La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

13/09/2022 | FRANCE | N°20/13428

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 3 - chambre 5, 13 septembre 2022, 20/13428


Copies exécutoiresREPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 3 - Chambre 5



ARRET DU 13 SEPTEMBRE 2022



(n° , 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/13428 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CCL7T



Décision déférée à la Cour : Jugement du 01 Février 2019 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 17/03502





APPELANTE



Madame [X] [H] [V] épouse [B] née le 27 octobre 1

943 à [Localité 3] (Tunisie),



[Adresse 7]

[Adresse 7]

TUNISIE



représentée par Me Charles-Hubert OLIVIER de la SCP LAGOURGUE & OLIVIER, avocat au barreau de PARIS, toque : ...

Copies exécutoiresREPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 3 - Chambre 5

ARRET DU 13 SEPTEMBRE 2022

(n° , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/13428 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CCL7T

Décision déférée à la Cour : Jugement du 01 Février 2019 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 17/03502

APPELANTE

Madame [X] [H] [V] épouse [B] née le 27 octobre 1943 à [Localité 3] (Tunisie),

[Adresse 7]

[Adresse 7]

TUNISIE

représentée par Me Charles-Hubert OLIVIER de la SCP LAGOURGUE & OLIVIER, avocat au barreau de PARIS, toque : L0029

assistée de Me Geneviève AUGENDRE, avocat plaisdant du barreau de PARIS, toque : P60

INTIME

LE MINISTERE PUBLIC pris en la personne de MONSIEUR LE PROCUREUR GENERAL - SERVICE CIVIL

[Adresse 1]

[Localité 2]

représenté à l'audience par Mme M.-D. PERRIN, substitut général

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 10 juin 2022, en audience publique, l'avocat de l'appelante et le ministère public ne s'y étant pas opposés, devant M. François MELIN, conseiller, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :

Mme Hélène FILLIOL, présidente de chambre

M. François MELIN, conseiller

Mme Marie-Catherine GAFFINEL, conseillère

Greffier, lors des débats : Mme Mélanie PATE

ARRET :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Mme Hélène FILLIOL, présidente de chambre et par Mélanie PATE, greffière présente lors de la mise à disposition.

Vu le jugement rendu le 1er février 2019 par le tribunal de grande instance de Paris qui a constaté que les formalités de l'article 1043 du code de procédure civile ont été respectées, jugé que Mme [X] [H] [V], née le 27 octobre 1943 à [Localité 3] (Tunisie), n'est pas de nationalité française, ordonné la mention prévue par l'article 28 du code civil, débouté Mme [X] [H] [V] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile et l'a condamnée aux dépens ;

Vu la déclaration d'appel en date du 24 septembre 2020 et les dernières conclusions notifiées le 21 décembre 2020 par Mme [X] [H] [V] qui demande à la cour de déclarer recevable et bien-fondé son appel, d'infirmer le jugement, d'annuler la décision du service de la nationalité du 29 février 2016, de juger qu'elle est de nationalité française par filiation maternelle, d'ordonner la transcription de l'arrêt à intervenir sur son acte de naissance et de condamner le ministère public à payer la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi que les dépens ;

Vu les dernières conclusions notifiées le 19 février 2021 par le ministère public qui demande à la cour de constater que le récépissé prévu par l'article 1043 du code de procédure civile a été délivré, de confirmer le jugement et d'ordonner la mention prévue par l'article 28 du code civil ;

Vu les observations notifiées le 24 mai 2022 par le ministère public qui demande à la cour d'écarter de la procédure et des débats les pièces communiquées par l'appelante le 23 mai 2022 ;

Vu l'ordonnance de clôture en date du 24 mai 2022.

Vu le message envoyé aux parties le 17 juin 2022 par lequel il a été demandé à Mme [H] [V] de préciser notamment, par une note en délibéré à transmettre pour le 22 juin 2022, le titre auquel son arrière-grand-mère, [T] [F], aurait été italienne, alors qu'elle serait née en Sicile en 1845, soit à une date à laquelle la Sicile appartenait au Royaume des Deux-Siciles et à laquelle le Royaume d'Italie n'était pas encore constitué, et décédée en Tunisie où elle était domiciliée ;

Vu la note en délibéré transmise le 21 juin 2022 par Mme [H] [V] qui indique notamment que son arrière-grand-mère, née en Sicile, est devenue italienne lorsque la Sicile a intégré le Royaume d'Italie en 1861 et que celle-ci est devenue résidente en Tunisie, où elle s'est mariée en 1866 ;

MOTIFS

Sur l'article 1043 du code de procédure civile

Il est justifié de l'accomplissement de la formalité prévue par l'article 1043 du code de procédure civile par la production du courrier, avec accusé de réception signé le 20 novembre 2020, de demande de délivrance du récépissé par le ministère de la Justice.

Sur la demande de rejet de pièces

Mme [X] [H] [V] a produit ses pièces n° 37 et 38 le 23 mai 2022 à 15 heures 17, à savoir les copies intégrales des actes de naissance de deux de ses ascendants.

Le ministère public a demandé, le 24 mai 2022 à 11 heures 40, que ces pièces soient écartées des débats, au motif que ces pièces n'ont pas été produites en temps utiles, la clôture de l'instruction étant prévue le 24 mai 2022 à 13 heures 30.

La cour relève que ces pièces ont été produites la veille de la clôture.

Le ministère public n'a donc pas disposé d'un temps suffisant pour apprécier leur intérêt et demander, le cas échéant, un report de la date de clôture s'il estimait devoir conclure suite à la production de ces pièces.

Ces pièces sont donc jugées irrecevables, faute d'avoir été communiquées en temps utile.

Sur le fond

Mme [X] [H] [V], se disant née le 27 octobre 1943 à [Localité 3] (Tunisie), présente ses ascendants de la manière suivante :

- Elle est née de [S] [H] [V], de nationalité tunisienne, né le 14 mars 1903 à [Localité 11] (Tunisie) et mort le 23 mai 1977 à [Localité 11], et de [J] [A], de nationalité algérienne, née à [Localité 6] (Tunisie) le 16 mars 1911 et décédée le 8 décembre 1991 à [Localité 8] (Tunisie) ;

- Ses grands-parents étaient [Z] [R] [H] [Z] [V] [Y] [A], né en 1837 à [Localité 5] (Algérie) et décédé le 22 juillet 1922 à [Localité 11], et [G] [O], dite [U] [C], originaire de Malte et de nationalité anglaise, née en 1879 à [Localité 9] (Tunisie) et décédée le 6 janvier 1967 à [Localité 11] ;

- Ses arrières-grands-parents maternels étaient [W] [O], né à [Localité 9] le 16 octobre 1837 et décédé à [Localité 11] le 18 février 1911, et [T] [F], née à [Localité 4] (Sicile, Italie) le 8 avril 1845 et décédée à [Localité 11] le 23 janvier 1907.

N'étant pas personnellement titulaire d'un certificat de nationalité française, il lui appartient en application de l'article 30 du code civil de rapporter la preuve qu'elle réunit les conditions requises par la loi pour l'établissement de sa nationalité française.

Elle revendique cette nationalité à plusieurs titres.

a) En premier lieu, Mme [X] [H] [V] indique que ses deux grands-parents étaient inscrits sur les registres matriciels des Français musulmans d'Algérie détenus par le consulat général de France à [Localité 11], ainsi que cela résulte d'une attestation délivrée le 4 juin 1975 par ce même consulat. Elle en déduit qu' « il est dès lors évident que [Z] [R] [H] [Z] [V] [Y] [A] ainsi que tous ses descendants, dont Mme [X] [H] [V] [J] [A], mère de la concluante, étaient français domiciliés en Tunisie et jouissaient pleinement de leurs droits en tant que ressortissants français ».

Toutefois, d'une part, si Mme [X] [H] [V] produit une photocopie, certifiée conforme à l'original, d'une attestation du consul général de France à [Localité 11], délivrée le 4 juin 1975 selon laquelle [Z] [R] [H] [Z] [V] [Y] [A] étaient inscrits sur les registres matriciels des Français musulmans d'Algérie détenus par ce consulat, elle ne produit pas une copie de ces registres eux-mêmes.

D'autre part, Mme [X] [H] [V] ne fournit pas, en tout état de cause, d'éléments démontrant la nationalité française de son grand-père allégué, dont l'origine algérienne n'est d'ailleurs pas établie, comme l'indique à juste titre le ministère public.

b) En deuxième lieu, Mme [X] [H] [V] fait valoir que son arrière-grand-mère, [T] [F], est née en Italie et plus particulièrement en Sicile et qu'elle était donc italienne, ainsi que cela résulte du certificat de baptême et de l'acte de décès de sa grand-mère, [G] [O]. Mme [X] [H] [V] en déduit (conclusions p. 9) qu'elle « est, elle aussi, italienne par filiation maternelle et est à cet égard également française, conformément aux dispositions » de l'article 1er de la loi du 20 décembre 1923, relative à l'attribution de la nationalité française, qui reprenait le principe de l'attribution de la nationalité française à tout individu né dans la Régence de [Localité 11] de parents dont l'un d'eux est lui-même né dans la Régence, à l'exclusion des indigènes, sujets ou protégés français de la Tunisie, de l'Algérie, des colonies française ou pays de protectorat français. Ces dispositions ont en effet été étendues aux Italiens par un échange de lettres franco-italien. Ainsi, Mme [X] [H] [V] est née italienne et bénéficie de la nationalité française grâce à ces dispositions.

Le moyen développé par Mme [X] [H] [V] repose donc sur le postulat que son arrière-grand-mère était italienne, ce qu'il lui appartient de prouver.

Elle produit à cet effet :

- un extrait, délivré le 23 septembre 2019, du registre des sépultures de l'archevêché de [Localité 11] précisant que [T] [F], originaire de [Localité 4], est décédée à [Localité 11] le 23 janvier 1907 ;

- un extrait, délivré le 8 juin 2018 par la commune de [Localité 11], des registres de décès qui indique que [T] [F], née à [Localité 10], de nationalité anglo-maltaise, est décédée le 23 janvier 1907 ;

- un extrait du registre des baptêmes de l'archevêché de [Localité 11] qui indique que le 18 juillet 1868, [G] [O] a été baptisée et qu'elle est née à [Localité 9] le 13 juillet 1869 de [W] [O], originaire de Malte, et de [E] [F], originaire de Sicile ;

- un extrait, délivré le 12 juin 2018, par la commune de [Localité 11], du registre des décès qui indique que [G] [O], née de [D] [O] et de [I] [K], est décédée le 6 janvier 1967.

Cependant, elle ne produit pas l'acte de naissance de [T] [F] ni aucun élément conduisant à retenir qu'elle aurait été de nationalité italienne.

Par ailleurs, elle indique que [T] [F] est née à [Localité 4] en Sicile le 8 avril 1845. Or, il est notoire qu'à cette date et jusqu'en 1861, année de création du royaume d'Italie, la Sicile appartenait au royaume des Deux-Siciles, de sorte que Mme [X] [H] [V] ne peut pas se borner à alléguer une naissance en Sicile pour en déduire nécessairement que [T] [F] était italienne, sans fournir autre élément pertinent, de fait et de droit, allant en ce sens et alors qu'elle n'indique pas à quelle date son arrière-grand-mère est devenue résidente en Tunisie.

Enfin, l'extrait des registres de l'acte de décès énonce que [T] [F] était de nationalité anglo-maltaise, ce qui contredit l'allégation de Mme [X] [H] [V]. Ainsi, elle ne rapporte pas la preuve de la nationalité italienne de son arrière-grand-mère. Par voie de conséquence, elle ne peut pas affirmer que c'est en raison de sa nationalité italienne obtenue par filiation qu'elle est devenue française.

c) En troisième lieu, Mme [X] [H] [V] soutient que sa grand-mère, [G] [O] dite [U] [C], et son arrière-grand-père, [W] [O], étaient originaires de Malte. Or, il résulte selon elle de l'article 1er du décret du 8 novembre 1921 que sous le protectorat français en Tunisie, les personnes ressortissantes de Malte étaient considérées comme des sujets européens et bénéficiaient de la nationalité française.

Toutefois, ce moyen manque en fait dès lors que si Mme [X] [H] [V] indique de manière générale que [G] [O] et [W] [O] étaient originaires de Malte, elles précisent elles-mêmes qu'ils sont nés à [Localité 9] et donc en Tunisie, la première en 1879 et le second le 16 octobre 1837. Par ailleurs, elle ne fournit aucun élément dont il résulterait qu'ils avaient une nationalité attribuée par Malte.

d) Au regard de ce qui précède, la cour retient que Mme [X] [H] [V] ne démontre pas disposer d'un titre à la nationalité française.

Le jugement est donc confirmé.

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile

Mme [X] [H] [V], qui succombe, est condamnée aux dépens. Sa demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile est rejetée.

PAR CES MOTIFS

Rejette les pièces 37 et 38 produites par Mme [X] [H] [V], épouse [B],

Constate que le récépissé prévu par l'article 1043 du code de procédure civile a été délivré,

Confirme le jugement,

Ordonne la mention prévue par l'article 28 du code civil,

Rejette la demande formée par Mme [X] [H] [V], épouse [B], au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne Mme [X] [H] [V], épouse [B], aux dépens.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 3 - chambre 5
Numéro d'arrêt : 20/13428
Date de la décision : 13/09/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-09-13;20.13428 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award