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30/11/2022 | FRANCE | N°21/17835

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 2 - chambre 7, 30 novembre 2022, 21/17835


REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 2 - Chambre 7



ARRET DU 30 NOVEMBRE 2022



(n° 30/2022, 4 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/17835 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CEO53



Décision déférée à la cour : Jugement du 6 octobre 2021 -TJ hors JAF, JEX, JLD, J.EXPRO, JCP de PARIS (17è chbre Presse-civile) RG n° 19/14713





APPELANTE



Madame [Y] [C]

[Adresse 6]

[Localité 4

] - BELGIQUE

née le [Date naissance 1] 1987 à [Localité 5]



Représentée par Maître Anne GRAPPOTTE-BENETREAU de la SCP GRAPPOTTE BENETREAU, avocats associés, avocat au barreau de PARIS, toque :...

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 2 - Chambre 7

ARRET DU 30 NOVEMBRE 2022

(n° 30/2022, 4 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/17835 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CEO53

Décision déférée à la cour : Jugement du 6 octobre 2021 -TJ hors JAF, JEX, JLD, J.EXPRO, JCP de PARIS (17è chbre Presse-civile) RG n° 19/14713

APPELANTE

Madame [Y] [C]

[Adresse 6]

[Localité 4] - BELGIQUE

née le [Date naissance 1] 1987 à [Localité 5]

Représentée par Maître Anne GRAPPOTTE-BENETREAU de la SCP GRAPPOTTE BENETREAU, avocats associés, avocat au barreau de PARIS, toque : K111, avocat postulant

Assistée de Maître Eric MORAIN, avocat au barreau de PARIS, toque : P298, substitué par Maître Myriam MAYEL, avocat au barreau de PARIS, toque : P298, avocat plaidant

INTIMEE

S.A.S.U. LAGARDERE MEDIA NEWS prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Maître Jeanne BAECHLIN de la SCP Jeanne BAECHLIN, avocat au barreau de PARIS, toque : L34, avocat postulant

Assistée de Maître Christophe BIGOT, avocat au barreau de PARIS, toque : W10, avocat plaidant

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 26 octobre 2022, en audience publique, devant la cour composée de :

M. Jean-Michel AUBAC, Président

Mme Anne RIVIERE, Assesseur

Mme Anne CHAPLY, Assesseur

qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l'audience par M. [S] dans les conditions prévues par l'article 804 du code de procédure civile.

Greffier, lors des débats : Mme Margaux MORA

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Jean-Michel AUBAC, Président, et par Margaux MORA, Greffier, présente lors de la mise à disposition.

LES FAITS':

1. Par acte d'huissier du 21'novembre 2019, Mme'[Y] [C] a fait assigner la société LAGARDERE MEDIA NEWS ' éditrice du site www.lejdd.fr ' devant le tribunal, judiciaire de Paris, sur le fondement des articles'9 du code civil et 8.1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, au motif qu'il aurait été porté atteinte au respect dû à sa vie privée, à son droit à l'image et à sa dignité dans l'article «'[W] [U] visé par une plainte pour viol'» et la photographie l'illustrant, publié le 19'mai 2018 sur le site internet du Journal du Dimanche, et a demandé au tribunal':

d'ordonner le retrait de l'article et de la photographie, sous astreinte de 800'euros par jour de retard dans le délai de 15 jours à compter de la signification de la décision';

de se réserver la liquidation de l'astreinte';

d'ordonner la publication de la décision à intervenir en page d'accueil du site www.jdd.fr dans un délai de 15 jours suivant la signification de la décision à intervenir';

de condamner la société défenderesse à lui verser la somme de 15'000'euros en réparation de son préjudice moral';

de condamner la société défenderesse à lui verser la somme de 10'000'euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile';

de condamner la société défenderesse aux entiers dépens dont distraction au profit de Maître LARATTE.

2. Par jugement du 6'octobre 2021, le tribunal judiciaire de Paris a,

débouté Mme'[C] de l'ensemble de ses demandes,

laissé à la charge de chacune des parties les frais exposés par elles au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

condamné Mme'[C] aux dépens et débouté les parties du surplus de leurs demandes.

3. Mme'[C] a interjeté appel de ce jugement le 11'octobre 2021.

Devant la cour,

4. Par conclusions notifiées par voie électronique le 26'septembre 2022, Mme'[C] demande à la cour d'infirmer le jugement entrepris et, statuant à nouveau, de,

constater l'atteinte portée à sa vie privée par la première divulgation de faits relevant de la sphère privée,

constater l'atteinte portée à son droit à l'image par le JOURNAL DU DIMANCHE, propriété de la société LAGARDERE MEDIA NEWS,

ordonner le retrait de l'article intitulé «'[W] [U] VISÉ PAR UNE PLAINTE POUR VIOL'» et de la photographie litigieuse du site du JOURNAL DU DIMANCHE sous astreinte de 800'€ (huit cents euros) par jour de retard dans un délai de 15 (quinze) jours à compter de la signification de la décision,

dire que la cour se réserve la liquidation de l'astreinte,

ordonner la publication de la décision à intervenir en page d'accueil du site www.jdd.fr dans un délai de 15 jours suivant la signification de la décision à intervenir,

condamner LAGARDERE MEDIA NEWS au paiement de 15'000'€ (quinze mille euros) au titre de dommages et intérêts à raison du préjudice moral subi par Madame [Y] [C],

condamner LAGARDERE MEDIA NEWS au paiement de la somme de 10'000'€ (dix mille euros) au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile, ainsi qu'au paiement des dépens, conformément à l'article 699 du Code de Procédure Civile dont distraction au profit de Maître Anne GRAPPOTTE-BENETREAU.

5. La SAS LAGARDERE MEDIA NEWS, par conclusions notifiées par voie électronique le 16'septembre 2022, demande à la cour, à titre principal, de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté Mme'[C] de l'ensemble de ses demandes.

À titre subsidiaire, elle lui demande que le préjudice ne soit pas évalué à une somme supérieure à l'euro symbolique.

En toutes hypothèses, elle conclut au rejet des demandes de Mme'[C] et à sa condamnation au paiement de la somme de 3'000'euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.

6. L'ordonnance de clôture a été rendue le 28'septembre 2022.

7. L'affaire a été plaidée à l'audience du 26'octobre 2022, à l'issue de laquelle il a été indiqué aux parties que la décision était mise en délibéré et serait rendue le 30 novembre 2022 par mise à disposition au greffe.

SUR CE,

8. Par des motifs pertinents que la cour adopte, le tribunal a exactement retenu qu'aucune atteinte illégitime à la vie privée ou au droit à l'image de Mme'[C] n'était caractérisée et qu'elle devait, en conséquence, être déboutée de l'ensemble de ses demandes.

9. En effet, après avoir relevé que le droit au respect de la vie privée, protégé par l'article 9 du code civil, et le droit à la liberté d'expression ont la même valeur normative et qu'il appartient au juge saisi de mettre ces droits en balance en fonction des intérêts en jeu et de privilégier la solution la plus protectrice de l'intérêt le plus légitime, les premiers juges ont exactement retenu que l'article s'inscrit dans un débat d'intérêt général majeur relatif aux comportements à connotation sexuelle et non consentis intervenant dans le cadre de relations professionnelles.

10. L'article, loin de chercher à satisfaire «'la curiosité d'un certain lectorat'», vise à informer le public d'une nouvelle plainte un viol commis dans le milieu du cinéma, impliquant un producteur mondialement connu, sur fond d'un «'chantage à l'emploi dans la perspective de sa carrière'».

11. Par ailleurs, l'article adopte un ton particulièrement neutre ayant soin d'employer le conditionnel et se conclut sur les interrogations du milieu du cinéma sur d'éventuelles plaintes susceptibles d'être déposées par d'autres actrices.

12. En outre, le jdd.fr n'est pas à l'origine de la divulgation des faits, l'article rappelant que l'information avait été révélée par Europe 1.

13. Concernant l'atteinte portée au droit à l'image de Mme'[C], la cour relève que la photographie illustrant l'article ne porte nullement atteinte au respect de la dignité de l'appelante et qu'il ne peut être soutenu qu'elle «'donne l'impression d'avoir été prise non posée lors d'une sortie du couple'» ' comme le soutient l'appelante dans ses conclusions ', dès lors qu'elle est assortie de la légende suivante': «'[W] [U] et [I] lors d'une avant-première du dernier 'Taxi' (Abaca)'», peu important que la photographie acquise auprès de l'agence Abaca ait été recentrée sur M. [U] et Mme'[C].

14. C'est donc à juste titre que les premiers juges ont retenu que la photographie litigieuse ' qui illustre un article qui par son contenu et le contexte de sa publication participe à un débat d'intérêt général ', ne porte pas atteinte au droit à l'image de l'appelante.

15. Il est équitable de rejeter les demandes présentées sur le fondement des dispositions du code de procédure civile.

16. Mme'[C], qui succombe, sera condamnée aux dépens.

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Statuant publiquement, par arrêt contradictoire, après en avoir délibéré conformément à la loi,

Confirme le jugement entrepris';

Y ajoutant,

Rejette les demandes présentées sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne Mme'[Y] [C] aux dépens.

LE PRÉSIDENT LE GREFFIER


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 2 - chambre 7
Numéro d'arrêt : 21/17835
Date de la décision : 30/11/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-11-30;21.17835 ?
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