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20/09/2022 | FRANCE | N°20/07088

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 8, 20 septembre 2022, 20/07088


Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 8



ARRÊT DU 20 SEPTEMBRE 2022



(n° /2022 , 7 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/07088 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CB2R5



Décision déférée à la Cour : Jugement du 29 Mai 2020 -Tribunal Judiciaire de MEAUX - RG n° 19/03407





APPELANTE



Madame [J] [S]

Née le [Date naissance 1] 1963 à [Loca

lité 4]

De nationalité française

Demeurant [Adresse 2]

[Adresse 2]



Représentée et assistée de Me Christelle CHOLLET de la SCP LCA - LES CONSEILS ASSOCIES, avocate au barreau de M...

Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 8

ARRÊT DU 20 SEPTEMBRE 2022

(n° /2022 , 7 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/07088 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CB2R5

Décision déférée à la Cour : Jugement du 29 Mai 2020 -Tribunal Judiciaire de MEAUX - RG n° 19/03407

APPELANTE

Madame [J] [S]

Née le [Date naissance 1] 1963 à [Localité 4]

De nationalité française

Demeurant [Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentée et assistée de Me Christelle CHOLLET de la SCP LCA - LES CONSEILS ASSOCIES, avocate au barreau de MELUN,

INTIMÉE

S.E.L.A.R.L. GARNIER GUILLLOUET, prise en la personne de Me [Y] [F], en qualité de liquidateur judiciaire de l'association du PONEY CLUB DES HAUTS GRÈS

Immatriculée au registre du commerce et des sociétés de MEAUX sous le numéro 478 547 243,

Ayant son siège social [Adresse 3]

[Adresse 3]

Représentée et assistée de Me Carole BOUMAIZA de la SCP GOMME et BOUMAIZA, avocat au barreau de PARIS, toque : J94,

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 18 Janvier 2022, en audience publique, devant la Cour, composée de :

Madame Marie-Christine HÉBERT-PAGEOT, présidente de chambre

Madame Anne-Sophie TEXIER, conseillère

Madame Florence DUBOIS-STEVANT, conseillère,

qui en ont délibéré.

Un rapport a été présenté à l'audience par Madame Marie-Christine HÉBERT-PAGEOT dans le respect des conditions prévues par l'article 804 du code de procédure civile.

Greffier, lors des débats : Madame Liselotte FENOUIL

MINISTÈRE PUBLIC : L'affaire a été communiquée au ministère public, représenté lors des débats par M. François VAISSETTE, avocat général, qui a fait connaître son avis écrit le 7 décembre 2021 et ses observations orales lors de l'audience.

ARRÊT :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Marie-Christine HÉBERT-PAGEOT, Présidente de chambre et par Liselotte FENOUIL, greffière, présente lors de la mise à disposition.

*

* *

FAITS ET PROCÉDURE :

Mme [J] [S] a créé trois associations, qui avaient pour activité de promouvoir l'insertion et la formation, dont l'association Poney Club des Hauts Grès. Elle en était la Présidente bénévole .

Sur assignation d'anciens salariés invoquant des décisions prud'homales, et par jugement du 4 novembre 2017, le tribunal de grande instance de Meaux a ouvert une procédure de liquidation judiciaire à l'égard notamment de l'association Poney Club des Hauts Grès, fixé provisoirement la date de cessation des paiements au 14 mai 2016,et désigné la Selarl Garnier-[F], en la personne de Maître [Y] [F], en qualité de liquidateur judiciaire.

Le 19 septembre 2019, la Selarl Garnier-[F], ès qualités de liquidateur judiciaire de l'association Poney Club des Hauts Grès, a fait assigner Mme [S] devant le tribunal judiciaire de Meaux afin de la voir condamner à une mesure d'interdiction de gérer de 5 ans ainsi qu'au paiement de la somme de 60.963,52 euros correspondant au montant de l'insuffisance d'actif, en lui reprochant d'avoir souscrit pour le compte d'autrui, sans contrepartie, des engagements jugés trop importants au moment de leur conclusion, eu égard à la situation de l'association et d'avoir omis volontairement de demander l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire dans le délai de quarante-cinq jours à compter de la cessation des paiements, sans avoir par ailleurs demandé l'ouverture d'une procédure de conciliation.

Par jugement du 29 mai 2020 le tribunal judiciaire de Meaux a condamné Mme [S] à payer à la Selarl Garnier-[F], en qualité de liquidateur judiciaire de l'association dénommée Poney Club Des Hauts Grès, la somme de 60.963,52 euros au titre de l'insuffisance d'actif, prononcé à l'égard de Mme [S] une interdiction de gérer d'une durée de deux ans, dit qu'en application des articles 768 et R.69-9 du code de procédure pénale, le présent jugement sera transmis par le greffier du tribunal au service du casier judiciaire, ainsi qu'au Fichier National automatisé des interdits de gérer, débouté Mme [S] de sa demande formée en vertu de l'article 700 du code de procédure civile et l'a condamnée aux dépens.

Mme [S] a relevé appel de cette décision le 8 juin 2020.

Par conclusions notifiées le 2 décembre 2021, Mme [S] demande à la cour de déclarer son appel recevable et fondé, en conséquence infirmer le jugement en ce qu'il l'a condamnée à payer la somme de 60.963,52 euros au titre de l'insuffisance d'actif et à une interdiction de gérer d'une durée de 2 ans avec publication, ainsi qu'aux dépens, statuant à nouveau, à titre principal, juger qu'elle n'a pas commis de faute de gestion de nature à engager sa responsabilité en comblement de passif de l'association Poney Club des Hauts Grès, ni de faute de gestion de nature à prononcer à son encontre une mesure d'interdiction de gérer, de condamner le liquidateur judiciaire ès qualités à lui payer la somme de 3.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens, subsidiairement, en cas de confirmation des condamnations, faire une application du principe de proportionnalité et la condamner à une peine de principe, et en cas de condamnation en comblement de passif, lui octroyer les plus larges délais de paiement pour s'acquitter de sa dette.

Dans ses conclusions n°2 notifiées par RPVA le 2 décembre 2021, la Selarl Garnier-[F], en la personne de Maître [Y] [F], ès qualités de liquidateur judiciaire de l'association Poney Club des Hauts Grès, demande à la cour de confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions, débouter Mme [S] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions, et la condamner au paiement de la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 ainsi qu'aux dépens.

Dans son avis du 6 décembre 2021, le ministère public invite la cour à confirmer le jugement déféré.

Ainsi qu'elle y avait été autorisée, Mme [S] a transmis en cours de délibéré son avis de non imposition au titre des revenus 2020.

SUR CE

Liminairement, il sera relevé que dans le cadre d'un projet qu'elle qualifie de social, Mme [S] a, en sa qualité de présidente de l'association Poney Club des Hauts Grès, embauché deux salariés à la fin de l'année 2015, MM.[I] et [O] [L], puis a procédé, le 2 février 2016, à leur licenciement pour motif économique.

MM.[L] ont contesté leur licenciement devant le conseil des prud'hommes de Meaux, et par deux ordonnances en date du 1er juillet 2016, le juge des référés a condamné l'association Poney Club des Hauts Grès à verser:

- à M.[O] [L] la somme de 49.184,30 euros brut au titre de dommages et intérêts couvrant la période des salaires de janvier 2016 au 14 novembre 2018, la somme de 5.278 euros bruts au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés avec intérêt au taux légal, celle de 300 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

-verser à M. [I] [L] la somme de 2.515,38 euros bruts à titre de rappel de salaire pour janvier et février 2016 avec intérêt au taux légal, la somme de 3.484 euros à titre de dommages-intérêts pour rupture abusive du contrat de travail, la somme de 300 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

L'appel relevé par l'association Poney Club des Hauts Grès a fait l'objet d'une mesure de radiation en février 2017.

- Sur la responsabilité pour insuffisance d'actif

L'article L.651-2 du code de commerce dispose que lorsque la liquidation judiciaire d'une personne morale fait apparaître une insuffisance d'actif, le tribunal peut, en cas de faute de gestion ayant contribué à cette insuffisance d'actif, décider que le montant de cette insuffisance d'actif sera supporté, en tout ou partie, par tous les dirigeants de droit ou de fait, ou par certains d'entre eux, ayant contribué à la faute de gestion. En cas de pluralité de dirigeants, le tribunal peut, par décision motivée, les déclarer solidairement responsables. Toutefois, en cas de simple négligence du dirigeant de droit ou de fait dans la gestion de la société, sa responsabilité ne peut être engagée.

Il résulte de ce texte que pour condamner un dirigeant de droit ou de fait à supporter tout ou partie de l'insuffisance d'actif, il convient de caractériser l'existence de l'insuffisance d'actif, d'une ou plusieurs fautes de gestion, lesquelles ne doivent pas constituer une simple négligence, ainsi que le lien causal entre la ou les fautes et l'insuffisance d'actif .

- sur l'insuffisance d'actif:

Selon le liquidateur l'insuffisance d'actif, en l'absence de tout actif recouvré, correspond au passif proposé à l'admission soit 60.963,52 euros.

Ce montant n'étant pas contesté, la cour retiendra que l'insuffisance d'actif s'élève à 60.963,52 euros.

- sur les fautes de gestion

Deux fautes de gestion sont reprochées à Mme [S], le défaut de déclaration de cessation des paiements dans le délai légal, et d'avoir conclu deux contrats de travail sans s'assurer de la capacité de l'association à pouvoir les assumer, puis en procédant au licenciement des deux salariés sans respecter les dispositions du code du travail.

S'agissant de l'absence de déclaration de cessation des paiements, Mme [S] objecte que le passif de l'association résulte des deux ordonnances de référés rendues le 1er juillet 2016, que l'association n'était donc pas en état de cessation des paiements au 14 mai 2016, que les ordonnances de référés n'ont pas autorité de la chose jugée au principal même si elles sont devenues irrévocables, de sorte que l'état de cessation des paiements n'était pas acquis le 14 mai 2016 pas plus que le 1 er juillet 2016. Elle ajoute qu'il n'y a pas eu aggravation de la situation de la société, entre le moment où l'association a été condamnée et le jour de l'assignation en liquidation judiciaire, puisqu'aucune autre dette n'est venue accroitre le passif en dehors des deux condamnations

Mme [S] n'a jamais déclaré la cessation des paiements, la liquidation ayant été ouverte sur assignation des deux anciens salariés.

La date de cessation des paiements a été fixée par le jugement d'ouverture au 14 mai 2016 soit avec un report de 18 mois. Cette décision devenue définitive s'impose au juge de la sanction.

Si cette absence de déclaration de la cessation des paiements dans le délai légal de 45 jours constitue une faute de gestion imputable à la présidente, il reste à établir que cette faute ne constitue pas une simple négligence et qu'elle a contribué à l'insuffisance d'actif.

Or, il sera relevé, d'une part que le fait générateur à l'origine des condamnations prud'homales est le licenciement irrégulier des deux salariés intervenu antérieurement à la date de cessation des paiements, d'autre part que les décisions prud'homales constituant le seul passif de l'association lequel équivaut en l'espèce au montant de l'insuffisance d'actif, sont en date du 1er juillet 2016, soit deux jours avant l'expiration du délai de 45 jours pour déclarer la cessation des paiements, de sorte qu'il n'est pas établi que l'omission de déclarer la cessation des paiements a aggravé l'insuffisance d'actif.

Ce grief ne peut donc constituer une faute de gestion sanctionnable au visa de l'article L651-2 du code de commerce.

S'agissant de la seconde faute, le liquidateur indique que Mme [S] a conclu deux contrats de travail dont la charge ne pouvait être assurée par l'association qui n'avait aucun financement et aucun compte bancaire et qu'il résulte des décisions du conseil des prud'hommes que les salaires de MM.[L] n'étaient pas réglés pour l'un depuis le mois de novembre 2015 et pour l'autre depuis le mois de janvier 2016, que ces fautes ont conduit à la cessation des paiements et à une insuffisance d'actif de 60.963,52 euros.

Mme [S] réplique qu'elle a financé la construction d'une carrière équestre avec ses deniers personnels, qu'elle même était présidente bénévole et qu'elle a embauché les deux salariés dont les qualifications correspondaient aux besoins de l'activité de l'association et aux critères d'embauche en contrats aidés et qu'elle a dû les licencier à cause de graves manquements à leurs obligations. Elle soutient que ni l'embauche ni le licenciement de MM. [L] rendu inévitable du fait de leurs comportements et manquements contractuels ne peuvent être de nature à caractériser une faute de gestion.

En sa qualité de présidente, Mme [S] a conclu deux contrats de travai:l

- avec M.[O] [L], le 15 novembre 2015, un contrat à durée déterminée, emploi avenir, pour une durée de 36 mois, à temps plein en qualité d'ouvrier en maçonnerie,

- avec M.[I] [L], en décembre 2015, un contrat à durée indéterminée, pour un temps partiel de 20 heures hebdomadaires, en qualité d'ouvrier qualifié maconnerie.

Elle a licencié ces deux salariés pour motif économique par lettres en date du 3 février 2016, toutes deux ainsi rédigées: ' nous vous informons que nous décidons de prendre une mesure de licenciement pour raison économique vous concernant . Ce licenciement prendra effet à la date du 22 février compte tenu d'un préavis d'une durée de 2 semaines . Nous vous dispensons d'effectuer cette période de préavis . Un solde de tout compte vous sera envoyé en date du 22 février 2016 en recommandé' .

Il résulte des ordonnances de référé rendue le 1er juillet 2016 que le conseil des prud'hommes de Meaux a:

- s'agissant de M. [O] [L], rappelé les dispositions des articles L1243.1 et L1243-4 du code du travail qui prévoient que, sauf accord des parties, le contrat de travail à durée déterminée ne peut être rompu avant l'échéance du terme qu'en cas de faute grave ou de force majeure et qu'en dehors de ces cas, la rupture du contrat de travail ouvre droit pour le salarié à des dommages-intérêts d'un montant égal aux rémunérations qu'il aurait perçues jusqu'au terme du contrat, et a donc condamné l'association à payer la somme de 49.184,30 euros bruts, demandée par le salarié qui indiquait avoir perçu un acompte de 700 euros sur sa rémunération du mois de janvier 2016, à titre de rappel de salaire de janvier 2016 au 14 novembre 2018 ainsi que la somme de 5.278 euros à titre d'indemnités compensatrices de congés payés.

- s'agissant de M. [I] [L], relevé qu'il n'avait pas reçu de lettre de convocation à l'entretien préalable, lequel n'avait pas eu lieu, que l'association n'avait mentionné dans la lettre de licenciement ni les motifs économiques qu'elle invoquait, ni la priorité de réembauche, ni ses conditions de mise en oeuvre, retenu que le licenciement n'était pas économique et qu'il devait être considéré comme sans cause réelle et sérieuse, condamné l'association à payer les salaires de janvier et février 2006, soit 2.515,36 euros et alloué la somme de 3.484 euros à titre de dommages-intérêts.

S'agissant d'emplois dits aidés, Mme [S] a procédé à ces embauches en prenant en compte les subventions publiques attendues, lesquelles représentent un taux de prise en charge de 75% lorsque l'employeur est une association.

C'est en définitive, d'une part le licenciement avant le terme du contrat de travail à durée déterminée, d'autre part le non respect de la procédure de licenciement qui a conduit à la condamnation de l'association.

L'ignorance des règles élémentaires du droit du travail de la part de Mme [S], alors qu'elle présidait une entité employant des salariés, est incompatible avec l'attitude d'un dirigeant normalement avisé se trouvant confronté à une problématique classique, a lourdement obéré les finances de l'association qu'elle a directement conduit à la liquidation judiciaire.

Cette faute de gestion est caractérisée et ne se limite pas à une simple négligence, tout dirigeant devant connaître l'exigence de rigueur qui s'attache au respect de la procédure de licenciement. Cette faute est à l'origine de l'insuffisance d'actif.

- sur la sanction pécunaire

Mme [S] était présidente bénévole de l'association. Elle a perdu les économies qu'elle avait investies (34.744,35 euros) dans la création d'un centre équestre qui s'intégrait à un projet social. Elle justifie de son non-imposition à l'impôt sur les revenus 2020, compte tenu de l'extrême modicité de ses ressources (2.945 euros).

Compte tenu des faits de l'espèce, la cour condamnera Mme [S] au titre de sa responsabilité pour insuffisance d'actif au paiement d'une somme de 3.000 euros, le jugement étant infirmé en ce sens.

- sur la sanction personnelle

En application de l'article L 653-8 du code de commerce, une interdiction de gérer peut être prononcée à l'encontre de toute personne mentionnée à l'article L653-1 qui a omis sciemment de demander l'ouverture d'une procédure de redressement ou de liquidation judiciaire dans le délai de quarante-cinq jours à compter de la cessation des paiements, sans avoir, par ailleurs, demandé l'ouverture d'une procédure de conciliation.

Eu égard à la date de cessation des paiements fixée au 14 mai 2016, le délai de 45 jours pour déclarer la cessation des paiements expirait le 28 juin 2016. Les condamnations prononcées par le conseil des prud'hommes de Meaux, qui constituent le seul passif de l'association, sont intervenues le 1er juillet 2016. L'appel relevé par l'association a été radié en février 2017, de sorte qu'à tout le moins à compter de cette date, Mme [S] n'a pu ignorer l'existence de ce passif en face duquel elle ne disposait d'aucun d'actif. Ce grief est donc constitué.

Il résulte de l'article L653-5, 3° du code de commerce, qu'est passible de faillite personnelle le dirigeant qui a souscrit pour le compte d'autrui, sans contrepartie, des engagements jugés trop importants au moment de leur conclusion eu égard à la situation de l'entreprise ou de la personne morale.

Ce grief n'est pas caractérisé dès lors que les contrats de travail souscrits par Mme [S] pour le compte de l'association et les engagements financiers en découlant n'étaient pas sans contrepartie à l'origine, mais rémunéraient l'activité fournie par les salariés au profit de la personne morale.Il n'est pas contesté que MM.[L] ont réellement accompli des travaux de maçonnerie avant leur licenciement, leur emploi n'étant pas fictif.

Seul le premier grief sera en conséquence retenu. Il mérite d'être sanctionné par une peine d'interdiction de gérer en ce qu'il est révélateur d'une méconnaissance des règles de gestion d'une entreprise et du risque que cette situation fait courir aux créanciers. La cour, réformant le jugement, prononcera à l'encontre de Mme [S] une interdiction de gérer d'une durée de 1 an.

- Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile

Mme [S], bien que voyant les condamnations allégées en appel, demeure sanctionnée à titre personnel et patrimonial. Elle sera donc condamnée aux dépens et ne peut prétendre être indemnisée de ses frais irrépétibles au titre de l'article 700 du code de procédure civile .

Aucune considération d'équité ne commande d'allouer au liquidateur judiciaire, ès qualités, une indemnité procédurale.

PAR CES MOTIFS

Infirme le jugement déféré, sauf en ce qu'il a condamné Mme [S] aux dépens et l'a déboutée de sa demande au titre des frais irrépétibles de procédure,

Statuant des chefs infirmés et y ajoutant,

Condamne Mme [J] [S] à payer à la Selarl Garnier -[F], en la personne de Me [Y] [F], en qualité de liquidateur judiciaire de l'association Poney Club Des Hauts Grès, la somme de 3.000 euros au titre de l'insuffisance d'actif,

Prononce à l'égard de Mme [J] [S], née le [Date naissance 1] 1963 à [Localité 4] (Seine et Marne), de nationalité française, demeurant [Adresse 2], une interdiction de diriger, gérer et administrer, ou contrôler, directement ou indirectement, toutes entreprise commerciale ou artisanale, toute exploitation agricole et toute personne morale, d'une durée de 12 mois.

Dit que les inscriptions au casier judiciaire et sur le fichier des interdits de gérer seront modifiées pour tenir compte de la présente décision,

Déboute les parties de leurs demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne Mme [S] aux dépens d'appel et admet l'avocat concerné au bénéfice de l'article 699 du code de procédure civile.

La greffière,

Liselotte FENOUIL

La Présidente,

Marie-Christine HÉBERT-PAGEOT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 8
Numéro d'arrêt : 20/07088
Date de la décision : 20/09/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-09-20;20.07088 ?
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