Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 5 - Chambre 8
ARRÊT DU 8 NOVEMBRE 2022
(n° / 2022, 8 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/04565 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CBTSP
Décision déférée à la Cour : Jugement du 11 Février 2020 - Tribunal de Commerce de PARIS - RG n° 2018015176
APPELANTE
Madame [R] [P]
Née le [Date naissance 2] 2021 à [Localité 8])
De nationalité française
Demeurant [Adresse 4]
[Localité 5]
Représentée par Me Belgin PELIT-JUMEL de la SELEURL BELGIN PELIT-JUMEL AVOCAT, avocat au barreau de PARIS, toque : D1119,
Assistée de Me Béatrice HIEST NOBLET de la SCP HYEST et ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : P0311,
INTIMÉS
S.C.P. BTSG, prise en la personne de Me Stéphane Gorrias, en qualité de liquidateur de la société PARIS EVENTS, immatriculée au registre du commerce et des sociétés de Paris sous le numéro 750 317 505,
Immatriculée au registre du commerce et des sociétés de Nanterre sous le numéro 434 122 511,
Dont le siège social est situé [Adresse 1]
[Localité 7]
Représentée et assistée de Me Fabrice DALAT de la SCP Herald anciennement Granrut, avocat au barreau de PARIS, toque : P0373,
Monsieur LE PROCUREUR GÉNÉRAL
SERVICE FINANCIER ET COMMERCIAL
[Adresse 3]
[Localité 6]
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 19 Octobre 2021, en audience publique, devant la Cour, composée de :
Madame Marie-Christine HÉBERT-PAGEOT, Présidente de chambre,
Madame Anne-Sophie TEXIER, conseillère,
Madame Florence DUBOIS-STEVANT, conseillère,
qui enont délibéré.
Un rapport a été présenté à l'audience par Madame Anne-Sophie TEXIER dans le respect des conditions prévues à l'article 804 du code de procédure civile.
Greffier, lors des débats : Madame Liselotte FENOUIL
MINISTÈRE PUBLIC : L'affaire a été communiquée au ministère public, représenté lors des débats par Monsieur François Vaissette, avocat général, qui a fait connaître son avis écrit le 19 juin 2020, et ses observations orales lors de l'audience.
ARRÊT :
- contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Marie-Christine HÉBERT-PAGEOT, Présidente de chambre et par Liselotte FENOUIL, greffière, présente lors de la mise à disposition.
*
* *
FAITS ET PROCÉDURE:
La SAS Paris Events, immatriculée le 3 avril 2012 et ayant pour présidente et unique actionnaire Mme [P], exploitait en location-gérance un fonds de commerce de bar, restaurant, cabaret, dancing sous l'enseigne « Les Folies Pigalle ».
Le contrat de location-gérance, non renouvelé, a pris fin le 31 décembre 2014.
Sur déclaration de la cessation des paiements du 8 avril 2015 et par jugement du 16 avril suivant, le tribunal de commerce de Paris a ouvert une liquidation judiciaire à l'égard de la société Paris Events, fixé la date de la cessation des paiements au 16 octobre 2013 et désigné la SCP BTSG en qualité de liquidateur.
Le 13 mars 2018, le ministère public a déposé une requête en prononcé d'une sanction personnelle à l'encontre de Mme [P] en reprochant à cette dernière d'avoir frauduleusement augmenté le passif, détourné une partie de l'actif et tenu une comptabilité manifestement incomplète ou irrégulière et de s'être abstenue de déclarer la cessation des paiements dans le délai légal.
Par jugement contradictoire du 11 février 2020, assorti de l'exécution provisoire, le tribunal de commerce de Paris, après avoir retenu tous les griefs sauf l'augmentation frauduleuse du passif, a prononcé une faillite personnelle à l'égard de Mme [P], fixé la durée de cette mesure à 10 ans et dit que les dépens seront employés en frais de liquidation judiciaire.
Mme [P] a relevé appel de ce jugement selon déclaration du 2 mars 2020.
Par conclusions déposées au greffe et notifiées par voie électronique le 29 mai 2020, Mme [P] demande à la cour d'infirmer le jugement et, statuant à nouveau, de rejeter la demande du ministère public tendant à voir prononcer une sanction personnelle à son encontre.
Suivant conclusions déposées au greffe et notifiées par voie électronique le 20 juillet 2020, la société BTSG, en qualité de liquidateur de la société Paris Events, demande à la cour de confirmer le jugement et de condamner Mme [P] à lui payer la somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.
Dans son « avis » déposé au greffe et notifié par voie électronique le 19 juin 2020, le ministère public « invite » la cour à confirmer le jugement en ce qu'il a condamné Mme [P] à une mesure de faillite personnelle mais estime que la durée de celle-ci pourrait être ramenée à 8 ans.
SUR CE,
- Sur l'augmentation frauduleuse du passif
L'article L. 653-4, 5°, du code de commerce prévoit qu'est passible d'une mesure de faillite personnelle le fait, pour tout dirigeant d'une personne morale, d'avoir frauduleusement augmenté le passif de celle-ci.
Le ministère public invite la cour à confirmer le jugement en ce qu'il a écarté le grief tenant à l'augmentation frauduleuse du passif et le liquidateur ne fait valoir aucun moyen sur celui-ci.
Dès lors, le grief ne peut être retenu.
- Sur le détournement d'une partie de l'actif
L'article L. 653-4, 5°, du code de commerce dispose qu'est passible d'une mesure de faillite personnelle le fait, pour tout dirigeant d'une personne morale, d'avoir détourné tout ou partie de l'actif.
Le ministère public soutient qu'entre 2012 et 2014, diverses personnes morales et physiques ont bénéficié du crédit de la société Paris Events sans que le caractère professionnel et l'intérêt pour l'exploitation de ces dépenses, justement chiffrées par le tribunal à 259 922 euros, n'aient été démontrés.
Il invoque, en particulier :
* le versement de loyers à la SCI KWW pour un montant de 120 000 euros entre mai 2012 et décembre 2013 au titre de locaux constituant le siège social de la société Paris Events appartenant à la société William Transport ;
* le financement, par la société KWW, d'une partie des loyers de l'appartement occupé par Mme [P] et M [O] et des frais de scolarité de leurs enfants mineurs ;
* le paiement d'honoraires à la société [S] [W], gérée par M. [O], pour un montant total de 83 000 euros, sans que la réalité des prestations ne soit démontrée ;
* le paiement, sans justification du caractère professionnel de la dépense, de factures d'eau concernant une villa située à Ramatuelle dues par la SCI Silvana ;
* le paiement de dépenses personnelles évaluées par l'administration fiscale à 31 140 euros (2012), 109 634 euros (2013) et 30 862 euros (2014), soit un total de 171 636 euros déduction faite des factures d'eau.
Le liquidateur développe des arguments similaires à ceux du ministère public et approuve le tribunal d'avoir chiffré les dépenses contraires à l'intérêt de la société Paris Events à 259 922 euros.
Mme [P] fait valoir que les dépenses incriminées ont été engagées dans l'intérêt social.
En particulier, elle argue que la société Paris Events a pris en charge les frais de déplacement, d'hôtel et de restauration des DJ sollicités pour animer des soirées, que des cocktails à des fins promotionnelles ont eu lieu à l'hôtel Bulgari lors de la fashion week, que la villa de [Localité 10] a été utilisée pour organiser des anniversaires et que les loyers versés à la société KWW concernaient les locaux constituant le siège social de la société Paris Events.
Elle souligne également que la commission départementale des impôts directs a considéré comme plausibles les explications avancées par la société Paris Events, notamment sur l'organisation de soirées à l'étranger à des fins promotionnelles.
Les différentes catégories de dépenses constitutives du détournement d'actif allégué seront examinées successivement ci-après.
* Les loyers réglés par la société Paris Events à la SCI KWW
Dans sa proposition de rectification du 27 novembre 2015, relative à l'exercice 2012, et celle du 29 mars 2016, afférente aux exercices 2013 et 2014, l'administration fiscale a considéré comme non engagés dans l'intérêt social les loyers payés par la société Paris Events à la société KWW (48 000 euros en 2012, 72 000 euros en 2013, 72 000 euros en 2014) après avoir relevé que le local abritant le siège social de la société Paris Events n'était pas la propriété de la société KWW, gérée par M. [O], concubin de Mme [P], mais de la société William Transport, principale associée de la société KWW, et que certains loyers du domicile commun de Mme [P] et de M. [O] situé [Adresse 4] à [Localité 9] ainsi que des frais de scolarité de leurs enfants mineurs avaient été payés par la société KWW.
L'administration fiscale semble ainsi avoir estimé que les loyers versés par la société Paris Events à la société KWW avaient en réalité servi à payer ceux dus au bailleur des locaux constituant le domicile personnel de Mme [P] et de M. [O] ainsi que des frais de scolarité des enfants de ces derniers.
Cette dernière circonstance n'est toutefois pas établie et il n'est produit aucun élément permettant de retenir que la société Paris Events a, au titre des locaux constituant son siège social, versé des loyers à la société William Transport en sus de ceux réglés à la société KWW.
Force est de constater, de surcroît, qu'il résulte de la réponse aux observations du contribuable du 8 juin 2016 (p. 3) que les rappels de TVA et d'impôt sur les sociétés afférents aux loyers facturés par la société KWW en 2013 et 2014 ont finalement été abandonnés par l'administration fiscale.
Ainsi, et même si le versement par la société Paris Events des loyers afférents à son siège social entre les mains de la filiale de la société William Transport, plutôt qu'entre celles de cette dernière, reste inexpliqué, le détournement d'actif n'est pas démontré.
* Les honoraires versés à [S] [W] à hauteur de 83 000 euros
La réponse aux observations du contribuable adressée par l'administration fiscale le 21 mars 2016 mentionne qu'en 2012, des paiements pour un montant total de 40 000 euros ont été effectués par la société Paris Events à la société [S] [W], créée en Belgique par M. [O], au titre de « prestations de DJ et autres performances artistiques » et constate, d'une part, que les règlements ont anticipé la facturation et, d'autre part, qu'il n'a pas été justifié de la réalité des prestations.
La proposition de rectification fiscale du 23 mai 2016 indique qu'en 2013, entre le 5 février et le 22 mai 2013, une somme totale de 43 000 euros a été payée à la société [S] [W] au titre de « prestations de DJ et autres performances artistiques » et relève, d'une part, que la charge a été constatée dans les comptes de la société Paris Events en une seule fois, le 28 octobre 2013, sous la forme d'une opération diverse et, d'autre part, qu'il n'a pas été justifié de la réalité des prestations.
Les décalages entre les règlements effectués et la constatation des charges correspondantes, les premiers précédant les secondes, et l'absence de justification de la réalité des prestations accomplies par la société [S] [W], créée par le concubin de Mme [P], tant lors du contrôle fiscal que devant la cour, conduisent à retenir que cette dernière a utilisé les fonds sociaux au profit de la société [W] sans contrepartie et ce, à concurrence de 83 000 euros (40 000 + 43 000 euros), commettant ainsi un détournement d'actif.
* Les frais relatifs à la villa appartenant à la SCI Silvana
Les propositions de rectification des 27 novembre 2015 et 19 mars 2016 et les réponses aux observations du contribuable des 21 mars, 2 juin et 10 juin 2016 mentionnent que la société Paris Events a payé en 2012, 2013 et 2014 des factures d'eau d'un montant total de 5 285,67 euros (1 498,88 euros le 11/10/12, 863,71 euros le 23/07/13, 1 357,03 euros le 17/10/13, 566,05 euros le 12/03/14 et 1 000 euros le 18/08/14) pour une villa située à Ramatuelle appartenant à la SCI Silvana, dont Mme [P] est la gérante et l'une des associés.
Elles relèvent également que l'allégation de Mme [P] selon laquelle la villa a été mise à disposition pour des manifestations festives professionnelles n'a été corroborée par aucune pièce.
Il n'est pas davantage justifié devant la cour d'une telle mise à disposition.
Il apparaît ainsi que les fonds sociaux ont été amputés d'une somme de 5 285,67 euros sans contrepartie pour la société Paris Events.
Le détournement d'actif est donc caractérisé, à due concurrence.
* Les autres dépenses
Il résulte des propositions de rectification des 27 novembre 2015 et 19 mars 2016 ainsi que des réponses aux observations du contribuable des 21 mars, 2 juin et 10 juin 2016 que l'administration fiscale a relevé l'existence de nombreuses charges supportées par la société Paris Events dont le caractère professionnel n'a pu être justifié par Mme [P] et qui, pour certaines, présentent un caractère personnel manifeste (achats de fournitures scolaires ou dans des magasins de jouets, achats d'un vélo, d'une table de ping pong, d'un oreiller, factures d'un club de sport rattachées aux clients Mme [P] et M. [O], entretien d'un véhicule Cadillac immatriculé au nom de M. [O], déplacements de M. [O], dépenses de cinéma, achats dans des commerces situés à proximité du domicile de Mme [P], etc.).
Il est à noter, également, que l'administration fiscale n'a pas remis en cause la déductibilité des frais de voyage et de déplacement déboursés au profit de DJ.
En définitive, et après avoir abandonné « par mesure de tempérament » certaines rectifications proposées en dépit de l'absence de justificatifs, l'administration fiscale a considéré comme non engagées dans l'intérêt de la société Paris Events des dépenses totalisant :
- en 2012, 32 639,63 euros incluant les 1 498,88 euros réglés au titre des factures d'eau de la villa de [Localité 10], soit 31 140,75 euros abstraction faite de ces factures ;
- en 2013, 111 855,15 euros incluant les 43 000 euros payés à la société [W] et les 2 220,74 euros versés au titre des factures d'eau de la villa de [Localité 10], soit 66 634,41 euros abstraction faite de ces derniers montants ;
- en 2014, 32 428,67 euros, comprenant les 1 566,05 euros versés au titre des factures d'eau de la villa de [Localité 10], soit 30 862,62 euros abstraction faite de ces factures.
Mme [P] ne justifie pas davantage devant la cour de ce qu'en dépit de leur nature, les dépenses concernées sont en rapport avec l'activité de la société Paris Events.
Les détournements d'actif liés aux « autres dépenses » ressortent donc à 128 637,78 euros (2012 : 31 140,75 euros ; 2013 : 66 634,41 euros ; 2014 : 30 862,62 euros).
En définitive, le total des sommes utilisées pour payer des dépenses étrangères à l'activité de la société Paris Events, et donc détournées, s'élève à 216 923,45 euros (83 000 + 5 285,67 + 128 637,78).
- Sur la tenue d'une comptabilité manifestement incomplète ou irrégulière
L'article L. 653-5, 6°, du code de commerce dispose qu'est passible d'une mesure de faillite personnelle, la personne mentionnée à l'article L. 653-1 du même code qui « [a] fait disparaître des documents comptables, [n'a pas] tenu de comptabilité lorsque les textes applicables en font obligation, ou [a] tenu une comptabilité fictive, manifestement incomplète ou irrégulière au regard des dispositions applicables ».
Le ministère public soutient que la comptabilité de l'exercice 2014 n'a pas été tenue de manière complète en ce que seule la balance générale « en brouillard » a été communiquée au liquidateur. Il souligne également que les comptes de la société Paris Events n'ont pas été déposés au greffe.
Le liquidateur prétend que Mme [P] a « omis de remettre les liasses fiscales » et « omis de tenir une comptabilité ».
Mme [P] conteste le grief en faisant valoir qu'il résulte des pièces jointes à la requête du ministère public que l'ensemble des éléments comptables nécessaires à la vérification de comptabilité pour la période du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2014 ont été remis à l'administration fiscale.
La proposition de rectification de l'administration fiscale du 23 mars 2016 mentionne que les écritures comptables afférentes aux exercices 2013 et 2014 de la société Paris Events ont été communiquées et ne relèvent pas leur caractère lacunaire.
Dans ces conditions, le seul défaut de remise, au liquidateur, d'une partie de la comptabilité et l'absence de dépôt des comptes sociaux au greffe ne suffisent pas à caractériser l'incomplétude de la comptabilité de l'exercice 2014.
Le grief ne sera donc pas retenu.
- Sur la tardiveté de la déclaration de la cessation des paiements
L'article L. 653-8, alinéa 3, du code de commerce, dans sa rédaction issue de la loi du 6 août 2015, moins sévère, dispose que l'interdiction de gérer peut être prononcée « à l'encontre de toute personne mentionnée à l'article L. 653-1 qui a omis sciemment de demander l'ouverture d'une procédure de redressement ou de liquidation judiciaire dans le délai de quarante-cinq jours à compter de la cessation des paiements, sans avoir, par ailleurs, demandé l'ouverture d'une procédure de conciliation ».
Le ministère public soutient que, compte tenu des multiples actions entreprises par les créanciers (inscriptions de privilège, contraintes de l'URSSAF, avis de mise en recouvrement, etc.), Mme [P] ne pouvait ignorer avoir omis de payer des dettes et en déduit que c'est sciemment que cette dernière a tardé à déclarer la cessation des paiements. Il estime également que le tribunal a justement évalué le passif né pendant la période suspecte en l'estimant à 671 909 euros.
Le liquidateur relève que Mme [P] s'est abstenue de déclarer la cessation des paiements dans le délai légal et qu'un passif de 731 927 euros est né pendant la période suspecte.
Mme [P] réplique avoir pris des mesures pour tenter de relancer l'activité de la société Paris Events, qui ont conduit à une augmentation de la fréquentation, et estime que, dans ces conditions, il ne peut lui être reproché d'avoir sciemment omis de déclarer la cessation des paiements dans le délai légal. Elle prétend également que le passif né pendant la période suspecte ne s'élève pas à 731 927 euros, montant qui, selon elle, comprend de nombreuses créances nées avant l'expiration du délai légal pour déclarer la cessation des paiements.
La date de la cessation des paiements ayant été fixée au 16 octobre 2013, Mme [P] disposait, en application de l'article L. 653-8 du code de commerce, d'un délai expirant le 30 novembre 2013 pour demander l'ouverture d'un redressement ou d'une liquidation judiciaires.
C'est donc avec 16 mois et 8 jours de retard qu'elle a effectué cette demande, le 8 avril 2015.
Le ministère public invoque des actions entreprises par les créanciers ayant alerté Mme [P] sur les difficultés de trésorerie de la société Paris Events mais n'en justifie pas et le liquidateur ne consacre aucun développement de ses écritures à l'élément moral du grief.
Plus généralement, les pièces versées aux débats ne renseignent pas sur la situation économique de la société Paris Events à l'époque de la cessation des paiements.
Dans ces conditions, et nonobstant son importance, il n'est pas établi que le retard dans la déclaration de la cessation des paiements procède d'une abstention délibérée.
Le grief doit donc être écarté.
- Sur le non-paiement des créances sociales et fiscales
Le liquidateur invoque un grief tenant au défaut de paiement des créances sociales et fiscales sans préciser le texte qui permettrait de sanctionner un tel comportement.
En conséquence, le grief ne peut être retenu.
- Sur la sanction
Il ressort de la liste des créances versée aux débats que le passif déclaré de la société Paris Events s'élève à 2 619 175,87 euros et celui définitivement admis à 880 965,78 euros, pour un actif réalisé ressortant à seulement 41 178,07 euros.
Alors que les trois années d'existence de la société Paris Events ont ainsi généré une importante insuffisance d'actif, Mme [P] a procédé à des prélèvements sociaux à des fins personnelles pour un total de 216 923,45 euros.
Si, étant sans emploi, percevant le RSA et ayant trois enfants à charge, elle se trouve actuellement dans une situation personnelle difficile l'ayant conduit à déposer un dossier de surendettement déclaré recevable le 14 juin 2018 et orienté vers un rétablissement personnel sans liquidation judiciaire, la gravité des faits de détournement d'actif relevés à son encontre justifie de l'éloigner de la vie des affaires pour une durée assez longue.
En considération des éléments qui précèdent, il sera infligé à Mme [P] une faillite personnelle d'une durée de 6 ans, le jugement étant confirmé en ce qu'il a prononcé une telle mesure mais infirmé en ce qu'il en a fixé la durée à 10 ans.
- Sur les dépens et frais irrépétibles
Mme [P], qui succombe pour l'essentiel, sera tenue aux dépens de première instance, le jugement étant infirmé de ce chef, et d'appel.
La demande du liquidateur fondée sur l'article 700 du code de procédure civile sera rejetée.
PAR CES MOTIFS
Confirme le jugement sauf en ce qu'il a fixé à 10 ans la mesure de faillite personnelle
prononcée à l'encontre de Mme [R] [P], née le [Date naissance 2] 1972 à Paris 15e, de nationalité française, demeurant [Adresse 4], [Localité 5], et ordonné l'emploi des dépens en frais de liquidation judiciaire,
Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,
Fixe à 6 ans la mesure de faillite personnelle prononcée à l'encontre de Mme [R] [P],
Rejette la demande de la SCP BTSG, en qualité de liquidateur de la société Paris Events, fondée sur l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne Mme [R] [P] aux dépens de première instance et d'appel.
La greffière,
Liselotte FENOUIL
La Présidente,
Marie-Christine HÉBERT-PAGEOT