Copies exécutoiresREPUBLIQUE FRANCAISE
délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 3 - Chambre 5
ARRET DU 25 OCTOBRE 2022
(n° , 5 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/03273 - N° Portalis 35L7-V-B7D-B7JGP
Décision déférée à la Cour : Jugement du 29 Novembre 2018 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 16/17698
Après arrêt avant-dire-droit du 07 septembre 2021 rouvrant les débats, rendu par la cour de céans
APPELANT
LE MINISTERE PUBLIC pris en la personne de MONSIEUR LE PROCUREUR GENERAL - SERVICE CIVIL
[Adresse 2]
[Localité 4]
représenté à l'audience par Mme Laure de CHOISEUL-PRASLIN, avocat général, magistrat honoraire
INTIMEE
Madame [H] [K] née le 24 octobre 2002 à [Localité 6] au Sénégal
[Adresse 1]
[Localité 3]
représentée par Me Karima OUELHADJ, avocat au barreau de PARIS, toque : C2558
bénéficie d'une AIDE JURIDICTIONNELLE TOTALE en date du 1er avril 2019 n°2019/010784 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle du TGI de Paris
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 23 septembre 2022, en audience publique, le ministère public et l'avocat de l'intimée ne s'y étant pas opposés, devant Mme Hélène FILLIOL, présidente de chambre, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :
Mme Hélène FILLIOL, présidente de chambre
M. François MELIN, conseiller
Mme Marie-Catherine GAFFINEL, conseillère
Greffier, lors des débats : Mme Mélanie PATE
ARRET :- contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Mme Hélène FILLIOL, présidente de chambre et par Mme Mélanie PATE, greffière présente lors de la mise à disposition.
Vu le jugement rendu le 29 novembre 2018 par le tribunal de grande instance de Paris qui a constaté le respect des formalités de l'article 1043 du code de procédure civile et déclaré en conséquence recevable l'action du ministère public, débouté le ministère public de l'ensemble de ses demandes, jugé qu'[H] [K], née le 24 octobre 2002 à [Localité 6] au Sénégal de M. [M] [K] et de Mme [D] [P], est de nationalité française, ordonné la mention prévue à l'article 28 du code civil en marge des actes concernés et condamné le Trésor public aux dépens ;
Vu la déclaration d'appel en date du 12 février 2019 et les conclusions notifiées le 02 mai 2019 par le ministère public qui demande à la cour de constater que le récépissé prévu par l'article 1043 du code de procédure civile a été délivré, infirmer le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Paris le 29 novembre 2018 et statuant à nouveau, constater que le certificat de nationalité française délivré le 15 janvier 2003 à [H] [K] par le greffier en chef du tribunal d'instance de Paris 20ème l'a été à tort, dire et juger qu'[H] [K], se disant née le 24 octobre 2002 à [Localité 6] (Sénégal), n'est pas de nationalité française et ordonner la mention prévue par l'article 28 du code civil ;
Vu les conclusions en réponse notifiées le 31 juillet 2019 par M. [M] [K] et Mme [D] [P] épouse [K] ès-qualités de représentants légaux de leur fille mineure, [H] [K], qui demandent à la cour de débouter le ministère public en toutes ses demandes, confirmer le jugement du 29 novembre 2018, dire et juger que [H] [K], née le 24 octobre 2002 à [Localité 6] (Sénégal), est française en vertu de l'article 18 du code civil, ordonner la mention prévue par l'article 28 du code civil, et y ajoutant, condamner l'Etat à leur verser la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens de première instance et d'appel dont distraction pour ceux d'appel à Maitre Karima OUELHADJ, avocat, par application de l'article 699 du code de procédure civile ;
Vu l'arrêt rendu le 07 septembre 2021 par la cour d'appel de Paris qui a ordonné la réouverture des débats, rabattu l'ordonnance de clôture, invité Mme [H] [K] à intervenir volontairement à l'audience, renvoyé l'affaire devant le conseiller de la mise en état à l'audience du 04 novembre 2021 et réservé l'examen des demandes ;
Vu les conclusions aux fins de régularisation d'instance notifiées le 09 septembre 2021 par Mme [H] [K] qui demande à la cour de prendre acte de la reprise d'instance enrôlée sous le RG n°19/03273 par Mme [H] [K], née le 24 octobre 2022 à [Localité 6] (Sénégal), laquelle fait siennes les conclusions d'intimés en réponse produites par ses parents et de renvoyer l'examen de l'affaire aux fins de plaidoirie à telle date qu'il plaira ;
Vu l'ordonnance de clôture rendue le 16 juin 2022 ;
MOTIFS :
Il est justifié de l'accomplissement de la formalité prévue par l'article 1043 du code de procédure civile dans sa version applicable à la présente procédure, par la production du récépissé délivré le 12 février 2019 par le ministère de la Justice. La déclaration d'appel n'est donc pas caduque.
Mme [H] [K] soutient qu'elle est française par application de l'article 18 du code civil pour être née d'un père français.
Mme [H] [K] est titulaire d'un certificat de nationalité française délivré le 15 janvier 2003 par le greffier en chef du tribunal d'instance de Paris 20ème.
Le ministère public qui soutient que ce certificat de nationalité française a été délivré à tort à l'intéressée, doit en apporter la preuve en application de l'article 30 du code civil.
La force probante d'un certificat de nationalité française dépend des documents qui ont servi à l'établir et si le ministère public prouve que ce certificat a été délivré à tort à l'intéressée ou sur la base d'actes erronés, ce certificat perd toute force probante, étant précisé que l'article 47 du code civil dispose que « tout acte de l'état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité. Celle-ci est appréciée au regard de la loi française ».
Le certificat de nationalité française vise notamment son acte de naissance sénégalais et l'acte de mariage étranger des parents de l'intéressée.
Pour juger que le ministère public ne rapportait pas la preuve que le certificat de nationalité française avait été délivré à tort, les premiers juges ont notamment retenu que la transcription par le consulat général de France à [Localité 5] le 2 juillet 2015 de l'acte de mariage sénégalais de M. [M] [K] empêchait la remise en cause de la force probante de l'acte de mariage de ce dernier, laquelle ne pouvait l'être que par la voie d'une annulation judiciaire de l'acte transcrit.
Mais, comme le soutient le ministère public, la circonstance que l'acte de mariage étranger ait été transcrit par une autorité consulaire n'a pas pour effet de rendre les dispositions de l'article 47 du code civil inopérantes dès lors que la valeur probante de cette transcription est subordonnée à celle de l'acte étranger à partir duquel la transcription a été effectuée.
Aucune disposition ne fait obligation au ministère public d'agir en nullité de l'acte transcrit par l'officier d'état civil consulaire, préalablement à la contestation de la validité du certificat de nationalité française délivré au vu d'un acte dressé à l'étranger dont il est allégué qu'il est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité. Il suffit au ministère public, conformément à l'article 47 du code civil, d'établir que le certificat de nationalité française a été délivré à tort ou sur la base d'actes erronés, la transcription consulaire ne pouvant pas avoir plus de valeur que l'acte étranger au vu duquel elle a été faite et ne le purgeant ni de ses vices ni de ses irrégularités.
Or, le ministère public produit :
- une copie littérale délivrée le 2 avril 2002 de l'acte de mariage de [M] [K] et de [D] [P] célébré à [Localité 6] le 11 février 2000, portant le n°145, dressé par l'officier d'état civil de [Localité 6] le 31 décembre 2000. Cet acte ne mentionne pas de témoin (pièce n°4),
- une copie littérale d'acte de mariage n°145 délivrée le 27 mars 2008 qui mentionne la présence de deux témoins,
- un bordereau d'envoi du consulat général de France à [Localité 5] adressé au ministère de la Justice concernant M. [M] [K], né le 8 mars 1973 à [Localité 6] (Sénégal) portant mention des observations suivantes : « la vérification du registre lors de la mission de mars 2003 a permis de constater que 'l'acte de mariage n'est pas conforme à l'article 147 du code de la famille sénégalais constaté plus de 6 mois après la célébration, il aurait dû faire l'objet d'un jugement, de plus le 31 décembre 2000 est un dimanche ».
Le ministère public justifie donc de la non-conformité de l'acte de mariage aux dispositions de l'article 147 du code de la famille sénégalais en ce qu'il a été constaté plus de 6 mois après la célébration et de l'existence de deux copies de l'acte de mariage portant des mentions différentes concernant les témoins alors que l'acte de mariage est un acte unique de telle sorte que les copies doivent toujours avoir les mêmes références et contenu.
Le ministère public établit donc que l'acte de mariage étranger produit par Mme [H] [K] à l'appui de sa demande de certificat de nationalité française n'est pas fiable et probant au sens de l'article 47 du code civil.
Il s'ensuit que le certificat de nationalité française délivré à Mme [H] [K] l'a été à tort.
Il ne ressort pas des différentes copies littérales de l'acte de naissance de Mme [H] [K], dont la valeur probante est contestée par le ministère public, que la naissance de l'enfant ait été déclarée par M. [M] [K].
Le lien de filiation de Mme [H] [K] à l'égard de [M] [K] n'étant pas établi, il convient de constater son extranéité.
Les dépens seront supportés par Mme [H] [K] qui succombe en ses prétentions. La demande présentée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile doit être rejetée.
PAR CES MOTIFS :
Constate que le récépissé prévu par l'article 1043 du code de procédure civile a été délivré,
Déclare l'appel recevable,
Infirme le jugement,
Statuant à nouveau,
Dit que le certificat de nationalité française délivré à 15 janvier 2003 à Mme [H] [K] par le greffier en chef du tribunal d'instance de Paris 20ème sous le n°CNF 20/2003, l'a été à tort,
Dit que Mme [H] [K], se disant née le 24 octobre 2002 à [Localité 6] (Sénégal) n'est pas de nationalité française,
Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel,
Ordonne la mention prévue par l'article 28 du code civil,
Condamne Mme [H] [K] aux dépens d'appel.
LA GREFFIERE LA PRESIDENTE