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24/11/2022 | FRANCE | N°20/000944

France | France, Cour d'appel de Paris, H0, 24 novembre 2022, 20/000944


Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées aux parties le : République française
Au nom du Peuple français

COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 4 - Chambre 9 - B

ARRET DU 24 Novembre 2022
(no 210 , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S No RG 20/00094 - No Portalis 35L7-V-B7E-CBTMS

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 26 Septembre 2019 par le tribunal d'instance de PARIS RG no 11-18-210960

APPELANT

Monsieur [V] [R] (créancier-bailleur : indemnités d'occupation impayées)
[Adresse 1]
[LocalitÃ

© 4]
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2019/052516 du 29/11/2019 accordée par le bureau d'aide jurid...

Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées aux parties le : République française
Au nom du Peuple français

COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 4 - Chambre 9 - B

ARRET DU 24 Novembre 2022
(no 210 , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S No RG 20/00094 - No Portalis 35L7-V-B7E-CBTMS

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 26 Septembre 2019 par le tribunal d'instance de PARIS RG no 11-18-210960

APPELANT

Monsieur [V] [R] (créancier-bailleur : indemnités d'occupation impayées)
[Adresse 1]
[Localité 4]
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2019/052516 du 29/11/2019 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de PARIS)
non comparant représenté par Me Laurent SIDOBRE, avocat au barreau de PARIS, toque : D0514

INTIMES

Monsieur [D] [T] (débiteur)
[Adresse 2]
[Localité 3]
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2022/014211 du 20/05/2022 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de PARIS)
comparant en personne, assisté de Me Sophie CHHU, avocat au barreau de PARIS, toque : E0342

SOCIÉTÉ GENERALE (solde débiteur : 013663 0301000051825892)
ITIM/PLT/COU
TSA 90002
[Localité 3]
non comparante

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 04 Octobre 2022, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Laurence ARBELLOT, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Mme Muriel DURAND, présidente
Mme Laurence ARBELLOT, conseillère
Mme Fabienne TROUILLER, conseillère

Greffière : Mme Alexandra AUBERT, lors des débats

ARRET :

- RÉPUTÉ CONTRADICTOIRE
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Muriel DURAND, présidente et par Madame Ophanie KERLOC'H, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

M. [D] [T] a saisi la commission de surendettement des particuliers du Val-de-Marne qui a, le 9 janvier 2017, déclaré sa demande irrecevable.
Par une décision notifiée le 21 février 2017, la commission a indiqué que M. [T] bénéficiait d'une procédure collective et qu'il n'était pas éligible dans la mesure où il bénéficiait du statut d'artisan.
M. [T] a contesté cette décision et par jugement du 6 novembre 2017, le tribunal d'instance de Paris a déclaré recevable sa demande dans la mesure où ce dernier avait cessé son activité d'artisan le 15 septembre 2016 et que son passif ne contenait aucune dette professionnelle.
M. [R], en tant que bailleur et a qui cette décision a été notifiée, l'a contestée le 16 mars 2018 en invoquant la mauvaise foi de M. [T], locataire depuis le 1er février 2016 avec une pension de retraite de 1 036 euros qui lui permettrait de s'acquitter de son loyer.
Par jugement réputé contradictoire du 26 septembre 2019, le tribunal d'instance de Paris a :
- déclaré recevable le recours formé par M. [R],
- rejeté le recours,
- constaté que les conditions de recevabilité de la demande du débiteur, M. [T] et notamment sa bonne foi ainsi que son impossibilité à faire face à l'ensemble de ses dettes exigibles ou à échoir,
- constaté le caractère irrémédiablement compromis de la situation de M. [T],
- prononcé le rétablissement personnel sans liquidation judiciaire au bénéfice de M. [T].

La juridiction a considéré que M. [T], âgé de 74 ans, retraité, célibataire et sans enfant à charge, ne disposait d'aucune capacité de remboursement ni d'aucun patrimoine immobilier susceptible de désintéresser ses créanciers pour 20 879,61 euros.
Cette décision a été notifiée le 26 septembre 2019 à M. [T] et le 8 octobre 2019 à M. [R].
Par déclaration adressée le 19 décembre 2019 au greffe de la cour d'appel de Paris, M. [R] a interjeté appel du jugement.
La partie a été convoquée à l'audience du 22 mars 2022 et le dossier renvoyé à l'audience du 4 octobre 2022.
Le conseil de M. [T] indique ne plus soulever de difficulté quant à la recevabilité de l'appel.
Aux termes d'écritures visées par le greffier et développées oralement, M. [R] sollicite l'infirmation du jugement, de voir déclarer l'intéressé irrecevable en sa demande de traitement de sa situation de surendettement compte tenu de sa mauvaise foi et de le débouter de ses demandes.
Il explique que M. [T] lui a loué un appartement pour 1 500 euros par mois et qu'il savait qu'il ne pourrait pas payer cette somme puisqu'il allait être à la retraite. Il précise avoir accepté de diminuer le montant du loyer mais que M. [T] a mis en place des stratagèmes pour éviter de payer. Il explique qu'il y a eu de multiples contentieux avec lui et notamment au sujet d'un véhicule. Il note que le dernier avis d'imposition mentionne 44 000 euros de revenus au titre de l'année 2021.
Aux termes d'écritures visées par le greffier et soutenues oralement, M. [T] par le biais de son avocat conclut au rejet de l'ensemble des demandes, et à la condamnation de M. [R] au paiement de 700 euros au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il conteste le montant de 44 000 euros porté sur sa déclaration de revenus 2021. Il précise toucher 600 euros mensuels de retraite et ne comprend pas ce montant qu'il explique par le fait que M. [R] l'aurait faussement salarié. Il indique avoir découvert cette erreur en demandant l'aide médicale universelle qui lui a été refusée. Il indique avoir demandé rectification au service des impôts.
M. [T] indique être retraité depuis 2010. Il fait état de ce que le bail n'est plus en cours, qu'il a été déclaré caduc et l'indemnité d'occupation fixée à 550 euros sans arriéré. Il fait état de sa bonne foi et que M. [R] est responsable de sa propre turpitude en précisant que s'agissant du véhicule, il y a eu un jugement rejetant ses demandes.
Aucun autre créancier n'a comparu ni ne s'est fait représenter.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Il convient d'indiquer à titre liminaire que l'appel en matière de procédure de surendettement des particuliers, est formé, instruit et jugé selon les règles de la procédure sans représentation obligatoire figurant aux articles 931 à 949 du code de procédure civile. La procédure applicable devant la cour d'appel est donc la procédure orale de droit commun dans laquelle la prise en considération des écrits d'une partie par la cour est subordonnée à l'indication orale à l'audience par cette partie ou son représentant qu'elle se réfère à ses écritures. Dès lors, la cour ne peut prendre en compte les demandes ou observations présentées par écrit par les parties non comparantes.
Sur la recevabilité du recours
En l'absence de tout élément de nature à contredire le jugement sur ce point, la décision entreprise sera confirmée en ce qu'elle a déclaré recevable le recours.

Sur la recevabilité au regard de la bonne foi
Il résulte de l'article L.711-1 du code de la consommation que la recevabilité de la demande de traitement de la situation de surendettement est subordonnée à la bonne foi du débiteur, conçue comme une absence de mauvaise foi. Il convient de rappeler que la bonne foi est présumée et qu'il appartient au créancier d'apporter la preuve de la mauvaise foi du débiteur. La simple imprudence ou imprévoyance n'est pas constitutive de mauvaise foi. De même, la négligence du débiteur ne suffit pas à caractériser la mauvaise foi en l'absence de conscience de créer ou d'aggraver l'endettement en fraude des droits des créanciers. Les faits constitutifs de mauvaise foi doivent de surcroît être en rapport direct avec la situation de surendettement.
Le débiteur doit donc être de bonne foi pendant la phase d'endettement mais aussi au moment où il saisit la commission de surendettement, ce qui implique sa sincérité, et tout au long du déroulement de la procédure.
En application de l'article L.761-1 du code de la consommation, la mauvaise foi procédurale est également sanctionnée en ce qu'est déchue du bénéfice des mesures de traitement des situations de surendettement toute personne :
1o ayant sciemment fait de fausses déclarations ou remis des documents inexacts,
2o ayant détourné ou dissimulé, ou tenté de détourner ou de dissimuler, tout ou partie de ses biens,
3o ayant, sans l'accord de ses créanciers, de la commission ou du juge, aggravé son endettement en souscrivant de nouveaux emprunts ou ayant procédé à des actes de disposition de son patrimoine pendant le déroulement de la procédure de traitement de la situation de surendettement ou de rétablissement personnel, ou pendant l'exécution du plan ou des mesures de traitement.
En l'espèce, M. [R] invoque la mauvaise foi de M. [T] sans apporter un quelconque élément à l'appui de ses allégations. La bonne foi présumée de M. [T] n'est pas susceptible d'être remise en cause au vu des éléments dont la cour dispose.
Il convient donc de confirmer la recevabilité du dossier de traitement de sa situation de surendettement.
Sur les mesures
Aux termes de l'article L.733-1 du code de la consommation, en l'absence de mission de conciliation ou en cas d'échec de celle-ci, la commission peut, à la demande du débiteur et après avoir mis les parties en mesure de fournir leurs observations, imposer tout ou partie des mesures suivantes :
1o Rééchelonner le paiement des dettes de toute nature, y compris, le cas échéant, en différant le paiement d'une partie d'entre elles, sans que le délai de report ou de rééchelonnement puisse excéder sept ans ou la moitié de la durée de remboursement restant à courir des emprunts en cours ; en cas de déchéance du terme, le délai de report ou de rééchelonnement peut atteindre la moitié de la durée qui restait à courir avant la déchéance ;
2o Imputer les paiements, d'abord sur le capital ;
3o Prescrire que les sommes correspondant aux échéances reportées ou rééchelonnées porteront intérêt à un taux réduit qui peut être inférieur au taux de l'intérêt légal sur décision spéciale et motivée et si la situation du débiteur l'exige. Quelle que soit la durée du plan de redressement, le taux ne peut être supérieur au taux légal;
4o Suspendre l'exigibilité des créances autres qu'alimentaires pour une durée qui ne peut excéder deux ans. Sauf décision contraire de la commission, la suspension de la créance entraîne la suspension du paiement des intérêts dus à ce titre. Durant cette période, seules les sommes dues au titre du capital peuvent être productives d'intérêts dont le taux n'excède pas le taux de l'intérêt légal.

L'article L.733-3 du même code énonce que la durée totale des mesures mentionnées à l'article L. 733-1 ne peut excéder sept années.

Aux termes de l'article R. 731-1 du code de la consommation : « Pour l'application des dispositions des articles L. 732-1, L. 733-1 et L. 733-4, la part des ressources mensuelles du débiteur à affecter à l'apurement de ses dettes est calculée, dans les conditions prévues aux articles L. 731-1, L.731-2 et L. 731-3, par référence au barème prévu à l'article R. 3252-2 du code du travail. Toutefois, cette somme ne peut excéder la différence entre le montant des ressources mensuelles réelles de l'intéressé et le montant forfaitaire du revenu de solidarité active mentionné au 2o de l'article L. 262-2 du code de l'action sociale et des familles applicable au foyer du débiteur ».

L'article R. 731-2 précise : « La part de ressources réservée par priorité au débiteur est déterminée au regard de l'ensemble des dépenses courantes du ménage, qui intègre les dépenses mentionnées à l'article L. 731-2 ».

Enfin selon l'article R.731-3 : « Le montant des dépenses courantes du ménage est apprécié par la commission, soit pour leur montant réel sur la base des éléments déclarés par le débiteur, soit en fonction du barème fixé par son règlement intérieur et prenant en compte la composition de la famille. Le règlement intérieur précise à quelles conditions et selon quelles modalités les dépenses sont prises en compte pour leur montant réel ou selon le barème. Lorsque la commission prend en compte des dépenses courantes du ménage pour leur montant réel, elle peut demander au débiteur d'en fournir des justificatifs. Si le débiteur ne les fournit pas, les dépenses concernées sont appréciées selon le barème susvisé ».

En vertu des dispositions de l'article L.724-1 du code de la consommation, le débiteur qui se trouve dans une situation irrémédiablement compromise, caractérisée par l'impossibilité manifeste de mettre en oeuvre les mesures de traitement prévues par les articles L.732-1, L.733-1, L.733-7 et L.733-8 du même code, est éligible à la procédure de rétablissement personnel sans liquidation judiciaire s'il est constaté qu'il ne possède que des biens meublants nécessaires à la vie courante et des biens non professionnels indispensables à l'exercice de son activité professionnelle ou que l'actif est constitué de biens dépourvus de valeur marchande ou dont les frais de vente seraient manifestement disproportionnés au regard de leur valeur vénale.
En application de ces textes, il incombe au juge de se référer aux éléments objectifs qui lui sont soumis, c'est-à-dire le rapport entre le montant des dettes et les revenus disponibles ou ceux prévisibles et de déterminer la part des revenus que le débiteur peut affecter au paiement de ses dettes au regard des éléments dont il dispose, en prenant en compte l'évolution prévisible des revenus du débiteur.
Par ailleurs, il convient de rappeler que la situation n'est pas irrémédiablement compromise dès lors qu'elle est susceptible d'évoluer, du fait de l'âge du débiteur, de sa qualification et de sa situation personnelle.
En l'espèce, M. [T] âgé de 77 ans, justifie être retraité, avec un état de santé précaire et vivre dans une résidence autonomie séniors du centre d'action sociale de la Ville de [Localité 3]. Il perçoit selon les attestations fiscales communiquées de 2020 à août 2022, 632 euros de retraite de la CNAV et 212 euros de retraite complémentaire. Les relevés de banque produits de mai à août 2022 démontrent qu'il ne perçoit aucun autre revenu. Son accompagnateur social atteste par courrier du 26 août 2022, qu'une erreur s'est produite concernant sa déclaration de revenus 2021 mentionnant 40 325 euros de revenus et qu'une déclaration complémentaire a été réalisée.
Les ressources de M. [T] avaient été retenues pour 1 068,63 euros comprenant 806,63 euros de pension de retraite, 205 euros d'aide au logement et 57 euros de pension d'invalidité. M. [T] justifie ne percevoir actuellement que 844 euros pour des charges évaluées à 1 106 euros. M. [T] ne dispose donc d'aucune capacité de remboursement ni d'aucun bien susceptible de désintéresser ses créanciers.
Sa situation s'est donc détériorée depuis la première décision sans aucune perspective d'évolution de sorte que c'est à bon droit que le premier juge a constaté que la situation était irrémédiablement compromise et accordé à l'intéressé le bénéfice d'une mesure de rétablissement personnel sans liquidation judiciaire.
Le jugement doit donc être confirmé en toutes ses dispositions.
Le surplus des demandes est rejeté.
Chaque partie supportera ses éventuels dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire et en dernier ressort rendu par mise à disposition au greffe :

Confirme le jugement le jugement en toutes ses dispositions,

y ajoutant,

Déboute les parties du surplus de leurs demandes,

Laisse à la charge de chaque partie les éventuels dépens d'appel exposés par elle,

Dit que l'arrêt sera notifié par lettre simple à la commission de surendettement et aux parties par lettre recommandée avec accusé de réception.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : H0
Numéro d'arrêt : 20/000944
Date de la décision : 24/11/2022
Sens de l'arrêt : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2022-11-24;20.000944 ?
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