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08/09/2022 | FRANCE | N°19/21910

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 9 - a, 08 septembre 2022, 19/21910


Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 9 - A



ARRÊT DU 08 SEPTEMBRE 2022



(n° , 10 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/21910 - N° Portalis 35L7-V-B7D-CBCHK



Décision déférée à la Cour : Jugement du 4 novembre 2019 - Tribunal d'Instance de LAGNY SUR MARNE - RG n° 11-18-001089





APPELANTE



La société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE, so

ciété anonyme à conseil d'administration, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité audit siège, venant aux droits de la société ...

Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 9 - A

ARRÊT DU 08 SEPTEMBRE 2022

(n° , 10 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/21910 - N° Portalis 35L7-V-B7D-CBCHK

Décision déférée à la Cour : Jugement du 4 novembre 2019 - Tribunal d'Instance de LAGNY SUR MARNE - RG n° 11-18-001089

APPELANTE

La société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE, société anonyme à conseil d'administration, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité audit siège, venant aux droits de la société BANQUE SOLFEA

N° SIRET : 542 097 902 04319

[Adresse 1]

[Localité 4]

représentée par Me Sébastien MENDES GIL de la SELAS CLOIX & MENDES-GIL, avocat au barreau de PARIS, toque : P0173

substitué à l'audience par Me Christine LHUSSIER de la SELAS CLOIX & MENDES-GIL, avocat au barreau de PARIS, toque : P0173

INTIMÉS

Monsieur [T] [B]

né le 3 août 1969 à [Localité 7] (95)

[Adresse 2]

[Localité 5]

représenté par Me Schmouel HABIB de la SELEURL HERACLES, avocat au barreau de PARIS, toque : E1511

Madame [Z] [C] épouse [B]

née le 6 janvier 1968 à TERMONDE (BELGIQUE)

[Adresse 2]

[Localité 5]

représentée par Me Schmouel HABIB de la SELEURL HERACLES, avocat au barreau de PARIS, toque : E1511

La SCP Philippe ANGEL & [H] [M], représentée par Maître [H] [M], en qualité de liquidateur judiciaire de la société GREEN POWER SOLUTION (SAS)

[Adresse 3]

[Localité 6]

DÉFAILLANTE

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 21 juin 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant M. Christophe BACONNIER, Président, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. Christophe BACONNIER, Président de chambre

Mme Fabienne TROUILLER, Conseillère

Mme Laurence ARBELLOT, Conseillère

Greffière, lors des débats : Mme Camille LEPAGE

ARRÊT :

- RÉPUTÉ CONTRADICTOIRE

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Mme Fabienne TROUILLER, Conseillère pour le Président empêché et par Mme Camille LEPAGE, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Suivant bon de commande signé le 11 juin 2011 à la suite d'un démarchage à domicile, M. [T] [B] et Mme [Z] [C] épouse [B] ont conclu avec la société Néolia Environnement devenue Green Power Solutions un contrat de vente d'une installation photovoltaïque. L'installation a été financée par un contrat de prêt contracté le même jour auprès de la banque Solfea aux droits de laquelle vient la société BNP Paribas Personal Finance (la société BNPPPF), d'un montant de 21 500 euros, au taux d'intérêts contractuel de 5,13 % l'an remboursable sur une durée de 156 mois.

Par un jugement en date du 16 juin 2013, la société GPS a été placée en liquidation judiciaire et la SCP Philippe Angel & [H] [M] a été désignée en qualité de liquidateur judiciaire.

Saisi le 25 mai 2018 par M. et Mme [B] d'une demande tendant principalement à l'annulation des contrats de vente et de crédit affecté, le tribunal d'instance de Lagny-sur-Marne, par un jugement réputé contradictoire rendu le 4 novembre 2019 auquel il convient de se reporter, a :

- déclaré M. et Mme [B] recevables en leurs demandes dirigées contre la société BNPPPF,

- annulé le contrat de vente et le contrat de prêt,

- condamné la société BNPPPF à restituer à M. et Mme [B] les sommes versées au titre des échéances payées du crédit souscrit,

- rejeté les demandes de dommages-intérêts formées par M. et Mme [B],

- débouté la société BNPPPF de ses demandes de restitution et de dommages intérêts,

- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,

- condamné la société BNPPPF à payer à M. et Mme [B] la somme de 800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- ordonné l'exécution provisoire.

Le premier juge a relevé que le contrat de vente ne comportait pas les mentions requises par l'article L. 121-23 du code de la consommation, que celui-ci était nul et que les acquéreurs n'avaient pas entendu couvrir la nullité, la seule reproduction des dispositions du code de la consommation ne permettant pas d'établir leur connaissance du vice affectant l'acte. Il a prononcé en conséquence la nullité du contrat de prêt avant de relever que la banque avait commis une faute en ne contrôlant pas la régularité du contrat principal. Il a enfin considéré que les parties ne rapportaient pas la preuve des préjudices qu'elles alléguaient.

Par une déclaration en date du 28 novembre 2019, la société BNP Paribas Personal Finance a relevé appel de cette décision.

Aux termes de conclusions remises par voies électronique le 4 avril 2022, et signifiées au liquidateur de la société Green Power Solutions le 29 avril 2022, l'appelante demande à la cour :

- d'infirmer en toutes ses dispositions le jugement dont appel,

- de déclarer irrecevables ou à tout le moins infondées les demandes en nullité des contrats,

- de constater que la déchéance du terme a été prononcée,

- subsidiairement de prononcer la résiliation judiciaire du contrat de crédit du fait des impayés et condamner solidairement M. et Mme [B] à lui payer la somme de 11 928,81 euros avec intérêts au taux contractuel à compter du 4 novembre 2019 sur la somme de 11 045,19 euros et au taux légal pour le surplus en remboursement du crédit,

- de les condamner solidairement à lui restituer la somme de 18 056,36 euros au titre des sommes versées en exécution du jugement au titre des mensualités précédemment réglées,

- subsidiairement de les condamner à lui payer la somme de 7 161 euros au titre des échéances échues impayées de décembre 2019 à août 2022 incluses, outre la somme de 18 056,36 euros au titre des mensualités précédemment restituées, et leur enjoindre de reprendre le remboursement des mensualités à peine de déchéance du terme,

- plus subsidiairement en cas de nullité des contrats, de condamner M. et Mme [B] à lui payer la somme de 21 500 euros en restitution du capital prêté et de déclarer irrecevables les demandes de M. et Mme [B] visant à la privation de sa créance de restitution,

- très subsidiairement, de limiter la réparation qu'elle devrait eu égard au préjudice effectivement subi par les emprunteurs à charge pour eux de l'établir et eu égard à la faute de l'emprunteur ayant concouru à son propre préjudice et limiter, en conséquence, la décharge à concurrence du préjudice subi à charge pour les emprunteurs d'en justifier,

- à titre infiniment subsidiaire, en cas de décharge de l'obligation des emprunteurs, de condamner solidairement M. et Mme [B] à lui payer la somme de 21 500 euros correspondant au capital perdu à titre de dommages et intérêts en réparation de leur légèreté blâmable,

- d'enjoindre à M. et Mme [B] de restituer, à leurs frais, le matériel installé chez eux à la société Philippe Angel & [H] [M] en qualité de liquidateur judiciaire de la société Green Power Solutions dans un délai de 15 jours à compter de la signification de l'arrêt, ainsi que les revenus perçus au titre de la revente d'électricité, et de dire qu'à défaut de restitution, ils resteront tenus du remboursement du capital prêté,

- subsidiairement, de priver M. et Mme [B] de leur créance en restitution des sommes réglées du fait de leur légèreté blâmable,

- d'ordonner le cas échéant la compensation des créances réciproques à due concurrence,

- de débouter M. et Mme [B] de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions,

- de condamner solidairement M. et Mme [B] à lui payer la somme de 3 000 euros au titre des frais irrépétibles d'appel.

L'appelante soutient au visa des articles 2224 du code civil et L. 110-4 du code de commerce que l'action tendant à la nullité du contrat d'installation des panneaux photovoltaïques est irrecevable comme prescrite. Elle ajoute que la prescription quinquennale fait également obstacle à l'action en responsabilité formée par les emprunteurs à son encontre.

Soulignant le caractère exceptionnel de l'annulation d'un contrat, elle conteste les griefs émis à l'encontre du libellé du bon de commande, rappelle le caractère strict de l'interprétation de l'article L. 121-23 du code de la consommation et souligne que le premier juge est allé au-delà des exigences prévues par les textes. Elle soutient que les clauses du contrat sont apparentes et lisibles.

Subsidiairement, elle fait valoir que les acquéreurs ont confirmé le contrat et renoncé à se prévaloir d'une nullité du bon de commande en attestant de l'exécution conforme des travaux sans aucune réserve, en ordonnant le paiement du prix puis en contractant avec la société EDF et en vendant l'électricité produite par l'équipement.

Elle note que les allégations de dol au sens des anciens articles 1109 et 1116 du code civil ne sont aucunement étayées et relève qu'aucun élément n'est fourni sur la réalité d'une promesse d'autofinancement ou sur la rentabilité de l'installation, le bon de commande mentionnant au contraire que cette rentabilité n'est pas garantie et offrant aux acquéreurs la possibilité de solliciter une estimation de production. Elle soutient qu'aucune des tromperies alléguées n'est établie. Elle ajoute que le défaut de performance allégué est sans effet sur la cause du contrat et sa validité.

La banque rappelle que le maintien du contrat obligera les intimés à restituer le capital perçu au titre de l'exécution provisoire du jugement attaqué et à payer les échéances restant dues. À titre subsidiaire, l'appelante fait valoir que la nullité du contrat de crédit emporterait obligation pour les emprunteurs de restituer le capital emprunté.

Elle souligne que la nullité du contrat empêcherait les emprunteurs de se prévaloir d'une quelconque faute contractuelle notamment dans le déblocage des fonds et relève que les emprunteurs devraient alors prouver la survenance d'une faute d'origine délictuelle pour engager sa responsabilité.

Visant notamment les articles L. 311-31 et L. 311-51 du code de la consommation, elle conteste toute obligation de contrôler la validité du bon de commande, toute faute dans la vérification du bon de commande, de l'exécution de la prestation qui ne lui incombe pas ou dans la délivrance des fonds sur la base d'un mandat de payer donné par les clients (en rappelant les obligations du mandataire) ; elle souligne que toutes les demandes des emprunteurs à son encontre sont vaines dès lors que les intéressés ne justifient pas du moindre préjudice ni d'un lien causal entre celui-ci et un fait imputable à la banque.

Elle note enfin que l'évaluation d'un éventuel préjudice doit prendre en compte la valeur du bien que les acquéreurs conserveront et souligne que la légèreté blâmable avec laquelle les emprunteurs ont signé l'attestation de fin de travaux constitue une faute occasionnant un préjudice correspondant au capital prêté dont elle serait privée. L'appelante relève par ailleurs qu'en cas de nullité des contrats, l'octroi de dommages et intérêts en sus de la décharge du paiement des intérêts constituerait une double indemnisation avant de souligner que les préjudices invoqués sont manifestement infondés.

Par des conclusions remises le 21 mars 2022, M. et Mme [B] demandent à la cour :

- de confirmer le jugement du tribunal d'instance de Lagny-sur-Marne en ce qu'il a annulé le contrat de vente et le contrat de prêt et condamné la société BNPPPF à leur restituer les sommes versées au titre des échéances payées du crédit souscrit,

- de dire leurs demandes recevables et les déclarer bien fondées,

- de débouter la société BNPPPF de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

- de réformer le jugement dont appel pour le surplus,

- de condamner la société BNPPPF à leur payer la somme de 4 000 euros au titre de leur préjudice financier et du trouble de jouissance et 4 000 euros au titre de leur préjudice moral,

- de condamner la société BNPPPF à leur payer la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Les intimés soutiennent au visa de l'article 2224 du code civil n'avoir pris connaissance des vices affectant l'acte qu'à compter de la réception des factures EDF en juin 2013, de sorte que leur action en nullité est recevable. Au visa des articles L. 621-40 et L. 622-21 du code de commerce, les intimés indiquent que leur action tend à l'annulation du contrat conclu avec la société Green Power Solutions, et non à la condamnation de celle-ci à quelque somme que ce soit, de sorte qu'elle est recevable.

À titre principal, ils allèguent au visa des articles L. 121-23 à L. 121-25 du code de la consommation des violations de dispositions impératives régissant le bon de commande, notamment en ce qui concerne la description du matériel promis, les conditions et délais d'exécution des prestations, les éléments relatifs au paiement, le nom du démarcheur, les ambiguïtés et la mauvaise lisibilité du bon de commande.

Ils dénoncent des abstentions malicieuses, la référence mensongère à un partenariat avec la société EDF, une présentation fallacieuse de la rentabilité prévisible de l'installation et une dénomination trompeuse de l'acte qui ont affecté la validité de leur consentement au sens des anciens articles 1109 et 1116 du code civil.

Ils contestent toute confirmation de l'acte entaché de nullité en se prévalant de leur qualité de consommateurs profanes et en relevant que la seule reproduction des dispositions du code de la consommation ne permet pas de présumer de la connaissance du vice. Après avoir rappelé que le contrat de crédit constitue avec le contrat de vente une opération commerciale unique au sens de l'article L. 311-1 du code de la consommation, ils soutiennent que celui-ci doit être également annulé.

Ils soutiennent que la banque est tenue de vérifier la régularité du contrat principal, et qu'elle a commis une faute en n'y procédant pas et en finançant un contrat nul. Ils ajoutent au visa de l'article L. 311-31 qu'elle a commis une faute confinant au dol en libérant les fonds sans que les travaux aient été achevés, de sorte qu'elle doit être privée de sa créance de restitution et condamnée à prendre en charge les frais de remise en état. Ils réclament la réparation du préjudice financier et du trouble de jouissance qu'ils subissent en raison des fautes commises par la banque, ainsi que de leur préjudice moral.

Régulièrement assignée par acte d'huissier délivré le 21 janvier 2020 conformément aux dispositions des articles 656 et 658 du code de procédure civile, la société Philippe Angel & [H] [M] ès-qualités n'a pas constitué avocat. Les premières conclusions lui ont été signifiées le 5 mars 2020.

Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions des parties, il est renvoyé aux écritures de celles-ci conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 17 mai 2022 et l'affaire a été appelée à l'audience le 21 juin 2022.

MOTIFS DE LA DÉCISION

À titre préliminaire, il convient de souligner qu'il n'est pas contesté que la société BNPPPF est venue aux droits de la société Banque Solféa.

Il résulte du dernier alinéa de l'article 954 du code de procédure civile que la partie qui ne conclut pas ou qui, sans énoncer de nouveaux moyens, demande la confirmation du jugement est réputée s'en approprier les motifs.

Le contrat de vente conclu le 11 juin 2011 après démarchage à domicile, est soumis aux dispositions des articles L. 121-21 et suivants du code de la consommation et le contrat de crédit conclu entre M. et Mme [B] et la société BNPPPF est un contrat affecté soumis aux dispositions de la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010 de sorte qu'il sera fait application des articles du code de la consommation dans leur rédaction en vigueur après le 1er mai 2011 et leur numérotation antérieure à l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 et au décret n° 2016-884 du 29 juin 2016.

Sur l'irrecevabilité des demandes des emprunteurs tirée de la prescription

La société BNPPPF soutient au visa des articles 2224 du code civil et L. 110-4 du code de commerce que les moyens tirés de l'irrégularité formelle du bon de commande, du dol, et de l'action en responsabilité du prêteur de deniers soulevés par M. et Mme [B] sont prescrits, puisque la signature du bon de commande remonte au 11 juin 2011 (date utile pour le bon de commande et le dol), que le déblocage des fonds remonte au 7 septembre 2011 (date utile pour l'action en responsabilité) alors que l'assignation a été signifiée le 25 mai 2018.

M. et Mme [B] soutiennent au visa de l'article 2224 du code civil que le point de départ de la prescription remonte à la date de la première facture de production le 28 juin 2013 et qu'ils avaient donc jusqu'au 28 juin 2018 pour agir en justice.

En application de l'article 1304 du code civil dans sa rédaction ancienne applicable au litige, dans tous les cas où l'action en nullité ou en rescision d'une convention n'est pas limitée à un moindre temps par une loi particulière, cette action dure cinq ans.

Selon l'article 2224 du même code, les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.

En application de l'article L. 110-4 du code de commerce, les obligations nées à l'occasion de leur commerce entre commerçants ou entre commerçants et non-commerçants se prescrivent par cinq ans si elles ne sont pas soumises à des prescriptions spéciales plus courtes.

Sur la prescription des demandes de nullité du bon de commande

En l'espèce, le contrat dont l'annulation est demandée a été conclu le 11 juin 2011 et M. et Mme [B] ont engagé l'instance par une assignation délivrée le 25 mai 2018.

Plus de cinq années s'étant écoulées entre ces deux dates, M. et Mme [B] sont irrecevables à solliciter l'annulation du contrat sur le fondement des articles L. 121-23 et suivants du code de la consommation alors applicables, en invoquant des irrégularités formelles qui - à les supposer avérées - étaient visibles par les intéressés, à la date de conclusion du contrat sans que l'invocation d'une méconnaissance de la réglementation applicable puisse faire échec à l'application des règles de la prescription ou en reporter le point de départ du délai.

C'est en vain que les intimés soutiennent que le point de départ de la prescription doit être reporté au 28 juin 2013, date de l'établissement de la première facture de vente à EDF de l'électricité produite alors que dès la signature du contrat, ils étaient en mesure de connaître le moyen de droit qu'ils allèguent dans le cadre de la présente procédure tiré d'irrégularités formelles du bon de commande et de constater d'éventuelles irrégularités du bon de commande au regard de l'application de cette règle de droit, de sorte que le délai a bien couru dès cette date et ne peut être reporté.

Sur la prescription des demandes de nullité pour dol

M. et Mme [B] sollicitent l'annulation du contrat litigieux pour dol en soutenant que le point de départ du délai de prescription doit être fixé à la date de réception de la première facture d'électricité leur ayant permis de prendre connaissance des man'uvres frauduleuses opérées par la société Groupe éco France, soit le 28 juin 2013.

La cour constate que M. et Mme [B] invoquent à l'appui du dol des éléments connus lors de la signature du bon de commande qui justifient de retenir cette date comme point de départ du délai de prescription ou des éléments non contractualisés et donc inopérants pour permettre de reporter le point de départ du délai de prescription à la date de réception de la première facture d'électricité.

En effet il est soutenu que les informations relatives au délai de raccordement, à l'assurance obligatoire à souscrire en cas d'acquisition de tels matériels, à la location obligatoire d'un compteur de production auprès de la société EDF sur 20 ans, et à la durée de vie des matériels et notamment, celle de l'onduleur électrique n'ont pas été communiquées, que la société Neolia a sciemment fait état de partenariats mensongers en laissant planer la confusion entre GDF et GEF, que la présentation de la rentabilité de l'installation était fallacieuse et que la présentation de l'opération contractuelle comme une simple candidature était trompeuse.

De surcroît, les deux courriers communiqués adressés par les intimés les 2 octobre et 28 décembre 2013 formulent une demande de contrôle de l'installation suite aux rendements non satisfaisants mais ne suffisent pas à caractériser de man'uvre dolosive ni de tromperie.

À l'examen des pièces produites et des moyens débattus, la cour retient que ce moyen tiré du dol est prescrit au motif que les moyens de fait invoqués à l'appui du dol pouvaient être découverts à la date de signature du bon de commande comme cela est le cas du défaut d'information sur la durée de vie des matériels et notamment, celle de l'onduleur électrique, comme cela est aussi le cas des allégations relatives à la confusion entre GDF et GEF et à la présentation trompeuse de l'opération contractuelle comme une simple candidature.

La cour ajoute, en ce qui concerne les moyens de faits relatifs au délai de raccordement, à l'assurance obligatoire à souscrire en cas d'acquisition de tels matériels, à la location obligatoire d'un compteur de production auprès de la société EDF sur 20 ans, à la présentation fallacieuse de la rentabilité de l'installation et à un prétendu autofinancement qu'il s'agit de moyens inopérants dès lors qu'ils portent sur des éléments non contractualisés, le bon de commande ne comportant strictement aucune indication sur la rentabilité de l'installation et étant suffisamment explicite sur les limites du contrat relatif à l'installation photovoltaïque vendue étant précisé que le raccordement a été fait dans le cadre du contrat passé par ailleurs entre M. et Mme [B] et ERDF.

En l'espèce, plus de cinq années se sont écoulées entre le contrat conclu le 11 juin 2011 et l'assignation délivrée le 25 mai 2018 en sorte que l'action en nullité pour dol fondée sur l'article 1116 du code civil est prescrite.

Sur la prescription de l'action en responsabilité des emprunteurs contre le prêteur de deniers

M. et Mme [B] soutiennent que la banque a commis une faute dans la mesure où, étant spécialisée dans les opérations de crédit, il lui incombait de vérifier que le contrat était conforme aux dispositions du code de la consommation, qu'elle a commis une faute en délivrant les fonds avant l'achèvement de l'installation, que le raccordement était un élément déterminant du contrat et à titre subsidiaire qu'elle a manqué à ses devoirs d'information, de mise en garde et de conseil et n'a pas suffisamment éclairé les emprunteurs sur la réalité de l'opportunité économique de l'opération et le caractère illusoire des rendements escomptés.

À l'examen des pièces produites et des moyens débattus, la cour retient que l'action en responsabilité est prescrite au motif que les moyens de fait invoqués à l'appui de l'action en responsabilité du prêteur pouvaient être découverts soit à la date de signature du contrat de crédit affecté le 11 juin 2011 comme cela est le cas des éventuelles non-conformités du contrat principal aux dispositions du code de la consommation, soit à la date du déblocage des fonds le 7 septembre 2011 comme cela est le cas de l'éventuelle faute dans le déblocage des fonds.

En l'espèce, plus de cinq années se sont écoulées entre le contrat conclu le 11 juin 2011 ou le déblocage des fonds survenu le 7 septembre 2011 et l'assignation délivrée le 25 mai 2018 en sorte que l'action en responsabilité engagée par M. et Mme [B] est irrecevable par application de l'article L. 110-4 précité.

En conséquence, le jugement est infirmé en toutes ses dispositions, et statuant à nouveau des chefs, la cour déclare que M. et Mme [B] sont irrecevables en leur action en nullité, en leur action en responsabilité et en toutes leurs demandes découlant de ces actions.

Sur la demande reconventionnelle en paiement

La société BNPPPF demande à la cour de constater que M. et Mme [B] sont défaillants dans le remboursement du crédit, de prononcer la résiliation judiciaire du contrat de crédit du fait des impayés avec effet au 4 novembre 2019, de condamner, en conséquence, solidairement M. et Mme [B] à lui payer la somme de 11 928,81 euros avec les intérêts au taux contractuel à compter du 4 novembre 2019 sur la somme de 11 045,19 euros et au taux légal pour le surplus en remboursement du crédit. Subsidiairement, elle demande à la cour de les condamner solidairement à lui payer la somme de 7 161 euros au titre des mensualités échues impayées entre décembre 2019 à août 2022 incluses, outre la somme de 18 056,36 euros au titre des mensualités précédemment restituées et leur enjoindre de reprendre le remboursement des mensualités à peine de déchéance du terme.

M. et Mme [B] n'ont pas répondu à ce moyen.

La société BNPPPF fonde sa demande en paiement en produisant notamment le contrat de crédit signé par les parties, la fiche dialogue, la notice d'assurance, les pièces justificatives d'identité, de domicile, de revenus et d'imposition et le tableau d'amortissement.

Il ressort des pièces et des débats que les emprunteurs ont cessé d'exécuter leur obligation de remboursement du crédit à compter de décembre 2019 après que le premier juge a, par jugement rendu le 4 novembre 2019, prononcé la nullité du contrat principal et la nullité du contrat de crédit affecté conclu le 11 juin 2011 et ordonné l'exécution provisoire.

Cette situation judiciaire ne suffit pas à qualifier de grave le manquement imputable aux emprunteurs qui avaient spontanément assumé leurs obligations jusqu'alors.

Il convient donc de rejeter la demande de résiliation du crédit.

Pour autant, les mensualités échues jusqu'à la date du présent arrêt sont exigibles.

C'est donc à bon droit que la société BNPPPF sollicite la condamnation solidaire de M. et Mme [B] à lui payer la somme de 7 161 euros au titre des mensualités échues impayées de décembre 2019 à août 2022 incluses et la reprise du remboursement des mensualités.

En conséquence, M. et Mme [B] sont condamnés solidairement à payer à la société BNPPPF cette somme et ils devront reprendre le remboursement du crédit à compter du 8 septembre 2022.

Il convient de rappeler que M. et Mme [B] sont en outre redevables de plein droit du remboursement des sommes qu'ils ont perçues en exécution du jugement qui est infirmé.

Les motifs qui précèdent rendent sans objet les prétentions et moyens subsidiaires des parties.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant par arrêt réputé contradictoire et en dernier ressort,

Infirme le jugement dont appel en toutes ses dispositions ;

Statuant à nouveau,

Déclare M. [T] [B] et Mme [Z] [C] épouse [B] irrecevables en leurs demandes de nullité, en leur action en responsabilité et en toutes leurs demandes en découlant ;

Y ajoutant,

Déboute la société BNP Paribas personal finance de sa demande de résiliation judiciaire du contrat de crédit avec effet au 4 novembre 2019 ;

Condamne solidairement M. [T] [B] et Mme [Z] [C] épouse [B] à payer à la société BNP Paribas personal finance la somme de 7 161 euros au titre des mensualités échues impayées de décembre 2019 à août 2022 incluses ;

Dit que M. et Mme [B] devront reprendre le remboursement du crédit à compter du 8 septembre 2022 ;

Condamne in solidum M. [T] [B] et Mme [Z] [C] épouse [B] aux dépens de première instance et d'appel, ces derniers pouvant être recouvrés directement par la Selas Cloix & Mendès-Gil, avocats conformément à l'article 699 du code de procédure civile ;

Condamne in solidum M. [T] [B] et Mme [Z] [C] épouse [B] à payer à la société BNP Paribas personal finance la somme de 1 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Rappelle que le présent arrêt infirmatif constitue le titre ouvrant droit à la restitution des sommes versées en exécution du jugement, et que les sommes devant être restituées portent intérêt au taux légal à compter de la notification ou de la signification, valant mise en demeure, de la décision ouvrant droit à restitution.

La greffièrePour le président empêché


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 9 - a
Numéro d'arrêt : 19/21910
Date de la décision : 08/09/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-09-08;19.21910 ?
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