Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE
délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 4 - Chambre 4
ARRET DU 17 JANVIER 2023
(n° , 5 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/06883 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CBZ4F
Décision déférée à la Cour : Jugement du 03 Mars 2020 -Tribunal Judiciaire de PARIS - RG n° 19/009543
APPELANTS
Monsieur [E] [K]
[Adresse 1]
[Localité 5]
Représenté par Me Michel GUIZARD de la SELARL GUIZARD ET ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0020
Monsieur [J] [K] Venant aux droits de sa mère décédée
[Adresse 1]
[Localité 5]
Représenté par Me Michel GUIZARD de la SELARL GUIZARD ET ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0020
Madame [N] [K] Venant aux droits de sa mère décédée
[Adresse 1]
[Localité 5]
Représenté par Me Michel GUIZARD de la SELARL GUIZARD ET ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0020
INTIMEE
Madame [O] [T] épouse [G] [Z]
[Adresse 2]
[Localité 5]
Représentée par Me Leila MASSERA, avocat au barreau de PARIS, toque : E1310
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 07 Novembre 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Marie MONGIN, Conseiller, chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :
M. Michel CHALACHIN, président
Mme Marie MONGIN, conseiller
Mme Anne-Laure MEANO, conseiller
Greffier, lors des débats : Mme Gisèle MBOLLO
ARRET :
- Contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Michel CHALACHIN, Président de chambre et par Gisèle MBOLLO, Greffière chambre 4-4, présente lors de la mise à disposition.
EXPOSÉ DU LITIGE
Par acte sous seing privé en date du 8 juillet 2004, à effet du 10 juillet 2004, Mme [L] [F] [V] a donné à bail à Mme [O] [T] épouse [G] [Z] un logement situé au [Adresse 3] dans le [Localité 4] moyennant un loyer de 1 130 euros outre 175,32 euros de provision sur charges.
Mme [L] [F] [V] est décédée et ses héritiers MM. [H] [F] [V], [X] [F] [V], [D] [M] [F] [V] et [W] [M] [F] [V] (ci-après les consorts [F] [V]) ont, par l'intermédiaire de leur notaire, informé Mme [G] [Z], par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 26 décembre 2018, de leur intention de vendre les locaux objet du bail à un prix de 500 000 euros et de son droit de préemption, avec la précision que le bail ne serait pas remis en cause que ce droit soit ou non exercé, en application de l'article 10 de la loi du 31 décembre 1975.
Mme [G] [Z] n'a pas exprimé son intention de se porter acquéreur de ce logement dans le délai de deux mois qui lui était offert.
Le 8 janvier 2019,les consorts [F] [V] ont fait délivrer à Mme [G] [Z] un congé pour motif légitime et sérieux « lié à la nécessité de rénover, restructurer, améliorer et mettre aux normes l'appartement », à effet du 9 juillet 2019.
Par acte notarié en date du 15 mai 2019, les consorts [F] [V] ont vendu le bien faisant l'objet du bail à M. [E] [K] et Mme [Y] [B] épouse [K], lesquels ont, par courrier du même jour, indiqué à Mme [G] [Z] vouloir se prévaloir du congé délivré par les précédents propriétaires.
Par exploit d'huissier en date du 11 juillet 2019, M. et Mme [K] ont fait assigner Mme [G] [Z] devant le tribunal d'instance de Paris afin d'obtenir la validation du congé pour motif sérieux et légitime, l'expulsion de Mme [G] [Z] et sa condamnation à leur verser une indemnité d'occupation.
Par jugement du 3 mars 2020, le juge des contentieux de la protection a ainsi statué :
Annule le congé délivré à Mme [G] [Z] le 8 janvier 2019 concernant le bail d'habitation en date du 8 juillet 2004 portant sur le logement situé au [Adresse 3], en raison de l'absence de justification d'un motif légitime et sérieux,
Rejette en conséquence l'ensemble des demandes de M. et Mme [K],
Condamne M. et Mme [K] aux dépens de l'instance,
Ordonne l'exécution provisoire.
Par déclaration reçue au greffe le 4 juin 2020, M. et Mme [K] ont interjeté appel de cette décision par la voie électronique.
[Y] [B] épouse [K] étant décédée le 9 novembre 2020, ses héritiers, M. [J] [K] et Mme [N] [K] sont intervenus à l'instance aux droits de leur mère.
Dans leurs dernières conclusions notifiées le 6 octobre 2022, les consorts [K], demandent à la cour de :
- infirmer le jugement en date du 3 mars 2020 rendu par le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Paris,
- statuant à nouveau, juger que le congé délivré à Mme [G] [Z] le 8 janvier 2019 est justifié par un motif légitime et sérieux,
- valider en conséquence le congé délivré à Mme [G] [Z] le 8 janvier 2019,
- en conséquence, constater que Mme [G] [Z] est déchue de plein droit de tout titre d'occupation sur l'appartement situé [Adresse 3], depuis le 9 juillet 2019 à minuit, date d'effet du congé,
- en conséquence, ordonner l'expulsion de Mme [G] [Z] ainsi que celle de tout occupant de son chef avec l'aide d'un huissier, d'un serrurier et de la force publique si besoin est,
- condamner Mme [G] [Z] à payer aux consorts [K] à compter du 10 juillet 2019 une indemnité d'occupation égale au double du montant du loyer outre les charges jusqu'à la libération complète des lieux,
- ordonner la suppression du délai de deux mois du commandement de quitter les lieux en application des dispositions de l'article L. 412-1 du code des procédures civiles d'exécution,
- condamner Mme [G] [Z] à la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.
Par conclusions notifiées le 13 octobre 2020, Mme [G] [Z] demande à la cour de :
- la recevoir en ses écritures,
- l'y déclarer bien fondée,
- en conséquence, confirmer purement et simplement le jugement entrepris en ce qu'il a annulé le congé délivré à Mme [G] [Z] le 8 janvier 2019 en raison de l'absence de justification d'un motif sérieux et légitime, rejeté l'ensemble des demandes des consorts [K], condamné les consorts [K] aux entiers dépens,
- condamner les consorts [K] à payer à Mme [G] [Z] la somme de 2 400 euros et aux entiers dépens.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 11 octobre 2022.
SUR CE
Considérant qu'il n'est pas contesté que la nécessité d'effectuer des travaux de rénovation d'un logement, travaux incompatibles avec l'occupation de celui-ci, caractérise un motif légitime et sérieux au sens de l'article 15 de la loi du 6 juillet 1989 ; que pour annuler le congé délivré à Mme [G] [Z], le tribunal a considéré que la réalité et le sérieux du projet de réfection et de mise aux normes de l'appartement litigieux étaient insuffisamment établis ;
Considérant cependant que le congé délivré le 8 janvier 2019, visant le dossier des diagnostics techniques établi le 20 février 2018, précisait de façon détaillée les travaux devant être réalisés dans ce logement situé dans un immeuble construit en 1960, pour répondre aux normes actuelles, dans les termes suivants :
« Rénovation complète de l'appartement nécessitant sa libération en raison de la nature et de l'importance des travaux rendus nécessaires au vu notamment du dossier des diagnostics techniques établi le 20 février 2018, savoir :
- Réfection des installations électriques (Emportant mise aux normes),
- Démantèlement des installation de gaz naturel ( Emportant mise aux normes),
- Réfection des installations sanitaires (Emportant mise aux normes),
- Amélioration de la performance énergétique des lieux loués par un doublage des murs intérieurs, par la réfection des menuiseries extérieures (Double vitrage, isolation thermique et isolation phonique) ainsi que pose de volets (sur rue) et de persiennes (sur cour),
- Modification de la configuration des lieux loués ( Création d'une cuisine ouverte sur la pièce de vie),
- Réfection subséquente des embellissements (Sols, murs et plafonds) » ;
Que le rapport de diagnostic établi le 20 février 2018 indiquait s'agissant du gaz, que la personne en charge du diagnostic avait dû procéder à la fermeture de l'arrivée du gaz en raison d'anomalies dont l'une présentait un risque grave ; que s'agissant de l'électricité plusieurs anomalies, outre la vétusté générale des installations, étaient relevées, notamment dans les pièces contenant une douche ou baignoire, ou bien le défaut d'alimentation à la terre, la personne ayant établi le diagnostic précisant qu'elle n'avait pu examiner l'ensemble du réseau électrique ;
Que s'agissant de la performance énergétique, celle-ci était décrite comme mauvaise en raison de la surface importante de baies à simple vitrage sans volets ;
Considérant que la présentation faite par l'architecte de son projet de réhabilitation de l'appartement confirme la nécessité d'y effectuer des travaux importants et que ces travaux, dont la durée prévisible est de 14 semaines, ne peuvent être réalisés si l'appartement est habité ; que des devis sont produits qui corroborent la réalité, la légitimité et le sérieux du motif du congé ;
Qu'en outre, la circonstance que ce congé ait été délivré par les anciens propriétaires postérieurement au courrier adressé à la locataire pour l'informer de leur intention de vendre cet appartement n'est pas de nature à avoir une quelconque incidence sur la validité dudit congé dès lors que les bailleurs ont découvert par les diagnostics qu'ils ont dû faire établir pour proposer leur bien à la vente l'état de cet appartement loué depuis quinze ans et que, si cet appartement n'avait pas trouvé preneur en l'état, ils auraient dû faire procéder eux-mêmes à ces travaux ;
Qu'enfin, il sera relevé surabondamment, que les consorts [K] justifient disposer de fonds pour faire réaliser les travaux envisagés ;
Considérant, en conséquence, que le jugement sera infirmé ; que le congé sera jugé valide et Mme [G] [Z] occupante sans droit ni titre du logement dont il s'agit depuis le 10 juillet 2019 ; que son expulsion sera ordonnée, à défaut de départ volontaire, sans qu'il y ait lieu de supprimer le délai de deux mois prévu par l'article L. 412-1 du code des procédures civiles d'exécution ;
Que Mme [G] [Z] sera également condamnée à verser une indemnité d'occupation à compter du 10 juillet 2019 ; qu'il doit être rappelé à cet égard que l'indemnité d'occupation revêt une nature mixte, indemnitaire et compensatoire, correspondant à la valeur équitable de l'occupation des lieux et assurant la réparation du préjudice résultant d'une occupation sans droit ni titre ; qu'il convient en l'occurrence de fixer l'indemnité d'occupation au montant du loyer augmenté des charges qui aurait été dû si le bail s'était poursuivi ;
Considérant quant aux mesures accessoires que Mme [G] [Z] sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel ainsi, qu'en équité, à verser aux consorts [K] la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
statuant publiquement par mise à disposition au greffe de l'arrêt contradictoire,
- Infirme le jugement entrepris,
Statuant à nouveau et ajoutant :
- Valide le congé délivré à Mme [O] [G] [Z] née [T] le 8 janvier 2019 relatif au logement sis à [Localité 4], [Adresse 3],
- Constate que Mme [O] [G] [Z] née [T] est occupante sans droit ni titre dudit logement depuis le 10 juillet 2019,
- Ordonne, à défaut de départ volontaire, son expulsion ainsi que celle de tout occupant de son chef, avec le concours de la force publique et d'un serrurier dans le respect du délai de deux mois à compter du commandement de quitter les lieux, prévu par l'article L. 412-1 du code des procédures civiles d'exécution,
- Condamne Mme [O] [G] [Z] née [T] à verser à MM. [E] et [J] [K], et Mme [N] [K], pris ensemble, une indemnité mensuelle d'occupation égale au montant du loyer et des charges qui aurait été dû si le bail s'était poursuivi, et ce jusqu'à la libération des lieux,
- Déboute les parties de leurs prétentions plus amples ou contraires,
- Condamne Mme [O] [G] [Z] née [T] à verser à MM. [E] et [J] [K], et Mme [N] [K], pris ensemble, la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- Condamne Mme [O] [G] [Z] née [T] aux dépens de première instance et d'appel.
Le Greffier Le Président