La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

04/04/2023 | FRANCE | N°22/05048

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 3 - chambre 5, 04 avril 2023, 22/05048


Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 3 - Chambre 5



ARRET DU 04 AVRIL 2023



(n° , 4 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/05048 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CFNWU



Décision déférée à la Cour : Jugement du 14 octobre 2021 rendu par le tribunal judiciaire de PARIS - RG n° 19/10499





APPELANTE



Madame [N] [G] née le 26 septembre 1995 à [Local

ité 1] (Algérie),



[Adresse 6]

[Localité 1] Algérie



représentée par Me Abderrazak BOUDJELTI, avocat au barreau de PARIS, toque : D0094



(bénéficie d'une AIDE JURIDICTIONNE...

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 3 - Chambre 5

ARRET DU 04 AVRIL 2023

(n° , 4 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/05048 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CFNWU

Décision déférée à la Cour : Jugement du 14 octobre 2021 rendu par le tribunal judiciaire de PARIS - RG n° 19/10499

APPELANTE

Madame [N] [G] née le 26 septembre 1995 à [Localité 1] (Algérie),

[Adresse 6]

[Localité 1] Algérie

représentée par Me Abderrazak BOUDJELTI, avocat au barreau de PARIS, toque : D0094

(bénéficie d'une AIDE JURIDICTIONNELLE TOTALE numéro 2021/052427 du 11/02/2022 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de PARIS)

INTIME

LE MINISTERE PUBLIC pris en la personne de MONSIEUR LE PROCUREUR GENERAL

[Adresse 2]

[Localité 3]

représenté à l'audience par Mme M.-D. PERRIN, substitut général

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 16 février 2023, en audience publique, l'avocat de l'appelante et le ministère public ne s'y étant pas opposés, devant Mme Marie-Catherine GAFFINEL, conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Hélène FILLIOL, présidente de chambre

M. François MELIN, conseiller

Mme Marie-Catherine GAFFINEL, conseillère,

Greffier, lors des débats : Mme Mélanie PATE

ARRET :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Mme Hélène FILLIOL, présidente de chambre et par Mme Mélanie PATE, greffière présente lors de la mise à disposition.

Vu le jugement rendu le 14 octobre 2021 par le tribunal judiciaire de Paris qui a dit la procédure régulière au regard des dispositions de l'article 1043 du code de procédure civile, jugé Mme [N] [G], née le 26 septembre 1995 à [Localité 1] (Algérie), irrecevable à faire la preuve qu'elle a, par filiation, la nationalité française, jugé qu'elle est réputée avoir perdu la nationalité française le 4 juillet 2012, ordonné la mention prévue par l'article 28 du code civil et l'a condamnée aux dépens ;

Vu la déclaration d'appel en date du 7 mars 2022 de Mme [N] [G] ;

Vu les conclusions notifiées le 28 mars 2022 par Mme [N] [G] qui demande à la cour de dire son appel recevable au regard des dispositions de l'article 1043 du code de procédure civile, la dire bien fondé, en conséquence, infirmer le jugement dont appel, statuer de nouveau et dire qu'elle est française par filiation en application de l'article 18 du code civil, ordonner les mentions prévues par l'article 28 du code civil, condamner le ministère public (l'État) au paiement de la somme de 2 000 euros au titre des frais irrépétibles en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridictionnelle, condamner également le ministère public (l'État) aux entiers dépens dont distraction au profit de Maitre BOUDJELTI ;

Vu les conclusions notifiées le 16 juin 2022 par le ministère public qui demande à la cour, à titre principal, de confirmer le jugement qui a déclaré Mme [N] [G] irrecevable à faire la preuve qu'elle a par filiation la nationalité française, dire que [G], se disant née 26 septembre 1995 à [Localité 1] (Algérie) est réputée avoir perdu la nationalité française le 4 juillet 2012, la débouter de ses demandes tendant à réformer le jugement et à la dire de nationalité française, à titre subsidiaire, dire que Mme [N] [G], se disant née le 26 septembre 1989 à [Localité 1] (Algérie) n'est pas française, dans tous les cas, ordonner la mention prévue par l'article 28 du code civil et la condamner aux dépens ;

Vu l'ordonnance de clôture rendue le 2 novembre 2022 ;

MOTIFS :

Il est justifié de l'accomplissement de la formalité prévue par l'article 1043 du code de procédure civile dans sa version applicable à la présente procédure, par la production du récépissé délivré le 31 mars 2022 par le ministère de la Justice.

En application de l'article 30 alinéa 1er du code civil, il appartient à celui qui revendique la nationalité française d'en rapporter la preuve, lorsqu'il n'est pas titulaire d'un certificat de nationalité française délivré à son nom, conformément aux dispositions des articles 31 et suivants du code civil.

N'étant pas personnellement titulaire d'un certificat de nationalité française, il appartient à Mme [N] [G] en application de l'article 30 du code civil de rapporter la preuve qu'elle réunit les conditions requises par la loi pour l'établissement de sa nationalité française.

Mme [N] soutient qu'elle est française par filiation maternelle pour être née le 26 septembre 1995 à [Localité 1] (Algérie), de Mme [F] [C], née le 8 février 1969, celle-ci étant la fille de Mme [U] [A], née le 3 mars 1929, celle-ci étant la fille de [L] [K], née le 9 novembre 1903 à [Localité 7] (Algérie) de [M] [T], présumée née en 1883 à [Localité 5] (Algérie). L'appelante indique que [L] [K] et [M] [T] ont été admises à la qualité de citoyennes françaises par décret du 21 juillet 1913. Dès lors, l'appelante affirme qu'étant descendante directe d'une citoyenne française, c'est à bon droit qu'elle diligente la présente procédure aux fins de voir dire qu'elle est française.

Le tribunal a retenu que les conditions posées par l'article 30-3 du code civil étaient réunies et qu'en conséquence, Mme [N] [G] était réputée avoir perdu la nationalité le 4 juillet 2012.

L'article 30-3 du code civil dispose que :

« Lorsqu'un individu réside ou a résidé habituellement à l'étranger, où les ascendants dont il tient par filiation la nationalité sont demeurés fixés pendant plus d'un demi-siècle, cet individu ne sera plus admis à faire la preuve qu'il a, par filiation, la nationalité française si lui-même et celui de ses père et mère qui a été susceptible de la lui transmettre n'ont pas eu la possession d'état de Français.

Le tribunal doit dans ce cas constater la perte de la nationalité française dans les termes de l'article 23-6 du code civil en déterminant la date à laquelle la nationalité française a été perdue. »

La présomption irréfragable de perte de la nationalité française par désuétude édictée par l'article 30-3 du code civil suppose que les conditions prévues par le texte précité soient réunies de manière cumulative.

L'application de l'article 30-3 du code civil est en conséquence, subordonnée à la réunion des conditions suivantes : l'absence de résidence en France pendant plus de 50 ans du parent français, l'absence de possession d'état de l'intéressé et de son parent, le demandeur devant en outre résider ou avoir résidé habituellement à l'étranger.

L'article 30-3 du code civil interdit, dès lors que les conditions qu'il pose sont réunies, de rapporter la preuve de la transmission de la nationalité française par filiation, en rendant irréfragable la présomption de perte de celle-ci par désuétude. Édictant une règle de preuve, l'obstacle qu'il met à l'administration de celle-ci ne constitue pas une fin de non-recevoir au sens de l'article 122 du code de procédure civile, de sorte qu'aucune régularisation sur le fondement de l'article 126 du même code ne peut intervenir (Civ 1ère, 13 juin 2019, pourvoi n°18-16.838).

C'est par des motifs exacts et pertinents que la cour adopte que les premiers juges ont retenu que Mme [N] [G] et ses ascendants étaient demeurés fixés à l'étranger pendant plus de 50 ans.

Contrairement à ce que soutient Mme [N] [G], les premiers juges, en précisant qu'aucune preuve n'était rapportée d'une résidence en France « de ses ascendantes » pendant la période visée à l'article 30-3 du code civil, ont exactement retenu que lorsque l'ascendant direct de l'intéressée est né après le 3 juillet 1962, la condition d'absence de résidence en France pendant plus d'un demi-siècle est appréciée dans la personne de l'ascendant direct de l'intéressé et de celui qui précède. En appel, Mme [N] [G] prétend que son arrière-arrière-grand-mère [M] [T] a vécu en France depuis l'indépendance de l'Algérie jusqu'à son décès survenu le 24 février 1975 à [Localité 4]. Mais, il convient seulement d'apprécier la condition de résidence dans la personne de la mère et de la grand-mère de l'intéressée, Mme [U] [A], née le 3 mars 1929 au regard de leur date de naissance. Or, l'appelante ne verse aucune pièce attestant que l'une ou l'autre aurait fixé sa résidence en France. En tout de cause, le seul acte de décès de [M] [T] indiquant qu'elle est décédée à [Localité 4] n'établit nullement qu'elle avait fixé sa résidence en France.

Par ailleurs, l'appelante n'invoque aucune possession d'état la concernant et la seule production du certificat de nationalité française délivrée à sa mère le 13 novembre 2014 ne suffit pas, en l'absence d'autres éléments, à établir sa possession d'état de Française.

Enfin, contrairement à ce que soutient Mme [N] [G], rien n'empêche de retenir la désuétude à son encontre alors même que sa mère a obtenu un certificat de nationalité le 13 novembre 2014, Mme [N] [G] étant majeure pour être né le 26 septembre 1995 et l'action ne concernant pas sa mère.

Les conditions prévues par l'article 30-3 du code civil étant réunies, Mme [N] [G] n'est donc pas admise à faire la preuve qu'elle a, par filiation, la nationalité française et elle est présumée avoir perdu cette nationalité le 4 juillet 2012.

Le jugement est toutefois infirmé en ce qu'il a déclaré Mme [N] [G] irrecevable à faire la preuve qu'elle a, par filiation, la nationalité française.

M. [B] [G], succombant à l'instance, est condamné aux dépens et ne saurait prétendre à une indemnité au titre des frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

Constate que les formalités prévues par l'article 1043 du code de procédure civile ont été respectées,

Confirme le jugement sauf en ce qu'il a dit que Mme [N] [G], né le 26 septembre 1995 à [Localité 1] (Algérie), irrecevable à faire la preuve qu'elle a, par filiation, la nationalité française,

Statuant à nouveau,

Dit que Mme [N] [G], né 26 septembre 1995 à [Localité 1] (Algérie) n'est pas admise à faire la preuve de ce qu'elle a, par filiation, la nationalité française,

Ordonne la mention prévue par l'article 28 du code civil,

Rejette les autres demandes,

Condamne Mme [N] [G] aux dépens.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 3 - chambre 5
Numéro d'arrêt : 22/05048
Date de la décision : 04/04/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-04-04;22.05048 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award