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08/09/2022 | FRANCE | N°19/05670

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 9 - a, 08 septembre 2022, 19/05670


Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 9 - A



ARRÊT DU 08 SEPTEMBRE 2022



(n° , 13 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/05670 - N° Portalis 35L7-V-B7D-B7QT3



Décision déférée à la Cour : Jugement du 25 janvier 2019 - Tribunal d'Instance de PARIS - RG n° 11-16-630





APPELANTE



La société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE, SA à conseil d

'administration agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés ès-qualités audit siège, venant aux droits de la société SYGMA BANQUE

N° SIRET : 542 097 ...

Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 9 - A

ARRÊT DU 08 SEPTEMBRE 2022

(n° , 13 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/05670 - N° Portalis 35L7-V-B7D-B7QT3

Décision déférée à la Cour : Jugement du 25 janvier 2019 - Tribunal d'Instance de PARIS - RG n° 11-16-630

APPELANTE

La société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE, SA à conseil d'administration agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés ès-qualités audit siège, venant aux droits de la société SYGMA BANQUE

N° SIRET : 542 097 902 04319

[Adresse 1]

[Localité 3]

représentée par Me Sébastien MENDES GIL de la SELAS CLOIX & MENDES-GIL, avocat au barreau de PARIS, toque : P0173

substitué à l'audience par Me Christine LHUSSIER de la SELAS CLOIX & MENDES-GIL, avocat au barreau de PARIS, toque : P0173

INTIMÉS

Monsieur [O] [Z]

né le 20 novembre 1958 à [Localité 3] (75)

[Adresse 5]

[Localité 4]

représenté par Me Ariane VENNIN de la SELEURL A7 AVOCAT, avocat au barreau de PARIS, toque : C1186

Madame [F] [D] épouse [Z]

née le 12 février 1981 à [Localité 3] (75)

[Adresse 5]

[Localité 4]

représentée par Me Ariane VENNIN de la SELEURL A7 AVOCAT, avocat au barreau de PARIS, toque : C1186

La SELAFA MJA prise en la personne de Maître [J] [Y] en qualité de liquidateur judiciaire de la SAS VIVONS ENERGY

[Adresse 2]

[Localité 3]

DÉFAILLANTE

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 19 avril 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant M. Benoît DEVIGNOT, Conseiller, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. Christophe BACONNIER, Président de chambre

M. Benoît DEVIGNOT, Conseiller

Mme Laurence ARBELLOT, Conseillère

Greffière, lors des débats : Mme Camille LEPAGE

ARRÊT :

- RÉPUTÉ CONTRADICTOIRE

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Mme Laurence ARBELLOT, Conseillère pour le Président empêché et par Mme Camille LEPAGE, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Le 17 décembre 2013, M. [O] [Z] et son épouse, [F] [D], ont commandé à la société Activ eco une installation comportant 16 panneaux photovoltaïques, au prix de 26 000 euros TTC.

Selon offre préalable de crédit acceptée le même jour, la société Sygma banque a consenti à M. et Mme [Z] un crédit affecté d'un montant de 26 000 euros remboursable, après une période de report d'amortissement de douze mois, en 132 mensualités de 281,09 euros (hors assurance) incluant les intérêts au taux nominal de 5,76 % l'an.

Le 13 janvier 2014, M. [Z] a signé un « certificat de livraison du bien ou de fourniture de services ».

Par actes d'huissier du 17 février 2016, M. et Mme [Z] ont fait assigner la société Vivons energy et la société BNP paribas personal finance, venant aux droits de la société Sygma banque, en nullité du contrat de vente et du contrat de financement devant le tribunal d'instance du 9ème arrondissement de Paris.

Le 13 décembre 2017, le tribunal de commerce de Paris a prononcé la liquidation judiciaire de la société Vivons energy et désigné la société MJA, prise en la personne de Maître [J] [Y], en qualité de liquidateur.

Par jugement réputé contradictoire du 25 janvier 2019 assorti de l'exécution provisoire, le tribunal d'instance de Paris a :

- donné acte à la société BNP Paribas personal finance de son intervention volontaire aux droits de la société Sygma banque ;

- prononcé la nullité tant du contrat de vente'que du contrat de prêt ;

- dit que la société BNP Paribas personal finance a commis une faute la privant de son droit à restitution du capital emprunté ;

- dit que M. et Mme [Z] devraient restituer à la société MJA, prise en la personne de Maître [J] [Y], en qualité de liquidateur judiciaire de la société Vivons energy, le matériel posé en exécution du contrat de vente et dit que la mise à disposition de ce matériel à leur domicile pendant une durée de six mois à compter de la signification de la présente décision vaudrait restitution ;

- condamné la société BNP Paribas personal finance à restituer à M. et Mme [Z] les sommes dont ils se sont acquittés au titre du prêt, soit un montant de 4 507,44 euros ;

- fixé la créance de la société BNP Paribas personal finance au passif de la liquidation de la société Vivons energy à la somme de 15 000 euros ;

- condamné la société BNP Paribas personal finance à payer à M. et Mme [Z] la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- rejeté les autres demandes ;

- condamné la société BNP Paribas personal finance aux dépens.

Pour statuer ainsi, le tribunal a retenu que le bon de commande était incomplet au regard des exigences de l'article L. 121-23 du code de la consommation. Il a considéré que les emprunteurs n'avaient pas entendu confirmer l'acte entaché de nullité. Après avoir rappelé que la nullité du contrat de vente emportait de plein droit celle du contrat de crédit, le tribunal a estimé que la banque avait commis une faute lors de la vérification du contrat principal et lors de la délivrance des fonds, ce qui la privait du droit à restitution du capital prêté. Il a retenu que la venderesse avait commis une faute à l'origine de l'annulation du contrat de vente et, par conséquent, du contrat de prêt, portant ainsi préjudice à la banque.

Le13 mars 2019, la société BNP Paribas personal finance a interjeté appel.

Dans ses dernières conclusions déposées par voie électronique le 22 novembre 2021, la société BNP Paribas personal finance requiert la cour :

- d'infirmer le jugement, en ce qu'il a prononcé la nullité du contrat de vente et la nullité du contrat de prêt, en ce qu'il a dit qu'elle avait commis une faute la privant de son droit à restitution du capital emprunté, en ce qu'il a dit que M. et Mme [Z] devraient restituer au liquidateur de la société Vivons energy le matériel posé en exécution du contrat de vente et dit que la mise à disposition de ce matériel au domicile de M. et Mme [Z] pendant une durée de six mois à compter de la signification du jugement vaudrait restitution, en ce qu'il l'a condamnée à restituer à M. et Mme [Z] les sommes dont ils se sont acquittés au titre du prêt, en ce qu'il l'a déboutée de ses demandes en paiement, en ce qu'il a fixé sa créance au passif de la liquidation de la société Vivons energy à un montant de 15 000 euros, en ce qu'il a condamné la société BNP paribas personal finance à payer à M. et Mme [Z] la somme globale de 1 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et en ce qu'il l'a condamnée aux dépens.

Statuant à nouveau,

à titre principal,

- de déclarer irrecevable la demande de M. et Mme [Z] de nullité du contrat de vente et, par voie de conséquence, irrecevable la demande de nullité du contrat de crédit ;

- de débouter M. et Mme [Z] de leur demande de nullité du contrat de vente et de leur demande de nullité du contrat de crédit, ainsi que de leur demande de restitution des mensualités réglées ;

- de déclarer irrecevable la demande de M. et Mme [Z] de résolution du contrat de vente et, par voie de conséquence, irrecevable la demande de résolution du contrat de crédit ;

- de débouter M. et Mme [Z] de leur demande de résolution du contrat de vente et de leur demande de résolution du contrat de crédit, ainsi que de leur demande de restitution des mensualités réglées ;

- de prononcer la résiliation du contrat de crédit du fait des impayés avec effet au 1er mars 2019 ;

- de condamner, en conséquence, solidairement M. et Mme [Z] à lui payer la somme de 21 272,44 euros avec les intérêts au taux contractuel de 5,76 % l'an à compter du 4 février 2019 sur la somme de 19 696,70 euros et au taux légal sur le surplus, outre la restitution des sommes versées à M. et Mme [Z] en exécution du jugement au titre des mensualités précédemment réglées, soit la somme de 15 801,79 euros ;

- en tant que de besoin, de condamner solidairement M. et Mme [Z] à lui restituer cette somme de 15 801,79 euros ;

- subsidiairement, de condamner solidairement M. et Mme [Z] à lui régler la somme de 11 590,56 euros correspondant aux échéances impayées du 4 mars 2019 au 4 février 2022 inclus, ainsi que la somme de 15 801,79 euros au titre des mensualités précédemment restituées, puis de leur enjoindre de reprendre le remboursement des mensualités à peine de déchéance du terme ;

subsidiairement, en cas de nullité ou de résolution des contrats,

- de déclarer irrecevable la demande de M. et Mme [Z] visant à être déchargés de l'obligation de restitution du capital prêté ;

- de condamner in solidum M. et Mme [Z] à lui payer la somme de 26 000 euros en restitution du capital prêté ;

en tout état de cause,

- de déclarer irrecevable la demande de M. et Mme [Z] visant à la privation de sa créance ;

- de débouter, à tout le moins, ceux-ci ;

très subsidiairement,

- de limiter la réparation qu'elle devrait et, en conséquence, la décharge ;

à titre infiniment subsidiaire, en cas de décharge de l'obligation de l'emprunteur,

- de condamner in solidum M. et Mme [Z] à lui payer la somme de 26 000 euros correspondant au capital perdu, à titre de dommages-intérêts pour légèreté blâmable ;

- d'enjoindre à M. et Mme [Z] de restituer, à leurs frais, le matériel installé chez eux au liquidateur dans un délai de quinze jours à compter de la signification de l'arrêt, ainsi que les revenus tirés de la revente d'électricité

- de dire qu'à défaut de restitution, M. et Mme [Z] resteront tenus du remboursement du capital prêté ;

- subsidiairement, de priver M. et Mme [Z] de leur créance en restitution des mensualités réglées ;

- de dire qu'en tout état de cause, en cas de nullité ou de résolution des contrats, la société Vivons energy est garante du remboursement par l'emprunteur du capital prêté ;

- de fixer la créance en garantie de la restitution du capital prêté au passif de la procédure collective de la société Vivons energy à un montant de 26 000 euros ;

- de fixer, par ailleurs, la créance de la société BNP Paribas personal finance au titre des intérêts perdus du fait de l'annulation ou de la résolution des contrats à la somme de 11 103,88 euros ;

- de débouter M. et Mme [Z] de leurs autres demandes ;

- d'ordonner, le cas échéant, la compensation des créances réciproques'à due concurrence ;

en tout état de cause,

- de condamner M. et Mme [Z] à lui payer la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Soulignant le caractère exceptionnel de l'annulation d'un contrat, elle évoque un détournement de droit.

Elle conteste les griefs émis à l'encontre du libellé du bon de commande, rappelle le caractère strict de l'interprétation de l'article L. 121-23 du code de la consommation et estime que le premier juge est allé au-delà des exigences prévues par ce texte.

Subsidiairement, elle soutient que les emprunteurs ont confirmé l'acte entaché de nullité en exécutant volontairement le contrat, en manifestant leur volonté de conserver et d'utiliser le matériel, puis en continuant à revendre de l'électricité à ERDF.

Elle estime que M. et Mme [Z] ne justifient d'aucun manquement suffisamment grave pour fonder la résolution judiciaire. Elle souligne qu'en cas de réception sans réserve de la chose vendue, l'acquéreur ne peut plus invoquer une absence de délivrance ou une délivrance non conforme. Elle considère que l'absence de deux panneaux ne pourrait donner lieu, tout au plus, qu'à des dommages-intérêts.

Elle justifie la demande de prononcé de la résiliation judiciaire du contrat par les mensualités impayées postérieures au jugement.

À titre subsidiaire, elle fait valoir que la nullité du contrat de crédit emporterait obligation pour les emprunteurs de restituer le capital emprunté.

Elle estime que l'attestation de réalisation de la prestation signée par M. [Z] démontre qu'elle n'a commis aucune faute dans le versement des fonds, étant même précisé qu'elle n'a fait qu'exécuter l'ordre de paiement donné par son mandant. Elle ajoute qu'aucun texte ne prévoit que l'établissement de crédit ait l'obligation de vérifier la régularité du bon de commande.

Elle souligne qu'en cas de nullité du contrat de crédit, seule la responsabilité civile délictuelle des parties peut être engagée.

Elle affirme que son contrôle ne portait ni sur les autorisations données par des organismes tiers ni sur la réalisation du raccordement réalisé ultérieurement par ERDF.

Elle ajoute que l'emprunteur ne justifie d'aucun préjudice.

Dans leurs conclusions déposées par voie électronique le 10 septembre 2019, M. et Mme [Z] sollicitent que'la cour déboute la société BNP Paribas personal finance de l'ensemble de ses prétentions et confirme le jugement, en ce qu'il les a déclarés recevables en leurs demandes, puis :

à titre principal,

- confirme le jugement, en ce qu'il a prononcé l'annulation du contrat conclu entre la société Vivons energy et M. [Z] ;

- « infirme » le jugement, en ce qu'il a prononcé l'annulation de plein droit du contrat de crédit affecté ;

- confirme le jugement, en ce qu'il a dit qu'ils devraient restituer, à la demande du liquidateur de la société Vivons energy, le matériel posé en exécution du contrat de vente et en ce que la mise à disposition du matériel à domicile pendant une durée de six mois à compter de la signification de la décision vaudrait restitution ;

à titre subsidiaire, si la cour d'appel ne confirmait pas à titre principal le jugement de première instance, en ce qu'il a prononcé l'annulation des contrats en cause,

- prononce la résolution judiciaire du contrat principal pour inexécution suffisamment grave de ses obligations contractuelles par la société Vivons energy ;

- prononce la résolution judiciaire de plein droit du contrat de crédit ;

- juge que M. et Mme [Z] devront restituer, à la demande du liquidateur, le matériel posé en exécution du contrat de vente et juge que, dans cette hypothèse, la mise à disposition du matériel à domicile pendant une durée de six mois à compter de la signification de la décision à intervenir vaudra restitution ;

en tout état de cause,

- confirme le jugement, en ce qu'il a jugé que la banque a commis une faute dans le déblocage des fonds'et que la faute de la banque la prive de son droit à restitution du capital prêté ;

- confirme le jugement, en ce qu'il a condamné la banque à leur restituer le montant total des échéances déjà remboursées ;

- condamne la société BNP Paribas personal finance à leur payer la somme de 3 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Ils exposent que la banque soulève pour la première fois en cause d'appel l'irrecevabilité de leurs demandes sur le fondement des articles L. 622-21 du code de commerce et 1134 du code civil.

Ils soutiennent que le bon de commande méconnaît les dispositions de l'article L. 121-23 du code de la consommation, en ce qu'il ne désigne précisément ni les biens ni les prestations de service vendus, ne mentionne pas de façon compréhensible le délai de livraison et n'indique ni le prix unitaire des biens ni les modalités de paiement. Ils ajoutent que le bon de rétractation est irrégulier.

Ils contestent avoir couvert la nullité encourue et soutiennent que la seule reproduction des dispositions du code de la consommation au verso du bon de commande ne permet pas de présumer de leur connaissance du vice. Ils relèvent qu'en signant l'attestation de livraison -dont la portée est limitée à la livraison- ils n'ont fait qu'exécuter de bonne foi leurs obligations contractuelles.

Ils se prévalent des articles L. 311-1 et L. 311-32 du code de la consommation pour obtenir l'annulation de plein droit du contrat de crédit affecté.

Subsidiairement, ils relèvent que la société Vivons energy n'a livré et installé que 14 des 16 panneaux prévus. Ils estiment que cela constitue une inexécution grave justifiant la résolution judiciaire du bon de commande - et donc du crédit.

Ils estiment que la banque a commis une faute en consentant un crédit, puis en débloquant les fonds sur la base d'un bon de commande nul. Ils ajoutent que l'attestation délivrée était limitée à la livraison et que la banque aurait dû procéder à une vérification directe auprès d'eux.

Ils en déduisent que, quel que soit leur préjudice, la banque ne peut pas prétendre au remboursement du capital prêté.

Par actes d'huissier délivrés les 3 juin 2019 à personne morale, 18 juin 2019 à personne morale, 13 décembre 2019 à un tiers et 2 septembre 2021 à personne morale, la société BNP Paribas personal finance a fait signifier au liquidateur de la société Vivons energy sa déclaration d'appel et ses trois premiers jeux de conclusions, ainsi que le bordereau de pièces.

Par acte d'huissier délivré le 16 septembre 2019 à personne morale, M. et Mme [Z] ont fait signifier au liquidateur leurs conclusions et pièces.

La société MJA, prise en la personne de Me [Y], en tant que liquidateur de la société Vivons energy, n'a pas constitué avocat.

Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions des parties constituées, il est renvoyé aux écritures de celles-ci, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

Le 7 décembre 2021, le magistrat chargé de la mise en état a prononcé la clôture de l'instruction.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Il résulte du dernier alinéa de l'article 954 du code de procédure civile que la partie qui ne conclut pas ou qui, sans énoncer de nouveaux moyens, demande la confirmation du jugement est réputée s'en approprier les motifs.

A titre liminaire, la cour constate :

- qu'il n'est pas contesté que la société Vivons energy est venue aux droits de la société Activ eco et la société BNP Paribas personal finance aux droits de la société Sygma banque ;

- le contrat de vente conclu le 17 décembre 2013 entre la société Activ eco et M. et Mme [Z] est soumis aux dispositions des articles L. 121-21 et suivants du code de la consommation, dans leur rédaction en vigueur au jour du contrat, dès lors qu'il a été conclu dans le cadre d'un démarchage à domicile ;

- le contrat de crédit affecté conclu le même jour entre M. et Mme [Z] et la société Sygma banque est soumis aux dispositions de la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010, de sorte qu'il sera fait application des articles du code de la consommation dans leur rédaction en vigueur après le 1er mai 2011 et leur numérotation antérieure à l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 et au décret n° 2016-884 du 29 juin 2016.

Sur la fin de non-recevoir

Il ressort de l'article 123 du code de procédure civile que les fins de non-recevoir peuvent être invoquées en tout état de cause, y compris à hauteur d'appel.

En l'état de ses dernières conclusions, l'appelante ne soulève plus de fin de non-recevoir tenant à l'ouverture d'une procédure collective à l'égard de la société Vivons energy.

Par ailleurs, la société BNP Paribas Personal Finance se fonde dans ses écritures sur l'article 1134 alinéa 1 du code civil pour invoquer le caractère irrecevable et à tout le moins infondé de la demande de nullité des contrats, faisant état du caractère exceptionnel de la remise en cause d'un contrat par une partie.

Ce faisant, la société BNP Paribas Personal Finance n'explique pas en quoi le non-respect des dispositions de l'article 1134 du code civil en leur version applicable en la cause viendrait fonder une irrecevabilité des demandes formulées, étant ajouté que l'organisme de crédit excipe sans aucun élément de preuve d'une prétendue mauvaise foi de M. et Mme [Z].

Il en résulte qu'aucune irrecevabilité n'est encourue de ce chef et que la fin de non-recevoir est rejetée.

Sur la nullité du contrat de vente

L'article L. 121-23 dispose : « Les opérations visées à l'article L. 121-21 doivent faire l'objet d'un contrat dont un exemplaire doit être remis au client au moment de la conclusion de ce contrat et comporter, à peine de nullité, les mentions suivantes :

1° Noms du fournisseur et du démarcheur ;

2° Adresse du fournisseur ;

3° Adresse du lieu de conclusion du contrat ;

4° Désignation précise de la nature et des caractéristiques des biens offerts ou des services proposés ;

5° Conditions d'exécution du contrat, notamment les modalités et le délai de livraison des biens, ou d'exécution de la prestation de services ;

6° Prix global à payer et modalités de paiement ; en cas de vente à tempérament ou de vente à crédit, les formes exigées par la réglementation sur la vente à crédit, ainsi que le taux nominal de l'intérêt et le taux effectif global de l'intérêt déterminé dans les conditions prévues à l'article L. 313-1 ;

7° Faculté de renonciation prévue à l'article L. 121-25, ainsi que les conditions d'exercice de cette faculté et, de façon apparente, le texte intégral des articles L. 121-23, L. 121-24, L. 121-25 et L. 121-26 ».

En application de l'article 9 du code de procédure civile, il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention.

En l'espèce, le bon de commande produit par M. et Mme [Z] indique :

« Equipements/ Main d'oeuvre

16 panneaux photovoltaïques de type monocristallin de 250 wc de marque GSF'intégration d'une puissance globale de 4 000 wc'

Démarches administratives comprises (Mairie, consuel, EDF, région) + mise en service ».

Ces dispositions, particulièrement sommaires, n'indiquent notamment pas si les accessoires nécessaires à l'installation sont inclus et les caractéristiques de l'onduleur.

La condition de désignation précise de la nature et des caractéristiques des biens offerts ou des services proposés n'est ainsi pas satisfaite.

Le bon de commande ne permettait donc pas à M. et Mme [Z] de comparer utilement les produits proposés avec d'autres offres présentes sur le marché.

Il plaçait aussi les acquéreurs dans l'impossibilité de vérifier, avant de signer l'attestation de fin de travaux, que tous les éléments nécessaires au bon fonctionnement de l'installation avaient été livrés et installés.

Par ailleurs, la mention « La livraison aura lieu sous 12 mois maximum suivant la disponibilité des produits commandés » ne peut pas être considérée comme informant utilement l'acquéreur des modalités et du délai de livraison des biens, ou d'exécution de la prestation de services.

En conséquence, sans qu'il soit nécessaire d'examiner les autres moyens soulevés, le bon de commande encourt l'annulation, pour violation des 4° et 5° de l'article L. 121-23 précité.

Sur la renonciation à la nullité

Il est admis, sur le fondement de l'article 1338 du code civil, dans sa rédaction alors applicable, que la nullité formelle résultant du texte précité du code de la consommation est une nullité relative à laquelle la partie qui en est bénéficiaire peut renoncer par des actes volontaires explicites dès lors qu'elle avait connaissance des causes de nullité.

En l'espèce, le bon de commande remis en original reproduit au verso de façon parfaitement lisible, après les conditions générales de vente, le texte des articles L. 121-23 à L. 121-26 du code de la consommation dont la simple lecture suffit à informer une personne normalement avisée des exigences de la réglementation en matière de démarchage à domicile et plus particulièrement des mentions nécessaires à la validité du bon de commande.

Le seul fait que les acquéreurs n'aient pas souhaité, le cas échéant, prendre connaissance de ces dispositions que la loi impose pour leur protection, ne saurait justifier que la reproduction des articles précités soit sans portée quant à la capacité des acquéreurs à apprécier les irrégularités formelles du bon de commande.

Le 13 janvier 2014, M. [Z] a signé au bas du « certificat de livraison de bien ou de fourniture de services ».

Le caractère sommaire, dans le bon de commande, de la désignation des biens offerts ne mettait pas l'acquéreur en mesure, avant de signer ce certificat, de vérifier que tous les éléments nécessaires au bon fonctionnement avaient été livrés.

Toutefois, la cour constate :

- que le certificat, signé par M. [Z], contient une clause pré-imprimée sollicitant la mise à disposition des fonds par le prêteur ;

- que les échéances du prêt ont été payées jusqu'au mois de mars 2019 ;

- que l'installation a été mise en service le 15 juillet 2014 ;

- qu'il n'est pas contesté que l'installation permet la revente d'électricité.

Ces actes positifs non équivoques caractérisent une volonté de percevoir les avantages attendus du contrat.

Il est donc retenu que M. et Mme [Z] ont renoncé, en toute connaissance, à se prévaloir des irrégularités affectant le contrat de vente et qu'ils sont mal fondés à en solliciter désormais la nullité pour des raisons formelles.

Sur la résolution judiciaire des deux contrats

Il résulte de l'ancien article 1184 du code civil que la condition résolutoire est toujours sous-entendue dans les contrats synallagmatiques, pour le cas où l'une des deux parties ne satisferait point à son engagement.

Sur la demande présentée par la banque

Il ressort de l'historique de compte que M. et Mme [Z] n'ont cessé de procéder au remboursement de leur prêt qu'après la décision du 25 janvier 2019 assortie de l'exécution provisoire, qui avait prononcé la nullité du contrat de crédit.

Cette situation judiciaire ne suffit pas à qualifier de grave le manquement imputable aux emprunteurs qui avaient spontanément assumé leurs obligations jusqu'alors.

Il convient donc de rejeter aussi la demande de résolution judiciaire présentée par la société BNP Paribas personal finance.

Sur la demande présentée par les emprunteurs

M. et Mme [Z] ont commandé seize panneaux le 17 décembre 2013, ce qui leur a été facturé le 21 janvier 2014.

Seuls quatorze panneaux ont, en réalité, été livrés et installés.

Ceci ne ressort ni du certificat de livraison du 13 janvier 2014 ni de la photographie produite (pièce n° 4 des intimés) qui ne permet pas de compter le nombre de panneaux, mais d'un projet de protocole d'accord émanant de la société Activ eco (pièce n° 5) :

« (') 'Ce bon de commande prévoyait l'acquisition d'une centrale photovoltaïque de 16 Panneaux solaires, pour des raisons techniques et financière. 14 Panneaux ont été installés.

Dans ces conditions et afin de dédommager son client, la société ACTIV ECO s'engage à accepter de régler à Monsieur [Z] [O] la somme de 1 000,00 euros TTC en dédommagement des 2 Panneaux manquants. (') ».

Ce projet est non daté, mais a nécessairement été établi après les travaux d'installation comme le montre la phrase « 14 panneaux ont été installés », donc après le certificat du 13 janvier 2014.

L'absence de deux panneaux de 250 wc a réduit significativement le rendement de l'installation, alors que le produit de la revente d'électricité était nécessaire pour les emprunteurs au remboursement des mensualités du crédit affecté.

La société Activ eco a donc commis une inexécution suffisamment grave pour justifier la résolution du contrat de vente.

Conformément à l'ancien article L. 311-32 du code de commerce, elle emporte la résolution de plein droit du contrat de crédit affecté.

La résolution ayant un effet rétroactif, les parties doivent être remises dans l'état où elles se trouvaient à la date de conclusion des contrats. De ce fait, elles doivent se restituer les prestations que chacune d'elles a reçues de l'autre.

Sur la responsabilité de l'établissement de crédit

L'exécution du contrat de crédit ne fait pas obstacle à ce que les emprunteurs recherchent la responsabilité du prêteur dans les obligations spécifiques qui lui incombent dans le cadre d'une opération commerciale unique.

Il appartient au prêteur, avant de débloquer les fonds, de s'assurer que les termes de l'attestation de fin de travaux suffisent à établir que les prestations financées ont été intégralement exécutées.

Cette obligation de contrôle qui incombe au prêteur exclut qu'il puisse présenter la signature de l'attestation de fin de travaux comme un mandat impératif donné par l'emprunteur de verser les fonds entre les mains du prestataire de services.

En l'espèce, la nullité du bon de commande n'est pas retenue, de sorte qu'il ne peut pas être fait grief à la banque de ne pas avoir réagi aux irrégularités formelles y figurant.

Par ailleurs, le contrat mettait à la charge du vendeur la fourniture et la pose d'une installation photovoltaïque de seize panneaux, ainsi que les démarches administratives afférentes (mairie, consuel, EDF, région), mais non le raccordement effectif de l'installation au réseau public -qui ne pouvait être réalisé que par la société ERDF- ni la délivrance des autorisations administratives -qui ne pouvait émaner que des autorités concernées.

M. [Z] a signé au bas du « certificat de livraison de bien ou de fourniture de services » du 13 janvier 2014 dont une formule pré-imprimée précisait que la livraison du bien et/ou la fourniture de la prestation de services au client emprunteur a/ont été réalisée(s) conformément à la commande de celui-ci.

Ainsi, l'établissement de crédit -qui n'avait pas à vérifier sur site la réalité de l'achèvement des travaux contractuellement promis- pouvait légitimement considérer que la société Activ eco avait rempli ses obligations.

Aucune faute ne peut donc être retenue à l'encontre de la banque.

En conséquence, infirmant le jugement, il n'y a pas lieu de priver la société BNP Paribas personal finance, venant aux droits de la société Sygma banque, de son droit à restitution du capital prêté.

Sur le montant de la créance

M. et Mme [Z] ont emprunté un montant de 26 000 euros.

Ils ont versé, en paiement des échéances du prêt, un total de 15 801,79 euros, puisque, selon historique (pièce n° 10), c'est ce montant que la banque leur a remboursé le 12 mars 2019.

Le même historique montre que M. et Mme [Z] n'ont pas opéré de versement après cette date.

M. et Mme [Z] sont donc solidairement condamnés à payer à la banque un solde de 10 198,21 euros (26'000 euros ' 15 801,79 euros).

Ce solde est augmenté des intérêts au taux légal à compter du présent arrêt prononçant la résolution judiciaire.

Sur la restitution du matériel

Il y a lieu de confirmer les modalités de restitution, telles que définies par le premier juge.

Sur l'appel en garantie

Il résulte de l'article 1382 du code civil, dans sa rédaction applicable au contrat, que tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.

En l'espèce, la société Activ eco, aux droits de laquelle est venue la société Vivons energy, a commis une faute qui a entraîné la résolution judiciaire du contrat de vente - et donc du contrat de crédit affecté.

Il en résulte pour la banque :

- la privation des intérêts du prêt, soit un montant de 11 103,88 euros ;

- un droit à l'encontre des emprunteurs de recouvrer le montant du capital prêté, après déduction des versements déjà opérés par ceux-ci.

Infirmant le jugement, il y a lieu de fixer la créance de la société BNP Paribas personal finance au passif de la liquidation de la société Vivons energy à un montant de'11 103,88 euros correspondant aux intérêts perdus du contrat de prêt du 17 décembre 2013 et à un montant de 26 000 euros en garantie de la restitution du capital prêté.

Sur la restitution des sommes versées en exécution de la décision de première instance

L'obligation de restitution résultant de plein droit de l'infirmation du jugement assorti de l'exécution provisoire, la cour d'appel n'a pas à statuer sur la demande en remboursement des sommes versées au titre de l'exécution provisoire du jugement et concernées par l'infirmation.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant par arrêt réputé contradictoire et en dernier ressort,

Écarte la fin de non-recevoir ;

Infirme le jugement, sauf s'agissant :

- du donné acte à la société BNP Paribas personal finance, venant aux droits de la société Sygma banque, de son intervention ;

- des modalités de restitution et de mise à disposition du matériel ;

- de la somme allouée au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- des dépens de première instance ;

Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,

Déboute [O] [Z] et Mme [F] [D] épouse [Z] de leurs demandes de nullité des contrats de vente et de crédit affecté ;

Prononce la résolution judiciaire du contrat de vente et celle, subséquente, du contrat de crédit affecté ;

Dit n'y avoir lieu de priver la société BNP Paribas personal finance, venant aux droits de la société Sygma banque, de son droit à restitution du capital prêté ;

Condamne solidairement M. [O] [Z] et Mme [F] [D] épouse [Z] à payer à la société BNP Paribas personal finance, venant aux droits de la société Sygma banque, la somme de 10 198,21 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter du présent arrêt ;

Fixe la créance de la société BNP Paribas personal finance au passif de la liquidation de la société Vivons energy à :

- un montant de 11 103,88 euros correspondant aux intérêts perdus du contrat de prêt du 17 décembre 2013 ;

- un montant de 26 000 euros en garantie de la restitution du capital prêté ;

Condamne la société BNP Paribas personal finance, venant aux droits de la société Sygma banque, à payer à M. [O] [Z] et Mme [F] [D] épouse [Z] pris ensemble la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais exposés en cause d'appel ;

Rejette les autres prétentions des parties ;

Condamne la société BNP Paribas personal finance, venant aux droits de la société Sygma banque, aux dépens d'appel ;

Rappelle que l'obligation de restitution résultant de plein droit de l'infirmation du jugement assorti de l'exécution provisoire, la cour d'appel n'a pas à statuer sur la demande en remboursement des sommes versées au titre de l'exécution provisoire du jugement et concernées par l'infirmation.

La greffièrePour le président ermpêché


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 9 - a
Numéro d'arrêt : 19/05670
Date de la décision : 08/09/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-09-08;19.05670 ?
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