Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE
délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 3 - Chambre 5
ARRET DU 17 JANVIER 2023
(n° , 4 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/03518 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CBQKZ
Décision déférée à la Cour : Jugement du 06 février 2020 rendu par le tribunal judiciaire de PARIS - RG n° 19/01352
APPELANT
LE MINISTERE PUBLIC pris en la personne de MONSIEUR LE PROCUREUR GENERAL - SERVICE CIVIL
[Adresse 1]
[Adresse 1]
représenté à l'audience par Mme M. D. PERRIN, substitut général
INTIMEE
Madame [H] [F] née le 26 mai 1995 à [Localité 4] (Mauritanie),
[Adresse 2]
[Adresse 2]
représentée par Me Nicole ANNONCIA, avocat au barreau de PARIS, toque : E1405
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 24 novembre 2022, en audience publique, le ministère public et l'avocat de l'intimée ne s'y étant pas opposés, devant M. François MELIN, conseiller, chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Mme Hélène FILLIOL, présidente de chambre
M. François MELIN, conseiller
Mme Marie-Catherine GAFFINEL, conseillère
Greffier, lors des débats : Mme Mélanie PATE
ARRET :
- contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Mme Hélène FILLIOL, présidente de chambre et par Mme Mélanie PATE, greffière, présente lors de la mise à disposition.
Vu le jugement en date du 6 février 2020 du tribunal judiciaire de Paris qui a constaté que la procédure est régulière au regard de l'article 1043 du code de procédure civile, jugé que Mme [H] [F], née le 26 mai 1995 à [Localité 4] (Mauritanie), est française, ordonné la mention prévue par l'article 28 du code civil, débouté Mme [H] [F] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile et laissé à chaque partie la charge de ses propres dépens ;
Vu la déclaration d'appel du 17 février 2020 et les conclusions signifiées le 15 mai 2020, par lesquelles le procureur général demande à la cour de constater que le récépissé de l'article 1043 a été délivré, infirmer le jugement et statuant à nouveau, constater l'extranéité de l'intimée et ordonner la mention prévue à l'article 28 du code civil ;
Vu les conclusions notifiées le 8 décembre 2020 par Mme [H] [F] qui demande à la cour de débouter le ministère public, confirmer le jugement, et condamner le Trésor public à lui verser la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'à payer les entiers dépens ;
Vu l'ordonnance de clôture rendue le 7 décembre 2021 ;
MOTIFS
Il est justifié de l'accomplissement de la formalité prévue par l'article 1043 ancien du code de procédure civile dans sa rédaction applicable à la présente instance par la production du récépissé délivré le 6 mai 2020 par le ministère de la Justice.
Invoquant l'article 18 du code civil, Mme [H] [F], se disant née le 26 mai 1995 à [Localité 4] (Mauritanie), soutient qu'elle est française par filiation paternelle pour être née de M. [Z] [W] [F], né le 2 janvier 1975 à [Localité 4], qui l'a reconnue le 10 juin 2003 à la mairie de [Localité 3], celui-ci étant le fils de M. [W] [C] [F], né le 20 février 1936 à [Localité 4], de nationalité française pour avoir fixé son domicile de nationalité en France lors de l'indépendance de la Mauritanie.
En application de l'article 30 alinéa 1er du code civil, il appartient à Mme [H] [F] qui revendique la nationalité française d'en rapporter la preuve, dès lors qu'elle n'est pas titulaire d'un certificat de nationalité française délivré à son nom conformément aux dispositions des articles 31 et suivants du code civil.
Mme [H] [F] doit notamment établir la nationalité française de son grand-père revendiqué, M. [W] [C] [F].
En premier lieu, Mme [H] [F] indique que son grand-père s'est vu délivrer un certificat de nationalité française par le greffier en chef du tribunal d'instance de Clichy La Garenne le 19 septembre 1995. Toutefois, la circonstance que son grand-père soit titulaire d'un certificat de nationalité française ne la dispense pas d'apporter la preuve de la nationalité française de celui-ci, ce certificat de nationalité française n'ayant pas d'effet quant à la charge de la preuve qui repose sur elle.
En deuxième lieu, Mme [H] [F] soutient que la nationalité française de son grand-père a été établie judiciairement de manière implicite par un jugement du tribunal de grande instance de Nanterre du 13 juin 1997 qui a annulé son second mariage en sa qualité de français. Cependant, si ce jugement indique dans ses motifs que M. [W] [C] [F] est de nationalité française, il se borne, dans son dispositif, à prononcer la nullité du mariage célébré le 9 février 1980 avec Mme [P] [M], de sorte qu'il n'a pas autorité de chose jugée quant à la nationalité de M. [W] [C] [F].
En troisième lieu, Mme [H] [F] produit le relevé de carrière de son grand-père, dont elle déduit que ce dernier se trouvait en France dès 1958. La cour relève certes que ce relevé de carrière fait état de la validation de quatre trimestres par an de 1958 à 1967, de trois trimestres en 1968 puis d'aucune validation à compter de 1969. Néanmoins, il y a lieu de rappeler, de manière générale, que les effets sur la nationalité de l'accession à l'indépendance des anciens territoires d'Afrique (hors Algérie, Mayotte et Territoire des Afars et des Issas), sont régis par la loi n° 60-752 du 28 juillet 1960 et par le chapitre VII du titre 1er bis du livre 1er du code civil ; et qu'il en résulte qu'ont conservé la nationalité française, notamment, les originaires de ces territoires qui avaient établi leur domicile hors de l'un des Etats de la Communauté lorsqu'ils sont devenus indépendants, soit le 28 novembre 1960 en ce qui concerne la Mauritanie. Il y a également lieu de rappeler que le domicile de nationalité s'entend du lieu de résidence effective, présentant un caractère stable et permanent et coïncidant avec le centre des occupations professionnelles et des attaches familiales. Or, en l'espèce, Mme [H] [F] se borne à produire ce relevé de carrière, sans fournir aucun autre élément démontrant que son grand-père avait également établi en France ses attaches familiales. En outre, il résulte des pièces produites aux débats que son grand-père s'est marié en Mauritanie le 2 août 1960 avec à Mme [L] [U] [Localité 4] puis une seconde fois le 9 février 1980 à [Localité 4] avec Mme [P] [M], ce dont il résulte que même s'il travailla en France de 1958 à 1968, il a maintenu ses attaches familiales en Mauritanie, ce dont il faut déduire qu'il n'a pas établi son domicile de nationalité en France.
Ainsi, Mme [H] [F] ne démontre pas la nationalité française de son grand-père.
Par ailleurs, elle ne démontre pas non plus la nationalité française de son père, M. [Z] [W] [F]. Elle se borne en effet à indiquer qu'il s'est vu délivrer un certificat de nationalité française le 11 avril 2002 par le greffier en chef du tribunal d'instance de Saine-Denis. Or, d'une part, ce certificat a été délivré au titre d'une nationalité par filiation paternelle. D'autre part, il a été précédemment indique que la production du certificat de nationalité d'un ascendant n'a pas d'effet quant à la charge de la preuve de la nationalité française.
Le jugement est donc infirmé, en ce qu'il a jugé que Mme [H] [F] est française.
Mme [H] [F], qui succombe, est condamnée aux dépens. Sa demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile est rejetée.
PAR CES MOTIFS
Constate que le récépissé prévu par l'article 1043 du code de procédure civile a été délivré ;
Infirme le jugement ;
Statuant à nouveau,
Juge que Mme [H] [F], se disant née le 26 mai 1995 à [Localité 4] (Mauritanie), n'est pas de nationalité française ;
Ordonne la mention prévue par l'article 28 du code civil ;
Rejette la demande formée par Mme [H] [F] au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne Mme [H] [F] aux dépens.
LA GREFFIERE LA PRESIDENTE