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08/09/2022 | FRANCE | N°20/17619

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 9 - a, 08 septembre 2022, 20/17619


Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 9 - A



ARRÊT DU 08 SEPTEMBRE 2022



(n° , 2 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/17619 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CCYD5



Décision déférée à la Cour : Jugement du 3 novembre 2020 - Tribunal Judiciaire de MELUN - RG n° 20/02583





APPELANTE



La société BANQUE CIC EST, société anonyme agissant pour

suites et diligences de ses représentants légaux domiciliés audit siège

N° SIRET : 754 800 712 03230

[Adresse 2]

[Localité 4]



représentée par Me Emmanuel CONSTANT de la SELAR...

Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 9 - A

ARRÊT DU 08 SEPTEMBRE 2022

(n° , 2 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/17619 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CCYD5

Décision déférée à la Cour : Jugement du 3 novembre 2020 - Tribunal Judiciaire de MELUN - RG n° 20/02583

APPELANTE

La société BANQUE CIC EST, société anonyme agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés audit siège

N° SIRET : 754 800 712 03230

[Adresse 2]

[Localité 4]

représentée par Me Emmanuel CONSTANT de la SELARL CB Avocats, avocat au barreau de PARIS, toque : C0639

INTIMÉ

Monsieur [F] [U]

né le [Date naissance 6] 1970 à [Localité 7] (77)

[Adresse 3]

[Localité 5]

DÉFAILLANT

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 19 avril 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant M. Benoît DEVIGNOT, Conseiller, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. Christophe BACONNIER, Président de chambre

M. Benoît DEVIGNOT, Conseiller

Mme Laurence ARBELLOT, Conseillère

Greffière, lors des débats : Mme Camille LEPAGE

ARRÊT :

- DÉFAUT

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Mme Laurence ARBELLOT, Conseillère pour le Président empêché et par Mme Camille LEPAGE, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Le 2 mai 2013, M. [F] [U] a ouvert un compte courant n° [XXXXXXXXXX01] auprès de la société Banque CIC Est.

Selon avenant du 2 octobre 2014, le montant du crédit renouvelable a été porté à 22 000 euros, le montant des échéances étant fonction de l'utilisation et de la durée de remboursement choisie.

Les fonds ont été débloqués dès le 9 octobre 2014.

Après mise en demeure du 29 juillet 2019 de régler les échéances impayées dans un délai de huit jours, la banque a prononcé la déchéance du terme par courrier du 6 septembre 2019.

Par acte d'huissier du 16 juin 2020, la société Banque CIC Est a fait assigner M. [U] devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Melun qui, à l'audience du 6 octobre 2020, a soulevé d'office l'éventuelle irrecevabilité des demandes en paiement au regard de la forclusion, la régularité de la déchéance du terme et les moyens relatifs aux irrégularités du contrat de crédit sanctionnées par la nullité de celui-ci ou la déchéance du droit aux intérêts.

Par jugement réputé contradictoire du 3 novembre 2020 assorti de l'exécution provisoire, le tribunal a :

- déclaré recevables les actions en paiement ;

- condamné M. [U] à payer à la société Banque CIC Est la somme de 751,58 euros au titre du solde débiteur du compte ;

- prononcé la nullité du contrat de prêt « du 3 avril 2018 » ;

- condamné la société Banque CIC Est à payer à M. [U] la somme de 2 970,45 euros ;

- débouté la société Banque CIC Est de sa demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné la société Banque CIC Est aux dépens.

Pour statuer ainsi, le tribunal, après avoir vérifié la recevabilité de l'action en paiement, puis déduit du solde du compte courant les intérêts et frais, a estimé, au visa de l'article L. 312-25 du code de la consommation, que le contrat de crédit était nul, les fonds ayant été versés dès le 9 octobre 2014, en violation du délai légal de sept jours. Le premier juge a calculé que le total des versements opérés par M. [U] dépassait celui des financements octroyés.

Le 7 décembre 2020, la société Banque CIC Est a interjeté appel.

Dans ses conclusions déposées par voie électronique le 11 février 2021, la société Banque CIC Est requiert la cour :

- d'infirmer la décision, en ce qu'elle a prononcé la nullité du contrat de prêt ;

- de condamner M. [U] à lui payer les sommes suivantes arrêtées au 6 septembre 2019 au titre des utilisations du crédit renouvelable, sous réserve des intérêts aux taux contractuels mentionnés à compter du 7 septembre 2019 :

* 20365320 :12 929,05 euros 4,90'%

* 20365329 : 599,12 euros 5,50'%

* 20365430 : 812,05 euros 5,50'%

* 20365332 : 1 949,55 euros 5,50'%

* 20365333 : 1 551,94 euros 5,50'%

* 20365334 : 1 564,79 euros 5,50'%

soit un total dû de 19 406,50 euros ;

- d'ordonner la capitalisation des intérêts sur le fondement de l'article 1343-2 du code civil ;

- de condamner M. [U] au paiement de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Pour contester la nullité, elle expose que celle-ci peut être considérée comme couverte, M. [U] ayant commencé à exécuter son engagement de manière volontaire et en toute connaissance de cause par le remboursement des échéances.

Elle ajoute, au visa de l'article 2224 du code civil issu de la loi du 17 juin 2008, que le premier juge ne pouvait ni lors de l'audience du 6 octobre 2020 ni dans le jugement du 3 novembre 2020 soulever d'office la nullité, alors que le moyen était prescrit depuis le 2 octobre 2019.

Elle souligne qu'elle produit les relevés des utilisations remboursées, les utilisations des années 2016 à 2018, le décompte des sommes dues pour chaque utilisation et les lettres de renouvellement annuelles.

Par actes délivrés en l'étude d'huissier les 18 janvier 2021 et 26 février 2021, la société Banque CIC Est a fait signifier à M. [U] le 18 janvier 2021 sa déclaration d'appel, puis le 26 février 2021 ses conclusions d'appel.

M. [U] n'a pas constitué avocat.

Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions de l'appelante, il est renvoyé aux écritures de celle-ci, conformément à l'article 455 du code de procédure civile.

Le 8 mars 2022, le magistrat chargé de la mise en état a prononcé la clôture de l'instruction.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Il résulte du dernier alinéa de l'article 954 du code de procédure civile que la partie qui ne conclut pas ou qui, sans énoncer de nouveaux moyens, demande la confirmation du jugement est réputée s'en approprier les motifs.

L'appel de la Banque CIC Est ne porte pas sur les dispositions relatives au solde débiteur du compte courant, mais sur celles relatives au crédit renouvelable.

Il convient de faire application des dispositions du code de la consommation dans leur version antérieure à l'entrée en vigueur au 1er juillet 2016 de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016.

A titre liminaire, il y a lieu de rappeler que, conformément à l'ancien article L. 311-52 du code de la consommation, les actions en paiement engagées devant le tribunal d'instance à l'occasion de la défaillance de l'emprunteur doivent être formées dans les deux ans de l'événement qui leur a donné naissance à peine de forclusion.

La recevabilité de l'action engagée par la société Banque CIC Est au regard de la forclusion a été vérifiée par le premier juge et ne fait l'objet d'aucune contestation.

Il ressort de l'ancien article L. 311-14 du code de la consommation que, pendant un délai de sept jours à compter de l'acceptation du contrat par l'emprunteur, aucun paiement, sous quelque forme et à quelque titre que ce soit, ne peut être fait par le prêteur à l'emprunteur ou pour le compte de celui-ci, ni par l'emprunteur au prêteur.

La méconnaissance de ces dispositions est sanctionnée par la nullité du contrat de crédit en vertu de l'article 6 du code civil, laquelle entraîne le remboursement par l'emprunteur du capital prêté.

En l'espèce, la société Banque CIC Est ne conteste pas que les fonds ont été débloqués pendant le délai de sept jours ; elle ne soulève pas davantage que le premier juge aurait excédé ses prérogatives.

Le fait que M. [U] ait volontairement exécuté le contrat en procédant au remboursement d'échéances ne vaut pas renonciation tacite de sa part à se prévaloir de la nullité découlant de la violation des dispositions de l'ancien article L. 311-14, ce qui est d'ailleurs impossible en raison du caractère d'ordre public de celles-ci.

La Directive 2008/48/CE du parlement européen et du conseil du 23 avril 2008 concernant les contrats de crédit aux consommateurs et abrogeant la directive 87/102/CEE du Conseil a été transcrite en droit interne français par la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010 ; elle est applicable directement par les juridictions nationales.

En application de l'article 14 de cette directive :

"1. Le consommateur dispose d'un délai de quatorze jours calendaires pour se rétracter dans le cadre du contrat de crédit sans donner de motif. Ce délai de rétractation commence à courir :

le jour de la conclusion du contrat de crédit, ou le jour où le consommateur reçoit les clauses et conditions contractuelles ainsi que les informations prévues à l'article 10, si cette date est postérieure à celle visée au point a) du présent alinéa

[...]

7. Le présent article est sans préjudice des dispositions nationales fixant un délai pendant lequel l'exécution du contrat ne peut commencer".

Selon l'article 22, "les États membres veillent à ce que le consommateur ne puisse renoncer aux droits qui lui sont conférés en vertu des dispositions du droit national qui mettent en 'uvre la présente directive ou qui lui correspondent".

Selon l'article 23, "les États membres définissent le régime de sanctions applicables en cas de violation des dispositions nationales adoptées conformément à la présente directive, et prennent toutes les mesures nécessaires pour faire en sorte qu'elles soient appliquées. Les sanctions doivent être effectives, proportionnées et dissuasives".

Il a été jugé par la Cour de justice de l'union européenne que le principe d'effectivité des dispositions de la directive précitée s'oppose à ce que la sanction de nullité du contrat de crédit assortie de l'obligation de restituer le capital soit soumise à la condition que la nullité soit soulevée par le consommateur dans un délai de prescription de trois ans (arrêt du 5 mars 2020, OPR - finances, C-679/18).

Il n'y a donc pas lieu d'opposer une quelconque prescription au moyen de nullité soulevé par le premier juge.

Sur le fond, la cour constate que le calcul opéré par le tribunal n'est pas critiqué.

En conséquence, le jugement est confirmé, sauf pour rectifier une erreur matérielle de date.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant après débats en audience publique, par arrêt rendu par défaut mis à disposition au greffe,

Confirme le jugement, sauf en ce qu'il a indiqué que le contrat de crédit annulé remontait au 3 avril 2018 ;

Statuant à nouveau sur ce point et y ajoutant,

Constate que le contrat de crédit annulé porte la date du 2 octobre 2014 ;

Condamne la société Banque CIC Est aux dépens d'appel ;

Dit n'y avoir lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais exposés en cause d'appel.

La greffièrePour le président empêché


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 9 - a
Numéro d'arrêt : 20/17619
Date de la décision : 08/09/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-09-08;20.17619 ?
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