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10/11/2022 | FRANCE | N°21/12378

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 9 - a, 10 novembre 2022, 21/12378


Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 9 - A



ARRÊT DU 10 NOVEMBRE 2022



(n° , 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/12378 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CD7E2



Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 22 juin 2021 - Conseiller de la mise en état de la Cour d'appel de PARIS - RG n° 18/19807





DEMANDERESSE AU DÉFÉRÉ



Madame [Z] [S]

épouse [U]

née le [Date naissance 2] 1654 à [Localité 6] (TUNISIE)

[Adresse 1]

[Localité 4]



représentée par Me Sandra OHANA de l'AARPI OHANA ZERHAT, avocat au barreau de PAR...

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 9 - A

ARRÊT DU 10 NOVEMBRE 2022

(n° , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/12378 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CD7E2

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 22 juin 2021 - Conseiller de la mise en état de la Cour d'appel de PARIS - RG n° 18/19807

DEMANDERESSE AU DÉFÉRÉ

Madame [Z] [S] épouse [U]

née le [Date naissance 2] 1654 à [Localité 6] (TUNISIE)

[Adresse 1]

[Localité 4]

représentée par Me Sandra OHANA de l'AARPI OHANA ZERHAT, avocat au barreau de PARIS, toque : C1050

ayant pour avocat plaidant Me Gregory HANIA, avocat au barreau de VAL-DE-MARNE, toque : 403

DÉFENDERESSE AU DÉFÉRÉ

La société EUROTITRISATION en qualité de représentant du fonds commun de titrisation CREDINVEST, Compartiment CREDINVEST 1 (venant aux droits de la société COFINOGA), société anonyme prise en la personne de ses représentants légaux domicliés en cette qualité audit siège

N° SIRET : 352 458 368 00052

[Adresse 5]

[Adresse 5]

[Localité 3]

représentée et assistée de Me Cédric KLEIN de la SELAS CREHANGE & KLEIN ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : C1312

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 20 septembre 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Muriel DURAND, Présidente, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Muriel DURAND, Présidente de chambre

Mme Fabienne TROUILLER, Conseillère

Mme Laurence ARBELLOT, Conseillère

Greffière, lors des débats : Mme Camille LEPAGE

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Mme Muriel DURAND, Présidente et par Mme Camille LEPAGE, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Le 18 mars 1996, une ordonnance d'injonction de payer a été rendue par le tribunal d'instance du 12ème arrondissement de Paris à l'encontre de Mme [Z] [U], la condamnant à payer à la société Cofinoga la somme principale de 16 830,46 francs, celle de 26,80 francs au titre des frais accessoires ainsi que les dépens.

Par déclaration au greffe du 21 décembre 2015, Mme [U] a formé opposition à cette ordonnance.

Par jugement contradictoire du 22 mars 2018, Le tribunal d'instance de Paris 12ème a déclaré recevable l'opposition formée par Mme [U] et jugé que la société Eurotitrisation avait bien qualité à agir mais l'a déboutée de l'intégralité de ses demandes, en l'absence de production de l'offre préalable de crédit, de décompte et d'historique de compte.

Par déclaration en date du 7 août 2018 enrôlée sous le numéro RG 18/19807, la société Eurotitrisation a relevé appel de cette décision.

Le 25 septembre 2018, Maître Sandra Ohana de l'AARPI Ohana Zerhat, avocat du barreau de Paris s'est constituée pour Mme [U].

Le 24 janvier 2019, Maître Sandra Ohana a notifié par voie électronique des conclusions d'intimé et d'appel incident.

Par un avis en date du 20 mai 2021, Maître Sandra Ohana a été sommée de procéder au paiement du droit de timbre d'un montant de 225 euros au visa de l'article 1635 bis P du code général des impôts.

Le droit de timbre n'a pas été régularisé dans le délai imparti.

Par ordonnance du 22 juin 2021, le magistrat en charge de la mise en état a prononcé l'irrecevabilité des conclusions de Mme [U].

Cette dernière s'est acquittée du droit de timbre le 5 juillet 2021.

Par requête notifiée par RPVA le 6 juillet 2021 faisant l'objet d'un enrôlement sous le numéro RG 21/12378, elle a déféré à la cour l'ordonnance du 22 juin 2021, sollicitant à titre principal l'infirmation en toutes ses dispositions de l'ordonnance d'irrecevabilité rendue le 22 juin 2021 dans l'affaire référencée RG n°18/19807.

A titre subsidiaire, elle demande à la cour d'infirmer partiellement l'ordonnance d'irrecevabilité et de dire que seules ses demandes en qualité d'appelante à titre incident soient déclarées irrecevables et recevables ses arguments en défense au fond à titre principal et subsidiaire en sa qualité d'intimé ainsi qu'il ressort de ses dernières conclusions au fond.

Elle soutient avoir régularisé sa situation en payant le droit de timbre quelques jours après l'ordonnance d'irrecevabilité, précise que le retard dans ce paiement résulte d'un surcroît d'activité de l'avocat plaidant et ajoute avoir conclu dans les délais légaux sur le fond.

Elle soutient qu'en la privant de son droit de faire valoir sa défense au fond, cette sanction constituerait une atteinte à son droit à bénéficier d'un procès équitable. Elle ajoute que le retard dans le paiement de l'impôt n'a causé aucun préjudice à l'appelant ou à la cour et souligne qu'il est d'usage devant certaines formations de la cour d'appel de laisser les parties régulariser le droit de timbre jusqu'au jour de l'audience de plaidoiries.

Elle précise que l'avis a été dressé à son avocat postulant mais ni à elle-même ni à son avocat plaidant, alors que ce sont les parties qui doivent directement s'expliquer sur le défaut de paiement du timbre.

A titre subsidiaire, elle invoque les dispositions des articles 963 et 122 du code de procédure civile pour que seule la demande afférente à son appel à titre incident soit déclarée irrecevable et rappelle que les arguments de défense au fond qu'elle a invoqués ne constituent pas une demande au sens de l'article 122 du code de procédure civile.

Aux termes d'un avis rendu le 18 mai 2022, le ministère public réclame la confirmation de l'ordonnance déférée devant la cour d'appel de Paris, rendu le 22 juin 2021 par la conseiller de la mise en état.

Il indique que le principe posé par le code général des impôts ne prévoit aucune dérogation. Il ajoute que l'article 1635 P bis du code général des impôts a déjà été déclaré conforme à la Convention européenne des droits de l'Homme par la Cour de cassation dans un arrêt de la deuxième chambre civile du 22 mars 2018 et par le Conseil d'état par un arrêt rendu le 28 décembre 2012. Le ministère public en conclut qu'il n'y a pas eu méconnaissance du droit à un procès équitable et soutient que l'irrecevabilité prononcée par le conseiller de la mise en état était justifiée.

Dans un mémoire distinct notifié par RPVA le 8 mars 2022 faisant l'objet d'un enrôlement sous le numéro RG 21/16072, Mme [U] a soulevé une question prioritaire de constitutionnalité tendant à démontrer que l'article 963 du code de procédure civile et l'article 1635 bis P du code général des impôts portent atteinte au principe de la hiérarchie des normes.

Par arrêt contradictoire et en dernier ressort du 30 juin 2022, la cour a déclaré recevable la question prioritaire de constitutionnalité mais l'a déclarée non nouvelle et a dit n'y avoir lieu en conséquence de transmettre ladite question à la Cour de cassation et a dit que le dossier sur le fond sera renvoyé devant cette chambre à l'audience du mardi 20 septembre 2022 à 14h00.

MOTIF DE LA DÉCISION

La requête en déféré, introduite dans les 15 jours de l'ordonnance querellée, est recevable.

En application de l'article 963 du code de procédure civile, les parties doivent justifier de l'acquittement du droit prévu à l'article 1635 bis P du code général des impôts à peine d'irrecevabilité de l'appel ou des défenses selon le cas qui doit être constatée d'office par la juridiction.

Cet article prévoit que, sauf en cas de demande d'aide juridictionnelle, l'auteur de l'appel principal en justifie lors de la remise de sa déclaration d'appel et les autres parties lors de la remise de leur acte de constitution par l'apposition de timbres mobiles ou par la remise d'un justificatif lorsque le droit pour l'indemnisation de la profession d'avoué a été acquitté par voie électronique. En cas de requête conjointe, les appelants justifient de l'acquittement du droit lors de la remise de leur requête.

L'irrecevabilité, que les parties ne peuvent pas soulever elles-mêmes, mais que la cour se doit donc de relever d'office, ne peut être prononcée sans que celles-ci aient été mises en mesure de s'expliquer ou qu'un avis du greffe les ait au préalable invitées à justifier du paiement du droit.

Le 21 mai 2021, le greffe a notifié à Maître Sandra Ohana un avis d'avoir à s'acquitter de ce droit ou de justifier du dépôt d'une demande d'aide juridictionnelle dans un délai d'un mois à compter du présent avis, lequel précisait exactement ce qui suit :

« Maître,

Vous vous êtes constitué pour Madame [Z] [S] ÉPOUSE [U] épouse [U]. En application des articles 963 et 964 du code de procédure civile, les parties justifient, à peine d'irrecevabilité de l'appel ou des défenses, selon le cas, de l'acquittement du droit prévu à l'article 1635 bis P du code général des impôts; sauf en cas de demande d'aide juridictionnelle, l'auteur de l'appel principal en justifie lors de la remise de sa déclaration d'appel; l'irrecevabilité est constatée d'office, le juge pouvant statuer sans débat.

Vous n'avez pas acquitté cette contribution lors du dépôt de votre constitution; en conséquence, la présidente avant de prononcer l'irrecevabilité, vous invite à adresser au greffe dans un délai d'un mois à compter du présent avis :

- le timbre fiscal en utilisant l'événement 'Timbre dématérialisé',

- le récépissé du dépôt d'un dossier d'aide juridictionnelle délivré par le service du BAJ en utilisant l'événement ' Décision d'AJ en cours',

- la décision d'aide juridictionnelle en utilisant l'évènement 'Décision D'AJ'

À défaut, l'irrecevabilité de vos conclusions sera constatée d'office par une ordonnance qui sera rendue le mardi suivant l'expiration du délai accordé.

MERCI DE NE PAS RÉPONDRE DIRECTEMENT A CE MESSAGE ET D'UTILISER LES ÉVÉNEMENTS INDIQUÉS CI-DESSUS À PEINE DE REJET DE VOTRE MESSAGE

LE GREFFE ».

Mme [U] se plaint de ce que l'avis n'a pas été adressé à l'avocat plaidant mais seulement à l'avocat postulant.

Il est constant que dans le cadre d'une procédure écrite, les parties sont représentées par leur avocat et n'ont pas la possibilité de faire valoir directement des observations. L'avocat qui les représente est celui qui s'est constitué pour elles et seul l'avocat constitué accomplit les actes de procédure. L'avocat qui s'est constitué pour Mme [U] le 25 septembre 2018 est Maître Sandra Ohana de l'AARPI Ohana Zerhat, avocat du barreau de Paris. C'est à cet avocat que l'avis d'avoir à payer le droit prévu à l'article 1635 bis P du code général des impôts a été envoyé par le greffe qui n'avait donc pas à aviser ni Mme [U] ni son avocat plaidant, même si son nom apparaissait sur les conclusions.

Mme [U] soutient encore que l'avis ne les invite pas à s'expliquer sur les raisons de l'absence de paiement. Toutefois dès lors qu'un avis du greffe a été envoyé, il n'y avait pas lieu de les inviter à fournir des explications. En tout état de cause, Mme [U] ne donne aucune explication au fait que ce droit n'ait pas été acquitté dans les délais.

Il résulte par ailleurs de l'article 964 du code de procédure civile que cette l'irrecevabilité peut être prononcée sans débats à moins que les parties aient été convoquées ou citées à comparaître à une audience mais que dans ce cas, la décision peut être rapportée en cas d'erreur.

La cour constate que Mme [U] n'a pas sollicité que l'ordonnance soit rapportée pour cause d'erreur mais combat le principe même de ces textes et a déféré l'ordonnance devant la cour.

Mme [U] fait encore valoir qu'elle a régularisé peu de temps après l'ordonnance.

En application de l'article 126 du code de procédure civile, la fin de non-recevoir peut être régularisée jusqu'au jour où le juge statue.

Ceci doit s'entendre du jour où le juge statue sur la recevabilité du fait du défaut d'acquittement de ce droit.

La régularisation postérieure à la décision d'irrecevabilité n'est pas possible s'agissant d'une fin de non-recevoir et l'absence de préjudice est indifférent.

Mme [U] soutient encore que dès lors qu'elle a conclu dans les délais légaux, cette décision la prive du droit à un procès équitable.

Dans sa décision n° 2012-231/234 QPC du 13 avril 2012, le Conseil Constitutionnel a dit que ce droit fixe d'appel est conforme à la Constitution dès lors qu'il ne porte pas une atteinte disproportionnée au droit d'exercer un recours effectif devant une juridiction ou aux droits de la défense et n'entraîne pas de rupture caractérisée de l'égalité devant les charges publiques.

Tant la Cour européenne des droits de l'Homme que la Cour de cassation ont retenu que cette fin de non-recevoir ne portait pas atteinte aux règles du procès équitable.

Mme [U] fait encore valoir à titre subsidiaire que la fin de non-recevoir ne peut concerner que ses demandes c'est-à-dire son appel incident mais ne peut pas l'empêcher de présenter des moyens de défense.

Or il résulte de l'article 963 du code de procédure civile susvisé que l'irrecevabilité frappe tant les demandes que les défenses de celui qui ne s'acquitte pas de ce droit dans les délais impartis.

La décision du conseiller de la mise en état qui a déclaré l'irrecevabilité des conclusions de Mme [U] doit donc être confirmée.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Confirme l'ordonnance du conseiller de la mise en état du 22 juin 2021 ;

Condamne Mme [Z] [U] aux dépens du déféré.

La greffière La présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 9 - a
Numéro d'arrêt : 21/12378
Date de la décision : 10/11/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-11-10;21.12378 ?
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