Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE
délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 4 - Chambre 8
ARRÊT DU 14 SEPTEMBRE 2022
(n° 2022/ 129 , 16 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/00311 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CBGZI
Décision déférée à la Cour : Jugement du 05 Novembre 2019 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 17/05884
APPELANTE
SARL [S] [Z] YACHT BROKERAGE (BGYB)
[Adresse 1]
[Localité 8]
représentée par Me Philippe MEYLAN de la SCP TNDA, avocat au barreau de PARIS, toque : P0505
INTIMÉES
Société ARB INTERNATIONAL LIMITED, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés audit siège en cette qualité
[Adresse 2]
LONDRES - ROYAUME UNI
représentée par Me Christophe HUNKELER du PARTNERSHIPS PENNINGTONS MANCHES COOPER LLP, avocat au barreau de PARIS, toque : D1037 substituée par Me Franck HAMONIER, avocat au barreau de ROUEN, toque : 43
SAS LES SYNDICATS SOUSCRIPTEURS DU LLOYD'S, agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
chez LLOYD'S FRANCE [Adresse 5]
[Localité 4]
représentée par Me Aurélia CADAIN de la SELEURL SELARL Aurélia Cadain, avocat au barreau de PARIS, toque : P0555 substituée par Me Arnaud ATTIAS, avocat au barreau de PARIS
SARL AUDASSUR, représentée par son gérant en exercice,
[Adresse 3]
[Localité 4]
Immatriculée au RCS de PARIS sous le numéro : 320 789 407
Représenté par Me Marc FORIN, avocat au barreau de PARIS, toque E0773
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 23 Mai 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant M. Julien SENEL, Conseiller, chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Mme Béatrice CHAMPEAU-RENAULT, Présidente de chambre
Mme Laurence FAIVRE, Conseillère
M. Julien SENEL, Conseiller
Greffier, lors des débats : Mme Séphora LOUIS-FERDINAND
ARRÊT : Contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Béatrice CHAMPEAU-RENAULT, Présidente de Chambre et par Laure POUPET, greffière présente lors de la mise à disposition.
*****
EXPOSÉ DU LITIGE :
La société SARL [S] [Z] Yacht Brokerage, par abréviation BGYB, spécialisée dans le courtage d'opérations de vente ou de location de navires, est intervenue en 2016 dans une opération d'intermédiation et d'assistance pour la location à la société Lattice Group d'un voilier de course, dénommé 'La Bête', appartenant à la société de droit anglais 'La Bête Sailing Limited'.
Au mois de mai 2016, voulant remettre au loueur le montant de la consignation sur frais de bord recueilli par ses soins auprès de la société locataire, la société BGYB a été, à la suite d'une malversation commise par un tiers inconnu, amenée à se libérer des fonds entre des mains indélicates.
M. [S] [Z], en sa qualité de gérant et actionnaire principal de la société BGYB, a déposé plainte le 18 juillet 2016 pour escroquerie, au nom de la société BGYB, auprès du commissariat de police central de [Localité 8].
La société BGYB a effectué, par courriel et lettre recommandée avec accusé de réception du 24 juin 2016, une déclaration de sinistre auprès de M. [E] [M], qui déclare exercer l'activité de courtage d'assurance accessoire à l'activité d'agent général d'assurance, par l'intermédiaire duquel elle a souscrit une assurance de responsabilité civile professionnelle auprès de la société 'les syndicats souscripteurs du Lloyd's de Londres' via la société AUDASSUR (courtier et conseils en assurances) et/ou la société ARB International Limited (société de droit anglais ayant le statut de courtier en assurances exerçant en France en Libre Prestation de Services) pour couvrir les risques liés à son activité.
Cette déclaration est restée sans suite, l'assureur ayant refusé sa garantie d'assurance en considérant que le sinistre tombait dans le champ de la clause excluant tous les risques liés au détournement de liquidités ou ordres de valeur.
C'est dans ce contexte que la société BGYB a, par assignations des 3 et 12 avril 2017, fait citer devant le tribunal de grande instance de Paris, la société AUDASSUR, M. [E] [M], la société ARB International, ainsi que les syndicats souscripteurs du Lloyd's de Londres concernés par le contrat n° B0 42 415 INT 02 945 , représentés en France par leur mandataire général, la société Lloyd's France SAS , aux fins de voir dire que les sociétés AUDASSUR, ARB Limited et Lloyd's avaient engagé leur responsabilité en lui refusant la prise en charge de sa défense et de l'indemnisation de sa cliente, la société La Bête Sailing Limited, de les condamner en conséquence in solidum à prendre en charge et/ou l'indemniser pour tous frais à exposer et/ou exposés au titre de sa défense, sur présentation de justificatifs (factures ), de les voir condamner in solidum à l'indemniser et à la garantir de toute condamnation, sanction financière et/ou de toutes conséquence de toutes demandes, actions ou instances fondées sur le sinistre déclaré, de condamner la société ARB International Limited au paiement de la somme de 50 000 euros a titre de dommages-intérêts provisionnels, de condamner in solidum les sociétés Audassur, ARB International et les Lloyd's au paiement in solidum d'une somme de 10 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
Par décision du 5 novembre 2019, le tribunal de grande instance de Paris a :
- déclaré la société BGYB recevable en toutes ses demandes ;
- débouté M. [E] [M] de sa demande de rejet des pièces en langue anglaise ;
- mis M. [E] [M] et la société AUDASSUR hors de cause;
- débouté la société BGYB de l'ensemble de ses demandes ;
- débouté les autres parties de toutes leurs demandes plus amples ou contraires ;
- débouté l'ensemble des parties de leurs demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile et condamné la société BGYB aux dépens.
Par déclaration électronique du 19 décembre 2019, enregistrée au greffe le 7 janvier 2020, la SARL [S] [Z] YACHT BROKERAGE a interjeté appel à l'encontre de la société ARB INTERNATIONAL LTD, les syndicats souscripteurs du Lloyd's et la société AUDASSUR en précisant que l'appel tend à l'infirmation du jugement en ce qu'il a :
- mis hors de cause la société AUDASSUR,
- débouté la société BGYB de l'ensemble de ses demandes,
- condamné la société BGYB aux entiers dépens.
La société ARB INTERNATIONAL LTD a assigné en appel provoqué M. [M] par acte d'huissier du 14 août 2020.
Par ordonnance du 15 avril 2021, le magistrat en charge de la mise en état a constaté l'extinction de l'instance et le dessaisissement de la cour à l'égard de M. [M], dit que l'instance se poursuit à l'égard des autres parties et que les frais de l'instance éteinte seront, sauf convention contraire, supportés par l'appelant.
Aux termes de ses dernières écritures transmises par voie électronique le 16 novembre 2020, la société BGYB demande à la cour de :
- constater, dire et juger qu'elle est recevable et bien fondée en ses demandes ; que le sinistre intervenu rentre dans le champ des sinistres couverts par le contrat d'assurance de responsabilité civile professionnelle n° B042416INT02945 dont bénéficie la société BGYB;
- condamner en conséquence in solidum les syndicats du LLOYD'S et la société Lloyd's France (RG 422 066 613) à exécuter leurs obligations d'indemnisation auprès de la société LA BETE SAILING LIMITED et à en justifier à la société BGYB sous un délai de 15 jours à compter de la signification de l'arrêt à intervenir ; subsidiairement les condamner à payer à la société BGYB la somme de 95 000 £ correspondant au montant de la réclamation de la victime, BGYB acceptant en pareil cas de décharger l'assureur ;
- les condamner à indemniser la société BGYB pour tous frais exposés au titre de sa défense, sur présentation de justificatifs (déduction faite des sommes perçues au titre de l'article 700) ; les condamner plus généralement in solidum à indemniser, garantir et tenir indemne la société BGYB de toute condamnation, sanction financière et/ou de toutes conséquences de toutes demandes actions ou instances résultant du sinistre déclaré ;
- constater, dire et juger en outre que les syndicats du LLOYD'S et la société Lloyd's France (RG 422 066 613) ont manqué à leurs obligations de diligences et de bonne foi dans l'exécution du contrat ; qu'elles ont engagé leur responsabilité et doivent indemniser BGYB des conséquences de sa négligence et mauvaise foi ;
- condamner in solidum ces dernières à verser à BGYB la somme de 20 000 euros en réparation de son, préjudice financier, qui résulte de la dénonciation du contrat de charter, et de la perte de chance de percevoir des commissions à ce titre, comme de percevoir une commission de vente sur le navire, dont la vente a été confiée à un tiers ;
Subsidiairement,
- constater dire et juger que la société BGYB n'a jamais été alertée sur le fait que le contrat ne couvrait pas un risque qui est pourtant au c'ur de l'activité pour laquelle elle a souscrit le contrat d'assurance ; que cette situation caractérise un manquement à l'obligation de conseil des intermédiaires en assurance qui ont placé ce contrat auprès d'elle ;
- condamner en conséquence in solidum M. [M], les sociétés AUDASSUR et ARB International Ltd à verser à BGYB à titre indemnitaire la somme équivalente en euros à la somme de 95.000 Livres anglaises ; outre la somme de 20.000 euros ;
En tout état de cause,
- condamner in solidum les sociétés défenderesses au paiement de la somme de 10.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens ;
- débouter les autres parties en toutes leurs demandes, fins et conclusions en ce qu'elles sont dirigées contre la société BGYB.
Aux termes de ses dernières écritures (n°2) transmises par voie électronique le 12 avril 2021, la société ARB INTERNATIONAL LIMITED demande à la cour, au visa des dispositions des articles 1103, 1190 du code civil et l'article L.113-1 du code des assurances:
- d'infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a jugé que BGYB justifiait d'un intérêt à agir à son encontre et rejeté la fin de non-recevoir pour défaut d'intérêt à agir, et statuant à nouveau, de :
. juger que BGYB ne justifie d'aucun intérêt à agir dans cette affaire ;
. en conséquence, rejeter purement et simplement toute demande formulée par BGYB à son encontre comme entachée d'irrecevabilité ;
- À titre subsidiaire, confirmer le jugement entrepris en ce qu'il n'a retenu aucune faute à l'endroit de ARB INTERNATIONAL LTD et débouté BGYB de sa demande de condamnation à son encontre.
A titre très subsidiaire, infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a mis hors de cause AUDASSUR et statuant à nouveau :
- condamner AUDASSUR à réparer le préjudice subi par BGYB s'il était justifié ;
- débouter BGYB de sa demande de condamnation à l'encontre de ARB INTERNATIONAL LTD.
À titre infiniment subsidiaire, infirmer le jugement en ce qu'il a jugé que le fait dommageable entrait dans la définition de la clause d'exclusion excluant la prise en compte des dommages liés à la perte, au détournement ou à la destruction de liquidités ou d'instruments de valeur, y compris les devises, les billets de banque, obligations, titres au porteur, instruments négociables, traites bancaires, chèques ou ordres de paiement et configurations informatiques et en conséquence jugé que la garantie était non mobilisable; et statuant à nouveau :
- juger la garantie des souscripteurs du Lloyd's de Londres mobilisable ;
- juger, en conséquence, que la société ARB INTERNATIONAL LTD n'a commis aucune faute ;
- débouter la société BGYB de l'ensemble de ses demandes dirigées à son encontre.
En tout état de cause et statuant à nouveau,
- débouter AUDASSUR et M. [M] de leur demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- débouter BGYB, AUDASSUR, M. [M] et les syndicats souscripteurs du Lloyd's de toutes leurs demandes plus amples ou contraires en tant que dirigées contre la société ARB INTERNATIONAL LTD ;
- condamner BGYB et/ou tout succombant à verser à la société ARB INTERNATIONAL LTD
la somme de 15.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamner la société BGYB et/ou tout succombant aux entiers dépens, en application de l'article 699 du code de procédure civile.
Aux termes de ses dernières écritures (n°2) transmises par voie électronique le 12 novembre 2020, la société AUDASSUR demande à la cour :
- Sur l'appel principal de la société BGYB :
Juger la société BGYB mal fondée en son appel principal dirigé à son encontre ;
L'en débouter ;
Confirmer en conséquence le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;
Débouter la société BGYB de toutes demandes dirigées à son encontre ;
Condamner la société BGYB au paiement d'une somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- Sur l'appel incident de la société ARB INTERNATIONAL :
Juger irrecevable en vertu de l'article 564 du code de procédure civile l'appel incident de la société ARB INTERNATIONAL à son encontre,
Subsidiairement, juger mal fondé l'appel incident de la société ARB INTERNATIONAL et en conséquence l'en débouter,
Condamner la société ARB INTERNATIONAL au paiement d'une somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamner les sociétés BGYB et ARB INTERNATIONAL aux entiers dépens, dont distraction.
Aux termes de ses dernières écritures (n°2) transmises par voie électronique le 9 novembre 2020, les syndicats souscripteurs du Lloyd's de LONDRES concernés par le contrat n°B042415INT02945, représentés par leur mandataire général en France, la société Lloyd's France, demandent à la cour au visa des articles 132 et 906 du code de procédure civile, de la police d'assurance responsabilité civile professionnelle souscrite par BGYB auprès des souscripteurs du Lloyd's de Londres et des articles L. 113-1 et L. 124-5 4ème alinéa du code des assurances, de :
1) Sur la non-garantie du sinistre
- confirmer le jugement attaqué en ce qu'il a jugé que :
- la clause 3.1.H des conditions spéciales de la police d'assurance 'responsabilité civile professionnelle des intermédiaires de l'industrie maritime et offshore' n°B042415INT02945 exclut la couverture du présent sinistre ;
- c'est à bon droit que les souscripteurs du Lloyd's de Londres ont refusé de couvrir le sinistre, compte tenu des termes clairs et précis de la police d'assurance responsabilité civile professionnelle ;
A titre subsidiaire, si la cour fait droit à la demande d'indemnité d'assurance de BGYB :
- juger que la franchise de 2.500 euros doit venir en déduction du montant du sinistre de 95.000 £ ;
- si la cour condamne les syndicats souscripteurs du Lloyd's à verser l'indemnité d'assurance directement à la société La Bête Sailing, condamner BGYB à leur communiquer ses coordonnées ;
- si la cour condamne les syndicats souscripteurs du Lloyd's à verser l'indemnité d'assurance à BGYB, condamner cette dernière à la relever et garantir de toute action dirigée par la société La Bête Sailing contre les syndicats souscripteurs du Lloyd's.
2) Sur l'absence de responsabilité des syndicats souscripteurs du Lloyd's de Londres :
- juger que BGYB a fait preuve d'une particulière légèreté et négligence dans ses relations avec les souscripteurs du Lloyd's de Londres ;
- juger que les souscripteurs du Lloyd's de Londres ont fait preuve de diligence et ont notamment immédiatement informé BGYB de leur décision de refus de garantie et des motifs ;
- confirmer le jugement attaqué en ce qu'il a jugé que les souscripteurs du Lloyd's de Londres n'ont commis aucune faute susceptible d'engager leur responsabilité ;
- juger, au surplus, que BGYB ne justifie ni du bien fondé ni du quantum des préjudices allégués causés par la prétendue faute du Lloyd's de Londres ;
En conséquence :
- confirmer le jugement attaqué en ce qu'il a débouté BGYB de l'ensemble de ses demandes à l'encontre des souscripteurs du Lloyd's de Londres ;
- condamner BGYB ou tout succombant à verser aux souscripteurs du Lloyd's de Londres une indemnité de 10.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens dont distraction.
M. [M] a conclu au fond le 13 novembre 2020.
Par ordonnance sur incident du 15 avril 2021, le conseiller en charge de la mise en état de la cour d'appel de paris a :
- constaté l'extinction de l'instance et le dessaisissement de la cour à l'égard de [E] [P] ;
- dit que l'instance se poursuit à l'égard des autres parties ;
- dit que les frais de l'instance éteinte seront, sauf convention contraire, supportés par l'appelant.
Les parties n'ont pas reconclu après cette ordonnance de désistement partiel.
Il convient de se reporter aux conclusions pour plus ample exposé des prétentions et moyens des parties conformément à l'article 455 du code de procédure civile.
La clôture est intervenue le 4 avril 2022.
MOTIFS DE LA DÉCISION
1) Sur la fin de non recevoir soulevée par ARB INTERNATIONAL LIMITED à l'encontre de BGYB pour défaut d'intérêt à agir
Vu les articles 31, 122 du code de procédure civile, L. 121-12 du code des assurances et 1346-1 du code civil dans sa rédaction postérieure à l'entrée en vigueur de l'Ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016 ;
Le tribunal a déclaré la société BGYB recevable en toutes ses demandes.
La société ARB sollicite l'infirmation de la décision en ce qu'elle a retenu l'intérêt à agir de BGYB à son encontre, en exposant d'une part que cette dernière n'est pas subrogée dans les droits de la victime et qu'elle n'a pas vocation à agir pour son compte, et d'autre part que le préjudice n'est ni actuel ni certain et que dès lors la société BGYB échoue à prouver l'existence d'un préjudice propre dont le quatum a au surplus varié en cours de procédure.
Toutefois, la société BGYB ne prétend pas agir sur le fondement de la subrogation légale à l'encontre de la société ARB. Elle invoque, à titre subsidiaire, un défaut de conseil de ses courtiers, parmi lesquels figure la société ARB.
Le moyen tiré du défaut de subrogation est en conséquence inopérant.
Par ailleurs, il est constant que l'intérêt à agir, qui s'apprécie au jour de l'introduction de la demande en justice, n'est pas subordonné à la démonstration préalable du bien fondé de l'action, et l'existence du préjudice invoqué par l'appelante dans le cadre d'une action en responsabilité n'est pas une condition de recevabilité de son action mais du succès de celle-ci.
Il importe dès lors peu pour apprécier son intérêt à agir, que la société ARB ne justifie pas au jour de délivrance de l'assignation, avoir subi personnellement un préjudice financier et commercial en raison du refus de son assureur de mettre en 'uvre la garantie souscrite.
C'est ainsi à bon droit que le premier juge a retenu que la société BGYB justifie d'un intérêt à agir au sens de l'article 31 du code de procédure civile, à l'encontre, notamment, de la société ARB International Limited, qui seule conteste ce point en cause d'appel, dès lors qu'elle est incontestablement intervenue, en tant qu'intermédiaire dans le processus qui a conduit à la conclusion de son contrat d'assurance avec les Lloyds de Londres et qu'à ce titre, même de façon subsidiaire, elle était susceptible de répondre d'éventuels manquements à l'obligation d'information de conseil et de mise en garde vis-à-vis de l'assuré.
Le fait qu'elle se défende d'être un courtier soumis aux obligations afférente à cette fonction du droit français et plus particulièrement aux règles relatives aux intermédiaires d'assurances édictées aux articles L. 500 et suivants du code des assurances, mais un simple 'lloyd's broker' soumis au droit anglais, est un moyen de fond ressortant de l'appréciation du bien fondé ou non de l'action exercée à son encontre.
Le jugement sera en conséquence confirmé en ce qu'il a écarté la fin de non recevoir soulevée à l'encontre de société BGYB par la société ARB.
2) Sur la demande de prise en charge du sinistre
Vu notamment, les dispositions de la police d'assurance responsabilité civile professionnelle souscrite par la société BGYB auprès des souscripteurs du Lloyd's de Londres, et les articles L. 113-1 et L. 124-5 du code des assurances ;
En l'espèce, le tribunal a notamment, jugé non mobilisable la garantie du fait du détournement de liquidités, débouté la société BGYB de sa demande de condamnation des syndicats souscripteurs du Lloyd's à prendre en charge la somme de 95.000 £ au titre de la garantie découlant du contrat d'assurance de responsabilité civile professionnelle n°B04 24 15 INT 02 945, débouté la société BGYB de sa demande de condamnation in solidum de la société Lloyd's France et des syndicats du Lloyd's du de Londres au paiement de la somme de 20.000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation de son préjudice financier, mis hors de cause la société AUDASSUR, et débouté la société BGYB de sa demande de condamnation de la société ARB international Limited pour manquement à son obligation d'information et de mise en garde.
La société BGYB sollicite l'infirmation de la décision en soutenant en substance que le sinistre doit être pris en charge par l'assureur LLOYDS dès lors qu'aucune clause d'exclusion 'cyber' n'est stipulée au contrat et que celle prévue au contrat n'est pas applicable parce qu'elle concerne la perte ou la destruction ou du détournement de monnaie physique, des biens corporels, supports de valeurs, qui peuvent être égarés, ou détruits dans les bureaux de l'assureur, ce qui n'est pas le cas en l'espèce, l'activité de transfert de fonds par écriture de compte, inhérente à l'activité de courtier n'étant pas exclue de la garantie.
Elle ajoute que l'assureur a fait preuve d'un comportement dilatoire préjudiciable dans la gestion du sinistre.
La société ARB International Limited demande la confirmation du jugement en ce qu'il n'a retenu aucune faute à son égard et a débouté la société BGYB de ses demandes à son encontre.
La société AUDASSUR, rappelant le principe de subsidiarité que l'intermédiaire d'assurance peut opposer lorsque sa responsabilité est recherchée, demande la confirmation du jugement en toutes ses dispositions et les syndicats souscripteurs du Lloyd's de Londres demandent la confirmation du jugement en ce qu'il a jugé que la clause 3.1.H des conditions spéciales de la police d'assurance 'responsabilité civile professionnelle des intermédiaires de l'industrie maritime et offshore' n°B042415INT02945 exclut la couverture du présent sinistre et en ce qu'il a jugé que c'est à bon droit que les souscripteurs du Lloyd's de Londres ont refusé de couvrir le sinistre, compte tenu des termes clairs et précis de la police d'assurance responsabilité civile professionnelle.
Sur ce,
Comme l'a exactement relevé le tribunal, il résulte des pièces de la procédure que :
- selon extrait K bis du 10 mai 2017, la société BGYB a été immatriculée au registre du commerce et des sociétés de Montpellier le 28 octobre 2011, à la suite d'un transfert de son siège précédemment situé à Boulogne-Billancourt dans le ressort du RCS de Nanterre, et elle exerce à Montpellier une activité de 'prestations de services en communication, publicité dans le domaine de la voile (sponsoring)' ;
- elle s'est assurée en responsabilité civile professionnelle 'maritime et offshore' auprès des assureurs des Lloyd's de Londres en tant qu' 'intermédiaire de l'industrie maritime', pour une activité déclarée de 'sales and charter yacht broker' ;
- dans le cadre de son activité professionnelle, selon contrat en date du 06 avril 2016, elle est intervenue en qualité d'intermédiaire dans la conclusion d'un contrat d'affrètement conclu entre la société de droit anglais La Bête Sailing Limited, propriétaire d'un yacht à voiles de plaisance de 27,43 m immatriculé à Cowes, United Kingdom, et une société Lattice Group Holdings Limited, affréteur, ayant pour objet la mise à disposition du navire et de son équipage au port de [Localité 10] le 24 septembre 2016, jusqu'au 3 octobre 2016 date de sa restitution au port de [Localité 7], moyennant le prix de 64.000 £ hors-taxes ;
- la convention prévoyait en outre la constitution par l'affréteur d'une caisse de bord d'un montant de 73.000 £ pour la durée de la croisière.
La version des faits ayant conduit à la déclaration de sinistre litigieuse n'est par ailleurs pas contestée, à savoir que, selon la chronologie des opérations financières décrite dans la déposition effectuée le 18 juillet 2016 par M. [Z], en sa qualité de gérant de la société BGYB à un officier de police judiciaire du commissariat central de police de [Localité 8] :
- sa société a encaissé le 25 mai 2016 sur son compte 'séquestre' ouvert à la banque Courtois de Narbonne, la somme de 95.000 £ en provenance d'un compte bancaire ouvert au nom de la société Lattice Group ;
- le 27 mai 2016, agissant sur instructions données le 20 mai précédent par courriel de Mme [V] [R], employée de la société La Bête Sailing, la société BGYB a procédé par virement international sur un compte ouvert en Irlande à Galway, au versement de la somme de 95.000 £ séquestrée entre ses mains depuis 48 heures ;
- le jour même où le virement sur le compte irlandais a été effectué, sa collaboratrice chargée de suivre le dossier a reçu un courriel 'déclarant qu'il y avait un problème et qui nous demandait de rappeler les fonds et de les virer sur u n nouveau compte en Turquie'; elle a réussi à faire stopper le virement en cours de la banque Courtois à la banque irlandaise, les fonds ont été recrédités le 8 juin sur le compte de la banque Courtois et un virement de 95.000 £ a été effectué le 10 juin 2016 sur une banque turque au profit d'une société Ikarus à partir de fausses instructions provenant d'une adresse e-mail usurpée, la supercherie ayant été découverte le 24 juin suivant.
Enfin, il n'est pas davantage contesté devant la cour que devant le premier juge, que c'est par le biais de fausses instructions émanant d'un individu se faisant passer pour [V] [R], que la société BGYB s'est dessaisie de la somme de 95.000 £ qui lui avait été versée par la société Lattice Sailing à charge de la remettre à la société La Bête Sailing dans le cadre du contrat de 'charter agreement'du 6 avril 2016.
En effet, le 27 mai 2016 à 16 h 02, un intrus s'est immiscé dans les échanges de courriels engagés le 20 mai 2016 entre la société La Bête Sailing et la société BGYB. Auparavant, les courriels provenaient de l'adresse suivante'[Courriel 6]' ; or le premier courriel intrus provient de '[Courriel 6]'.
C'est dans ce contexte que M. [Z] a effectué entre les mains de M. [M], Areas assurances à [Localité 9] dans l'Herault, une déclaration de sinistre et que l'assureur responsabilité civile professionnelle de la société BGYB a par la suite décliné sa garantie.
Aucune pièce n'est produite concernant le sort réservé à la plainte déposée le 18 juillet 2016.
Au demeurant, comme l'a parfaitement relevé le tribunal, la garantie responsabilité civile professionnelle n'est pas mobilisable du fait du détournement de liquidités.
En effet, comme le soutiennent les syndicats souscripteurs du Lloyd's de Londres, au terme de l'article 1.A. des conditions spéciales de la police souscrite, celle-ci a vocation à 'garantir les conséquences pécuniaires résultant de toute Réclamation introduite par un Tiers à l'encontre de l'Assuré en raison de dommages corporels, matériels et immatériels [...] mettant en jeu la responsabilité civile que l'Assuré peut encourir individuellement ou solidairement à l'égard des Tiers, en cas de Faute Professionnelle, réelle ou alléguée commise dans l'exercice de la ou des Activité(s) Professionnelles'(s) Garantie(s) listée(s) et définie(s) aux Conditions Particulières.'
Le Tiers est défini à l'article IV.21 de la Police comme étant 'Toute personne physique ou morale autre que celle ayant la qualité d'Assuré et qui recherche la responsabilité de l'Assuré à raison d'une Faute Professionnelle'.
L'assureur ne conteste pas que les actes de courtage et de séquestre accomplis par la société BGYB entrent dans le champ des activités professionnelles garanties.
Or, comme l'a relevé le tribunal, la société BGYB, instituée séquestre de la somme de 95.000 £ par la société La Bête Sailing, s'est rendue redevable vis-à-vis de celle-ci d'une obligation contractuelle de représentation des fonds, de sorte que, si elle n'est pas responsable contractuellement vis-à-vis du véritable propriétaire des fonds détournés, elle est bien redevable à son égard d'une obligation pécuniaire dont elle doit s'acquitter indépendamment des circonstances dans lesquelles elle a été amenée à s'en dessaisir au profit d'un tiers indélicat.
La dette contractuelle à laquelle la société BGYB est tenue vis-à-vis de la société La Bête Sailing, dont elle ne justifie toujours pas s'être acquittée, n'entre ainsi pas dans l'objet de la garantie souscrite auprès de son assureur.
Au demeurant, de l'aveu même de la société BGYB, la perte alléguée de la somme de 95.000 £ ne résulte pas d'une faute professionnelle au sens de l'article IV.9 de la police, mais d'une 'escroquerie'.
Or, aux termes de l'article 3 « Exclusions générales » paragraphe « H » de la police d'assurance, sont exclus : 'TOUS DOMMAGES LIES A LA PERTE, AU DETOURNEMENT OU A LA DESTRUCTION DE LIQUIDITES OU INSTRUMENTS DE VALEUR, Y COMPRIS LES DEVISES, BILLETS DE BANQUE, OBLIGATIONS, TITRES AU PORTEUR, INSTRUMENTS NEGOCIABLES, TRAITES BANCAIRES, CHEQUES OU ORDRES DE PAIEMENT ET CONFIGURATIONS INFORMATIQUES.'
Comme le soutiennent les syndicats souscripteurs du Lloyd's de Londres, cette clause a vocation à s'appliquer dès lors que les fonds litigieux ont été perdus par suite des ordres de virement donnés par la société BGYB à la banque Courtois.
La société BGYB a bien été victime d'un détournement de fonds commis par un tiers qui demeure à ce jour, au vu des pièces produites, non identifié, auteur d'une infraction pénale susceptible d'être qualifiée de vol ou d'escroquerie.
Ce fait dommageable rentre dans la définition de la clause d'exclusion, qui n'a pas pour effet de vider la garantie accordée de sa substance, peu important le caractère habituel pour la société BGYB de ses obligations de maniement de fonds dès lors que la garantie de la responsabilité civile professionnelle d'un courtier en yacht est susceptible de couvrir de nombreux sinistres sans lien avec les obligations de maniements de fonds de ce dernier.
La société BGYB ne peut en outre être suivie lorsqu'elle prétend notamment que :
- le champ d'application de cette clause d'exclusion, dont elle estime qu'elle est en cela parfaitement compréhensible et comprise d'elle-même, est limité à des supports matériels de paiement (monnaie, billets à ordre, chèques, titres contenant un ordre de paiement), susceptibles d'être détenus par l'assuré, détruits, perdus ou détournés, de sorte qu'elle ne peut au cas d'espèce recevoir application parce qu'il n'y a pas de perte, destruction, ou détournement de monnaies ou supports physiques ;
- le courriel qu'elle a adressé à sa banque, par lequel elle donne une instruction de virer les sommes, n'est ni une liquidité, ni un instrument de valeurs ; il n'a au surplus pas été détourné, détruit ou perdu, pas plus que les sommes virées, qui ne sont pas assimilables non plus à des liquidités ;
- le contrat ne prévoit pas d'exclusion au titre de l'obligation de représentation des sommes, lesquelles ne sont pas 'séquestrées' (l'intitulé du compte indiqué n'étant pas significatif de la réalité juridique de l'opération sur les fonds), mais encaissées puis reversées.
En effet, comme elle le reconnaît elle-même en page 11 de ses dernières écritures, la clause ne souffre d'aucune ambiguïté, et le fait qu'elle ne soit pas un professionnel de l'assurance est dès lors inopérant.
De même, la société ARB ne peut être suivie lorsqu'elle soutient que cette clause doit être jugée nulle et inopposable à l'assuré, faute de caractère formel et limité, en l'absence de définition des 'configurations informatiques', ou à tout le moins interprétée en faveur de l'assuré au regard de son ambiguïté, de sorte que l'assureur doit sa garantie.
En effet, non seulement l'assuré reconnaît que cette clause est claire, et en effet elle ne laisse place à aucune incertitude quant à la volonté des parties d'écarter la garantie dans les circonstances qui y sont précisées, mais encore la cour estime que la clause est rédigée dans une formulation suffisamment précise afin, d'une part, de permettre à l'assuré de connaître exactement le domaine de l'exclusion de garantie et, d'autre part, de ne pas vider la garantie de sa substance, de sorte que le souscripteur ne caractérise pas de violation des conditions de fond exigées par les textes invoqués, d'autant plus que l'assureur ne fonde pas son refus de garantie sur les 'configurations informatiques'. Ce moyen est ainsi rejeté.
Les demandes de condamnation solidum des syndicats du LLOYD'S et la société Lloyd's France à exécuter leurs obligations d'indemnisation auprès de la société la BETE SAILING LIMITED et à en justifier à la société BGYB sous un délai de 15 jours à compter de la signification de l'arrêt à intervenir sont ainsi rejetées.
Le jugement est quant à lui confirmé en ce qu'il a débouté la société BGYB de sa demande de condamnation des syndicats souscripteurs du Llod's à payer la somme de 95.000 £ au titre de la garantie découlant du contrat d'assurance responsabilité civile professionnelle.
En cause d'appel, la société BGYB expose à juste titre que la police a également vocation à garantir 'les Frais de Défense exposés par l'Assuré au titre de toute Réclamation introduite par un Tiers à son encontre pendant la Période d'Assurance ou la Période Subséquente mettant en jeu la responsabilité civile qu'il peut encourir individuellement ou solidairement à l'égard des Tiers, en cas de Faute Professionnelle, réelle ou alléguée, commise dans l'exercice de la ou des Activités(s) Professionnelle(s) Garantie(s) listée(s) et définie(s) aux Conditions Particulières'.
Les frais de défense sont définis à l'article IV de la police comme 'Tout frais, coûts, charges, honoraires et dépense encourus par l'Assuré pour assurer sa défense lorsqu'il fait l'objet d'une Réclamation couverte au titre du présent contrat, et notamment : le frais d'enquête et d'expertise, les frais de procès, la rémunération des arbitres, les honoraires d'avocats, conseils juridiques et experts [']'.
Cependant, comme le font valoir les syndicats souscripteurs du Lloyd's de Londres, la garantie des frais de défense n'est mobilisable que lorsque la réclamation donne elle-même lieu à couverture.
Dès lors, la demande de condamnation des souscripteurs du Lloyd's de Londres, formulée par la société BGYB au titre des frais de défense, suit le sort réservé à la couverture du sinistre et doit donc être rejetée parce que la réclamation invoquée par la société BGYB n'est pas couverte par la police en ce qu'elle fait l'objet de la clause d'exclusion sus-visée.
La demande de mise en jeu de la garantie, et les demandes de condamnation subséquentes, formulées sur ce fondement sont ainsi rejetées.
3) Sur la responsabilité de l'assureur et des courtiers/intermédiaires d'assurance
Vu, notamment les articles L. 521-1 et suivant du code des assurances ;
Le tribunal a mis hors de cause M. [M], au motif que celui-ci était intervenu en qualité de mandataire d'intermédiaire d'assurance de la société AUDASSUR, que son rôle s'est limité à la présentation, à la proposition et à l'aide à la conclusion d'un contrat d'assurance conformément aux dispositions de l'article L. 511-1 du code des assurances, que la société BGYB ne démontrait pas l'avoir sollicité en vue de se voir proposer une assurance spécifique maniement de fonds sur compte séquestre, dont M. [M] ne pouvait supposer l'usage, l'activité de courtier maritime n'impliquant pas consubstantiellement la réalisation de ce service.
En cause d'appel, plus aucune demande n'est, in fine, formulée à l'encontre de M. [M] notamment au titre d'un manquement de sa part à son obligation de conseil et de mise en garde, l'appelante n'ayant pas interjeté appel à son encontre et l'appel incident qui avait été formulé par ARB à son encontre ayant fait l'objet d'une ordonnance de désistement partiel, le 15 avril 2021.
Sa mise hors de cause est ainsi acquise aux débats.
Le tribunal a par ailleurs débouté la société BGYB de sa demande de condamnation in solidum de la société Lloyd's France et des syndicats du Lloyd's de Londres au paiement de la somme de 20.000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation de son préjudice, et mis hors de causse la société AUDASSUR.
La société BGYB maintient en cause d'appel que les souscripteurs du Lloyd's de Londres ont manqué à leurs obligations de diligences et de bonne foi dans l'exécution du contrat et ainsi engagé leur responsabilité à son égard justifiant l'octroi d'une indemnité de 20.000 euros en réparation de son préjudice financier, qui résulte de la dénonciation du contrat de charter, et de la perte de chance de percevoir des commissions à ce titre, comme de percevoir une commission de vente sur le navire, dont la vente a été confiée à un tiers.
Subsidiairement, la société BGYB soutient que les sociétés AUDASSUR et ARB International Ltd doivent lui verser à titre indemnitaire la somme équivalente en euros à la somme de 95.000 £ anglaises, outre la somme de 20.000 euros, en réparation du préjudice causé du fait de leur manquement à leur obligation de conseil, en tant qu'intermédiaires en assurances, faute de l'avoir alertée sur le fait que le contrat ne couvrait pas un risque qui est pourtant au coeur de l'activité pour laquelle elle a souscrit le contrat d'assurance.
* l'assureur : les syndicats souscripteurs du Lloyd's de Londres
Les syndicats souscripteurs du Lloyd's de Londres répliquent à juste titre que l'objet des garanties de la police souscrite par la société BGYB est exclusivement de prendre en charge les préjudices subis par des tiers, à raison d'une faute professionnelle de la société BGYB.
Les sommes réclamées en réparation du préjudice financier allégué par la société BGYB n'ont pas vocation à être prises en charge au titre de la police et les demandes formulées à ce titre contre l'assureur seront ainsi rejetées.
En outre, la société BGYB n'établit pas davantage en cause d'appel qu'elle ne l'a fait devant le tribunal, que les syndicats souscripteurs du Lloyd's, représentés par la société Lloyd's France auraient manqué à leurs obligations de diligence et de bonne foi à son égard dans l'exécution du contrat d'assurance en tardant manifestement à lui apporter les réponses qu'elle était en droit d'attendre, comme elle le soutient, dès lors qu'elle n'établit pas elle-même avoir porté en temps et en heure à la connaissance de l'assureur la réclamation de la société La Bête Sailing en date du 25 novembre 2016, dont celui-ci n'a pris connaissance par voie de communication de pièces que le 25 octobre 2017 dans le cadre de la première instance.
Le jugement est en conséquence confirmé en ce qu'il a débouté la société BGYB de sa demande de condamnation in solidum de la société Lloyd's France et des syndicats du Lloyd's de Londres au paiement de la somme de 20.000 euros.
* les sociétés ARB et AUDASSUR
La société AUDASSUR, courtier en assurance, conteste avoir commis une faute susceptible d'engager sa responsabilité, dès lors qu'elle n'a jamais été en relation directe avec la société BGYB, et elle rappelle d'une part que la société BGYP ne justifie pas d'une subrogation dans les droits de sa cliente faute de preuve du remboursement de la somme détournée (95.000 £) et d'autre part que le préjudice financier sollicité à hauteur de 20.000 euros n'est pas démontré, de sorte qu'elle demande à être de nouveau mise hors de cause, d'autant plus que la société BGYB elle-même a eu un comportement fautif, en ayant fait preuve d'une particulière légèreté dans la gestion des fonds revenant à sa cliente.
La société ARB, qui précise ne pas être un courtier au sens du droit français mais un simple Llod's broker, intervenant en tant qu'intermédiaire afin de permettre au courtier d'assurance d'avoir accès au marché des Lloyd's, dont le statut est soumis au droit britannique, conteste également avoir commis une faute dans l'exécution de ses obligations susceptible d'engager sa responsabilité et réplique qu'au surplus, la société BGYB ne prouve pas le caractère actuel et certains des préjudices invoqués, en relation avec les fautes alléguées.
Comme l'a relevé le tribunal, la compagnie Areas dommages dont M. [M] était l'agent général, n'assurant pas le risque de la société BGYB, celui-ci s'est adressé à la filiale de sa mandante, la société AUDASSUR, courtier en assurances pour placer le risque auprès d'un assureur.
La société AUDASSUR s'est ensuite adressée a la société ARB international Limited, société de droit anglais, ayant le statut de courtier en assurances exerçant en France en libre prestation de services, qui a placé le risque auprès des Lloyd's de Londres.
Il ressort du chaînage de l'intervention des intermédiaires d'assurance ainsi rapportée par le tribunal, non utilement contredite en cause d'appel, que la société AUDASSUR n'a jamais été en relation directe avec la société assurée et avec l'assureur.
C'est ainsi à bon droit que le premier juge a retenu qu'il ne peut lui être fait grief d'avoir manqué à une quelconque obligation de conseil à l'égard de l'assurée et mis la société AUDASSUR hors de cause.
Le jugement est confirmé sur ces points.
Enfin, la société ARB international n'est pas démentie en ce qu'elle affirme avoir reçu comme seule et unique instruction de la part de la société AUDASSUR de faire souscrire une assurance de responsabilité civile professionnelle pour une société de courtage en vente et location de navires de plaisance.
Comme relevé par le premier juge, elle justifie avoir, le 4 février 2016, porté a la connaissance de la société BGYB la note de couverture du risque et l'avoir invitée à examiner attentivement le document afin de l'aviser dès que possible d'un quelconque élément qui n'emporterait pas son approbation.
Ce document atteste de ce que la disparition frauduleuse de fonds appartenant à des tiers à l'occasion d'opérations de séquestre était insusceptible d'être prise en charge.
La société BGYB ne démontre pas davantage qu'elle avait signalé cette activité de maniement et qu'elle entendait la faire garantir.
Dans ces conditions, il convient de confirmer le jugement en ce qu'il a débouté la société BGYB de sa demande en condamnation de la société ARB international Limited pour manquements à son obligation d'information et de mise en garde.
4) Sur l'appel incident de la société ARB à l'encontre de la société AUDASSUR
La société AUDASSUR soutient que les demandes formulées par la société ARB à son encontre sont irrecevables comme nouvelles au sens de l'article 564 du code de procédure civile. Subsidiairement, elle estime que cet appel n'est pas fondé.
Compte tenu de l'issue du litige, l'examen tant de la recevabilité que du bien fondé de l'appel incident formulé par la société ARB à l'encontre de la société AUDASSUR est sans objet.
5) Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile
Compte tenue de l'issue du litige, il convient de confirmer le jugement sur les dépens et les frais irrépétibles.
Partie perdante, l'appelante sera condamnée aux dépens d'appel.
Pour des motifs d'équité, aucune condamnation ne sera prononcée en application de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
statuant en dernier ressort, contradictoirement et par mise à disposition de la décision au greffe,
Confirme le jugement en ses dispositions soumises à la cour ;
Y ajoutant :
Déboute la société [S] [Z] Yacht Brokerage de ses demandes tendant à :
- Condamner in solidum les syndicats du LLOYD'S et la société Lloyd's France à exécuter leurs obligations d'indemnisation auprès de la société La Bête Sailing Limited et à en justifier à la société BGYB sous un délai de 15 jours à compter de la signification du présent arrêt;
- Subsidiairement, les condamner à payer à la société BGYB la somme de 95.000 £ correspondant au montant de la réclamation de la victime, BGYB acceptant en pareil cas de décharger l'assureur ;
- Les condamner à indemniser la société BGYB pour tous frais exposés au titre de sa défense, sur présentation de justificatifs (déduction faite des sommes perçues au titre de l'article 700) ; - Les condamner plus généralement in solidum à indemniser, garantir et tenir indemne la société BGYB de toute condamnation, sanction financière et/ou de toutes conséquences de toutes demandes actions ou instances résultant du sinistre déclaré ;
Condamne la société [S] [Z] Yacht Brokerage aux dépens, lesquels seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile pour les avocats pouvant y prétendre ;
Rejette les demandes formulées au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE