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20/04/2023 | FRANCE | N°20/16737

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 9 - a, 20 avril 2023, 20/16737


Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 9 - A



ARRÊT DU 20 AVRIL 2023



(n° , 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/16737 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CCVRU



Décision déférée à la Cour : Jugement du 10 août 2020 - Juge des contentieux de la protection de MELUN - RG n° 20/01451





APPELANTE



Le CRÉDIT INDUSTRIEL ET COMMERCIAL (CIC), soc

iété anonyme prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

N° SIRET : 542 016 381 01328

[Adresse 3]

[Adresse 3]



représentée par Me F...

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 9 - A

ARRÊT DU 20 AVRIL 2023

(n° , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/16737 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CCVRU

Décision déférée à la Cour : Jugement du 10 août 2020 - Juge des contentieux de la protection de MELUN - RG n° 20/01451

APPELANTE

Le CRÉDIT INDUSTRIEL ET COMMERCIAL (CIC), société anonyme prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

N° SIRET : 542 016 381 01328

[Adresse 3]

[Adresse 3]

représentée par Me François MEURIN de la SELARL TOURAUT AVOCATS, avocat au barreau de MEAUX

INTIMÉ

Monsieur [S] [Z]

né le [Date naissance 1] 1979 à [Localité 4]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

représenté par Me Quentin MISSEOU, avocat au barreau de PARIS

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2021/010558 du 16/03/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de PARIS)

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 21 mars 2023, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Muriel DURAND, Présidente de chambre, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Muriel DURAND, Présidente de chambre

Mme Fabienne TROUILLER, Conseillère

Mme Laurence ARBELLOT, Conseillère

Greffière, lors des débats : Mme Camille LEPAGE

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Mme Muriel DURAND, Présidente et par Mme Camille LEPAGE, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

M. [S] [Z] est titulaire dans les comptes de la société Crédit industriel et commercial d'un compte de dépôt numéro 00020293301 et il a signé le 22 juillet 2016 un « contrat CIC ».

Selon offre préalable acceptée le 24 août 2017, la société Crédit industriel et commercial a consenti à M. [Z] un crédit renouvelable d'un montant maximum autorisé de 10 000 euros remboursable par échéances mensuelles calculées en fonction du montant de l'utilisation et de la durée de remboursement choisis et un taux débiteur déterminé selon différents critères, dont la nature de l'utilisation, les options et la durée choisies pour chacune des utilisations.

Par avenant du 18 octobre 2017, le montant a été porté à 18 000 euros.

Par jugement contradictoire du 10 août 2020, le juge des contentieux de la protection de Melun, saisi le 18 février 2020 en paiement du solde du prêt et du solde débiteur du compte de dépôt, a :

- prononcé la déchéance du droit aux intérêts conventionnels,

- condamné M. [Z] au paiement de la somme de 14 199,93 euros avec intérêts au taux légal non majoré à compter du 20 novembre 2019,

- débouté la société Crédit industriel et commercial de ses demandes en paiement au titre du solde débiteur du compte de dépôt,

- autorisé M. [Z] à se libérer de sa dette en 24 mensualités, le premier de chaque mois à compter du mois suivant la signification du jugement soit 23 règlements de 590 euros et un 24ème versement pour le solde, et dit qu'à défaut de paiement d'une seule échéance l'intégralité de la somme deviendra immédiatement est entièrement exigible 15 jours après la réception d'une mise en demeure par courrier recommandé,

- rappelé que les procédures d'exécution qui auraient été engagées par le créancier sont suspendues et que les majorations d'intérêt ou les pénalités encourues en raison du retard cessent d'être dues pendant le délai fixé par le juge,

- débouté M. [Z] de sa demande de mainlevée de l'inscription au fichier des incidents de paiement caractérisé de la banque de France (FICP),

- débouté la société Crédit industriel et commercial de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile et condamné M. [Z] aux dépens.

Par déclaration réalisée par voie électronique le 19 novembre 2020, la société Crédit industriel et commercial a interjeté appel de cette décision.

Aux termes de ses conclusions déposées par voie électronique le 11 février 2021, la société Crédit industriel et commercial demande à la cour de réformer partiellement le jugement et de condamner M. [Z] à lui payer la somme de 17 597,82 euros au titre du solde débiteur du compte de dépôt majorée des intérêts au taux légal à compter du 20 novembre 2019, date de la mise en demeure outre celle de 14 199,93 euros au titre du solde du crédit renouvelable avec intérêts au taux légal à compter du 20 novembre 2019 date de la mise en demeure et 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens.

S'agissant du compte de dépôt, la société Crédit industriel et commercial fait principalement valoir que le juge avait raisonné comme si les utilisations du crédit renouvelable avaient été débitées sur le compte alors qu'en réalité elles y ont été créditées.

S'agissant du crédit renouvelable, elle admet la déchéance du droit aux intérêts mais indique que la majoration du taux légal doit s'appliquer sauf si le débiteur en demande l'exonération, ce qui n'était pas le cas.

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 10 mai 2021, M. [Z] demande à la cour de confirmer le jugement en toutes ses dispositions, de débouter la société Crédit industriel et commercial de toutes ses demandes et de la condamner aux dépens et au paiement à Me Quentin Misseau d'une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article 700 du code de procédure civile.

Il fait principalement valoir que les pièces versées aux débats montrent que les utilisations du crédit renouvelable ont été débitées sur le compte de dépôt et il y a donc bien un double emploi tel que dénoncé par le premier juge.

Il ajoute que c'est à bon droit, dans le cadre de son appréciation souveraine, que le tribunal a écarté l'application de l'article L. 313-3 du code monétaire et financier relatif à la majoration du taux de l'intérêt légal.

Par arrêt du 15 décembre 2022, la cour d'appel de Paris a :

- confirmé le jugement en ce qu'il a prononcé la déchéance du droit aux intérêts conventionnels du crédit renouvelable et condamné M. [Z] au paiement de la somme de 14 199,93 euros avec intérêts au taux légal non majoré à compter du 20 novembre 2019 ;

- avant dire droit sur le surplus des demandes, soulevé d'office sur le fondement des articles sur le fondement des articles R. 312-35, L. 311-1, L. 312-92, L. 312-93 et L. 341-9 du code de la consommation, les moyens tirés de la forclusion et de la déchéance du droit aux intérêts et à tous frais ; invite la société Crédit industriel et commercial à produire toute pièce utile, notamment toute convention mentionnant le régime des intérêts et des frais divers, les relevés de compte depuis l'ouverture du compte, les documents d'information sur le dépassement, le taux débiteur et tous frais ou intérêts sur arriérés qui sont applicables et la proposition d'un autre type d'opération de crédit ; ordonné la réouverture des débats, dans la limite des moyens soulevés d'office ; invité la société Crédit industriel et commercial à faire valoir ses observations sur le moyen soulevé d'office et à produire tout pièce utile, avant le 21 février 2023, renvoyé l'affaire à l'audience du 21 mars 2023 à 9h30 pour plaider et réservé l'application de l'article 700 du code de procédure civile, de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ainsi que les dépens.

La société Crédit industriel et commercial a indiqué ne pas disposer des pièces réclamées et n'a pas fait valoir d'autres observations.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur le solde du compte courant

Il appartient au créancier qui réclame des sommes au titre d'un solde débiteur de compte bancaire qui relève des dispositions du code de la consommation de justifier de la recevabilité de sa demande au regard de la forclusion et du strict respect du formalisme informatif prévu par le code de la consommation, comme du bien-fondé de sa demande en produisant la copie des pièces nécessaires.

Il résulte de l'article R. 312-35 du code de la consommation que les actions en paiement engagées à l'occasion de la défaillance de l'emprunteur doivent être formées dans les deux ans de l'événement qui leur a donné naissance à peine de forclusion.

En matière de solde débiteur d'un compte courant, cet événement est caractérisé par le dépassement, au sens du 11° de l'article L. 311-1, non régularisé à l'issue du délai de 3 mois prévu à l'article L. 312-93. Il s'agit donc du premier dépassement du découvert autorisé non régularisé dans les 3 mois. En l'absence de découvert autorisé, le premier dépassement est la première apparition d'un solde débiteur.

La société Crédit industriel et commercial produit une convention « contrat CIC » du 22 juillet 2016 qui ne mentionne pas d'autorisation de découvert. Elle ne produit pas les relevés depuis l'ouverture du compte le 22 juillet 2016 mais seulement depuis le 3 janvier 2018, date à laquelle le compte est débiteur de 6 173,50 euros. Ce débit a toutefois été régularisé le 28 février 2018. L'assignation date du 18 février 2020. Même à supposer que le compte ait été débiteur dès le lendemain de son ouverture soit dès le 23 juillet 2016, il le serait resté moins de 2 ans à la date à laquelle il est démontré qu'il est redevenu créditeur le 28 février 2018. Il est ensuite demeuré constamment débiteur. L'assignation a ensuite été délivrée le 18 février 2020 soit moins de 2 ans après et la banque n'est donc pas forclose en son action.

Par ailleurs aux termes des articles L. 312-92 et L. 312-93 du code de la consommation, dans le cas d'un dépassement significatif qui se prolonge au-delà d'un mois, le prêteur est tenu d'informer l'emprunteur, sans délai, par écrit ou sur un autre support durable, du montant du dépassement, du taux débiteur et de tous frais ou intérêts sur arriérés qui sont applicables et par ailleurs, lorsque le dépassement se prolonge au-delà de trois mois, le prêteur propose sans délai à l'emprunteur un autre type d'opération de crédit au sens du 4° de l'article L. 311-1, et ce à peine de déchéance du droit aux intérêts et des frais de toute nature applicables au titre du dépassement (article L. 341-9).

Le compte étant resté constamment débiteur à compter du 2 mars 2018, soit pendant plus de 3 mois, la déchéance du droit aux intérêts doit donc être prononcée et le prêteur ne peut réclamer à l'emprunteur les sommes correspondant aux intérêts et frais de toute nature à compter du 2 juin 2018.

Pour la période du 2 juin 2018 à la date de clôture pour laquelle les relevés sont produits, le compte présente au débit outre la facturation d'intérêts débiteurs, la facturation de nombreux frais d'intervention pour un total de 1 636,38 euros.

La seule somme à laquelle la banque peut donc prétendre est celle de 17 416,29 euros, la somme de 1 636,38 euros correspondant aux frais et intérêts, étant observé que contrairement à ce qu'a indiqué le premier juge, les sommes issues des déblocages du crédit n'ont pas été débitées du compte courant mais y ont été créditées. M. [Z] doit donc être condamné à payer la somme de 15 779,91 euros.

Le prêteur, bien que déchu de son droit aux intérêts, demeure fondé à solliciter le paiement des intérêts au taux légal, en vertu de l'article 1153 devenu 1231-6 du code civil, sur le capital restant dû, majoré de plein-droit deux mois après le caractère exécutoire de la décision de justice en application de l'article L. 313-3 du code monétaire et financier.

Ces dispositions légales doivent cependant être écartées s'il en résulte pour le prêteur la perception de montants équivalents ou proches de ceux qu'il aurait perçus si la déchéance du droit aux intérêts n'avait pas été prononcée, sauf à faire perdre à cette sanction ses caractères de dissuasion et d'efficacité (CJUE 27 mars 2014, affaire C-565/12, Le Crédit Lyonnais SA / Fesih Kalhan).

M. [Z] doit donc être également condamné à payer les intérêts au taux légal à compter du 20 novembre 2019, date de la mise en demeure, mais pour assurer l'effectivité de la sanction, il convient d'écarter l'application des dispositions de l'article L. 313-3 du code monétaire et financier.

Sur les délais de paiement

M. [Z] n'apporte aucun élément sur sa situation financière et dès lors le jugement doit être infirmé sur ce point.

Sur l'inscription au FICP

Le jugement doit être confirmé en ce qu'il a rejeté la demande de suppression au FICP en considérant qu'il restait des sommes dues.

Sur les autres demandes

Le jugement doit être confirmé en ce qu'il a condamné M. [Z] aux dépens et a rejeté la demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

M. [Z] qui succombe doit être condamné aux dépens d'appel mais il apparaît équitable de ne pas faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant par arrêt contradictoire,

Vu l'arrêt du 15 décembre 2022 ayant confirmé le jugement en ce qu'il a prononcé la déchéance du droit aux intérêts conventionnels du crédit renouvelable et condamné M. [S] [Z] au paiement de la somme de 14 199,93 euros avec intérêts au taux légal non majoré à compter du 20 novembre 2019,

Confirme également le jugement en ce qu'il a débouté M. [S] [Z] de sa demande de mainlevée de l'inscription au fichier des incidents de paiement caractérisé de la banque de France (FICP), débouté la société Crédit industriel et commercial de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile et condamné M. [S] [Z] aux dépens ;

L'infirme pour le surplus et y ajoutant,

Condamne M. [S] [Z] à payer à la société Crédit industriel et commercial la somme de 15 779,91 euros avec intérêts au taux légal à compter du 20 novembre 2019'au titre du solde du compte de dépôt numéro 00020293301 ;

Ecarte l'application des dispositions de l'article L. 313-3 du code monétaire et financier ;

Condamne M. [S] [Z] aux dépens d'appel ;

Dit n'y avoir lieu à application de l'article sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Rejette les autres demandes plus amples ou contraires.

La greffière La présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 9 - a
Numéro d'arrêt : 20/16737
Date de la décision : 20/04/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-04-20;20.16737 ?
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