Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées aux parties le : République française
Au nom du Peuple français
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 4 - Chambre 9 - B
ARRET DU 24 Novembre 2022
(no 208 , pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : S No RG 19/00250 - No Portalis 35L7-V-B7D-CATBK
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 14 Mai 2019 par le tribunal d'instance de JUVISY-SUR-ORGE RG no 11-18-001173
APPELANTE
Madame [T] [C] NÉE [L] (débitrice)
[Adresse 3]
[Adresse 19]
[Localité 16]
comparante en personne, assistée de Me Hugues KEUFAK TAMEZE, avocat au barreau de PARIS, toque : E1133
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2019/033357 du 19/07/2019 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de PARIS)
INTIMES
Monsieur [F] [L] (prêt familial)
[Adresse 14]
[Localité 15]
comparant en personne
CARREFOUR BANQUE (176635755, 183527316)
Chez EOS Contentia
[Adresse 2]
[Localité 9]
non comparante
EOS CREDIREC (232199)
[Adresse 10]
[Adresse 20]
[Localité 12]
non comparante
MY MONEY BANK (2012/206)
Service solutions alternatives
[Adresse 1]
[Localité 8]
non comparante
FINANCO (57655844)
Service surendettement
[Adresse 21]
[Localité 7]
non comparante
OPH [Localité 24] HABITAT (ancien logement : 387110/80)
[Adresse 6]
[Localité 11]
représentée par Me Catherine HENNEQUIN, avocat au barreau de PARIS, toque : P0483 substitué par Me Monica OSORIO, avocat au barreau de PARIS
DIRECTION DÉPARTEMENTALE DES FINANCES PUBLIQUES DE SEINE SAINT DENIS (IDF1 15 2600065469)
[Adresse 4]
[Localité 17]
non comparante
TRÉSORERIE [Localité 24] AMENDE 2ÈME DIVISION (05-0900061999)
[Adresse 5]
[Adresse 22]
[Localité 13]
non comparante
PARTIE INTERVENANTE
CSIP KB IDF (Cabinet de Soutien à l'Insertion et à la Procédure)14, [Adresse 25]
[Adresse 18]
[Localité 15]
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 04 Octobre 2022, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Laurence ARBELLOT, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Mme Muriel DURAND, présidente
Mme Laurence ARBELLOT, conseillère
Mme Fabienne TROUILLER, conseillère
Greffière : Mme Alexandra AUBERT, lors des débats
ARRET :
- RÉPUTÉ CONTRADICTOIRE
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Muriel DURAND, présidente et par Madame Ophanie KERLOC'H, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
Mme [T] [L] épouse [C] a saisi la commission de surendettement des particuliers de l'Essonne qui a, le 29 août 2019, déclaré sa demande recevable.
Le 15 mai 2018, la commission a imposé le rééchelonnement du paiement des créances sur une durée de 65 mois au taux de 0 %, sur la base d'une capacité de remboursement de 1 156 euros précisant qu'à partir du 43 ème mois, la capacité de remboursement est diminuée du fait d'une baisse des prestations familiales.
Mme [C] a contesté les mesures recommandées considérant les mensualités trop élevées.
Par jugement réputé contradictoire en date du 14 mai 2019, le tribunal d'instance de Juvisy-sur-Orge a :
- déclaré recevable le recours ;
- rejeté le recours ;
- établi un plan identique aux mesures imposées le 15 mai 2018 par la commission de surendettement des particuliers de l'Essonne.
Après avoir examiné la recevabilité du recours, le tribunal a fixé le montant du passif à 60 048,56 euros. Il a relevé que les ressources de Mme [C] s'élevaient à la somme de 3 149,34 euros par mois pour des charges de 1 973,85 euros et qu'elle disposait ainsi d'une capacité de remboursement de 1 175,51 euros. Il a maintenu une capacité de remboursement à la somme de 1 156 euros.
Le jugement a été notifié à Mme [C] le 27 mai 2019.
Par déclaration adressée le 7 juin 2019 au greffe de la cour d'appel Paris, Mme [C] a interjeté appel du jugement en réclamant une diminution de sa mensualité de remboursement en indiquant que sa situation avait changé.
Les parties ont été convoquées aux audiences des 23 novembre 2021, 7 juin 2022 et l'affaire renvoyée à l'audience du 4 octobre 2022.
À l'audience, l'avocat de Mme [C] sollicite qu'elle soit admise au bénéfice de la procédure de surendettement. Il explique qu'elle travaille en CDI et gagne 1 900 euros par mois, que la dette locative est de 12 000 euros et que madame a soldé la dette de Financo. Il sollicite une baisse de l'échéance à 200 euros par mois avec 60 mensualités et le solde à la 61? mensualité. Il ajoute que le loyer de 560 euros est payé, qu'elle a trois enfants à charge, que le père est décédé et qu'elle n'a pas de pension mais 587 euros de prestations familiales.
M. [F] [L], père de Mme [C] est présent en tant que créancier. Il indique que sa fille lui doit 6 000 euros mais qu'il souhaite faire une remise de dette.
Le conseil de [Localité 23] Habitat fait état de la mauvaise foi de madame, en précisant que ses ressources n'ont pas baissé mais au contraire ont augmenté et souhaite que sa demande soit déclarée irrecevable. Il requiert à titre subsidiaire confirmation du jugement et rejet des demandes formées.
Par courrier reçu au greffe le 1er avril 2022, le service des recettes non fiscales de la direction départementale des finances publiques de Seine Saint Denis fait connaître le montant de sa créance à hauteur de 11 871 euros.
Aucun autre créancier n'a comparu.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Il convient d'indiquer à titre liminaire que l'appel en matière de procédure de surendettement des particuliers, est formé, instruit et jugé selon les règles de la procédure sans représentation obligatoire figurant aux articles 931 à 949 du code de procédure civile. La procédure applicable devant la cour d'appel est donc la procédure orale de droit commun dans laquelle la prise en considération des écrits d'une partie par la cour est subordonnée à l'indication orale à l'audience par cette partie ou son représentant qu'elle se réfère à ses écritures. Dès lors, la cour ne peut prendre en compte les demandes ou observations présentées par écrit par les parties non comparantes.
Sur la recevabilité du recours
En l'absence de tout élément de nature à contredire le jugement sur ce point, la décision entreprise sera confirmée en ce qu'elle a déclaré recevable le recours.
Sur la recevabilité au regard de la bonne foi
Il résulte de l'article L.711-1 du code de la consommation que la recevabilité de la demande de traitement de la situation de surendettement est subordonnée à la bonne foi du débiteur, conçue comme une absence de mauvaise foi. Il convient de rappeler que la bonne foi est présumée et qu'il appartient au créancier d'apporter la preuve de la mauvaise foi du débiteur. La simple imprudence ou imprévoyance n'est pas constitutive de mauvaise foi. De même, la négligence du débiteur ne suffit pas à caractériser la mauvaise foi en l'absence de conscience de créer ou d'aggraver l'endettement en fraude des droits des créanciers. Les faits constitutifs de mauvaise foi doivent de surcroît être en rapport direct avec la situation de surendettement.
Le débiteur doit donc être de bonne foi pendant la phase d'endettement mais aussi au moment où il saisit la commission de surendettement, ce qui implique sa sincérité, et tout au long du déroulement de la procédure.
En application de l'article L.761-1 du code de la consommation, la mauvaise foi procédurale est également sanctionnée en ce qu'est déchue du bénéfice des mesures de traitement des situations de surendettement toute personne :
1o ayant sciemment fait de fausses déclarations ou remis des documents inexacts,
2o ayant détourné ou dissimulé, ou tenté de détourner ou de dissimuler, tout ou partie de ses biens,
3o ayant, sans l'accord de ses créanciers, de la commission ou du juge, aggravé son endettement en souscrivant de nouveaux emprunts ou ayant procédé à des actes de disposition de son patrimoine pendant le déroulement de la procédure de traitement de la situation de surendettement ou de rétablissement personnel, ou pendant l'exécution du plan ou des mesures de traitement.
Le débiteur doit donc être de bonne foi, autrement dit sincère, au moment où il saisit la commission de surendettement.
En l'espèce, [Localité 23] Habitat invoque la mauvaise foi de Mme [C] sans apporter un quelconque élément à l'appui de ses allégations. La bonne foi présumée de Mme [C] n'est pas susceptible d'être remise en cause au vu des éléments dont la cour dispose.
Il convient donc de confirmer la recevabilité du dossier de traitement de sa situation de surendettement.
Sur les mesures
Aux termes de l'article L.733-1 du code de la consommation, en l'absence de mission de conciliation ou en cas d'échec de celle-ci, la commission peut, à la demande du débiteur et après avoir mis les parties en mesure de fournir leurs observations, imposer tout ou partie des mesures suivantes:
1o Rééchelonner le paiement des dettes de toute nature, y compris, le cas échéant, en différant le paiement d'une partie d'entre elles, sans que le délai de report ou de rééchelonnement puisse excéder sept ans ou la moitié de la durée de remboursement restant à courir des emprunts en cours ; en cas de déchéance du terme, le délai de report ou de rééchelonnement peut atteindre la moitié de la durée qui restait à courir avant la déchéance ;
2o Imputer les paiements, d'abord sur le capital ;
3o Prescrire que les sommes correspondant aux échéances reportées ou rééchelonnées porteront intérêt à un taux réduit qui peut être inférieur au taux de l'intérêt légal sur décision spéciale et motivée et si la situation du débiteur l'exige. Quelle que soit la durée du plan de redressement, le taux ne peut être supérieur au taux légal;
4o Suspendre l'exigibilité des créances autres qu'alimentaires pour une durée qui ne peut excéder deux ans. Sauf décision contraire de la commission, la suspension de la créance entraîne la suspension du paiement des intérêts dus à ce titre. Durant cette période, seules les sommes dues au titre du capital peuvent être productives d'intérêts dont le taux n'excède pas le taux de l'intérêt légal.
L'article L.733-3 du même code énonce que la durée totale des mesures mentionnées à l'article L. 733-1 ne peut excéder sept années.
Aux termes de l'article R. 731-1 du code de la consommation : « Pour l'application des dispositions des articles L. 732-1, L. 733-1 et L. 733-4, la part des ressources mensuelles du débiteur à affecter à l'apurement de ses dettes est calculée, dans les conditions prévues aux articles L. 731-1, L.731-2 et L. 731-3, par référence au barème prévu à l'article R. 3252-2 du code du travail. Toutefois, cette somme ne peut excéder la différence entre le montant des ressources mensuelles réelles de l'intéressé et le montant forfaitaire du revenu de solidarité active mentionné au 2o de l'article L. 262-2 du code de l'action sociale et des familles applicable au foyer du débiteur ».
L'article R. 731-2 précise : « La part de ressources réservée par priorité au débiteur est déterminée au regard de l'ensemble des dépenses courantes du ménage, qui intègre les dépenses mentionnées à l'article L. 731-2 ».
Enfin selon l'article R.731-3 : « Le montant des dépenses courantes du ménage est apprécié par la commission, soit pour leur montant réel sur la base des éléments déclarés par le débiteur, soit en fonction du barème fixé par son règlement intérieur et prenant en compte la composition de la famille. Le règlement intérieur précise à quelles conditions et selon quelles modalités les dépenses sont prises en compte pour leur montant réel ou selon le barème. Lorsque la commission prend en compte des dépenses courantes du ménage pour leur montant réel, elle peut demander au débiteur d'en fournir des justificatifs. Si le débiteur ne les fournit pas, les dépenses concernées sont appréciées selon le barème susvisé ».
En l'espèce, le passif non contesté est fixé à la somme de 60 048,56 euros.
La commission de surendettement et le tribunal ont retenu des ressources de 3 149,34 euros composées de 1 835 euros de salaire, 347,58 euros d'aide au logement et de 966,76 euros de prestations familiales par mois pour des charges de 1 973,85 euros avec une capacité de remboursement de 1 175,51 euros fixé par le tribunal à 1 156 euros.
Mme [C] communique aux débats son bulletin de salaire du mois de septembre 2022. Elle perçoit 1 935 euros de salaire net, soit un salaire en augmentation. L'attestation de la Caisse d'allocations familiales du 3 octobre 2022 précise le montant du quotient familial sans indication du montant de l'aide au logement perçu ou des prestations familiales. Elle communique un courrier de la société Financo du 6 avril 2022 précisant qu'elle a soldé sa dette. Elle communique enfin un avis d'échéance pour ses loyers des mois d'août et de septembre 2022 (580,81 euros) et un échéancier avec Engie.
L'ensemble de ces éléments sont insuffisants à remettre en cause le jugement querellé en son évaluation des ressources et charges de Mme [C], étant constaté que son salaire a même augmenté et qu'elle ne conteste pas le montant retenu de ses charges.
Le jugement doit donc être confirmé en toutes ses dispositions.
Le surplus des demandes est rejeté.
Chaque partie supportera ses éventuels dépens d'appel.
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
Statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire et en dernier ressort rendu par mise à disposition au greffe ;
Confirme le jugement le jugement en toutes ses dispositions,
Y ajoutant,
Déboute les parties du surplus de leurs demandes,
Laisse à la charge de chaque partie les éventuels dépens d'appel exposés par elle,
Dit que l'arrêt sera notifié par lettre simple à la commission de surendettement et aux parties par lettre recommandée avec accusé de réception.
LA GREFFIERE LA PRESIDENTE