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27/10/2022 | FRANCE | N°20/09418

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 9 - a, 27 octobre 2022, 20/09418


Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 9 - A



ARRÊT DU 27 OCTOBRE 2022



(n° , 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/09418 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CCBLH



Décision déférée à la Cour : Jugement du 8 juin 2020 - Tribunal de proximité de SAINT DENIS - RG n° 11-19-001468





APPELANT



Madame [G] [J]

né le 30 mai 1970 à [Localité

5]

[Adresse 3]

[Adresse 3]



représenté par Me Catherine COMME, avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS, toque : 250





INTIMÉE



ENGIE HOMES SERVICES, société par actions simplifi...

Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 9 - A

ARRÊT DU 27 OCTOBRE 2022

(n° , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/09418 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CCBLH

Décision déférée à la Cour : Jugement du 8 juin 2020 - Tribunal de proximité de SAINT DENIS - RG n° 11-19-001468

APPELANT

Madame [G] [J]

né le 30 mai 1970 à [Localité 5]

[Adresse 3]

[Adresse 3]

représenté par Me Catherine COMME, avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS, toque : 250

INTIMÉE

ENGIE HOMES SERVICES, société par actions simplifiée prise en son établissement secondaire ENGIE HOME SERVICES, agence [Localité 4], sis [Adresse 1]

N° SIRET : 301 340 584 06761

[Adresse 2]

[Adresse 2]

DÉFAILLANTE

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 13 septembre 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Muriel DURAND, Présidente, chargée du rapport

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Muriel DURAND, Présidente de chambre

Mme Fabienne TROUILLER, Conseillère

Mme Laurence ARBELLOT, Conseillère

Greffière, lors des débats : Mme Camille LEPAGE

ARRÊT :

- RÉPUTÉ CONTRADICTOIRE

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Mme Muriel DURAND, Présidente de chambre et par Mme Camille LEPAGE, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Le 14 novembre 2018, la société Engie Home Services a établi à Mme [G] [J] un devis portant sur la dépose de son ancienne chaudière, un désembouage et la pose d'une nouvelle chaudière basse consommation de marque ELM Leblanc de type ACLEIS BAS NOx de 24 W pour un montant de 2 596,78 euros et a procédé à son installation le 19 novembre 2018. La chaudière posée ayant présenté des défectuosités, une nouvelle chaudière identique a été installée le 26 novembre 2018. Suite à la persistance des dysfonctionnements et à la réalisation d'une expertise amiable le 17 janvier 2019, la société Engie Home Services a procédé à la dépose de la chaudière et au remboursement de la somme de 2 596,78 euros.

Saisi le 23 septembre 2019 par Mme [J] d'une demande tendant principalement à la condamnation de la société Engie Home Service au paiement de dommages et intérêts, le tribunal de proximité de Saint Denis, par un jugement réputé contradictoire rendu le 8 juin 2020 auquel il convient de se reporter, a rendu la décision suivante :

« condamne la société Engie Home Services à payer à Mme [J] la somme de 300 euros en réparation de son préjudice moral,

déboute Mme [J] de ses autres demandes,

condamne la société Engie Home Services aux entiers dépens ».

Le tribunal a retenu que la demanderesse rapportait bien la preuve du préjudice moral subi résultant des diverses démarches qu'elle avait dû entreprendre pour obtenir le premier remplacement de la chaudière, la réalisation de l'expertise amiable et le second remplacement avec recours à un nouveau prestataire. Il a en revanche considéré que les frais supplémentaires d'installation d'une nouvelle chaudière étaient liés au choix du nouveau modèle et que les factures de gaz produites ne permettaient pas d'établir une éventuelle surconsommation.

Par une déclaration par voie électronique en date du 15 juillet 2020, Mme [J] a relevé appel de cette décision.

Aux termes de conclusions remises par voie électronique le 27 octobre 2020, elle demande à la cour de :

- dire et juger que la société Engie Home Service a manqué à son obligation de conseil à son égard,

- condamner la société Engie Home Service à lui verser les sommes de :

- 357,22 euros en remboursement des frais d'installation supplémentaires de la nouvelle chaudière,

- 856.86 euros en remboursement des factures de gaz excessives,

- 1 500 euros en réparation de son préjudice moral,

- 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

L'appelante soutient que la société Engie Home Service a manqué à son obligation de conseil prévue par les articles 1112-1 du code civil et L. 111-1 du code de la consommation en raison du caractère inadapté de la première chaudière vendue.

Elle expose avoir découvert que la chaudière était non seulement inadaptée mais interdite et avoir subi un surcoût de consommation, outre un surcoût lors de l'installation d'une nouvelle chaudière. Elle souligne que ces mésaventures lui ont en outre causé un important préjudice moral, la chaudière litigieuse provoquant une chaleur étouffante et des claquements dans les radiateurs particulièrement gênants de jour mais surtout de nuit et ce d'autant que vit à son domicile un enfant lourdement handicapé qui a été perturbé et qu'elle faisait confiance à la société Engie Home Service et à la publicité de l'enseigne qui s'est avérée mensongère.

La société Engie Home Services ne s'étant pas constituée, Mme [G] [J] lui a signifié la déclaration d'appel le 26 août 2020 par acte délivré à domicile. La société Engie Homes Services n'a pas davantage constitué avocat.

Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions de l'appelante, il est renvoyé aux écritures de celle-ci conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 31 mai 2022 et 'affaire a été appelée à l'audience le 13 septembre 2022.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur le manquement de la société Engie Home Services à son obligation de conseil

L'article 1112-1 du code civil oblige celle des parties qui connaît une information dont l'importance est déterminante pour le consentement de l'autre à l'en informer dès lors que, légitimement, cette dernière ignore cette information ou fait confiance à son cocontractant.

Les articles L. 111-1 et suivants du code de la consommation mettent à la charge du professionnel une obligation de conseil et d'information du consommateur avant même la conclusion du contrat.

Il est constant que Mme [J], qui souhaitait changer de chaudière, s'est adressée à la société Engie Home Services qui est un professionnel et que celle-ci se devait de la conseiller sur le modèle afin qu'il soit adapté à son logement et l'informer des caractéristiques du ou des produits proposés.

L'article 16 de l'arrêté du 3 mai 2007 relatif aux caractéristiques thermiques et à la performance énergétique des bâtiments existants modifié par l'arrêté du 22 mars 2017 entré en vigueur au 1er janvier 2018 dispose qu'' « une chaudière non étanche à coupe-tirage de type B1 ne peut être installée, y compris en remplacement d'une chaudière du même type, qu'en logement collectif sur un conduit commun à plusieurs logements existants, ou en logement collectif sur un conduit individuel de plus de 10 mètres de longueur ».

Or il résulte tant de l'expertise contradictoire amiable qui a été diligentée par l'assureur de Mme [J] le 17 janvier 2019 que des propres courriers de la société Engie Home Services et de ceux du fabricant, que la chaudière proposée et installée chez Mme [J], qui vit en pavillon et ne dispose pas d'un conduit collectif, ne pouvait pas l'être. Le fabricant qui a envoyé son service technique a, par courrier du 25 janvier 2019, admis que l'installation n'était pas conforme dans la mesure où il s'agissait d'un pavillon. L'expert a quant à lui surtout mis l'accent sur la longueur du conduit inférieur à 10 mètres. La société Engie Home Services a admis que l'installation n'était pas adaptée et a accepté de rembourser Mme [J] de la totalité de la facture, ce qui a été fait par chèque envoyé par lettre du 27 février 2919.

Il est ainsi démontré que la société Engie Home Services a failli à son obligation de conseil puisque non seulement ce type de chaudière était interdit en pavillon mais qu'en outre la hauteur du conduit ne permettait pas de l'installer même en immeuble collectif. Le jugement sera donc confirmé sur ce point.

Sur les préjudices subis

1- Le surcoût d'installation

Une nouvelle chaudière a donc dû être installée. Toutefois, dès lors que Mme [J] ne pouvait plus, du fait de la réglementation issue de l'arrêté du 3 mai 2007, faire installer une chaudière de même type que celle qu'elle avait avant l'intervention litigieuse, tout changement impliquait nécessairement le choix d'un modèle différent et une adaptation supplémentaire des évacuations. Mme [J] doit donc être déboutée de sa demande en paiement de la somme de 357,22 euros en remboursement des frais d'installation supplémentaires de la nouvelle chaudière. Le jugement sera donc confirmé sur ce point.

2- Le surcoût de consommation de gaz

Le modèle litigieux a été installé le 19 novembre 2018 et finalement déposé le 13 mars 2019 et la nouvelle chaudière choisie (ELM Leblanc Megalis condensation) a été posée le 15 mars 2019.

Dans ses écritures, Mme [J] procède à la comparaison des montants facturés sur les périodes du 21 novembre 2017 au 20 janvier 2018 / 21 novembre 2018 au 20 janvier 2019 et 21 janvier 2018 au 28 mars 2018 /21 janvier 2019 au 28 mars 2019.

Or, ce qui doit être examiné pour apprécier la surconsommation n'est pas le montant des factures en euros qui dépendent du prix du kwh de gaz naturel, mais bien la consommation énergétique elle-même.

Sur ce point, les factures produites sur les périodes pertinentes montrent :

- sur la période du 21 novembre 2017 au 20 janvier 2018 une consommation de 7 963 kwh de gaz naturel,

- sur la période du 21 novembre 2018 au 20 janvier 2019 une consommation de 7 869 kwh de gaz naturel,

- sur la période du 21 janvier 2018 au 28 mars 2018 une consommation de 7 685 kwh de gaz naturel,

- sur la période du 21 janvier 2019 au 28 mars 2019 une consommation de 4 231 kwh de gaz naturel.

Il n'y a donc aucune surconsommation sur cette période après la pose de la chaudière litigieuse le 19 novembre 2018.

Mme [J] doit donc être déboutée de cette demande et le jugement doit être confirmé sur ce point.

3- Le préjudice moral

Il résulte de ce qui précède que la société Engie Home Services a installé chez Mme [J] une chaudière contraire à la réglementation qui vise à limiter le dérèglement climatique mais aussi à protéger le consommateur des effets néfastes pour la santé des gaz évacués. Si cette chaudière n'est pas interdite partout et peut être installée en logement collectif, c'est à la condition que le conduit individuel mesure au moins 10 mètres, ce qui n'était pas le cas de celui de Mme [J]. Cette non-conformité et le danger potentiel subi de ce fait ont incontestablement généré un préjudice moral, de même que l'obligation dans laquelle elle s'est trouvée de réaliser de nombreuses démarches en période hivernale.

S'agissant en revanche de l'inconfort lié à la surchauffe de son logement pendant la période où le modèle litigieux a été installé chez Mme [J] (19 novembre 2018 - 13 mars 2019), la cour observe qu'aucune pièce probante ne vient étayer cette affirmation et que le rapport d'expertise amiable ne fait aucunement mention de cette plainte.

S'agissant des claquements des radiateurs dont Mme [J] a fait état devant l'expert amiable, celui-ci indique que « l'hypothèse la plus prégnante repose dans le fait que la nouvelle chaudière dispose d'un meilleur rendement qu'à ce titre elle pourrait engendrer une dilatation des conduits aux endroits où les canalisations sont bridées soit aux droits des colliers et des traversées de porcher ». Il résulte des pièces produites que ces bruits de claquements n'ont pas cessé avec l'installation de la nouvelle chaudière puisque Mme [J] verse aux débats un procès-verbal de constat établi par huissier le 6 septembre 2019, soit après la dépose de la chaudière litigieuse et l'installation de la nouvelle chaudière à condensation dont la conformité n'est pas critiquée. Il en résulte que ces bruits ne sont pas dus au choix de la chaudière initiale mais bien au fait que les chaudières actuelles ont un rendement qui n'est pas compatible avec l'ancienneté de l'installation de Mme [J].

Compte tenu de ces éléments, le préjudice moral subi par Mme [J] doit être évalué à une somme de 500 euros et le jugement doit donc être réformé sur ce point.

Sur les autres demandes

La société Engie Home Services qui succombe doit supporter les dépens de première instance et d'appel. Il apparaît en outre équitable de mettre à sa charge au titre des frais irrépétible une somme de 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant par arrêt réputé contradictoire et en dernier ressort,

Confirme le jugement dont appel en toutes ses dispositions'sauf en ce qu'il a condamné la société Engie Home Services à payer à Mme [G] [J] la somme de 300 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral ;

Statuant à nouveau,

Condamne la société Engie Home Services à payer à Mme [G] [J] la somme de 500 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral ;

Y ajoutant,

Condamne la société Engie Home Services aux dépens de première instance et d'appel ;

Condamne la société Engie Home Services à payer à Mme [G] [J] la somme de 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

La greffièreLa présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 9 - a
Numéro d'arrêt : 20/09418
Date de la décision : 27/10/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-10-27;20.09418 ?
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