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18/01/2023 | FRANCE | N°21/13104

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 3 - chambre 1, 18 janvier 2023, 21/13104


Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 3 - Chambre 1



ARRET DU 18 JANVIER 2023



(n° 2023/ , 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/13104 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CEBHT



Décision déférée à la Cour : Jugement du 06 Mai 2021 - Président du TJ de BOBIGNY - RG n° 21/00484





APPELANTE



Madame [D] [T]-[K]

née le 20 Mars 1979 à [Localité 10

]

[Adresse 5]

[Localité 7]



représentée par Me Martine BLANC, avocat au barreau de PARIS, toque : C1216



(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2021/028700 du 29/06...

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 3 - Chambre 1

ARRET DU 18 JANVIER 2023

(n° 2023/ , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/13104 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CEBHT

Décision déférée à la Cour : Jugement du 06 Mai 2021 - Président du TJ de BOBIGNY - RG n° 21/00484

APPELANTE

Madame [D] [T]-[K]

née le 20 Mars 1979 à [Localité 10]

[Adresse 5]

[Localité 7]

représentée par Me Martine BLANC, avocat au barreau de PARIS, toque : C1216

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2021/028700 du 29/06/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de PARIS)

INTIMEES

Madame [G], [L], [F] [K] épouse [S]

née le 06 Janvier 1957 à [Localité 9] (83)

[Adresse 6]

[Localité 1]

représentée par Me Paul MAURIAC, avocat au barreau de PARIS, toque : A0591

S.A.R.L. PSM IMMO, assignée à étude par acte d'huissier du 27.08.2021

ayant son siège social [Adresse 4]

[Localité 8]

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 905 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 29 Novembre 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Isabelle PAULMIER-CAYOL, Conseiller, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Patricia GRASSO, Président

Mme Sophie RODRIGUES, Conseiller

Mme Isabelle PAULMIER-CAYOL, Conseiller

Greffier lors des débats : Mme Emilie POMPON

ARRÊT :

- rendu par défaut

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Mme Patricia GRASSO, Président, et par Mme Emilie POMPON, Greffier.

***

EXPOSE DU LITIGE :

[W] [V] veuve [K] d'une part et son frère [Y] [V] ainsi que l'épouse de ce dernier d'autre part étaient propriétaires indivis d'un pavillon situé [Adresse 3], à concurrence de la moitié des droits indivis pour la première et pour les deux autres de l'autre moitié indivise.

Par deux acte notariés du 29 octobre 2001, [W] [V] a consenti à sa fille, Mme [G] [K] une donation portant sur ses droits indivis dans ce bien immobilier d'une part et Mme [G] [K] a acheté, à titre de licitation faisant cesser l'indivision, à son oncle, [Y] [V] et à son épouse leurs droits indivis sur la propriété de ce bien immobilier, moyennant le prix de 76 224,51 euros d'autre part.

Par ces deux actes, Mme [G] [K] est donc devenue l'unique propriétaire de ce bien immobilier.

Ultérieurement, par acte notarié du 30 novembre 2011, [W] [V] a consenti une seconde donation à Mme [G] [K], portant sur un ensemble immobilier situé [Adresse 2] (93).

[W] [V] est décédée le 19 août 2018, en l'état d'un testament authentique reçu le 27 septembre 2011 instituant sa fille Mme [G] [K] légataire universelle.

La défunte laisse pour lui succéder :

-sa fille, Mme [G] [K],

-ses trois petites-filles : Mme [D] [T], Mme [U] [K], Mme [B] [K], venant en représentation de leur père [Z] [K] décédé en 1992.

Par acte d'huissier des 31 juillet et 3 août 2020, Mme [D] [T] a assigné Mme [G] [K] et la société PSM IMMO agent immobilier devant le président du tribunal judiciaire de Bobigny, selon la procédure accélérée au fond, aux fins notamment d'annuler la vente par licitation du pavillon situé [Adresse 3] (93), d'en interdire la vente et d'interdire la vente de l'ensemble immobilier situé [Adresse 2] (93).

Par jugement réputé contradictoire du 6 mai 2021, la société PSM IMMO n'ayant pas comparu, le tribunal judiciaire de Bobigny a statué dans les termes suivants :

-déclare irrecevables les demandes formées par Mme [D] [T],

-déboute Mme [G] [K] de sa demande de dommages et intérêts,

-rappelle que la décision est de droit assortie de l'exécution provisoire,

-déboute Mme [G] [K] de sa demande au titre des dépens,

-condamne chaque partie à régler ses propres dépens,

-déboute les parties de leurs demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Mme [D] [T] a interjeté appel de ce jugement par déclaration du 9 juillet 2021. L'acte d'appel vise comme chefs expressément critiqués ceux qui ont déclaré ses demandes irrecevables, qui ont statué sur les dépens et sur l'application de l'article 700 du code de procédure civile.

Le 1er septembre 2021 l'affaire a été fixée à bref délai.

Par une ordonnance du 23 février 2022, le président de chambre a constaté l'irrecevabilité des conclusions déposées par Mme [G] [K] le 22 novembre 2021 et prononcé l'irrecevabilité des conclusions, sauf le droit de déférer la présente ordonnance à la cour par application de l'article 916 du code de procédure civile.

Par une ordonnance du 6 octobre 2022, le magistrat de la magistrat de la mise en état a constaté l'irrecevabilité des conclusions déposées par Mme [G] [K] le 26 septembre 2022 et prononcé l'irrecevabilité des conclusions, sauf le droit de déférer la présente ordonnance à la cour.

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 4 juillet 2022, l'appelante demande à la cour de :

-déclarer Mme [D] [T] recevable en son appel,

-déclarer Mme [D] [T] bien fondée en ses demandes,

en conséquence,

-infirmer le jugement rendu le 6 mai 2021 par le tribunal judiciaire de Bobigny,

-ordonner la mise sous scellés du pavillon sis [Adresse 3],

-condamner Mme [G] [K] au paiement de 6 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

-condamner PSM IMMO Stéphane Plaza au paiement de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

-condamner Mme [G] [K] aux entiers dépens de première instance et d'appel.

La société PSM IMMO, intimée, n'a pas constitué avocat.

Pour un plus ample exposé des moyens développés par les parties au soutien de leurs prétentions, il sera renvoyé à leurs écritures susvisées conformément à l'article 455 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 15 novembre 2022.

L'affaire a été appelée à l'audience du 29 novembre 2022.

MOTIFS

Mme [D] [T] expose que, par le jeu des deux donations, d'une légation universelle et d'un rachat de part indivise, l'intégralité du patrimoine immobilier connu d'[W] [V] a été transférée à un seul de ses héritiers, à savoir Mme [G] [K]. Mme [D] [T] rappelle que ces deux donations ont été consenties hors part successorale et avec dispense de rapport et que lors du rachat des parts d'[Y] [V] et de son épouse par Mme [G] [K], les prescriptions de l'article 815-14 du code civil faisant obligation à l'indivisaire qui entend céder ses droits indivis de notifier à ses coïndivisaires par acte extra-judiciaire le prix et les conditions de la cession projetée ainsi que les nom, domicile, profession de la personne qui se propose d'acquérir, n'ont pas été respectées.

Elle accuse également Mme [G] [K] d'avoir vidé les comptes bancaires de la défunte pendant le temps où cette dernière demeurait à son domicile, à son profit ou au profit de sa propre famille et d'avoir commis des faits relevant d'abus de faiblesse à son encontre, ayant déposé plainte à cet effet ; elle précise que sa tante et le mari de cette dernière l'ont empêchée de voir sa grand-mère.

S'agissant du pavillon, Mme [D] [T] expose que celui-ci aurait été donné à bail à M. [A] et à la compagne de ce dernier qui est clerc de notaire de l'étude qui a reçu et dressé l'ensemble des actes de la succession ; elle fait état de sa crainte que le pavillon soit vendu contre sa volonté, les serrures ayant déjà été changées ou que celui-ci soit occupé dans des conditions non contrôlées.

Elle dénonce l'atteinte à la réserve héréditaire qui résulte de ces différents actes.

Elle prétend agir à titre conservatoire en formant une demande de mise sous scellés d'un bien indivis, demande qu'elle fonde sur l'article 815-6 du code civil, lequel entre dans le champ de la procédure accélérée au fond qui autorise le président du tribunal judiciaire à prescrire ou autoriser toutes mesures urgentes que requiert l'intérêt commun.

Sur ce

L'article 481-1 du code de procédure civile dispose que : « A moins qu'il en soit disposé autrement, lorsqu'il est prévu par la loi ou le règlement qu'il est statué selon la procédure accélérée au fond, la demande est formée, instruite et jugée dans les conditions suivantes:

1° La demande est portée par voie d'assignation à une audience tenue aux jour et heure prévus à cet effet ;

2° Le juge est saisi par la remise d'une copie de l'assignation au greffe avant la date fixée pour l'audience, sous peine de caducité de l'assignation constatée d'office par ordonnance du juge, ou, à défaut, à la requête d'une partie ;

3° Le jour de l'audience, le juge s'assure qu'il s'est écoulé un temps suffisant depuis l'assignation pour que la partie assignée ait pu préparer sa défense. La procédure est orale;

4° Le juge a la faculté de renvoyer l'affaire devant la formation collégiale, à une audience dont il fixe la date, qui statuera selon la procédure accélérée au fond ;

5° A titre exceptionnel, en cas d'urgence manifeste à raison notamment d'un délai imposé par la loi ou le règlement, le président du tribunal, statuant sur requête, peut autoriser à assigner à une heure qu'il indique, même les jours fériés ou chômés ; 6° Le jugement est exécutoire de droit à titre provisoire dans les conditions prévues aux articles 514-1 à 514-6;

7° La décision du juge peut être frappée d'appel à moins qu'elle n'émane du premier président de la cour d'appel ou qu'elle n'ait été rendue en dernier ressort en raison du montant ou de l'objet de la demande.

Le délai d'appel ou d'opposition est de quinze jours. »

Il résulte de cet article qui déroge aux règles générales de procédure applicables en particulier devant le tribunal judiciaire, que, pour qu'une affaire soit instruite et jugée selon la procédure accélérée au fond, un texte spécial doit le prévoir.

Ainsi, aux termes de l'article 1380 du code de procédure civile, les demandes formées en application des articles 772, 794, 810-5, 812-3, 813-1, 813-7, 813-9 et du deuxième alinéa de l'article 814, des articles 815-6, 815-7, 815-9 et 815-11 du code civil sont portées devant le président du tribunal judiciaire qui statue selon la procédure accélérée au fond.

Le premier juge a déclaré les demandes de Mme [D] [T] irrecevables aux motifs que, fondées sur les articles 815-3, 815-14, 815-16, 909, 919-2 et 921 et suivants du code civil, elles n'entraient pas dans le champ d'application de la procédure accélérée au fond défini par l'article 1380 du code civil, que ses demandes d'annulation d'actes authentiques de vente et de libéralités, d'interdiction de ventes de biens immobiliers, d'expulsion et de renvoi devant une autre chambre pour statuer sur la liquidation et le partage de la succession d'[W] [V] ne constituaient pas des demandes relevant des textes visés par l'article 1380 du code de procédure civile pouvant faire l'objet d'une procédure accélérée au fond, et que le moyen défendu par Mme [D] [T] selon lequel elle formait des demandes de mesures conservatoires était inopérant puisqu'aucune de ces demandes n'était prévue en matière successorale.

Devant la cour, Mme [D] [T], qui se fonde sur l'article 815-6 du code civil selon lequel « le président du tribunal judiciaire peut prescrire toutes mesures urgentes que requiert l'intérêt commun », fait valoir que la mise sous scellé d'un bien indivis « constitue indéniablement une mesure urgente servant l'intérêt commun des héritiers ».

En premier lieu, l'article susvisé dépend du chapitre VII « Sur le régime légal de l'indivision » ; or par l'effet du legs universel consenti par voie testamentaire à Mme [G] [K], cette dernière a vocation à recueillir l'intégralité des biens dépendant la succession d'[W] [V] de sorte que les biens dépendant de la succession ne sont pas soumis au partage et ne sont donc pas indivis entre les héritiers de cette dernière. Ce texte n'est en conséquence pas applicable au règlement de la succession d'[W] [V].

En second lieu, le terme sceller signifie, selon la définition du Petit Robert, marquer d'un sceau pour authentiquer ou fermer un bien. Ainsi, les portes d'un local peuvent être scellées pour éviter notamment la distraction ou la dissipation des biens et effets qu'il contient.

L'apposition des scellés en matière successorale relève des mesures conservatoires, lesquelles font l'objet de la section première du Titre II sur les successions et les libéralités; cette section est composée des articles 1304 à 1326 du code de procédure civile ; aux termes de l'article 1304, ces mesures conservatoires qui sont accomplies par le ministère d'un huissier de justice sont au nombre de deux ; elles concernent les biens trouvés sur place après le décès d'une personne ; elles consistent à apposer des scellés et lorsque la consistance des biens laissés sur place ne le justifie pas, à dresser un état descriptif du mobilier ; destinées à empêcher la distraction ou la dispersion des biens meubles dépendant d'une succession, elles ne concernent pas les immeubles par nature comme le bien dont s'agit, lesquels ne sont pas susceptibles de dissipation.

De surcroît, en application de l'article 1304, la demande en apposition de scellés est portée devant le président du tribunal judiciaire qui statue par ordonnance sur requête.

Sous couvert de mesures urgentes, la demande de Mme [D] [T] de mise sous scellés du pavillon sis [Adresse 3] tend à empêcher Mme [G] [K] de prendre tout acte juridique sur ce bien et d'user en conséquence des prérogatives de propriétaire qu'elle tient de sa double qualité de donataire et de légataire universel. Plus précisément, l'appelante veut empêcher Mme [G] [K] de vendre le bien et même de le donner en location.

Or, Mme [D] [T] ne justifie d'aucun texte donnant compétence au président du tribunal judiciaire statuant selon la procédure accélérée au fond pour que soient ordonnées des mesures portant ainsi directement atteinte au droit de propriété du légataire universel, Mme [G] [K] étant de surcroît donataire du bien en question depuis plus de seize ans au décès d'[W] [V].

Partant, pour les motifs qui précèdent qui complètent ceux retenus par le premier juge, le jugement est confirmé en ce qu'il a déclaré les demandes de Mme [D] [T] irrecevables, sa demande de mettre sous scellés le pavillon sis [Adresse 3] présentée devant la cour étant tout aussi irrecevable.

Les demandes de Mme [D] [T] étant irrecevables, il n'est pas statué au fond.

Sur les demandes accessoires

Aux termes de l'article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge de l'autre partie.

Mme [D] [T] qui échoue en son appel en supportera les dépens.

En application de l'article 700 du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée ; il peut même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations dire qu'il n'y a pas lieu à condamnation.

Etant tenue aux dépens, Mme [D] [T] voit ses demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile rejetées.

PAR CES MOTIFS

Confirme le jugement rendu le 6 mai 2021 selon la procédure accélérée au fond par le président du tribunal judiciaire de Bobigny en toutes ses dispositions dévolues à la cour ;

Y ajoutant,

Déclare irrecevable la demande de Mme [D] [T] tendant à voir ordonner la mise sous scellés du pavillon sis [Adresse 3] ;

Déboute Mme [D] [T] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne Mme [D] [T] aux dépens d'appel.

Le Greffier, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 3 - chambre 1
Numéro d'arrêt : 21/13104
Date de la décision : 18/01/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-01-18;21.13104 ?
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