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18/04/2023 | FRANCE | N°20/10004

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 3 - chambre 5, 18 avril 2023, 20/10004


Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 3 - Chambre 5



ARRET DU 18 AVRIL 2023



(n° , 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/10004 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CCCQM



Décision déférée à la Cour : Jugement du 28 novembre 2018 -Tribunal de Grande Instance de Paris - RG n° 17/01401





APPELANTE



Madame [D] [H] née le 2 juillet 1968 à [Localité 5

] (Liban),



Elisant domicile à l'adresse de son conseil:

Me Rusen AYTAC

[Adresse 1]

[Localité 4]



représentée par Me Rusen AYTAC, avocat au barreau de PARIS, toque : D1525

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Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 3 - Chambre 5

ARRET DU 18 AVRIL 2023

(n° , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/10004 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CCCQM

Décision déférée à la Cour : Jugement du 28 novembre 2018 -Tribunal de Grande Instance de Paris - RG n° 17/01401

APPELANTE

Madame [D] [H] née le 2 juillet 1968 à [Localité 5] (Liban),

Elisant domicile à l'adresse de son conseil:

Me Rusen AYTAC

[Adresse 1]

[Localité 4]

représentée par Me Rusen AYTAC, avocat au barreau de PARIS, toque : D1525

INTIME

LE MINISTÈRE PUBLIC pris en la personne de MONSIEUR LE PROCUREUR GÉNÉRAL près la cour d'appel de Paris - Service nationalité

[Adresse 2]

[Localité 3]

représenté à l'audience par Madame BOUCHET-GENTON, substitut général

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 02 mars 2023, en audience publique, l' avocat de l'appelante et le ministère public ne s'y étant pas opposés, devant Mme Marie-Catherine GAFFINEL, conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Hélène FILLIOL, présidente de chambre

M. François MELIN, conseiller,

Mme Marie-Catherine GAFFINEL, conseillère

Greffier, lors des débats : Mme Mélanie PATE

ARRET :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Mme Hélène FILLIOL, présidente de chambre et par Mme Mélanie PATE, greffière présente lors de la mise à disposition.

Vu le jugement rendu le 28 novembre 2018 par le tribunal de grande instance de Paris qui a constaté le respect des formalités de l'article 1043 du code de procédure civile, déclaré le ministère public recevable et fondé en son action en contestation de la déclaration de nationalité française souscrite par Mme [D] [H] le 1er juillet 2010, annulé l'enregistrement effectué le 1er juin 2011 sous le numéro 08824/11 (n° de dossier 2010DX010923) de la déclaration de nationalité française souscrite par Mme [D] [H] le 1er juillet 2010, jugé que Mme [D] [H] , née le 2 juillet 1968 à [Localité 5] (Liban), n'est pas française, ordonné la mention prévue par l'article 28 du code civil et l'a condamnée aux dépens ;

Vu la déclaration d'appel du 20 juillet 2020 de Mme [D] [H] ;

Vu l'ordonnance de jonction rendue le 1er décembre 2020 par le conseiller de la mise en état qui a joint les procédures inscrites au rôle sous les numéros 20/10004 et 20/10009 sous le numéro 20/10004 ;

Vu l'ordonnance sur incident rendue le 6 juillet 2021 par le conseiller de la mise en état qui a ordonné la réouverture des débats sur l'incident soulevé par le ministère public, invité Mme [D] [H] et le ministère public à indiquer s'il est opportun de procéder à la jonction des dossiers sous les numéros 20/10004, 20/10009 et 20/10105, si l'appel formé par Mme [D] [H] le 21 juillet 2020 est recevable, alors que le jugement a été prononcé le 28 novembre 2019 et signifié, selon le ministère public, le 14 janvier 2019 et dit que l'affaire sera appelée à l'audience d'incident du jeudi 30 septembre 2021 ;

Vu l'ordonnance sur incident en date du 14 octobre 2021 par le conseiller de la mise en état qui a jugé recevable l'appel de Mme [D] [H], dit que la déclaration d'appel et les conclusions de Mme [D] [H] ne sont pas caduques, dit que la déclaration d'appel de Mme [D] [H] n'est pas nulle, constaté que le ministère public n'a pas formé, dans le dispositif de ses conclusions, une demande tendant à ce que les conclusions de Mme [D] [H] soient jugées irrecevables et réservé les dépens de l'incident ;

Vu l'ordonnance sur incident en date du 30 juin 2022 par le conseiller de la mise en état qui a constaté le désistement du ministère public de son incident formalisé par ses conclusions notifiées le 7 mars 2022 et mis les dépens de l'incident à la charge du Trésor public ;

Vu les dernières conclusions notifiées le 11 janvier 2023 par Mme [D] [H] qui demande à la cour de recevoir la déclaration d'appel du 20 juillet 2020, enregistrée le 23 juillet 2020, signifiée le 28 août 2020 par acte d'huissier, constater que l'assignation du 8 décembre 2016 a été délivrée à une mauvaise adresse et qu'elle a été privée de la possibilité d'organiser sa défense, prononcer la nullité de l'assignation du 8 décembre 2016 et toute la procédure subséquente, notamment le jugement rendu le 28 novembre 2018 par le tribunal de grande instance de Paris, prononcer la validité de la déclaration de nationalité de Mme [H] datée du 1er juillet 2010, décharger les condamnations prononcées à son encontre, en tout état de cause, y ajoutant, condamner l'intimé à la somme de 3.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens  ;

Vu les dernières conclusions notifiées le 7 mars 2022 par le ministère public qui demande à la cour, à titre principal, de déclarer nulle la déclaration d'appel en date du 20 juillet 2020, dire et juger que la cour d'appel n'est saisie d'aucune demande par Mme [H], à titre subsidiaire, rejeter l'exception de nullité, confirmer le jugement de première instance, ordonner la mention prévue par l'article 28 du code civil et condamner l'appelante au paiement des entiers dépens ;

Vu l'ordonnance de clôture rendue le 9 février 2023 ;

MOTIFS 

Il est justifié de l'accomplissement de la formalité prévue par l'article 1043 du code de procédure civile dans sa version applicable à la présente procédure, par la production du récépissé délivré le 19 mars 2021 par le ministère de la Justice.

Sur le moyen tiré de la nullité de la déclaration d'appel et de l'absence de saisine de la cour d'appel

Moyens des parties

Le ministère public soutient que la déclaration d'appel de Mme [D] [H] est nulle en application de l'article 901 du code de procédure civile faute de contenir précisément les chefs du jugement critiqués.

Mme [D] [H] soutient que la déclaration d'appel satisfait aux conditions prévues par l'article 901 du code de procédure civile dès lors qu'a été joint à la déclaration d'appel un document annexe intitulé « chefs du jugement expressément critiqués » au vu des difficultés techniques rencontrées.

Réponse de la cour

L'article 901 du code de procédure civile, dans sa version applicable à l'instance, dispose que la déclaration d'appel est faite par acte contenant, outre les mentions prescrites par l'article 57, et à peine de nullité :

1° La constitution de l'avocat de l'appelant ;

2° L'indication de la décision attaquée ;

3° L'indication de la cour devant laquelle l'appel est porté ;

4° Les chefs du jugement expressément critiqués auxquels l'appel est limité, sauf si l'appel tend à l'annulation du jugement ou si l'objet du litige est indivisible.

Elle est signée par l'avocat constitué. Elle est accompagnée d'une copie de la décision. Elle est remise au greffe et vaut demande d'inscription au rôle. Il ressort des messages adressés par la voie électronique (RPVA) que le 20 juillet 2020, Mme [D] [H] a adressé au greffe de la cour sa déclaration d'appel ainsi qu'un document intitulé «  chefs appel jugement critiqués [D] [H] », ce document étant par ailleurs produit dans les pièces de l'appelante.

Conformément à l'avis de la Cour de cassation du 8 juillet 2022 (n°22-70005), la déclaration d'appel, à laquelle est jointe une annexe comportant les chefs de dispositif du jugement critiqués, constitue l'acte d'appel conforme aux exigences de l'article 901 du code de procédure civile, dans sa nouvelle rédaction, même en l'absence d'empêchement technique.

Il s'ensuit que la déclaration d'appel de Mme [D] [H] n'est pas nulle et que la cour est valablement saisie.

Sur la demande de nullité de l'assignation

Si Mme [D] [H] forme une demande de nullité de l'assignation dans le dispositif de ses conclusions, elle n'énonce aucun moyen de droit et de fait à l'appui de cette demande qui ne peut qu'être rejetée en application de l'article 954 alinéa 3 code de procédure civile.

Sur le fond

L'article 21-2 du code civil dans sa rédaction applicable à l'espèce dispose que : « L'étranger ou apatride qui contracte mariage avec un conjoint de nationalité française peut, après un délai d'un an à compter du mariage, acquérir la nationalité française par déclaration à condition qu'à la date de cette déclaration la communauté de vie tant affective que matérielle n'ait pas cessé entre les époux depuis le mariage et que le conjoint français ait conservé sa nationalité.

Mme [D] [H], née le 2 juillet 1968 à [Localité 5] (Liban), de nationalité libanaise, a contracté mariage le 10 mai 1992 à [Localité 6] (Liban) avec M. [L] [U], né le 22 décembre 1967 à [Localité 5]. Elle a, en application de l'article 21-2 du code civil, souscrit une déclaration d'acquisition de nationalité le 1er juillet 2010, enregistrée le 1er juin 2011.

L'article 26-4 du code civil prévoit que l'enregistrement de la déclaration peut être contestée par le ministère public en cas de mensonge ou de fraude dans le délai de deux ans à compter de leur découverte et que la cessation de la communauté de vie entre les époux dans les douze mois suivant l'enregistrement de la déclaration prévue à l'article 21-2 constitue une présomption de fraude.

La présomption résultant de la cessation de la communauté de vie prévue par la seconde phrase du troisième alinéa de l'article 26-4 ne saurait s'appliquer que dans les instances engagées dans les deux années de la date de l'enregistrement de la déclaration. Dans les instances engagées postérieurement, il appartient au ministère public de rapporter la preuve du mensonge ou de la fraude invoqué. Sous cette réserve, l'article 26-4, dans sa rédaction issue de la loi du 24 juillet 2006 relative à l'immigration et à l'intégration, est conforme à la Constitution (Cons. const. 30 mars 2012, no 2012-227 QPC).

La recevabilité de l'action du ministère public n'est pas discutée devant la cour.

Pour annuler l'enregistrement de la déclaration de nationalité française souscrite par Mme [D] [H], le tribunal a exactement retenu qu'elle vivait séparément de son époux depuis 1995 et avait signé un « accord de décharge » devant notaire le 6 avril 2010 aux termes duquel elle convenait avec son époux de « l'annulation définitive de leur mariage » , leur divorce ayant ensuite été prononcé le 6 juillet 2010.

Si Mme [D] [H] ne conteste pas l'existence de son divorce prononcé le 6 juillet 2010 par le tribunal ecclésiastique et donc son opposabilité, elle fait valoir que nonobstant la copie certifiée conforme du certificat de divorce, datée du 4 mai 2011, leur vie commune a continué après leur divorce. Elle considère que le choix de divorcer a été justifié non par la volonté de mettre fin à la vie commune mais par son travail au Kurdistan et la nécessité de protéger son époux afin qu'il ne soit pas tenu par ses engagements professionnels et ceux de la société qu'elle avait créée au Kurdistan.

Mais, les attestations de ses enfants et voisins indiquant que la vie commune affective et matérielle avec son époux a duré jusqu'en 2013 ainsi que les factures téléphoniques du domicile familiale à son nom sont insuffisantes à remettre en cause l'existence de son divorce avec M. [L] [U]. D'une part, aux termes de « l'accord de décharge » passé devant notaire le 6 avril 2010, Mme [D] [H] a déclaré être séparée de son époux depuis 1995 et d'autre part, elle admet dans ses conclusions être actuellement divorcée, évoquant son « ex mari ». Or, elle n'invoque aucun autre acte de divorce intervenu ultérieurement depuis la fin alléguée de la vie commune en 2013 selon les attestations qu'elle produit. L'attestation du greffier en chef du tribunal maronite unifié de 1ère instance du 9 septembre 2020 selon laquelle le tribunal maronite ne dispose d'aucun procès d'annulation, de dissolution ou d'abandon au nom de Mme [D] [H] et son conjoint n'engage que cette autorité. Nonobstant, cette attestation, Mme [D] [H] et son époux ont divorcé, leur divorce ayant été transcrit à l'état civil libanais. Cette attestation est donc inopérante.

Contrairement à ce que soutient Mme [D] [H], il est établi que la vie commune affective et matérielle avait cessé avant la souscription de sa déclaration de nationalité justifiant ainsi l'annulation de son enregistrement. Le jugement est donc confirmé.

Mme [D] [H], succombant à l'instance, est condamnée aux dépens et ne saurait prétendre à une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Constate l'accomplissement de la formalité prévue à l'article 1043 du code de procédure civile,

Rejette le moyen tiré de la nullité de la déclaration d'appel,

Rejette la demande de nullité de l'assignation,

Confirme le jugement,

Ordonne la mention prévue à l'article 28 du code civil,

Rejette la demande de Mme [D] [H] au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne Mme [D] [H] aux dépens.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 3 - chambre 5
Numéro d'arrêt : 20/10004
Date de la décision : 18/04/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-04-18;20.10004 ?
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