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06/04/2023 | FRANCE | N°20/00636

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 8, 06 avril 2023, 20/00636


Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 8



ARRET DU 06 AVRIL 2023



(n° , 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/00636 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CBJPG



Décision déférée à la Cour : Jugement du 18 Décembre 2019 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BOBIGNY - RG n° 18/00362





APPELANTE



Madame [I] [S] épouse [F]

[Adresse 1]

[Localité 4]



Représentée par Me Abdelaziz MIMOUN, avocat au barreau de VERSAILLES, toque : 89





INTIMÉ



Monsieur [Y] [D]

[Adresse 2]

[Localité 3]



Représenté par Me Marianne ...

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 8

ARRET DU 06 AVRIL 2023

(n° , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/00636 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CBJPG

Décision déférée à la Cour : Jugement du 18 Décembre 2019 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BOBIGNY - RG n° 18/00362

APPELANTE

Madame [I] [S] épouse [F]

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentée par Me Abdelaziz MIMOUN, avocat au barreau de VERSAILLES, toque : 89

INTIMÉ

Monsieur [Y] [D]

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représenté par Me Marianne DEWINNE, avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS, toque : 173

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 09 Février 2023, en audience publique, les avocats ne s'étant pas opposés à la composition non collégiale de la formation, devant Madame Sophie GUENIER-LEFEVRE, Présidente, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :

Madame Sophie GUENIER-LEFEVRE, présidente, rédactrice

Madame Nicolette GUILLAUME, présidente

Madame Emmanuelle DEMAZIERE, vice-présidente placée

Greffier, lors des débats : Mme Nolwenn CADIOU

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,

- signé par Madame Sophie GUENIER-LEFEVRE, présidente et par Madame Nolwenn CADIOU, greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DU LITIGE

Le 1er janvier 2005, Mme [I] [S] épouse [F] (Mme [F]) a été engagée à temps partiel, en qualité de pharmacien adjoint par M. [Y] [D], titulaire d'une pharmacie d'officine, à [Localité 4].

Par avenant du 30 novembre 2006, le volume horaire initialement fixé à 91 heures mensuelles a été porté à 100 heures.

La convention collective applicable à la relation de travail est celle de la pharmacie d'officine.

Le 31 décembre 2015, la salariée a notifié à son employeur sa volonté de faire valoir ses droits à la retraite à compter du 1er avril 2016.

Dans le cadre du cumul emploi-retraite, les parties ont conclu un nouveau contrat de travail le 1er avril 2016 , aux termes duquel Mme [F] était employée 20 heures par semaine.

Le 30 septembre 2017, M. [D] a cédé son officine et a remis à Mme [F] un certificat de travail, un solde de tout compte un bulletin de salaire dans lequel était liquidé l'ensemble des congés acquis et une attestation Pôle emploi sur laquelle avait été portée la mention d'une démission.

Estimant que son employeur restait lui devoir des rappels de salaire pour des heures complémentaires et considérant avoir été licenciée de manière abusive dans des conditions vexatoires et brutales, Mme [F] a saisi le conseil des prud'hommes de Bobigny le 12 février 2018 pour faire valoir ses droits.

Par jugement du 18 décembre 2019, notifié aux parties par lettre du 19 décembre 2019, cette juridiction a :

-fixé la moyenne des trois derniers mois de salaire à 2 264,69 euros,

- dit que le licenciement de Mme [S] épouse [F] est dépourvu de cause réelle et sérieuse,

en conséquence,

-condamné M. [D] à verser à Mme [S] épouse [F] la somme de :

-2 264,69 euros au titre du non respect de la procédure de licenciement,

- dit que le licenciement de Mme [S] épouse [F] ne produit aucun effet dès lors que le contrat de travail de Mme [S] épouse [F] s'est poursuivi avec le repreneur sans interruption avec reprise de son ancienneté conformément à l'article L1224-1 et L1235-3 du code du travail,

en conséquence,

- débouté Mme [S] épouse [F] de ses demandes subséquentes, -condamné M. [D] à verser à Mme [S] épouse [F] la somme de :

-1 022 euros au titre de rappel de salaire pour les heures complémentaires concernant la période de juillet 2017 à septembre 2017,

- condamné M. [D] à verser à Mme [S] épouse [F] la somme de :

-300 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- dit que les créances à caractère indemnitaire porteront intérêts au taux légal à compter du jour du prononcé du présent jugement,

- dit que les créances salariales porteront intérêts au taux légal à compter de la date de réception par la partie défenderesse de la convocation devant le bureau de conciliation soit le 7 avril 2018,

- débouté Mme [S] épouse [F] du surplus de ses demandes,

- débouté M. [D] de ses demandes reconventionnelles,

- condamné M. [D] aux entiers dépens.

Par déclaration du 20 janvier 2020, Mme [F] a interjeté appel.

Dans ses dernières conclusions, notifiées et déposées au greffe par voie électronique le 1er décembre 2022, elle demande à cour :

- d'infirmer partiellement le jugement rendu le 18 décembre 2019 par le conseil de prud'hommes de Bobigny ' Section Encadrement en ce qu'il a :

- dit que le licenciement de Madame [I] [F] ne produit aucun effet dès lors que le contrat de travail de Madame [I] [F] s'est poursuivi avec le repreneur sans interruption avec reprise de son ancienneté conformément à l'article L. 1224-1 et L. 1223-5 du code du travail,

- débouté Madame [I] [F] de ses demandes subséquentes,

statuant de nouveau,

- de condamner M. [D] à lui verser les sommes de :

- 20 000 euros pour licenciement nul ou subsidiairement sans cause réelle et sérieuse,

- 8 394,06 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

- 839,40 euros au titre des congés payés,

-1 399 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement,

- 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- de condamner M. [Y] [D] aux entiers dépens.

Dans ses dernières conclusions, notifiées et déposées au greffe par voie électronique le 21 octobre 2020, M. [D] demande à la cour :

- de fixer la moyenne de salaire de l'appelante à la somme de 2 530,37 euros,

- de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :

- dit que le contrat de travail de Madame [S] épouse [F] s'était poursuivi avec le repreneur, sans interruption avec reprise d'ancienneté conformément aux dispositions de l'article L 1224-1 et L 1235-3du code du travail,

- condamné M. [D] à verser à Mme [S] la somme de 1 022 euros au titre de rappel de salaire pour les heures complémentaires de juillet 2017 à septembre 2017,

- condamné M. [D] à verser Mme [S] la somme de 300 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

-débouté Mme [S] du surplus de ses demandes,

-de l'infirmer pour le surplus,

y ajoutant,

-de condamner Madame [F] au paiement de la somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

-de dire et juger que les intérêts dus pour une année entière seront eux-mêmes productifs d'intérêts au taux légal par application des dispositions de l'article 1343-2 du code civil,

-de condamner l'appelante aux entiers dépens.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 24 janvier 2023 et l'affaire a été appelée à l'audience du 9 février suivant pour y être examinée.

Il convient de se reporter aux énonciations de la décision déférée pour un plus ample exposé des faits et de la procédure antérieure et aux conclusions susvisées pour l'exposé des moyens des parties devant la cour.

MOTIFS

I- sur la rupture du contrat de travail,

Il est admis que le licenciement ne peut résulter que d'un acte de l'employeur par lequel il manifeste sa volonté de mettre fin de façon irrévocable au contrat de travail.

Les articles L. 1232-1 L.1232-3 et L. 1232-6 du code du travail imposent à l'employeur qui veut rompre le contrat de travail, le respect d'une procédure spécifique impliquant notamment la convocation à un entretien préalable et la notification de sa décision par lettre recommandée avec avis de réception qui doit comporter l'énoncé du ou des motifs invoqués à l'appui de la décision de rupture.

Aux termes de l'article L.1234-20 du code du travail, le solde de tout compte, établi par

l'employeur et dont le salarié lui donne reçu, fait l'inventaire des sommes versées au salarié

lors de la rupture du contrat de travail

Malgré son irrégularité, le licenciement verbal ou la rupture de fait a pour effet de rompre le contrat de travail.

La remise des documents sociaux doit être considérée comme une rupture de fait, sauf à ce que soit démontrée l'existence d'une erreur la rendant sans portée.

Par ailleurs, la démission résulte d'une volonté claire et déterminée dont il appartient au juge du fond de vérifier la réalité.

En l'espèce M. [D] soutient avoir commis une erreur en mentionnant sur l'attestation Pôle -Emploi la référence à une démission et rappelle que le contrat de travail a été transféré lors de la cession de l'officine, ce qui a été confirmé à la salariée par ses successeurs par courrier du 23 novembre 2017.

Cependant, outre que M [D] n'évoque son erreur que relativement à la mention d'une démission dans l'attestation Pôle emploi, il reconnaît lui même avoir procédé à la rupture du contrat de travail dès lors qu'outre la remise des documents de fin de contrat, il écrit à Mme [F] le 20 octobre 2017 que '(...), en avril les repreneurs ne pensaient pas reprendre les retraités(...), c'est donc pour cela que sans arrière pensée nous avons procédé à la rupture de votre contrat(...)'.

Le contrat de travail de Mme [F] a donc fait l'objet d'une rupture de fait, peu important que l'intéressée ait par la suite travaillé pour les cessionnaires de l'officine.

Pour solliciter que soit reconnue l'illicéïté de son licenciement, fondé selon elle sur le motif discriminatoire de l'âge, Mme [F] souligne que l'ensemble des salariés de l'officine ont été repris dans le cadre des dispositions de l'article L. 1224-1 du code du travail, elle seule, âgée de 65 ans, n'ayant pas bénéficié du transfert de son contrat de travail.

Elle relève que le courrier du 20 octobre 2017 par lequel son employeur lui expliquait avoir rompu le contrat de travail, rappelait que 'les repreneurs ne pensaient pas reprendre les 'retraités'(...)'.

Cependant, ces seuls éléments présentés ne permettent pas de laisser supposer l'existence d'une discrimination liée à l'âge, ce d'autant que Mme [F] souligne que les successeurs avaient l'espoir d'embaucher un assistant à sa place 'dont le coût était certainement moins élevé', reconnaissant ainsi que le motif de l'âge était étranger à la rupture de son contrat de travail.

Le licenciement de Mme [F] étant survenu sans qu'une lettre en fixe les motifs et sans aucun respect de la procédure, il est à ce seul titre dénué de cause réelle et sérieuse, le jugement devant être confirmé sur ce point.

II- sur les conséquences du licenciement sans cause réelle et sérieuse,

En application de l'article L. 1235-3 du code du travail tel qu'issu de l'ordonnance N°2017-1387 du 22 septembre 2017, le préjudice né de l'absence de caractère réel et sérieux de la rupture et des circonstances de cette dernière, doit être indemnisé à hauteur de 5 000 euros.

Au titre de l'indemnité de préavis, laquelle se calcule en référence à ce que la salariée aurait perçu si elle avait travaillé pendant la période du délai-congé, il doit être alloué à Mme [F], une somme équivalente à trois mois de salaire, en application de l'article 6 de la convention collective applicable et au regard de son statut de cadre.

Des mentions portées dans l'attestation Pôle emploi il résulte que si la salariée avait continué à travailler, elle n'aurait pas perçu un salaire brut mensuel supérieur à 2 530,37 euros.

Il doit lui être alloué en conséquence de ce chef la somme de 7 591,11 euros et 759,11 euros au titre des congés payés afférents.

Enfin, au titre de l'indemnité de licenciement, il convient de renvoyer aux dispositions de l'art.7 de la convention collective applicable aux termes duquel: 'dans le cas du licenciement d'un cadre ayant moins de cinq années d'ancienneté , ce sont les dispositions du code du travail qui s'appliquent.(...)'.

Cadre d'une ancienneté inférieure à cinq années, il y a donc lieu de faire application à Mme [F] des articles L.1234-9 et R. 1234-2 du code du travail et de déterminer la moyenne de salaire la plus favorable entre celle des douze derniers mois ou celle des trois derniers mois.

L'employeur fait à ce titre référence à une moyenne des douze derniers mois de salaire soit 2 530,37 euros tandis que la salariée fait référence à la moyenne des trois dernier mois soit 2 798,02 euros.

Cette dernière étant la plus favorable, c'est sur cette base que doit être calculée l'indemnité de licenciement égale à un quart de mois de salaire par année d'ancienneté avec un prorata pour les années incomplètes en fonction du nombre de mois.

Soit en l'espèce en considération de l'ancienneté d'un an et cinq mois :

2 798,02 /4 = 699,50 euros,

699,50 :12x5 = 291,46 euros

M. [D] doit être condamné à verser de ce chef la somme totale de : 990,96 euros.

Le jugement entrepris doit être infirmé sur ce point.

Les autres dispositions du jugement non critiquées en cause d'appel seront confirmées.

Les sommes à caractère salarial produiront intérêts au taux légal à compter de la réception par l'employeur de sa convocation en conciliation, et les sommes à caractère indemnitaire produiront intérêts au taux légal à compter du présent arrêt.

En raison des circonstances de l'espèce, il apparaît équitable d'allouer à Mme [F] une indemnité en réparation de tout ou partie de ses frais irrépétibles dont le montant sera fixé au dispositif.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

CONFIRME le jugement entrepris en ce qu'il a:

- dit le licenciement de Mme [F] dépourvu de cause réelle et sérieuse,

- condamné M. [D] à verser à Mme [S] épouse [F] :

-

1 022 euros au titre de rappel de salaire pour les heures complémentaires concernant la période de juillet 2017 à septembre 2017,

- 300 euros au titre de l'art.700 du code de procédure civile,

INFIRME le jugement pour le surplus,

et statuant à nouveau,

CONDAMNE M. [D] à verser à Mme [F] les sommes de:

- 5 000 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ,

- 7 591,11 euros et 759,11 euros au titre des congés payés afférents.

- 990,96 euros au titre de l'indemnité de licenciement,

- 3000 euros au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel,

DIT que les sommes à caractère salarial produiront intérêts au taux légal à compter de la réception par l'employeur de sa convocation en conciliation, et que les sommes à caractère indemnitaire produiront intérêts au taux légal à compter du présent arrêt.

CONDAMNE M. [D] aux entiers dépens de première instance et d'appel.

LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 8
Numéro d'arrêt : 20/00636
Date de la décision : 06/04/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-04-06;20.00636 ?
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