - Tribunal judiciaire de PARIS - RG n° 11-18-219235

APPELANTE

Madame [D] [S]

née le [Date naissance 12] 1976 à [Localité 16] (78)

[Adresse 6]

[Localité 10]

représentée par Me Agnès LEBATTEUX SIMON de la SCP ZURFLUH - LEBATTEUX - SIZAIRE ET ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : P0154

ayant pour avocat plaidant Me Christophe SIZAIRE de la SCP ZURFLUH - LEBATTEUX - SIZAIRE ET ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : P0154

substitué à l'audience par Me Amandine COSTE de la SCP ZURFLUH - LEBATTEUX - SIZAIRE ET ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : P0154

INTIMÉS

Monsieur [M] [X], architecte

N° SIRET : 325 086 619 00039

[Adresse 4]

[Localité 11]

représenté et assisté de Me Pierre ELMALIH, avocat au barreau de PARIS, toque : G0006

La société MUTUELLE DES ARCHITECTES FRANÇAIS (MAF), société d'assurance mutuelle représentée par ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

N° SIRET : 477 672 646 00015

[Adresse 2]

[Localité 8]

représentée et assistée de Me Pierre ELMALIH, avocat au barreau de PARIS, toque : G0006

La société FLOSEL - INSTALLATIONS ÉLECTRIQUES ET HYDRAULIQUES (anciennement dénommée NIPL BATIMENT), société par actions simplifiée agissant poursuites et diligences de son président en exercice domicilie ès-qualités audit siege

N° SIRET : 494 619 406 00049

[Adresse 3]

[Localité 15]

représentée par Me Dimitri PINCENT, avocat au barreau de PARIS, toque : A0322

substitué à l'audience par Me Bertrand LOTZ, avocat au barreau de PARIS, toque : A0322

La société ALLIANZ IARD, société anonyme agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

N° SIRET : 542 110 291 04757

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Localité 13]

représentée et assistée de Me Stanislas COMOLET de la SELAS COMOLET ZANATI AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : P435

PARTIES INTERVENANTES

La société VERRE ALU MIROITERIE, SARL prise en la personne de son représentant légal domcilié en cette qualité audit siège

N° SIRET : 381 386 408 00029

[Adresse 7]

[Localité 9]

DÉFAILLANTE

La compagnie d'assurance AXA FRANCE IARD, en qualité d'assureur de la société VERRE ALU MIROITERIE, prise en la personne de son reperésnentant légal domicilié en cette qualité audit siège

N° SIRET : 722 057 460 01971

[Adresse 5]

[Localité 14]

représentée et assistée de Me Catherine BONNEAU de la SELARL KAPRIME SOCIETE D'AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : C800

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 22 février 2023, en audience publique, devant la Cour composée de :

Mme Muriel DURAND, Présidente de chambre

Mme Fabienne TROUILLER, Conseillère

Mme Laurence ARBELLOT, Conseillère, chargée du rapport

qui en ont délibéré

Greffière, lors des débats : Mme Camille LEPAGE

ARRET :

- DÉFAUT

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Mme Muriel DURAND, Présidente et par Mme Camille LEPAGE, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Suivant proposition acceptée le 26 août 2009 et avenant du 30 septembre 2010, Mme [D] [S], propriétaire et occupante d'une maison sise [Adresse 6], a confié à M. [M] [X], architecte, la maîtrise d''uvre de travaux de rénovation de sa maison.

Un marché a été passé en lots séparés pour la couverture, l'isolation et la maçonnerie et confié à la société NIPL bâtiment devenue la société Flosel, Installation Électriques et Hydrauliques, ci-après la société Flosel, le 7 mai 2011. La société Verre Alu Miroiterie est intervenue pour la conception, la fabrication et la pose d'une verrière.

Un procès-verbal de réception assorti de réserves a été signé le 28 juillet 2012 par Mme [S], la société NIPL bâtiment, et M. [X].

En septembre 2013, Mme [S] a constaté des infiltrations d'eau sur la sous-pente de son séjour cathédrale au niveau de la verrière, ainsi que sur le mur de l'entrée en contrebas. Une expertise amiable dans le cadre de la protection juridique de Mme [S] a été organisée et réalisée le 7 avril 2014 par le cabinet Saretec.

Le 1er juin 2016, un constat d'huissier relatif aux désordres a été dressé à la demande de Mme [S].

Saisi le 31 août 2018 par Mme [S] d'une demande dirigée à l'encontre M. [X], de son assureur la société Mutuelles des architectes français MAF, de la société Flosel et son assureur la société Allianz Iard tendant principalement à la condamnation de l'architecte et de l'entrepreneur à l'indemniser des conséquences des infiltrations d'eau constatées, le tribunal judiciaire de Paris, par un jugement contradictoire rendu le 18 décembre 2020 auquel il convient de se reporter, a rejeté l'ensemble des demandes et a condamné Mme [S] aux dépens.

Dans le cadre de cette instance, la société Allianz Iard a fait intervenir à la procédure la société Verre Alu Miroiterie et son assureur, la société Axa France Iard par exploits en date des 11 et 16 avril 2019.

Pour statuer ainsi, le tribunal a principalement retenu que si des infiltrations d'eau étaient bien constatées, le rapport d'expertise versé aux débats était succinct et ne permettait pas de déterminer, d'une part, si l'architecte M. [X] avait manqué à son devoir de conseil et d'autre part, si la société NIPL bâtiment était directement responsable des désordres survenus postérieurement à l'achèvement des travaux.

Par une déclaration enregistrée le 9 avril 2021, Mme [S] a relevé appel de cette décision à l'encontre de M. [X], de la société Mutuelles des architectes français MAF, de la société Flosel et de la société Allianz Iard.

Aux termes de ses dernières conclusions remises le 6 janvier 2023, l'appelante demande à la cour :

- de la déclarer recevable en son appel,

- d'infirmer le jugement en toutes ses dispositions,

- de constater la nature décennale des désordres,

- de condamner solidairement M. [X] et la MAF, la société Flosel et son assureur Allianz IARD ou individuellement les mêmes à lui payer la somme de 9 148,50 euros TTC à parfaire, correspondant aux frais de reprise des désordres,

- de les condamner solidairement ou individuellement à lui payer la somme de 2 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice de jouissance,

- subsidiairement de condamner solidairement M. [X] et la société Flosel à lui payer la somme de 9 148,50 euros TTC pour manquements à leurs obligations contractuelles et à leur devoir de conseil,

- de les condamner à lui payer la somme de 2 000 euros en réparation de son préjudice de jouissance,

- de rejeter les demandes dirigées à son encontre,

- d'ordonner l'exécution provisoire,

- de condamner solidairement l'ensemble des défendeurs à lui payer la somme de 6 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Après avoir souligné le caractère contradictoire et opposable de l'expertise réalisée par le cabinet Saretec, elle déplore que le premier juge n'ait pas appliqué l'article 1792 du code civil prévoyant la responsabilité de plein droit des constructeurs en dépit des désordres constatés. Elle soutient que les infiltrations de la toiture résultent d'un défaut d'étanchéité rendant l'ouvrage impropre à sa destination et portant atteinte à sa solidité.

Subsidiairement elle invoque l'article 1147 du code civil pour soutenir que l'architecte a manqué à son devoir de conseil et à son obligation de surveillance du chantier en ne s'assurant pas de la réalisation des prestations nécessaires à l'étanchéité. Elle souligne que la responsabilité de la société Flosel, entrepreneur en charge de la couverture-toiture doit également être engagée au titre de la garantie de plein droit des constructeurs, ou à titre subsidiaire au titre de sa responsabilité contractuelle.

L'appelante demande le remboursement de frais engagés afin de réparer les désordres constatés et produit à cette fin le devis afférent aux travaux de reprise. Elle ajoute que les manquements lui ont causé un préjudice de jouissance en raison de la dégradation du logement lors des épisodes pluvieux.

Par des conclusions remises le 9 janvier 2023, la société Flosel demande à la cour :

- à titre principal, de débouter Mme [S] de l'ensemble de ses demandes dirigées à son encontre,

- de débouter toute autre partie au litige des demandes à son encontre,

- de confirmer le jugement en toutes ses dispositions,

- de condamner Mme [S] à lui verser la somme de 5 000 euros au titre des frais irrépétibles et de la condamner aux dépens,

- subsidiairement, de condamner la compagnie d'assurance Allianz Iard à la relever indemne de toute condamnation prononcée à son encontre,

- de condamner solidairement la société Verre Alu Miroiterie et son assureur Axa France Iard ainsi que M. [X] et son assureur la MAF à la relever indemne de toute condamnation prononcée à son encontre,

- de dire que dans les rapports entre co-obligés, la contribution finale à la dette se répartit comme suit : 100 % à la charge de la société Verre Alu Miroiterie et de M. [X] en raison de leurs fautes personnelles respectives ayant concouru ensemble à la résiliation du dommage décennal de la verrière et 0 % à sa charge en raison de l'absence de faute personnelle,

- de condamner in solidum tout succombant à lui payer la somme de 5 000 euros au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel.

Elle souligne que l'expertise dont se prévaut l'appelante est purement privée et a été réalisée dans des conditions non contradictoires de sorte qu'elle ne lui est pas opposable. Elle soutient que l'imputabilité des dommages ne fait l'objet d'aucune certitude, décline toute responsabilité dans les infiltrations alléguées par l'appelante et relève que les prétentions de l'appelante ne sont aucunement étayées.

Elle explique que son intervention concernait précisément « tous corps d'état sauf verrière », qu'elle n'était pas comptable de l'étanchéité de la verrière posée après son intervention et qu'aucun manquement ne lui est imputable. Elle ajoute que la société Verrerie Alu Miroiterie était la seule responsable de l'étanchéité de la verrière qu'elle posait et qu'en l'excluant, cette dernière avait fait preuve d'un manquement à ses devoirs de conseil et son obligation d'information ainsi qu'aux règles de l'art.

Elle rappelle que la société Verre Alu Miroiterie n'est pas son sous-traitant mais un locateur d'ouvrage avec qui Mme [S] a directement contracté et souligne que la responsabilité du maître d''uvre devra être engagée pour ne pas s'être assuré qu'une entreprise soit missionnée pour réaliser la prestation d'étanchéité.

Subsidiairement, en cas de condamnation, elle indique que son assureur, Allianz Iard, sera tenue de la couvrir conformément aux stipulations de sa police d'assurance. Elle invoque les dispositions de l'article 1240 du code civil pour soutenir que la responsabilité de M. [X] et de son assureur est engagée avec garantie de toute condamnation prononcée à son encontre. Elle insiste sur la faute commise par la société Verre Alu Miroiterie et souligne que sa contribution finale à la dette doit être nulle.

Aux termes de conclusions portant appel provoqué remises le 22 octobre 2021, la société Allianz Iard, assureur de la société Flosel, demande à la cour :

- à titre principal, de juger que le seul et exclusif élément de preuve sur lequel se fonde Mme [S] pour justifier ses demandes de condamnation à son encontre est le rapport d'expertise amiable établi par le cabinet Saretec à la demande de son assureur protection juridique,

- de juger que ce rapport lui est inopposable, qu'il est insuffisant en lui seul pour se prononcer sur la responsabilité de la Société Flosel,

- de confirmer en conséquence le jugement,

- à titre subsidiaire, de juger que Mme [S] est manifestement défaillante, dans l'établissement de la preuve qui lui incombe et qu'elle ne saurait garantir le sinistre objet de l'instance,

- de débouter Mme [S] de toutes ses demandes dirigées à son encontre,

- à titre infiniment subsidiaire, de juger que l'activité « travaux d'étanchéité » est exclue de la garantie souscrite par la société Flosel et de juger en conséquence qu'elle ne saurait garantir le sinistre objet de l'instance et de la mettre hors de cause,

- de juger en toute hypothèse que la garantie Allianz ne pouvait intervenir que dans les limites de son contrat,

- en tout état de cause, et dans l'hypothèse d'une condamnation quelconque d'Allianz, de condamner in solidum la société Verre Alu Miroiterie et la compagnie Axa, à la relever et garantir indemne de toute condamnation tant en principal qu'accessoires, y compris l'ensemble des dépens et intérêts qui pourraient être prononcés à son encontre,

- à défaut, de condamner in solidum M. [X] et la MAF à la relever et garantir indemne de toute condamnation tant en principal qu'accessoires, y compris l'ensemble des dépens et intérêts qui pourraient être prononcés à son encontre,

- de débouter toute partie des demandes formulées au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- de condamner tout succombant à lui régler la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- de condamner tout succombant aux entiers dépens de 1ère instance et d'appel.

Elle vise les articles 16 du code de procédure civile et 1353 du code civil pour soutenir que l'expertise réalisée par le cabinet Saretec dont se prévaut l'appelante n'a pas été réalisée contradictoirement et ne lui est donc pas opposable.

Subsidiairement elle souligne que la responsabilité de la société Flosel ne saurait être engagée, celle-ci ayant parfaitement exécuté les travaux lui incombant et rappelle que le marché conclu excluait expressément la verrière.

Plus subsidiairement elle vise l'article L. 112-4 du code des assurances pour souligner qu'en cas de condamnation de son assurée, la prestation d'étanchéité ne faisait pas partie des activités couvertes par la police d'assurance. Elle soutient que la charge définitive de la dette de réparation doit peser sur la société Verre Alu Miroiterie et son assureur la compagnie Axa seuls responsables de l'étanchéité et à défaut sur l'architecte et son assureur.

Par des conclusions d'appel provoqué remises le 7 octobre 2021, M. [X] et son assureur la MAF demandent à la cour :

- à titre principal, de confirmer le jugement en ce qu'il a rejeté les demandes de Mme [S] à leur encontre,

- subsidiairement, en cas d'infirmation de la décision, de condamner solidairement les sociétés Flosel, Allianz Iard, Verre Alu Miroiterie et Axa France Iard à les garantir intégralement de toute condamnation prononcée à leur encontre,

- de débouter la compagnie Allianz ou toute autre partie de leurs demandes formulées à l'encontre de la MAF,

- de limiter les condamnations prononcées contre M. [X] à sa seule responsabilité, sans bénéfice pour les autres parties d'une quelconque solidarité ou condamnation in solidum,

- à titre infiniment subsidiaire, si la compagnie MAF était condamnée, ne le faire que selon les termes et limites de la polie souscrite et de dire et juger opposable la franchise en cas de condamnation prononcée sur un fondement autre que décennal,

- en tout état de cause, de rejeter toute demandes, fins et prétentions dirigées à leur encontre,

- de condamner in solidum Mme [S] ainsi que tout succombant à leur payer chacun la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile à prendre en charge les dépens.

M. [X] et son assureur invoquent le caractère non opposable du rapport d'expertise privée produit par Mme [S] à défaut d'être réalisé contradictoirement. Ils soutiennent que l'imputabilité des désordres allégués n'est pas établie et contestent toute responsabilité.

Subsidiairement, ils rappellent que l'architecte n'est débiteur que d'une obligation de moyens, que la preuve d'une faute lui étant imputable n'est pas rapportée et soulignent que les entrepreneurs sont tenus d'une obligation de résultat. Visant l'article 1310 du code civil, ils soulignent que le contrat de maîtrise d''uvre exclut expressément la solidarité de l'architecte avec les autres co-responsables du désordre, que la Cour de cassation a validé ce type de clause limitative. S'agissant de la société MAF, elle rappelle que la police d'assurance prévoit une franchise en cas de condamnation prononcée sur un fondement autre que décennal.

Par des conclusions remises le 29 novembre 2021, la compagnie Axa France Iard -assureur de la société Verre Alu Miroiterie- demande à la cour :

- de déclarer le rapport d'expertise amiable opposable à la compagnie Allianz Iard,

- de confirmer en toutes ses dispositions le jugement dont appel,

- à titre subsidiaire, de déclarer M. [X] intégralement responsable des désordres,

- de débouter la compagnie Allianz Iard de l'ensemble de ses demandes,

- de la mettre hors de cause,

- de condamner la compagnie Allianz Iard, la MAF et M. [X] à la relever et la garantir indemne de toute condamnation prononcée à son encontre,

- de condamner la compagnie Allianz Iard à lui payer la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre les dépens.

Elle soutient que le rapport d'expertise amiable a bien été réalisé contradictoirement, l'ensemble des parties ayant été convoquées. Elle estime que la preuve de l'imputabilité des désordres à la société Verre Alu Miroiterie n'est pas rapportée, elle fait valoir que la prestation d'étanchéité n'était pas comprise dans le marché et qu'aucune faute contractuelle n'est caractérisée. Elle ajoute que l'architecte a quant à lui manqué à ses devoirs de conseil et de surveillance du chantier en ne s'assurant pas de la réalisation des prestations d'étanchéité.

La société'Verre Alu Miroiterie assignée par acte du 28 septembre 2021 n'a pas constitué avocat.

Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions des parties, il est renvoyé aux écritures de celles-ci conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 24 janvier 2023 et l'affaire a été appelée à l'audience du 22 février 2023.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Il résulte du dernier alinéa de l'article 954 du code de procédure civile que la partie qui ne conclut pas ou qui, sans énoncer de nouveaux moyens, demande la confirmation du jugement est réputée s'en approprier les motifs.

Au regard de la date des contrats, il convient de faire application des dispositions du code civil en leur rédaction antérieure à l'entrée en vigueur au 1er octobre 2016 de l'ordonnance du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats.

En l'espèce, il résulte des pièces produites aux débats, qu'en sa qualité de maître d'ouvrage, dans le cadre d'un projet de rénovation de la maison dont elle est propriétaire, Mme [S] a confié à M. [M] [X], architecte, une mission de maîtrise d''uvre complète selon marché en date du 26 août 2009 et avenant du 30 septembre 2010. Il n'est pas justifié de la souscription par l'architecte d'une assurance dommages-ouvrage pour la réalisation desdits travaux, M. [X] et la compagnie MAF ne produisant strictement aucune pièce aux débats.

Selon marché de gré à gré du 7 mai 2011, Mme [S] a confié à la société N.I.P.L bâtiment le lot « couverture, isolation et maçonnerie » pour 118 820,54 euros. Ce lot comprenait la réalisation de « travaux tous corps d'état sauf verrière ».

Suivant devis du 13 octobre 2010 validé et non contesté, Mme [S] a commandé à la société Verre Alu Miroiterie la fourniture et la pose d'une verrière en aluminium. Le devis de 4 958,50 euros prévoit la pose en toiture sur chevêtre bois à 6 mètres du sol, la mise en place d'un échafaudage intérieur. Il est précisé expressément que la couverture périphérique en zinc pour étanchéité entre la toiture tuilée et la verrière n'est pas comprise dans la prestation.

Si des réserves ont été émises à la réception des travaux le 28 juillet 2012, elles ne concernaient pas la verrière.

Mme [S] fait état de l'apparition en 2013 d'infiltrations d'eau sur la sous-pente de son séjour au niveau de la verrière et sur le mur de l'entrée en contrebas. Elle invoque une responsabilité décennale de l'article 1792 du code civil à l'encontre de M. [X] et de son assureur et à l'encontre de la société Flosel et de son assureur avec nécessité de reprise des désordres.

Aux termes de l'article 1792 du code civil, tout constructeur d'ouvrage est responsable de plein droit envers le maître ou l'acquéreur de l'ouvrage, des dommages même résultant d'un vice du sol qui compromettent la solidité de l'ouvrage ou qui l'affectant dans l'un de ses éléments constitutifs ou l'un de ses éléments d'équipement, le rendent impropre à sa destination. L'article 1792-1 du même code répute constructeur de l'ouvrage tout architecte lié au maître de l'ouvrage par un contrat de louage d'ouvrage.

Le rapport d'expertise dont se prévaut Mme [S] a été réalisé le 7 avril 2014 par le cabinet Saretec dans le cadre de sa protection juridique.

Il ne résulte d'aucune disposition du rapport que les entreprises NIPL bâtiment, M. [X], l'entreprise Verre Alu Miroiterie ainsi que leurs assureurs respectifs aient été appelés de manière officielle aux opérations d'expertise ou qu'ils aient pu discuter contradictoirement les conclusions ou préconisations de l'expert. Tout au plus le rédacteur du rapport semble évoquer des contacts tant avec l'entreprise Verre Alu Miroiterie qu'avec M. [X], voire avec l'entreprise NIPL sans en préciser la nature.

Il est admis, par application des dispositions de l'article 16 du code de procédure civile, que le juge ne peut se fonder exclusivement sur une expertise à laquelle une partie n'a été ni présente ni représentée sans que cette expertise ne soit corroborée par d'autres éléments.

Mme [S] communique aux débats en plus de l'expertise, un constat d'huissier dressé à sa demande le 1er juin 2016 ainsi qu'un courrier de la société NIPL bâtiment du 27 novembre 2014.

Il résulte du rapport de la société Saretec, que lors des opérations d'expertise, il n'a pas été constaté de traces d'eau au niveau de la verrière, qu'il n'y aurait plus d'infiltrations, que n'est constatée aucune présence d'humidité mais des traces d'humidité sur le mur de l'entrée qui se trouve dans la continuité de la sous-pente sans qu'il puisse être fait de lien entre les deux dommages. L'expert constate des tâches sombres au niveau de la descente des eaux pluviales. Il indique qu'il semble que les dommages au niveau de l'entrée du rez-de-chaussée puissent en être la conséquence.

Il estime que la verrière ne semble pas impliquée pour les désordres au 1er étage, qu'il est probable que les infiltrations proviennent de la toiture ou de l'interface toiture/verrière, que sur le devis l'interface n'était pas précisée, qu'il préconise l'ouverture d'un dossier de dégâts des eaux auprès de la multirisque habitation et que seule l'intervention d'un professionnel à savoir NIPL ou d'une société de recherche de fuite pourra déterminer l'origine des infiltrations. Son évaluation des dommages est fixée à 1 457,50 euros comprenant la réfection de la sous-pente et du mur en peinture.

Le constat dressé le 1er juin 2016 par huissier au domicile de Mme [S] et accompagné de 11 photographies fait état d'une large tâche d'humidité sur la façade en partie haute autour de la descente des eaux pluviales, d'une couverture en zinc qui encadre la verrière relativement étroite, d'un espace en partie basse de la verrière, entre le cache en zinc et la couverture en tuiles du toit, de cloques autour de la porte d'entrée sur le mur, d'une sous-pente du toit fortement dégradée autour de la verrière avec un doublage en plaques de plâtre déformé, de gonflements et d'auréoles d'humidité à l'angle en haut et à gauche du tableau de la verrière, de deux écailles et de cloques d'humidité sur le côté gauche de la verrière.

La société NIPL bâtiment est intervenue au domicile de Mme [S] à sa demande et conclut dans un courrier du 27 novembre 2014 qui lui a été adressé, que suite à l'inspection réalisée au-dessus de l'emplacement des dégâts visibles de l'intérieur du logement, il a été constaté que les éléments collaborateurs au maintien de l'étanchéité sont défectueux, que l'interface du contour de la verrière est à revoir, qu'il existe une perforation sur le zinc à gauche en partie haute de la verrière et des vestiges, que l'eau déborde du zinc.

Ces éléments viennent accréditer l'existence d'infiltrations d'eau sur la sous-pente du séjour au niveau de la verrière et sur le mur de l'entrée en contrebas avec pour origine un défaut d'étanchéité toiture/verrière.

Le marché de la société NIPL bâtiment exclut expressément les travaux de pose de la verrière alors que celui de la société Verre Alu Miroiterie exclut expressément toute prestation d'étanchéité de la verrière.

Pour autant, Mme [S] a confié à M. [M] [X], architecte, une mission de maîtrise d''uvre complète pour des travaux relativement importants de rénovation de sa maison d'habitation. En vertu de ce contrat, il était expressément convenu qu'il exercerait une mission « d'assistance au Maître d'ouvrage pour le choix des entreprises et l'établissement des marchés de travaux ». Dès lors il appartenait à M. [X] de prévoir la prestation d'étanchéité lors de l'établissement des marchés de travaux et il était investi d'un devoir de direction générale des travaux et de surveillance du chantier qui lui imposait de constater cette défaillance lors de ses visites de chantiers jusqu'à la réception des travaux. Aucun élément ne permet de dire par ailleurs que M. [X] ait souscrit une assurance dommage-ouvrage pour la réalisation des travaux.

En conséquence, M. [X] doit être tenu responsable des dommages survenus au domicile de Mme [S] et les sociétés Flosel et Verre Alu Miroiterie et leurs assureurs les sociétés Allianz Iard et Axa Iard mises hors de cause et les demandes formées à leur encontre rejetées.

La MAF qui assure M. [X] invoque une clause du contrat d'architecte excluant la solidarité.

L'article 5 du marché prévoit que l'architecte n'assumera les responsabilités professionnelles définies par les lois et règlements en vigueur et particulièrement celles édictées par les articles 1792 et 2270 du code civil que dans la mesure de ses fautes personnelles.

Cette clause ne prévoit en rien une exclusion de solidarité, cette exclusion dans le cadre des dispositions de l'article 1792 du code civil contreviendrait au demeurant aux dispositions impératives de l'article 1792-5 du même code qui dispose que toute clause d'un contrat qui a pour objet, soit d'exclure ou de limiter la responsabilité prévue aux articles 1792, 1792-1 et 1792-2, soit d'exclure les garanties prévues aux articles 1792-3 et 1792-6 ou d'en limiter la portée, soit d'écarter ou de limiter la solidarité prévue à l'article 1792-4, est réputée non écrite.

Si la MAF invoque également une franchise dans le cadre de la police d'assurance souscrite par M. [X], elle ne produit aucune pièce à l'appui de son moyen.

M. [X] doit être tenu in solidum avec son assureur à réparer les dommages.

Mme [S] communique aux débats :

- un devis établi le 2 avril 2015 par l'entreprise Hamelin aux fins de faire réaliser des travaux de peinture intérieurs suite au dégât des eaux constaté, ce à hauteur de 3 826,90 euros,

- un devis établi le 9 avril 2015 par l'entreprise Craq BTP aux fins de faire réaliser des travaux de couverture et peinture suite au dégât des eaux constaté, ce à hauteur de 6 385,50 euros TTC,

- un devis établi le 16 juin 2016 par l'entreprise Renotech à hauteur de 1 486,10 euros TTC pour la réalisation de travaux de mise en place d'un échafaudage tacquet, de type MACC, compris échelle, plancher, filets, plinthes et gardes corps pour la sécurité des ouvriers pour 180 euros, de dépose du contour de la verrière en totalité et fourniture et pose d'un entourage pour 655 euros, de fourniture et mise en place des tuiles et du faîtage pour 516 euros.

L'ensemble de ces devis forme un total de 11 698,50 euros. Mme [S] ne sollicite toutefois que la somme de 9 148,50 euros au titre des travaux de reprise, somme à laquelle sont condamnés in solidum M. [X] et son assureur la MAF.

Mme [S] sollicite une somme de 2 000 euros au titre d'un préjudice de jouissance en indiquant que l'humidité a des conséquences néfastes sur le bâti lui-même en mettant à mal son état de conservation et la salubrité du logement.

Au vu de l'ancienneté des désordres constatés, Mme [S] a nécessairement subi un préjudice dans la jouissance de son bien qui peut être indemnisé à hauteur de 800 euros, somme à laquelle sont condamnés in solidum M. [X] et la MAF.

Les parties doivent être déboutées de toute demande plus ample ou contraire.

Sur les autres demandes

Les dispositions relatives aux dépens et frais irrépétibles sont infirmées. Il convient de dire que M. [X] et la MAF qui succombent supporteront in solidum les dépens de première instance et d'appel et sont condamnés in solidum à payer à Mme [S] une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, les autres demandes à ce titre étant rejetées.

Il n'y pas lieu à exécution provisoire s'agissant d'un arrêt d'appel.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant par arrêt rendu par défaut en dernier ressort,

Infirme le jugement en toutes ses dispositions ;

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Dit que M. [M] [X], architecte, a engagé sa responsabilité et doit être tenu in solidum avec la compagnie d'assurance Mutuelles des architectes français MAF à réparer les dommages en résultant ;

Condamne M. [M] [X] in solidum avec la compagnie d'assurance Mutuelles des architectes français MAF à payer à Mme [D] [S] une somme de 9 148,50 euros au titre des travaux de reprise outre une somme de 800 euros au titre de son préjudice de jouissance ;

Rejette toute autre demande ;

Condamne M. [M] [X] in solidum avec la compagnie d'assurance Mutuelles des architectes français MAF aux dépens ;

Condamne M. [M] [X] in solidum avec la compagnie d'assurance Mutuelles des architectes français MAF à payer à Mme [D] [S] une somme de 3 000 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

La greffière La présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 9 - a
Numéro d'arrêt : 21/06883
Date de la décision : 20/04/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-04-20;21.06883 ?
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