Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 4 - Chambre 9 - A
ARRÊT DU 10 NOVEMBRE 2022
(n° , 5 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/12520 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CCJYN
Décision déférée à la Cour : Jugement du 9 avril 2020 prorogé d'office au 26 juin 2020 - Juge des contentieux de la protection d'AULNAY SOUS BOIS - RG n° 11-19-004691
APPELANTE
La société CREATIS, société anonyme agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
N° SIRET : 419 446 034 00128
[Adresse 2]
[Adresse 2]
[Adresse 2]
représentée par Me Olivier HASCOET de la SELARL HAUSSMANN-KAINIC- HASCOET-HELAI, avocat au barreau de l'ESSONNE
INTIMÉ
Monsieur [D] [R]
né le [Date naissance 1] 1963 à [Localité 3]
Cité des 15 arpents
[Adresse 4]
[Adresse 4]
DÉFAILLANT
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 27 septembre 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Laurence ARBELLOT, Conseillère, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Mme Muriel DURAND, Présidente de chambre
Mme Fabienne TROUILLER, Conseillère
Mme Laurence ARBELLOT, Conseillère
Greffière, lors des débats : Mme Ophanie KERLOC'H
ARRÊT :
- DÉFAUT
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Mme Muriel DURAND, Présidente et par Mme Camille LEPAGE, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
Par un acte sous seing privé du 27 février 2013, M. [D] [R] a contracté auprès de la société Creatis, un prêt personnel en regroupement de crédits pour un montant de 33 300 euros remboursable en 144 mensualités de 380,09 euros chacune hors assurance, moyennant un taux débiteur annuel fixe de 9,06 %.
A la suite d'impayés, la déchéance du terme du contrat a été prononcée.
Saisi le 6 novembre 2019 par la société Creatis d'une demande tendant principalement au constat de l'acquisition de la clause résolutoire et à défaut à la résolution du contrat ainsi qu'à la condamnation de M. [R] au paiement du solde restant dû au titre du contrat, le tribunal de proximité d'Aulnay-sous-Bois par un jugement contradictoire rendu le 9 avril 2020 auquel il convient de se reporter, a :
- déclaré la société Creatis recevable en son action,
- constaté l'acquisition de la clause résolutoire prévue au contrat de prêt,
- prononcé la déchéance du droit aux intérêts de la société Creatis,
- condamné M. [R] à payer à la société Creatis la somme de 17 278,27 euros avec intérêts au taux légal à compter du 22 mars 2019,
- autorisé M. [R] à s'acquitter de cette somme en 23 versements d'au moins 200 euros et un dernier versement venant solder la dette,
- rejeté le surplus des demandes,
- condamné M. [R] aux dépens.
Après avoir statué sur la recevabilité de l'action et pour prononcer la déchéance du droit aux intérêts contractuels, le tribunal a retenu que le prêteur ne produisait aucun exemplaire du bordereau de rétractation prévu à l'article L. 311-12 du code de la consommation. S'agissant du montant de la créance, il a déduit du capital emprunté le montant des versements opérés pour 16 021,73 euros.
Par une déclaration remise par voie électronique le 31 août 2020, la société Creatis, a relevé appel de cette décision
Aux termes de conclusions remises le 16 novembre 2020, l'appelante demande à la cour :
- de la voir déclarer recevable et bien fondée en ses demandes, fins et conclusions d'appel,
- d'y faire droit,
- de voir infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a prononcé la déchéance du droit aux intérêts, a minoré sa créance, rejeté sa demande de capitalisation des intérêts et sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et en ce qu'il a octroyé des délais de paiement,
- de dire n'y avoir lieu à déchéance du droit aux intérêts contractuels,
- de voir condamner M. [R] à lui payer la somme de 29 204,42 euros avec intérêts au taux contractuel de 9,06 % l'an à compter de la mise en demeure du 19 mars 2019 et à titre subsidiaire au taux légal,
- de voir ordonner la capitalisation annuelle des intérêts par application de l'article 1343-2 du code civil,
- de voir condamner M. [R] à lui payer la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi que les dépens.
L'appelante fait valoir que l'emprunteur en signant l'offre de prêt, a reconnu par une clause du contrat être entré en possession d'un exemplaire de cette offre dotée d'un formulaire détachable de rétractation et qu'il appartient à l'emprunteur de justifier du caractère erroné ou mensonger de sa reconnaissance écrite, en produisant l'exemplaire original de l'offre restée en sa possession.
Régulièrement assigné par acte d'huissier délivré à domicile le 17 novembre 2020, M. [R] n'a pas constitué avocat.
Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions de l'appelante, il est renvoyé aux écritures de celle-ci conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 28 juin 2022 et l'affaire a été appelée à l'audience le 27 septembre 2022.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Il résulte du dernier alinéa de l'article 954 du code de procédure civile que la partie qui ne conclut pas ou qui, sans énoncer de nouveaux moyens, demande la confirmation du jugement est réputée s'en approprier les motifs.
Au regard de sa date de conclusion, le contrat est soumis aux dispositions du code de la consommation dans leur rédaction postérieure à l'entrée en vigueur de la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010 et antérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 fixée au 1er juillet 2016.
La recevabilité de l'action de la société Creatis, vérifiée par le premier juge, ne fait pas l'objet de contestation de sorte que le jugement doit être confirmé.
Sur la déchéance du droit aux intérêts contractuels
Il résulte des articles L. 311-12 et L. 311-48 du code de la consommation en leur version applicable au litige, que, pour permettre à l'emprunteur d'exercer son droit de rétractation, un formulaire détachable est joint à son exemplaire du contrat de crédit et que le prêteur qui accorde un crédit sans remettre à l'emprunteur un contrat comprenant un tel formulaire est déchu du droit aux intérêts en totalité ou dans la proportion fixée par le juge.
Ces dispositions sont issues de la transposition par la France de la directive 2008/48/CE du Parlement européen et du Conseil du 28 avril 2008 concernant les contrats de crédit aux consommateurs et abrogeant la directive 87/102/CEE.
Par arrêt du 18 décembre 2014 (CA Consumer Finance C449/13), la Cour de justice de l'Union européenne a dit pour droit que les dispositions de la directive précitée doivent être interprétées en ce sens qu'elles s'opposent à ce qu'en raison d'une clause type, le juge doive considérer que le consommateur a reconnu la pleine et correcte exécution des obligations précontractuelles incombant au prêteur, cette clause entraînant ainsi un renversement de la charge de la preuve de l'exécution desdites obligations de nature à compromettre l'effectivité des droits reconnus par la directive.
Il incombe au prêteur de rapporter la preuve de ce qu'il a satisfait à ses obligations précontractuelles et la signature par l'emprunteur de l'offre préalable de crédit comportant une clause selon laquelle il reconnaît que le prêteur lui a remis le bordereau de rétractation constitue seulement un indice qu'il incombe à celui-ci de corroborer par un ou plusieurs éléments complémentaires.
En l'espèce, il ressort d'une mention pré-imprimée en verso de l'offre préalable acceptée le 27 février 2013 par M. [R], que celui-ci a reconnu rester en possession d'un exemplaire du contrat doté d'un formulaire détachable de rétractation.
Pour autant, la société Creatis, à laquelle incombe la charge de la preuve de l'exécution des obligations lui incombant, ne fournit à la cour aucun élément complémentaire permettant de vérifier la conformité de ce document aux dispositions légales qui imposent une teneur précise au bordereau de rétractation.
C'est donc à bon droit que le tribunal a prononcé la déchéance du droit du prêteur à percevoir les intérêts au taux contractuel.
Sur le bien-fondé de la demande en paiement
L'appelante produit à l'appui de sa demande :
- l'offre de crédit,
- la fiche de dialogue (ressources et charges) et les pièces d'identité et de solvabilité,
- la fiche d'informations précontractuelles européennes normalisées,
- le justificatif de consultation du fichier des incidents de paiement,
- le tableau d'amortissement,
- l'historique de prêt,
- un décompte de créance.
Pour fonder sa demande de paiement, la société Creatis justifie de l'envoi à l'emprunteur le 6 décembre 2018 d'un courrier recommandé de mise en demeure exigeant le règlement sous trente jours de la somme de 1 547,33 euros au titre des échéances impayées à défaut, la déchéance du terme du contrat sera acquise et l'intégralité des sommes deviendra exigible. Un courrier recommandé avec avis de réception adressé le 19 mars 2019 à M. [R] prend acte de la déchéance du terme du contrat et le met en demeure de régler la somme de 28 883,82 euros.
C'est donc de manière légitime que la société Creatis se prévaut de la déchéance du terme du contrat et de l'exigibilité des sommes dues.
Par application de l'article L. 311-48 du code de la consommation, en raison de la déchéance du droit aux intérêts contractuels, l'emprunteur n'est tenu qu'au seul remboursement du capital suivant l'échéancier prévu, ainsi que, le cas échéant, au paiement des intérêts dont le prêteur n'a pas été déchu. Les sommes perçues au titre des intérêts, qui sont productives d'intérêts au taux de l'intérêt légal à compter du jour de leur versement, sont restituées par le prêteur ou imputées sur le capital restant dû.
Au vu des pièces justificatives produites, l'emprunteur a versé la somme de 16 021,73 euros. Cette somme doit être déduite du capital emprunté de 33 300 euros soit un solde de 17 278,27 euros.
Le jugement est donc confirmé en ce qu'il a condamné M. [R] au paiement de la somme de 17'278,27 euros avec intérêts au taux légal à compter du 22 mars 2019.
La capitalisation des intérêts, dit encore anatocisme, est prohibée concernant les crédits à la consommation, matière dans laquelle les sommes qui peuvent être réclamées sont strictement et limitativement énumérées. En effet, l'article L. 311-23 du code de la consommation en sa version applicable, prévoit qu'aucune indemnité ni aucuns frais autres que ceux mentionnés aux articles L. 311-24 et L. 311-25 ne peuvent être mis à la charge de l'emprunteur dans les cas de défaillance prévus par ces articles.
C'est donc à bon droit que le premier juge a rejeté la demande de capitalisation des intérêts.
Le jugement déféré est donc confirmé en ce qu'il a débouté la société Creatis de sa demande de capitalisation des intérêts.
Le jugement doit également être confirmé en ce qu'il a octroyé des délais de paiement.
La société Creatis supportera la charge de ses propres dépens. L'équité commande de ne pas faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
Statuant en dernier ressort, après débats en audience publique, par arrêt rendu par défaut, par décision mise à disposition au greffe,
Confirme le jugement dont appel en toutes ses dispositions ;
Y ajoutant,
Déboute la société Creatis du surplus de ses demandes ;
Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
Dit que la société Creatis supportera la charge des dépens.
La greffière La présidente