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06/04/2023 | FRANCE | N°19/16301

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 9 - a, 06 avril 2023, 19/16301


Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 9 - A



ARRÊT DU 06 AVRIL 2023



(n° , 10 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/16301 - N° Portalis 35L7-V-B7D-CARPT



Décision déférée à la Cour : Jugement du 11 juin 2019 - Tribunal d'Instance de LAGNY SUR MARNE - RG n° 11-19-000204





APPELANTS



Monsieur [U] [K] [W]

né le 8 août 1980 à

[Localité 7] (92)

[Adresse 2]

[Localité 9]



représenté par Me Claudine SCOTTO D'APOLLONIA, avocat au barreau de PARIS, toque : C1941

substituée à l'audience par Me Christophe SCOT...

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 9 - A

ARRÊT DU 06 AVRIL 2023

(n° , 10 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/16301 - N° Portalis 35L7-V-B7D-CARPT

Décision déférée à la Cour : Jugement du 11 juin 2019 - Tribunal d'Instance de LAGNY SUR MARNE - RG n° 11-19-000204

APPELANTS

Monsieur [U] [K] [W]

né le 8 août 1980 à [Localité 7] (92)

[Adresse 2]

[Localité 9]

représenté par Me Claudine SCOTTO D'APOLLONIA, avocat au barreau de PARIS, toque : C1941

substituée à l'audience par Me Christophe SCOTTO D'APOLLONIA, avocat au barreau de MELUN, toque : M5

Madame [L] [K] [W]

nés le 30 juin 1975 à [Localité 6] (ALGÉRIE)

[Adresse 2]

[Localité 9]

représenté par Me Claudine SCOTTO D'APOLLONIA, avocat au barreau de PARIS, toque : C1941

substituée à l'audience par Me Christophe SCOTTO D'APOLLONIA, avocat au barreau de MELUN, toque : M5

INTIMÉES

La société BL AGENTS, société par actions simplifiée représentée par son président

N° SIRET : 791 952 427 00031

Parc international d'entreprises

[Adresse 1]

[Localité 5]

représentée par Me Agathe CORDELIER de la SCP CORDELIER & Associés, avocat au barreau de PARIS, toque : P0399

substituée à l'audience par Me Osanne VINCELOT de la SCP CORDELIER & Associés, avocat au barreau de PARIS, toque : P0399

La société [M] [N] INVESTISSEMENTS (CGI), SARL représentée par M. [M] [N]

N° SIRET : 390 236 644 00048

[Adresse 3]

[Localité 4]

représentée par Me Solange IEVA-GUENOUN de la SCP IEVA-GUENOUN/PAIN, avocat au barreau de MEAUX, toque : 22

substituée à l'audience par Me Vanessa CALAMARI de la SCP IEVA-GUENOUN/PAIN, avocat au barreau de MEAUX, toque : 22

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 28 février 2023, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Laurence ARBELLOT, Conseillère, chargée du rapport

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Muriel DURAND, Présidente de chambre

Mme Fabienne TROUILLER, Conseillère

Mme Laurence ARBELLOT, Conseillère

Greffière, lors des débats : Mme Camille LEPAGE

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Mme Muriel DURAND, Présidente et par Mme Camille LEPAGE, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

La société civile immobilière [Adresse 8] était propriétaire de terrains à bâtir situés sur la commune de [Localité 9], vendus en 24 lots après viabilisation, par l'intermédiaire de l'agence immobilière BL Agents.

M. [U] [K] [W] et Mme [L] [K] [W] se sont portés acquéreurs d'un lot constitué d'un terrain à bâtir d'une surface de 485 m² mis en vente pour la somme de 180 000 euros augmentée notamment des frais d'acte.

Un compromis de vente a été signé le 29 novembre 2013 entre la société [M] [N] Investissements ci-après société GCI et les époux [K] [W] sous plusieurs conditions suspensives dont l'obtention d'un prêt, lequel a été accordé le 4 janvier 2014 et l'obtention d'un permis de construire obtenu le 4 août 2015.

La vente a été réitérée par acte authentique du 7 avril 2016 et M. et Mme [K] [W] ont procédé à la construction d'une maison individuelle.

Saisi par M. et Mme [K] [W] d'une demande tendant principalement à la condamnation des sociétés BL Agents et [M] [N] Investissements au paiement de dommages et intérêts, le tribunal d'instance de Lagny-sur-Marne par un jugement contradictoire rendu le 11 juin 2019 auquel il convient de se reporter, a débouté M. et Mme [K] [W] de l'ensemble de leurs demandes.

Le tribunal a principalement retenu que le courriel du commercial de la société BL Agents sur lequel ils se fondaient, antérieur au compromis de vente, n'était qu'un document sans valeur contractuelle mentionnant des frais de notaire réduits à 5 500 euros et qu'il appartenait aux acheteurs de se renseigner sur le montant réel des frais notariés d'autant plus qu'ils avaient été destinataires d'un document émanant de l'office notarial indiquant expressément le montant de ces frais.

Par déclaration enregistrée le 5 août 2019, M. et Mme [K] [W] ont relevé appel de cette décision.

Aux termes de conclusions numéro 4 remises le 19 janvier 2023, les appelants demandent à la cour :

- de les déclarer recevables et bien fondés en leur appel,

- d'infirmer le jugement,

- à titre principal, de condamner la société BL Agents, ensemble le cas échéant la société CGI, au paiement d'une somme de 39 500 euros hors intérêts légaux,

- à titre subsidiaire, de condamner la société BL Agents, ensemble le cas échéant la société CGI, au paiement d'une somme de 21 000 euros, hors intérêt légaux,

- de constater le mensonge produit par M. [D] [H] dans son attestation écrite,

- de condamner la société BL Agents, ensemble le cas échéant la société CGI, au paiement d'une somme de 3 500 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile.

Les appelants indiquent que la responsabilité des sociétés intimées est engagée au regard des man'uvres dolosives dont elles se sont rendues coupables ou à tout le moins de pratiques commerciales trompeuses, lesquelles ont été la cause directe du préjudice subi par eux dont ils demandent réparation à hauteur de 39 500 euros ou de 21 000 euros au titre des préjudices matériels et moraux subis. Ils invoquent une information erronée quant aux frais de notaire payés pour 17 900 euros alors qu'il était annoncé une somme de 5 500 euros.

Ils soutiennent que leur action n'est pas prescrite en ce que l'article 2224 du code civil fixe comme point de départ du délai de prescription quinquennale le jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer, soit pour ce qui les concerne en juin 2017, date à laquelle ils se sont rendus compte de leur méprise quant au montant des frais notariés. Ils ajoutent que la société GCI a eu connaissance du mail du 14 novembre 2013 promettant de frais de notaire réduits.

Ils contestent toute mise hors de cause de la société GCI qui existait encore juridiquement et qui doit répondre des actes que ses mandataires ont commis en son nom.

Ils soutiennent que le jugement est entaché de dénaturation en ce qu'il a retenu que le courriel du 14 novembre 2013 n'avait pas la nature d'un engagement formel et alors que par ce courriel, M. [H] de l'agence leur a assuré que concernant les avantages, ils bénéficiaient de frais de notaire réduits soit environ 5 500 euros. Ils estiment que le vendeur a donc bien entendu leur accorder un avantage commercial consistant en la perception de frais de notaire réduits et qu'il s'agit d'un engagement formel qui aurait dû lier les parties. Elle fait observer que la société BL Agents fait l'aveu de ne pas avoir de compétence pour promettre des frais de notaire réduits, ni même d'en connaître tout simplement le montant exact, qu'elle reconnaît donc par là même qu'elle a commis un mensonge en promettant un avantage dont elle ne pouvait pas obtenir le bénéfice car n'ayant ni la compétence, ni l'autorisation pour le faire et que le mensonge doit être considéré comme une man'uvre dolosive de sorte que la qualification de dol est établie.

Ils estiment que ces man'uvres constituent également des pratiques commerciales trompeuses ou mensongères et rappellent que quelle que soit la solution retenue sur le terrain du dol, la responsabilité des intimées doit être retenue, dans la mesure où un simple mensonge, dès lors qu'il est la cause d'un dommage, constitue une faute pour l'application de l'ancien article 1382, transféré à l'actuel article 1240 du code civil.

Ils expliquent que les sociétés intimées ont volontairement fourni des informations ambiguës concernant le prix global de la prestation, ont omis de les informer qu'il était plausible qu'ils n'aient pas le droit aux frais de notaire réduits, qu'en admettant que le courriel du 14 novembre 2013 ait eu la nature d'un document publicitaire, celui-ci comportait des allégations fausses ou de nature à induire en erreur compte tenu de leur ambiguïté, à propos du prix et des conditions de vente ainsi que sur les engagements de la société BL Agents.

Les appelants indiquent que le montant des frais de notaire présentait un caractère déterminant dans l'opération immobilière et que la faute de la société BL Agents est la cause de leur préjudice.

S'agissant du préjudice, ils expliquent que s'ils avaient été informés correctement, ils auraient pu d'une part soit revoir leur accord dans son ensemble (prix du terrain et frais de notaires), soit choisir un prêt correspondant à la somme demandée et ne pas devoir ensuite réemprunter une nouvelle somme à un taux beaucoup moins avantageux ou encore se défaire de ce compromis. Ils font état d'un double préjudice de perte d'une chance de se défaire du compromis et de perte d'une chance de renégocier les termes du compromis de vente, et notamment le prix d'achat du terrain. Ils indiquent qu'un an après la vente litigieuse, la société BL Agents a vendu à des tiers des terrains équivalents à celui dont les époux se sont portés acquéreurs pour un prix inférieur de 21 000 euros, soit un total indemnisable au titre de la perte d'une chance de renégocier le contrat de vente de 21 000 euros hors intérêts légaux. Ils estiment également que leur préjudice résulte de la différence de prix entre le prix promis initialement par la société BL Agents, d'une part, et le prix finalement acquitté par les époux au titre des frais de notaire (16 500 euros) et de la perte de chance précédemment évoquée outre un préjudice moral de 1 000 euros par appelant soit un total un total indemnisable de 39 500 euros.

Ils soutiennent enfin que le process de médiation tenté à l'initiative de la société BL Agents en date du 15 octobre 2019 avait pour unique but de gagner du temps et qu'il n'y a eu aucune proposition de règlement amiable caractérisant ainsi des man'uvres dolosives de la part des sociétés BL Agents et GCI.

Aux termes de conclusions remises le 13 janvier 2023, la société CGI, intimée, demande à la cour :

- de confirmer le jugement en ce qu'il a rejeté les demandes de M. et Mme [K] [W] et les a condamnés aux entiers dépens de la procédure,

- d'infirmer le jugement en ce qu'il a omis de statuer sur sa mise hors de cause, omis de statuer sur la prescription de l'action soulevée, rejeté la demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- de la mettre hors de cause,

- de retenir que l'action de M. et Mme [K] [W] est prescrite,

- de condamner M. et Mme [K] [W] au titre des frais irrépétibles de première instance à lui verser la somme de 2 500 euros,

- de rejeter l'intégralité des demandes de M. et Mme [K] [W],

- si par extraordinaire la cour retenait le caractère bien fondé de l'action de M. et Mme [K] [W], il est demandé que les demandes indemnitaires de M. et Mme [K] [W] soient réduites à la somme de 6 900 euros et que la société BL Agents soit condamnée à relever et garantir la société GCI de toute condamnation prononcée à son encontre,

- de condamner in solidum le ou les succombants à régler la somme de 5 000 euros au titre des frais irrépétibles en cause d'appel et aux entiers dépens.

La société GCI fait valoir que l'action de M. et Mme [K] [W] est prescrite puisque le délai de prescription a commencé à courir le 29 novembre 2013 date du compromis pour s'achever au 29 novembre 2018 et que les erreurs dans le compromis de vente étaient parfaitement visibles dès sa signature en 2013.

Elle prétend qu'elle doit être mise hors de cause n'étant pas partie à l'acte de vente, la venderesse étant la société civile immobilière [Adresse 8] et alors qu'elle n'est que co-gérante de cette société. Elle indique que si les actes initiaux ont été signés par la société GCI, c'est parce que la SCI n'existait pas encore mais que tous les actes lui ont été transmis et que c'est bien la SCI qui a signé l'acte authentique.

Elle rejette toute faute, tout manquement, rappelant qu'elle n'a jamais eu aucun contact avec M. et Mme [K] [W] et que les actes contestés relèvent uniquement de la responsabilité de l'agence immobilière.

Elle soutient que les époux avaient nécessairement connaissance des frais notariés en ayant bénéficié de 30 mois de délai entre le compromis de vente et la signature de l'acte authentique pour vérifier les frais, qu'ils ont signés sans réserve l'acte authentique et qu'il leur appartenaient de se renseigner sur les coûts de la vente.

Elle conteste l'existence d'un dol non prouvé, l'absence de preuve de la connaissance par l'agence immobilière du montant des frais notariés, montant toujours estimatif ou toute dissimulation. Elle estime que M. et Mme [K] [W] ne rapportent pas la preuve que les frais notariés étaient un élément déterminant dans le projet d'achat du terrain immobilier.

Elle précise que le montant des frais notariés sont fixés par voie réglementaire et que s'il y a eu une erreur dans le montant de ces frais, elle ne peut lui être imputée.

Elle rappelle que le process de médiation est soumis au principe de confidentialité des articles 1531 et 129-4 du code de procédure civile.

En cas de condamnation, elle estime que l'agence BL Agents devra la garantir de toute condamnation qui ne pourrait dépasser 6 900 euros.

Aux termes de conclusions remises le 19 janvier 2023, la société BL Agents, intimée, demande à la cour :

- de confirmer le jugement, en ce qu'il n'a pas retenu de responsabilité à son encontre,

- de déclarer que la cour d'appel n'est tenue que par les moyens et les développements contenus dans les dernières écritures signifiées par M. et Mme [K] [W],

- de juger que M. et Mme [K] [W] ne se sont nullement engagés en raison des frais notariés mais en raison de la nature de l'opération,

- de juger qu'il a été mentionné, dans le compromis, une provision et non des frais définitifs,

- de juger qu'elle a parfaitement exécuté sa mission et n'a commis aucun manquement de nature à engager sa responsabilité, ni commis aucune man'uvre dolosive,

- de juger que M. et Mme [K] [W] ne justifient pas d'un préjudice indemnisable,

- de déclarer M. et Mme [K] [W] irrecevables et mal fondés en leurs demandes, et de les en débouter,

- subsidiairement, de condamner la société GCI à la relever et à la garantir de toutes condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre,

- de déclarer la société GCI irrecevable et mal fondée en son appel en garantie formé à son encontre et l'en débouter,

- de condamner solidairement M. et Mme [K] [W] ou toute partie succombante à lui verser la somme de 4 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

-de condamner solidairement M. et Mme [K] [W] ou toute partie succombante aux entiers dépens.

La société BL Agents fait valoir que le jugement de première instance a correctement retenu une absence de dol et que le courriel objet du litige n'est pas un document contractuel, qu'il ne fait aucune promesse ni ne formule aucune proposition.

Ils notent une contradiction en ce qu'il ne peut être simultanément invoqué la responsabilité délictuelle, supposant l'absence de tout lien contractuel et le dol intervenant seulement entre deux parties tenues par un lien contractuel.

Elle rappelle n'être intervenue qu'en tant qu'intermédiaire, qu'il était prévu au compromis de vente que le prix de vente était fixe, que les autres frais étaient présentés comme une provision impliquant que leur montant définitif était inconnu et donc susceptible de varier et qu'il n'était pas fait mention d'un engagement de l'agence immobilière sur le caractère non plus estimatif mais définitif des frais notariés, étant rappelé que ces frais ne bénéficient qu'au notaire à l'exclusion de l'agent immobilier. Elle soutient que l'affirmation des appelants indiquant que la provision sur les frais d'acte était « selon l'agence immobilière » de nature à couvrir la totalité des frais d'acte, est contraire aux documents contractuels, à l'intention des parties et à la réalité de ce litige. Elle note que le courriel du 14 novembre 2013 n'a pas de valeur contractuelle. Elle fait observer que les appelants ont payé sans réserve ces frais notariés dont le montant leur avait été communiqué par attestation du 30 mars 2016, qu'ils sont malvenus de réclamer le remboursement plus de 2 ans après le paiement et qu'en toute hypothèse, s'ils se prétendent victimes d'une information erronée voire d'un mensonge, le dol n'est pas pour autant constitué. Elle estime que les appelants ne prouvent ainsi ni que ces frais étaient connus avant la signature du compromis par les sociétés intimées ni qu'il y a eu une dissimulation volontaire du montant de ces frais. Elle note qu'il est difficilement concevable que la différence de 8 900 euros sur un coût d'opération globale de 301 000 euros (coût du terrain et de la construction de la maison) ait pu les pousser à renoncer à leur accession à la propriété.

L'intimée soutient que M. et Mme [K] [W] échouent à prouver une quelconque pratique commerciale trompeuse et que leur préjudice n'est absolument pas démontré puisqu'il n'y a pas de remise en question de la vente.

Elle sollicite en cas de condamnation la garantie de la société GCI motif pris qu'elle a correctement réalisé son mandat d'agent immobilier.

Elle constate enfin que les appelants violent le principe de confidentialité de la médiation.

Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions des parties, il est renvoyé aux écritures de celles-ci conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 14 février 2023 et l'affaire a été appelée à l'audience du 28 février 2023.

MOTIFS DE LA DÉCISION

La cour constate que l'appel de M. et Mme [K] [W] ne vise pas la société civile immobilière [Adresse 8], propriétaire du terrain vendu et intervenante volontaire lors de la première instance.

Sur la fin de non-recevoir tirée de la prescription

Il résulte des dernières écritures prises par M. et Mme [K] [W] devant le premier juge en vue de l'audience du 13 mai 2019, que ceux-ci ont entendu fonder leur action à l'encontre des sociétés BL Agents et GCI sur les dispositions des articles 1137, 1138, 1139, 1240, 1242 alinéa 5, 1991, 1992 et 1998 du code civil en sollicitant de voir constater le dol et les man'uvres dont ils prétendent avoir été victimes de la part de ces deux sociétés, et de les voir condamner in solidum à leur payer la somme de 10 000 euros outre les dépens de l'instance.

Leur action reposait donc à la fois sur le dol et sur la responsabilité délictuelle.

Il n'est pas contesté que la société GCI avait soulevé devant le premier juge la prescription des demandes de M. et Mme [K] [W] au regard de la prescription quinquennale ayant commencé à courir selon elle le 29 novembre 2013 date du compromis.

Il ne résulte d'aucune disposition du jugement querellé que le premier juge ait tranché au préalable la fin de non-recevoir soulevée par la société GCI et maintenue à hauteur d'appel.

Les appelants maintiennent leur action fondée sur les articles 1137, 1240 et 1231-1 du code civil et soutiennent n'avoir eu connaissance du montant réel des frais notariés qu'en juin 2017 et qu'ils ne pouvaient savoir à la date du compromis en 2013 que le montant des frais réduits promis ne serait pas respecté.

Au regard de la date du contrat, il convient de faire application des dispositions du code civil en leur version antérieure à l'entrée en vigueur au 1er octobre 2016 de l'ordonnance du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats.

Selon l'article 2224 du code civil, les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.

Il résulte des pièces communiquées aux débats, que le compromis de vente signé par M. et Mme [K] [W] le 29 novembre 2013 prévoit notamment un prix principal de vente de 180 000 euros, une provision pour frais d'acte d'achat de 5 000 euros, une provision pour frais d'emprunt (pour mémoire en sus à la charge de l'acquéreur) et une provision pour la construction de 121 000 euros. Ces mentions sont reprises à l'identique dans l'acte de vente réitéré le 7 avril 2016 suivant acte authentique et M. et Mme [K] [W] ne contestent pas avoir reçu le 30 mars 2016, préalablement à cet acte, une attestation de l'étude notariale détaillant les frais à ajouter à savoir en plus du prix de vente de 180 000 euros, 14 000 euros de frais d'achat (sauf à parfaire ou diminuer), 1 800 euros de frais de prêt, 100 euros de frais de dépôt de pièces, et 2 000 euros de séquestre voirie soit la somme totale de 17 900 euros.

Les motifs invoqués à l'appui de man'uvres ou réticences dolosives ou encore d'une faute des sociétés intimées étaient donc parfaitement connus des appelants dès le 30 mars 2016, date de l'attestation notariée mentionnant de manière non équivoque le montant des frais notariés à ajouter au prix de vente en vue de la signature de l'acte authentique quelques jours plus tard. Le point de départ du délai de prescription doit donc être fixé à cette date, sans que les appelants n'expliquent ou ne démontrent en quoi ce point de départ devrait être retardé au mois de juin 2017.

Il s'ensuit que les appelants disposaient de cinq années jusqu'au 30 mars 2021 pour exercer leur action, et que les demandes formées par conclusions récapitulatives à l'audience du 13 mai 2019 doivent être déclarées recevables et la fin de non-recevoir soulevée à ce titre doit être rejetée.

Sur la mise hors de cause de la société GCI

La société GCI demande sa mise hors de cause en ce qu'elle n'est pas propriétaire des terrains, qu'elle est co-gérante de la SCI [Adresse 8] et que l'agence immobilière a commis une erreur dans le compromis de vente en indiquant que la société GCI avait la qualité de vendeur.

Le compromis de vente validé le 29 novembre 2013 mentionne en qualité de vendeur la société à responsabilité limitée GCI représentée par son gérant M. [M] « [N] ». Toutefois, l'acte authentique du 7 avril 2016 précise que le vendeur est bien la société civile immobilière [Adresse 8] représentée par M. [M] [N], en sa qualité de gérant de la société [M] [N] Investissements, elle-même co-gérante de la société [Adresse 8].

La société GCI n'est donc pas propriétaire des lots vendus, ni partie en tant que telle à l'acte de vente du 7 avril 2016, de sorte qu'elle ne peut qu'être mise hors de cause.

Sur le dol et la faute délictuelle

Aux termes de l'article 1109 du code civil en sa rédaction applicable au contrat, il n'y a point de consentement valable si le consentement n'a été donné que par erreur ou s'il a été extorqué par violence ou surpris par dol.

Selon l'article 1116 du même code, le dol est une cause de nullité de la convention lorsque les man'uvres pratiquées par l'une des parties sont telles, qu'il est évident que, sans ces man'uvres, l'autre partie n'aurait pas contracté. Il ne se présume pas et doit être prouvé.

Selon l'article 1382 du code civil, tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.

Les appelants reprochent à l'agence immobilière d'avoir volontairement fourni des informations ambiguës concernant le prix global de la prestation et omis de les informer qu'il était plausible qu'ils n'aient pas le droit aux frais de notaire réduits de 5 500 euros comme cela leur avait été indiqué dans un courriel de M. [H] du 14 novembre 2013.

Le courriel de M. [H] antérieur à la signature du compromis de vente évoque concernant les « avantages », des frais de notaire réduits soit environ 5 500 euros en moyenne. Il s'agit d'un échange très informel préalable invitant les futurs acheteurs à prendre contact avec lui, ce courriel ne revêtant pas de nature contractuelle comme l'a à bon droit retenu le premier juge.

Le compromis validé le 29 novembre 2013 mentionne une provision sur frais d'acte d'achat de 5 000 euros reprise à l'acte authentique de vente du 7 avril 2016. Ces deux actes précisent très clairement qu'il ne s'agit que d'une provision sur frais, de sorte que les époux [K] [W] ne sauraient invoquer une quelconque ambiguïté, la notion de provision impliquant que le montant des frais était purement estimatif. Au demeurant, le calcul des frais de vente tarifés relève exclusivement de la compétence de l'office notarial, et il ne peut donc être déduit de cet échange préalable à la vente, une connaissance par l'agence immobilière avant signature du compromis de vente, du montant exact des frais de vente ni un engagement de sa part sur des frais réduits ni une dissimulation volontaire de sa part du montant réel de ces frais. Il ne peut non plus être reproché à l'agence une réticence d'information qu'elle n'était pas tenue de délivrer.

Il est rappelé que M. et Mme [K] [W] ont bénéficié d'un délai de 30 mois entre la signature du compromis de vente et la signature de l'acte authentique, délai leur permettant de se renseigner auprès de l'office notarial sur les coûts de la vente et qu'il n'est pas contesté qu'ils ont eu connaissance le 30 mars 2016 avant signature de l'acte authentique, du montant exact des frais de l'acte, ce qui ne les a pas empêché de réitérer leur intention d'achat.

Il résulte de ce qui précède que la preuve de man'uvres dolosives imputable à la société BL Agents n'est pas démontrée. Il en est de même d'agissements qualifiés de pratiques commerciales trompeuses et mensongères ou d'une faute de nature délictuelle susceptible d'engager sa responsabilité.

Il convient donc de confirmer le jugement en ce qu'il a rejeté les demandes formées à l'encontre des sociétés BL Agents et GCI et condamné les appelants aux dépens.

M. et Mme [K] [W] qui succombent sont tenus in solidum aux dépens d'appel et condamnés à verser à chacune des sociétés intimées la somme de 1 000 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Les parties sont déboutées de leurs demandes plus amples ou contraires.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant après débats en audience publique, par arrêt contradictoire et par mise à disposition au greffe,

Confirme le jugement en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant,

Rejette la fin de non-recevoir ;

Met hors de cause la société [M] [N] Investissements ;

Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;

Condamne M. [U] [K] [W] et Mme [L] [K] [W] in solidum aux dépens d'appel, avec distraction au profit de la SCP Credelier et Associés ;

Condamne M. [U] [K] [W] et Mme [L] [K] [W] in solidum à payer à la société BL Agents et à la société [M] [N] Invesstissements chacune la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

La greffière La présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 9 - a
Numéro d'arrêt : 19/16301
Date de la décision : 06/04/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-04-06;19.16301 ?
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