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07/02/2023 | FRANCE | N°21/14537

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 3 - chambre 5, 07 février 2023, 21/14537


Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 3 - Chambre 5



ARRET DU 07 FEVRIER 2023



(n° , 4 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/14537 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CEF2F



Décision déférée à la Cour : Jugement du 01 juillet 2021 rendu par le tribunal judiciaire de PARIS - RG n° 19/09193





APPELANT



LE MINISTERE PUBLIC pris en la personne de MONSIE

UR LE PROCUREUR GENERAL - SERVICE CIVIL

[Adresse 1]

[Localité 2]



représenté à l'audience par Mme Brigitte RAYNAUD, substitut général





INTIMEE



Madame [P] [S] née le 2...

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 3 - Chambre 5

ARRET DU 07 FEVRIER 2023

(n° , 4 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/14537 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CEF2F

Décision déférée à la Cour : Jugement du 01 juillet 2021 rendu par le tribunal judiciaire de PARIS - RG n° 19/09193

APPELANT

LE MINISTERE PUBLIC pris en la personne de MONSIEUR LE PROCUREUR GENERAL - SERVICE CIVIL

[Adresse 1]

[Localité 2]

représenté à l'audience par Mme Brigitte RAYNAUD, substitut général

INTIMEE

Madame [P] [S] née le 26 décembre 1982 à [Localité 5] (Algérie),

[Adresse 6]

[Adresse 6]

[Localité 5] - ALGERIE

représentée par Me Karima OUELHADJ, avocat au barreau de PARIS, toque : C2558

(bénéficie d'une AIDE JURIDICTIONNELLE TOTALE numéro 2021/051939 du 12/01/2022 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de PARIS)

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 9 décembre 2022, en audience publique, le ministère public et l'avocat de l'intimée ne s'y étant pas opposés, devant Mme Hélène FILLIOL, présidente de chambre, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Hélène FILLIOL, présidente de chambre

M. François MELIN, conseiller

Mme Marie-Catherine GAFFINEL, conseillère

Greffier, lors des débats : Mme Mélanie PATE

ARRET :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Mme Hélène FILLIOL, présidente de chambre et par Mme Mélanie PATE, greffière, présente lors de la mise à disposition.

Vu le jugement rendu le 1er juillet 2021 par le tribunal judiciaire de Paris qui a constaté que l'action est régulière au regard de l'article 1043 du code de procédure civile, déclaré Mme [P] [S] recevable à faire la preuve qu'elle a, par filiation, la nationalité française, débouté le ministère public de l'ensemble de ses demandes, jugé que Mme [P] [S], née le 26 décembre 1982 à [Localité 5] (Algérie), est de nationalité française, ordonné la mention prévue par l'article 28 du code civil et laissé à chaque partie la charge de ses propres dépens dans les conditions propres à l'aide juridictionnelle ;

Vu la déclaration d'appel remise au greffe en date du 16 juillet 2021 et les conclusions notifiées le 14 octobre 2021 par le ministère public qui demande à la cour d'infirmer le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Paris le 1er juillet 2021 et statuant à nouveau, constater que le récépissé prévu par l'article 1043 du code de procédure civile a été délivré, débouter Mme [P] [S] de ses demandes, juger que Mme [P] [S], née le 26 décembre 1982 à [Localité 5] (Algérie), a perdu la nationalité française le 04 juillet 2012, dire qu'elle n'est pas de nationalité française, ordonner la mention prévue par l'article 28 du code civil et la condamner aux dépens ;

Vu les conclusions notifiées le 15 mars 2022 par Mme [P] [S] épouse [O] qui demande à la cour de débouter le ministère public en toutes ses demandes, confirmer le jugement entrepris du 1er juillet 2021 (RG n°19/09193), dire et juger qu'elle est de nationalité française et ordonner la mention prévue par l'article 28 du code civil ;

Vu l'ordonnance de clôture rendue le 25 octobre 2022 ;

MOTIFS :

Il est justifié de l'accomplissement de la formalité prévue par l'article 1043 du code de procédure civile dans sa version applicable à la présente procédure, par la production du récépissé délivré le 19 juillet 2021 par le ministère de la Justice.

Invoquant l'article 18 du code civil, Mme [P] [S] soutient qu'elle est française par filiation maternelle pour être née le 15 mai 1988 à [Localité 5] (Algérie) d'une mère française, Mme [R] [B], née le 1er mars 1954 à [Localité 4], [Localité 3] (Algérie), elle-même née de [F] [Y], née le 07 juillet 1935 à [Localité 3] [Localité 5] (Algérie), laquelle a souscrit une déclaration recognitive de nationalité française n°40.032-DR-64, le 17 septembre 1964 auprès du tribunal d'instance de Saint-Brieuc, enregistrée le 18 janvier 1965.

Comme en première instance, le ministère public lui oppose la désuétude.

L'article 30-3 du code civil dispose que :

« Lorsqu'un individu réside ou a résidé habituellement à l'étranger, où les ascendants dont il tient par filiation la nationalité sont demeurés fixés pendant plus d'un demi-siècle, cet individu ne sera plus admis à faire la preuve qu'il a, par filiation, la nationalité française si lui-même et celui de ses père et mère qui a été susceptible de la lui transmettre n'ont pas eu la possession d'état de Français.

Le tribunal doit dans ce cas constater la perte de la nationalité française dans les termes de l'article 23-6 du code civil en déterminant la date à laquelle la nationalité française a été perdue.»

La présomption irréfragable de perte de la nationalité française par désuétude édictée par l'article 30-3 du code civil suppose que les conditions prévues par le texte précité soient réunies de manière cumulative.

L'application de l'article 30-3 du code civil est en conséquence, subordonnée à la réunion des conditions suivantes : l'absence de résidence en France pendant plus de 50 ans du parent français, l'absence de possession d'état de l'intéressé et de son parent, le demandeur devant en outre résider ou avoir résidé habituellement à l'étranger.

L'article 30-3 du code civil interdit, dès lors que les conditions qu'il pose sont réunies, de rapporter la preuve de la transmission de la nationalité française par filiation, en rendant irréfragable la présomption de perte de celle-ci par désuétude. Édictant une règle de preuve, l'obstacle qu'il met à l'administration de celle-ci ne constitue pas une fin de non-recevoir au sens de l'article 122 du code de procédure civile, de sorte qu'aucune régularisation sur le fondement de l'article 126 du même code ne peut intervenir (Civ 1ère, 13 juin 2019, pourvoi n°18-16.838).

Pour écarter la désuétude invoquée par le ministère public, le tribunal a retenu que pour l'appréciation de la condition de résidence habituelle à l'étranger permettant l'application de l'article 30-3 du code civil, il n'y avait pas lieu de faire de distinction quant au degré d'ascendance et qu'étaient donc également concernés les grands-parents, à condition qu'ils appartiennent à la branche par laquelle est revendiquée la nationalité française, que la grand-mère maternelle de l'intéressée, [F] [Y] avait résidé habituellement en France depuis 1963 et qu'il était ainsi justifié que l'ascendant de l'intéressée dont elle prétendait tenir la nationalité française par filiation n'était pas resté fixé à l'étranger pendant plus de cinquante ans.

Mais, lorsque l'ascendant direct de l'intéressé est né avant le 3 juillet 1962, la condition d'absence de résidence en France pendant plus d'un demi-siècle ne doit être appréciée que dans la personne de celui-ci.

En l'espèce, la mère de Mme [P] [S], Mme [R] [B] est née le 1er mars 1954 à [Localité 4], [Localité 3] en Algérie, et il n'est pas prétendu qu'elle a résidé en France entre le 3 juillet 1962 et le 4 juillet 2012. La condition de résidence à l'étranger pendant plus d'un demi-siècle étant déjà remplie en sa personne, il n'y a pas lieu de prendre en compte la résidence de la grand-mère maternelle de l'intéressée.

Par ailleurs, il n'est pas allégué que Mme [P] [S] réside ou a résidé habituellement en France.

En outre, Mme [P] [S] ne présente ni pour elle ni pour sa mère aucun élément de possession d'état de Français. C'est inutilement qu'elle invoque la possession d'état de sa grand-mère, la condition relative à la possession d'état de Français ne s'appréciant que dans la personne de l'ascendant direct.

Ainsi, elle n'est pas admise à faire la preuve qu'elle a, par filiation, la nationalité française et elle est présumée avoir perdu cette nationalité le 4 juillet 2012.

Le jugement est infirmé.

Succombant à l'instance, Mme [P] [S] est condamnée aux dépens.

PAR CES MOTIFS,

Constate que les formalités prévues par l'article 1043 du code de procédure civile ont été respectées,

Infirme le jugement,

Statuant à nouveau,

Dit que Mme [P] [S], se disant née le 26 décembre 1982 à [Localité 5] (Algérie), n'est pas admise à faire la preuve de ce qu'elle a, par filiation, la nationalité française,

Dit que Mme [P] [S], se disant née le 26 décembre 1982 à [Localité 5] (Algérie), est présumée avoir perdu la nationalité française le 4 juillet 2012,

Ordonne la mention prévue par l'article 28 du code civil,

Condamne Mme [P] [S] aux dépens.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 3 - chambre 5
Numéro d'arrêt : 21/14537
Date de la décision : 07/02/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-02-07;21.14537 ?
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