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30/06/2022 | FRANCE | N°20/04662

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 9 - a, 30 juin 2022, 20/04662


Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 9 - A



ARRÊT DU 30 JUIN 2022



(n° , 18 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/04662 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CBT2I



Décision déférée à la Cour : Jugement du 19 décembre 2019 - Tribunal d'Instance de PARIS - RG n° 11-19-002933





APPELANTE



La société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE, société anony

me à conseil d'administration, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux, domiciliés audit siège en cette qualité, venant aux droits de la société BANQUE SOLFEA
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Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 9 - A

ARRÊT DU 30 JUIN 2022

(n° , 18 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/04662 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CBT2I

Décision déférée à la Cour : Jugement du 19 décembre 2019 - Tribunal d'Instance de PARIS - RG n° 11-19-002933

APPELANTE

La société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE, société anonyme à conseil d'administration, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux, domiciliés audit siège en cette qualité, venant aux droits de la société BANQUE SOLFEA

N° SIRET : 542 097 902 04319

[Adresse 1]

[Localité 4]

représentée et assistée de Me Sébastien MENDES GIL de la SELAS CLOIX & MENDES-GIL, avocat au barreau de PARIS, toque : P0173

INTIMÉS

Monsieur [H] [S]

né le 28 avril 1972 à GUDUL (TURQUIE)

[Adresse 2]

[Localité 5]

représenté par Me Schmouel HABIB de la SELEURL HERACLES, avocat au barreau de PARIS, toque : E1511

Madame [U] [C] épouse [S]

née le 15 août 1977 à DERELI (TURQUIE)

[Adresse 2]

[Localité 5]

représentée par Me Schmouel HABIB de la SELEURL HERACLES, avocat au barreau de PARIS, toque : E1511

La SELARLU [J] MJ, en qualité de liquidateur judiciaire de la société NOUVELLE RÉGIE DES JONCTIONS DES ÉNERGIES DE FRANCE (SAS)

[Adresse 3]

[Localité 6]

DÉFAILLANTE

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 24 mai 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Laurence ARBELLOT, Conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. Christophe BACONNIER, Président de chambre

Mme Fabienne TROUILLER, Conseillère

Mme Laurence ARBELLOT, Conseillère

Greffière, lors des débats : Mme Camille LEPAGE

ARRÊT :

- RÉPUTÉ CONTRADICTOIRE

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par M. Christophe BACONNIER, Président et par Mme Camille LEPAGE, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Le 24 février 2014, la société Nouvelle régie des jonctions des énergies de France ci-après dénommée société Nouvelle régie exerçant sous l'enseigne Groupe solaire de France, a vendu à M. [H] [S] une centrale photovoltaïque au prix de 18 990 euros dans le cadre d'un démarchage à domicile.

Pour financer cette installation, et selon acte du 24 février 2014, M. [S] et son épouse Mme [U] [S] ont conclu un contrat de crédit avec la société Banque Solfea aux droits de laquelle vient désormais la société BNP Paribas personal finance ci-après dénommée BNPPPF, pour un montant de 18 990 euros au taux d'intérêts contractuels de 5,60 % l'an remboursable sur une durée de 143 mois.

Les fonds ont été débloqués par la banque sur la base d'une attestation de fin de travaux du 8 mars 2014.

Par jugement du 12 novembre 2014, le tribunal de commerce de Bobigny a prononcé la liquidation judiciaire de la société Nouvelle régie des jonctions des énergies de France et désigné la SCP Moyrand - [J] devenue SELARLU [J] en la personne de Maître [I] [J] en qualité de mandataire liquidateur.

Saisi le 20 février 2019 par M. et Mme [S] d'une demande tendant principalement à l'annulation du contrat de vente et du contrat de crédit, en remboursement des sommes versées au titre du crédit et en injonction à la BNPPPF d'avoir à communiquer un état des sommes remboursées au titre du contrat de crédit, le tribunal d'instance de Paris, par un jugement réputé contradictoire rendu le 19 décembre 2019 auquel il convient de se reporter, a :

- déclaré recevable l'action de M. et Mme [S] en tant qu'elle est dirigée à l'encontre de la société Nouvelle régie des jonctions des énergies de France,

- déclaré irrecevable la demande de nullité du contrat de vente du 24 février 2014 en tant qu'elle a été formée par Mme [S],

- prononcé la nullité du contrat de vente conclue le 24 février 2014 entre M. [S] et la société Nouvelle régie,

- dit que M. [S] devra tenir à la disposition de la société [J] MJ ès-qualités de liquidateur judiciaire de la société Nouvelle Régie, l'ensemble des matériels posés à leur domicile pendant un délai de six mois à compter de la notification du présent jugement,

- dit que, passé le délai de six mois à compter de la signification du jugement, si le liquidateur n'a pas émis la volonté de reprendre les matériels, M. [S] devra porter ce matériel dans un centre de tri sans pouvoir en retirer aucun profit,

- constaté la nullité de plein droit du contrat de crédit affecté,

- dit que la société Solfea a commis une faute qui prive la banque de son droit à restitution du capital emprunté,

- condamné la société BNPPPF à restituer à M. et Mme [S] le montant des sommes dont ils se sont acquittés au titre du prêt du 24 février 2014,

- débouté les parties de leurs autres plus amples ou contraires demandes,

- rejeté les demandes sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Le tribunal a retenu que l'action de M. et Mme [S] à l'encontre du vendeur était recevable et ne contrevenait pas la règle de l'arrêt des poursuites individuelles prévue en cas de procédure collective, puisque n'était formulée aucune demande pécuniaire à l'encontre de la société placée en liquidation judiciaire. Il a constaté que le contrat de vente n'avait été signé que par M. [S] de sorte que son épouse était tiers à la relation contractuelle et devait être déclarée irrecevable en ses demandes.

Pour annuler le contrat de vente, le premier juge a relevé que le bon de commande ne répondait pas aux exigences des articles L. 121-23 et R. 121-3 du code de la consommation en ce qu'il ne désignait pas de façon suffisamment précise les matériels vendus à défaut de précision de la marque, du modèle et des références des panneaux et de l'onduleur, de la date de livraison, des modalités de pose et du délai de mise en service, du coût total de l'emprunt et du détail des coûts de l'installation, de l'absence de dispositions claires relatives au paiement et de clauses claires et compréhensibles. Le tribunal a considéré que la preuve n'était pas rapportée d'une confirmation de l'acte nul.

Le tribunal a caractérisé une faute de la banque liée à l'absence de vérification de la régularité du bon de commande et un préjudice subi par les emprunteurs résultant de la situation dans laquelle la banque les a placés en ce qu'ils ne pourront se retourner contre la société venderesse placée en liquidation judiciaire et alors qu'ils devront continuer à rembourser un crédit. Il a rejeté toute légèreté blâmable des emprunteurs.

Suivant déclaration remise le 3 mars 2020, la société BNPPPF a relevé appel de cette décision.

Aux termes de conclusions remises le 8 novembre 2021, l'appelante demande à la cour :

- d'infirmer le jugement dont appel en ce qu'il a déclaré recevable l'action de M. et Mme [S], a prononcé la nullité des contrats, dit que l'acquéreur devra tenir à disposition les matériels posés, dit que la société banque Solfea a commis une faute qui la prive de son droit à restitution du capital emprunté, a condamné la société BNPPPF à restituer le montant des sommes acquittées au titre du prêt et débouté la société BNPPPF de ses demandes,

- de déclarer irrecevables les pièces dont se prévalent M. et Mme [S], de les débouter de toutes leurs prétentions ; à tout le moins, de déclarer irrecevable leur demande en nullité du contrat de vente et par conséquence du contrat de crédit, de dire à tout le moins que les demandes de nullité des contrats ne sont pas fondées, de débouter M. et Mme [S] de l'ensemble de leurs demandes,

- de déclarer irrecevable l'ensemble des demandes de M. et Mme [S] ; à tout le moins, les rejeter,

- de déclarer irrecevable la demande de déchéance du droit aux intérêts contractuels, à tout le moins la rejeter,

- en tout état de cause, de constater que M. et Mme [S] sont défaillants dans le remboursement du crédit et de prononcer la résiliation judiciaire du contrat de crédit du fait des impayés avec effet au 24 février 2020 et de condamner solidairement M. et Mme [S] à lui payer la somme de 13 328,98 euros avec les intérêts au taux contractuel de 5,60 % l'an à compter du 24 février 2020 sur la somme de 12 341,64 euros et au taux légal pour le surplus, outre la restitution des sommes versées à M. et Mme [S] en exécution du jugement au titre des mensualités précédemment réglées, soit la somme de 13 511,39 euros, et les condamner en tant que de besoin solidairement à lui restituer cette somme,

- subsidiairement, les condamner solidairement à lui régler les mensualités échues impayées au jour où la Cour statue, soit la somme de 5 397,36 euros correspondant aux échéances du 10 mars 2020 au 10 février 2022 incluses, outre la somme de 13 511,39 euros au titre des échéances restituées dans le cadre de l'exécution provisoire correspondant aux échéances du 10 mars 2015 au 10 février 2020 incluses, et leur enjoindre de reprendre le remboursement des mensualités à peine de déchéance du terme,

- subsidiairement, en cas de nullité des contrats, de déclarer irrecevable la demande visant à décharger les demandeurs de l'obligation de restituer le capital prêté, à tout le moins les en débouter et condamner en conséquence in solidum, M. et Mme [S] à lui régler la somme de 18 990 euros en restitution du capital prêté,

- en tout état de cause, de déclarer irrecevables les demandes visant à la privation de la créance de la société BNPPPF et visant à sa condamnation au paiement de dommages et intérêts et à tout le moins les débouter de leurs demandes,

- très subsidiairement, de limiter la réparation qui serait due par elle eu égard au préjudice effectivement subi par M. et Mme [S] et de limiter, en conséquence, la décharge à concurrence du préjudice subi à charge pour M. et Mme [S] d'en justifier; en cas de réparation par voie de dommages et intérêts, de limiter la réparation à hauteur du préjudice subi, et dire que M. et Mme [S] restent tenus de restituer l'entier capital à hauteur de 18 990 euros,

- à titre infiniment subsidiaire, en cas de décharge de l'obligation de M. et Mme [S], de les condamner in solidum à lui payer la somme de 18 990 euros correspondant au capital perdu à titre de dommages et intérêts en réparation de leur légèreté blâmable,

- enjoindre à M. et Mme [S], de restituer, à leurs frais, le matériel installé chez eux à la société [J] MJ, dans un délai de 15 jours à compter de la signification de l'arrêt, et dire qu'à défaut de restitution, ils resteront tenus du remboursement du capital prêté ; subsidiairement, priver M. et Mme [S] de leur créance en restitution des sommes réglées du fait de leur légèreté blâmable,

- ordonner le cas échéant la compensation des créances réciproques à due concurrence,

- condamner in solidum M. et Mme [S] au paiement de la somme de 3 000 euros au titre des frais irrépétibles d'appel de l'article 700 du code de procédure civile.

L'appelante soutient au visa de l'article 906 du code de procédure civile, que les pièces communiquées par les intimés doivent être déclarées irrecevables en ce que s'ils ont conclu le 30 juillet 2020, ils n'ont pas communiqué les pièces visées dans leurs conclusions de sorte qu'ils seront déboutés de l'intégralité de leurs demandes.

Elle invoque l'irrecevabilité des demandes en nullité à défaut de déclaration de créance à la procédure collective du vendeur dès lors que l'action tend indirectement à faire supporter une condamnation pécuniaire à la société Nouvelle régie alors en liquidation judiciaire.

Subsidiairement, elle invoque l'irrecevabilité ou le caractère infondé de la demande de nullité des contrats au regard des dispositions de l'article 1134 du code civil en ce que ce n'est que dans des circonstances exceptionnelles que l'une des parties peut obtenir en justice la remise en cause du contrat et sans mauvaise foi. Elle considère qu'est de mauvaise foi la partie qui tend à détourner une cause de nullité de son objet ou de sa finalité à seule fin de remettre en cause le contrat tout en sachant qu'en réalité elle conservera le bien acquis du fait de l'impossibilité matérielle pour l'autre de la récupérer.

Elle rappelle le caractère strict de l'interprétation de l'article L. 121-23 du code de la consommation et soutient qu'aucune irrégularité formelle du bon de commande n'est démontrée.

Elle affirme la désignation du matériel vendu est extrêmement précise et que la juridiction est allée au-delà des exigences textuelles. Elle indique que M. et Mme [S] ont exécuté le contrat sans contester pendant 5 ans et ont réceptionné le matériel sans contestation quant aux caractéristiques du matériel acquis. Elle fait remarquer que les conditions de livraison figurent aux conditions générales de vente et que les modalités de pose n'ont pas à figurer au bon de commande, ni le délai de raccordement qui dépend d'un tiers. S'agissant des modalités de paiement et de crédit, elle indique qu'elles ont bien été portées à la connaissance de l'acquéreur et que le coût total du crédit n'a pas à figurer au bon de commande. Elle conteste l'existence de mentions contradictoires concernant les garanties et affirme que le contrat est rédigé en termes parfaitement clairs et lisibles.

Elle relève que les acquéreurs n'allèguent aucun préjudice pouvant résulter d'une éventuelle irrégularité formelle du bon de commande.

Subsidiairement, elle fait valoir que l'acquéreur a confirmé le contrat et renoncé à se prévaloir d'une nullité du bon de commande en réceptionnant le matériel, en attestant de l'exécution conforme des travaux sans aucune réserve, en ordonnant le paiement du prix puis en utilisant l'installation pendant plusieurs années avant d'engager une action en nullité par acte du 20 février 2019. Elle souligne que postérieurement à l'introduction de leur action, M. et Mme [S] ont poursuivi l'exécution des contrats et ce en pleine connaissance des moyens allégués.

Elle note que les allégations de dol et d'absence de cause au sens des anciens articles 1109, et 1116 du code civil ne sont aucunement étayées et relève qu'aucun élément n'est fourni sur la réalité d'une promesse d'autofinancement, sur la rentabilité effective de l'installation ou sur l'affirmation d'un faux partenariat avec EDF. Elle affirme que M. et Mme [S] auraient dû s'informer sur le fonctionnement du matériel et les éléments qui dépassent le devoir d'information du vendeur. Elle expose que M. et Mme [S] n'établissent ni les man'uvres alléguées ni l'erreur commise et ne produisent aucune expertise concernant la rentabilité effective de l'installation, ni que cet élément ait été le motif prédominant de leur acquisition.

Elle expose que le maintien du contrat de vente emporte maintien du contrat de crédit affecté et que M. et Mme [S] devront être tenus de restituer la somme reçue au titre de l'exécution provisoire du jugement de première instance. Elle précise que les emprunteurs ont cessé de régler les échéances du crédit et qu'elle n'a d'autre choix que de solliciter la résiliation judiciaire du contrat de crédit à effet au 24 février 2020 avec condamnation au paiement des sommes restant dues.

À titre subsidiaire, elle fait valoir que la nullité du contrat de crédit emporterait obligation pour les emprunteurs de restituer le capital emprunté. Elle rappelle que la réparation doit être limitée à hauteur du préjudice subi.

Visant notamment les articles L. 311-31 et L. 311-51 du code de la consommation, elle conteste toute obligation de contrôle de la régularité du bon de commande, et précise que les irrégularités soulevées constituent des insuffisances de mention et non des omissions complètes, ce qui ne permet pas de caractériser une faute de la banque dans la vérification du bon de commande. Elle conteste également toute faute dans la vérification du bon de commande, dans l'exécution de la prestation qui ne lui incombe pas ou dans la délivrance des fonds sur la base d'une attestation de fin de travaux qui donne l'ordre de verser les fonds et d'un procès-verbal de réception.

Elle souligne que toutes les demandes M. et Mme [S] à son encontre sont vaines dès lors qu'ils ne justifient pas du moindre préjudice ni d'un lien causal entre celui-ci et un fait imputable à la banque. Elle précise que l'installation au domicile de M. et Mme [S] est achevée et fonctionnelle et que la prestation a été exécutée. Elle ajoute que M. et Mme [S] ne montrent pas quelle mention omise du bon de commande aurait pu les empêcher de poursuivre l'exécution du contrat.

Elle précise que M. et Mme [S] disposent d'une installation fonctionnelle qu'ils vont conserver du fait de la liquidation judiciaire du vendeur et ainsi ne justifient pas d'un préjudice en lien avec une faute de la banque. Elle note que l'évaluation d'un éventuel préjudice doit prendre en compte la valeur du bien que M. et Mme [S] conserveront et devront lui restituer la part du capital ayant financé le matériel conservé, cela même s'il est considéré qu'elle a commis une faute. Elle soutient que M. et Mme [S] ont fait preuve d'une légèreté blâmable devant conduire à l'allocation de dommages et intérêts en faveur de la banque.

Elle soutient que l'emprunteur ne peut solliciter à être indemnisé doublement, à la fois par la voie de décharge et par la voie de l'octroi de dommages et intérêts de sorte que la demande de dommages et intérêts est irrecevable, à tout le moins infondée. Elle rappelle que les emprunteurs ont confirmé les contrats par leur exécution volontaire, de sorte qu'ils ne peuvent opposer des moyens ou exceptions y afférent et qu'il en est de même de la demande de déchéance du droit aux intérêts contractuels qui sera déclarée irrecevable comme étant nouvelle en cause d'appel au regard des dispositions de l'article 564 du code de procédure civile.

Par des conclusions remises le 11 octobre 2021, M. et Mme [S] demandent à la cour de :

- confirmer dans toutes ses dispositions le jugement rendu sauf en ce qu'il les a déboutés de leurs demandes indemnitaires,

- d'infirmer le jugement susvisé pour le surplus et statuant à nouveau,

- de condamner la société BNPPPF à leur verser la somme de 3 000 euros au titre de leur préjudice financier et du trouble de jouissance outre la somme de 3 000 euros au titre de leur préjudice moral,

- à titre infiniment subsidiaire, si le tribunal ne faisait pas droit à leurs demandes considérant que la banque n'a pas commise de faute, de prononcer la déchéance du droit de la société BNPPPF aux intérêts du crédit affecté,

- de condamner la société BNPPPF à leur payer la somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

M. et Mme [S] soutiennent que leur action ne vise pas à voir condamner le vendeur au paiement d'une quelconque somme de sorte qu'ils n'avaient pas à déclarer leur créance au passif de la procédure collective et qu'ils sont donc recevables.

Pour solliciter l'annulation du contrat de vente, ils font valoir que le bon de commande ne respecte pas les dispositions impératives du code de la consommation en ce qu'il ne décrit pas l'objet de la vente. Ils font remarquer que huit types d'installation étaient proposées au client et qu'il suffisait au démarcheur de cocher le type d'installation choisi et qu'aucune installation n'a été sélectionnée parmi les huit. Il sollicite que soit constaté que le bon de commande produit par la banque a opportunément été complété par rapport à l'original du contrat versé au dossier en ce qu'une case est cochée, ce qui n'est pas le cas de l'original. Ils souhaitent que soit écartée la pièce n° 1 communiquée par la banque, en ce qu'il s'agit d'un faux.

Ils font observer que le bon de commande doit être annulé en ce qu'il ne précise pas la marque, le modèle et les références des panneaux, leur nombre, la puissance globale et unitaire des panneaux, la marque, le modèle, les références de l'onduleur, le délai de livraison, les modalités de pose des panneaux (impact visuel, orientation des panneaux, inclinaison) le délai de mise en service et le coût total de l'emprunt ainsi que le détail du coût de l'installation. Ils indiquent que des dispositions relatives aux garanties du matériel sont contradictoires et floues et que les clauses du contrat ne respectent pas le principe général de clarté et de lisibilité avec des caractères de trois millimètres.

Ils invoquent, au visa des articles 1109 et 1116 du code civil, une nullité du contrat pour vice du consentement. Ils exposent que si la réticence dolosive émane de la société Groupe solaire de France, à travers son démarcheur, la société a participé au dol. Ils font valoir que plusieurs informations ne leurs ont pas été transmises et que le vendeur a fait état de partenariats mensongers avec EDF et d'une présentation faussée sur la rentabilité de l'installation. Ils invoquent également des agissements dolosifs quant à la présentation de l'ensemble contractuel en simple candidature sans engagement.

Ils estiment que leur comportement ne peut caractériser ni une confirmation des contrats ni une régularisation expresse des actes. Ils précisent qu'ils n'ont pas accepté de renoncer à invoquer les irrégularités du contrat en l'exécutant.

Ils imputent une faute à la banque dans la libération des fonds avant l'achèvement de l'installation, alors que l'étude sur la faisabilité de l'installation, et la vérification de la mise en 'uvre du projet, le raccordement au réseau n'ont jamais été effectués.

Ils invoquent une faute dans l'octroi d'un crédit sur la base d'un contrat principal nul. Ils soutiennent que la société banque Solfea, en tant que professionnelle, aurait pu constater que le bon de commande présentait des irrégularités et les alerter sur cette situation et les avertir qu'ils s'engageaient dans un contrat qui pouvait leur être préjudiciable. Ils relèvent qu'au regard de l'indivisibilité du contrat, la banque aurait dû procéder aux vérifications nécessaires auprès du vendeur. Ils estiment que la banque ne peut se prévaloir de l'attestation de livraison pour s'exempter de sa responsabilité. Ils précisent que la société Solfea a accepté de financer des installations réalisées sans accord municipal alors qu'il s'agit d'une condition suspensive du contrat.

A titre subsidiaire, ils affirment que la société banque Solfea a manqué à son devoir d'information, de mise en garde et de conseil quant à l'opportunité économique du projet, ce qui doit conduire à la priver de son droit à remboursement des sommes mises à disposition.

Ils rappellent que les sommes versées au titre du remboursement du contrat de crédit devront leur être remboursées et qu'en raison des fautes commises par la société banque Solfea, elle perd son droit à remboursement. A titre subsidiaire, si la cour décidait de ne pas faire droit à cette demande, ils estiment que le prêteur devra être condamnée à leur verser la somme de 12 140 euros à titre de dommages et intérêts. Ils affirment faire face à une perte financière à cause de la conclusion des contrats. Ils invoquent un préjudice économique, un préjudice de trouble de jouissance, et un préjudice moral.

Régulièrement assignée par acte d'huissier délivré le 9 juin 2020 dans les formes de l'article 658 du code de procédure civile, la SELARLU [J] MJ, en qualité de liquidateur de la société Nouvelle régie n'a pas constitué avocat.

Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions des parties, il est renvoyé aux écritures de celles-ci conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 11 janvier 2022.

L'affaire a été appelée à l'audience le 22 mai 2022.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Il résulte du dernier alinéa de l'article 954 du code de procédure civile que la partie qui ne conclut pas ou qui, sans énoncer de nouveaux moyens, demande la confirmation du jugement est réputée s'en approprier les motifs.

A titre liminaire, la cour constate que n'est pas contestée la mention du dispositif du jugement querellé par laquelle Mme [S] a été déclarée irrecevable en sa demande de nullité du contrat de vente du 24 février 2014 de sorte que le jugement doit être confirmé sur ce point.

Sur la recevabilité des pièces communiquées par les intimés

L'appelante soulève l'irrecevabilité des pièces adverses sur le fondement de l'article 906 du code de procédure civile en ce que ces pièces n'auraient pas été communiquées en même temps que les conclusions du 30 juillet 2020.

Aux termes de cet article, les conclusions sont notifiées et les pièces communiquées simultanément par l'avocat de chacune des parties à celui de l'autre partie. La copie des conclusions est remise au greffe avec la justification de leur notification. Les pièces communiquées et déposées au soutien de conclusions irrecevables sont elles-mêmes irrecevables.

Il est toutefois admis que dès lors que les pièces contestées ont été communiquées avant la clôture de l'instruction de sorte que leur destinataire a été mis en temps utile en mesure de les examiner, les discuter et d'y répondre, il n'y a pas lieu de les écarter des débats.

Le bordereau de pièces communiquées en même temps que les écritures remises le 30 juillet 2020 par les intimés mentionne des éléments de jurisprudence côtés pièces A à Z-14 et des pièces cotées de 1 à 21. Ce bordereau est identique au bordereau numéro 2 communiqué en même temps que les conclusions numéro 2 des intimés le 11 octobre 2021.

Dans le dossier adressé à la cour reçu le 3 mai 2022 en vue de l'audience du 24 mai 2022, sur lequel se fonde les intimés, ne figurent que les pièces cotées 1 à 21 avec une cote particulière contenant les originaux des contrats de vente et de crédit. Les éléments de jurisprudence évoquées dans le bordereau n'y figurent pas.

Il en résulte que la cour ne pourra fonder sa décision que sur les pièces communiquées cotées 1 à 21 sans avoir à écarter les autres pièces non communiquées.

Il y a donc lieu de rejeter la demande.

Sur la recevabilité des demandes

Sur la fin de non-recevoir tirée de la procédure collective du vendeur

La société BNPPPF soulève l'irrecevabilité des demandes en de nullité des contrats en l'absence de déclaration de la créance au passif de la procédure collective de la société Nouvelle régie des jonctions des énergies de France.

Par application de l'article L. 622-21 du code de commerce, le jugement d'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire interrompt ou interdit toute action en justice tendant à la condamnation du débiteur au paiement d'une somme d'argent ou à la résolution d'un contrat pour défaut de paiement d'une somme d'argent. L'article L. 622-22 prévoit que les instances en cours sont interrompues jusqu'à que le créancier poursuivant ait procédé à la déclaration de sa créance.

Si la société Nouvelle régie des jonctions des énergies de France fait l'objet d'une procédure de liquidation judiciaire, force est de constater que M. [S] n'a formé aucune demande de condamnation pécuniaire à l'encontre de celle-ci, mais une demande principale tendant à voir prononcer la nullité du contrat de vente et de crédit affecté, prononcée par le premier juge, et discutée à cause d'appel, peu important que cette action est susceptible d'entraîner des restitutions.

L'absence de déclaration de créance au passif de la procédure collective de la société Nouvelle régie des jonctions des énergies de France par M. [S] est donc indifférente à la recevabilité de son action.

Il s'ensuit qu'aucune irrecevabilité n'est encourue de ce chef et qu'il convient de confirmer le jugement en ce qu'il a rejeté la fin de non-recevoir soulevée à ce titre

Sur la fin de non-recevoir soulevée sur le fondement de l'article 1134 du code civil

La société BNPPPF se fonde dans ses écritures sur l'article 1134 alinéa 1 du code civil pour invoquer le caractère irrecevable et à tout le moins infondé de la demande de nullité des contrats, faisant état du caractère exceptionnel de la remise en cause d'un contrat par une partie qui ne doit pas agir de mauvaise foi.

Ce faisant, l'appelante n'explique pas en quoi le non-respect des dispositions de l'article 1134 du code civil en leur version applicable en la cause viendraient fonder une irrecevabilité des demandes formulées.

Il s'ensuit qu'aucune irrecevabilité n'est encourue de ce chef et que la fin de non-recevoir formée à ce titre en cause d'appel doit être rejetée.

Sur la nullité des contrats de vente et de crédit

Il est rappelé le 24 février 2014, dans le cadre d'un démarchage à domicile, M. [S] a acquis auprès de la société Nouvelle régie des jonctions des énergies de France exerçant sous l'enseigne Groupe solaire de France, une centrale photovoltaïque au prix de 18 990 euros.

Pour financer cette installation, et selon acte du 24 février 2014, M. [S] et son épouse Mme [U] [S] ont souscrit un crédit auprès de la société Banque Solfea pour un montant de 18 990 au taux d'intérêts contractuel de 5,60 % l'an remboursable sur une durée de 143 mois par mensualités de 204 euros chacune.

Le 8 mars 2014, M. [S] a signé un certificat de livraison aux termes duquel il atteste que la société venderesse a exécuté la prestation et il accepte le déblocage des fonds au profit de cette société. La société banque Solfea a procédé au déblocage des fonds sur la base de cette attestation.

M. [S] indique que l'installation n'a pas été raccordée au réseau électrique.

Sur la nullité formelle

Il est constant que le contrat est soumis aux dispositions des articles L. 121-21 et suivants du code de la consommation dès lors qu'il a été conclu dans le cadre d'un démarchage à domicile.

L'article L. 121-23 dispose :

"Les opérations visées à l'article L. 121-21 doivent faire l'objet d'un contrat dont un exemplaire doit être remis au client au moment de la conclusion de ce contrat et comporter, à peine de nullité, les mentions suivantes:

1° Noms du fournisseur et du démarcheur,

2° Adresse du fournisseur,

3° Adresse du lieu de conclusion du contrat,

4° Désignation précise de la nature et des caractéristiques des biens offerts ou des services proposés,

5° Conditions d'exécution du contrat, notamment les modalités et le délai de livraison des biens, ou d'exécution de la prestation de services,

6° Prix global à payer et modalités de paiement ; en cas de vente à tempérament ou de vente à crédit, les formes exigées par la réglementation sur la vente à crédit, ainsi que le taux nominal de l'intérêt et le taux effectif global de l'intérêt déterminé dans les conditions prévues à l'article L. 313-1,

7° Faculté de renonciation prévue à l'article L. 121-25, ainsi que les conditions d'exercice de cette faculté et, de façon apparente, le texte intégral des articles L. 121-23, L. 121-24, L. 121-25 et L.121-26".

En l'espèce, et à titre liminaire, les intimés soutiennent que le bon de commande produit par la banque a opportunément été complété par rapport à l'original du contrat versé au dossier, car sur l'exemplaire de la banque une case est cochée, ce qui n'est pas le cas de l'original. Il est sollicité que la cour écarte par conséquent la pièce n° 1 communiquée par la banque, en ce qu'il s'agit d'un faux.

Cependant, la pièce numéro 1 communiqué par la BNPPPF consiste en un acte de cession de créances et la banque ne produit pas de copie du bon de commande, si ce n'est dans une cote intitulée « pièces adverses citées » une photocopie noir et blanc du bon de commande. Son bordereau de pièces ne fait pas non plus état du bon de commande. Il s'ensuit que le grief n'est pas fondé, étant observé qu'aucune précision n'est apportée par les intimés sur la nature de l'altération alléguée.

L'original du bon de commande souscrit le 24 février 2014 par M. [S] comprend bien en son verso les conditions générales de vente et d'installation ainsi que le formulaire détachable de rétractation.

Le bon de commande à en-tête Groupe solaire de France porte sur une centrale photovoltaïque au prix TTC de 18 990 euros avec fourniture, livraison et pose, garantie pièces, main d''uvre et déplacements, autoconsommation et vente du surplus. Il est également précisé au titre des mentions manuscrites que la garantie du matériel est de 20 ans, le remboursement de l'installation de 360 euros et que si le dossier est refusé, le dossier est caduc.

Un encadré pré-imprimé figurant en bas de la troisième page du bon de commande précise les démarches administratives à savoir le raccordement de l'onduleur au compteur de production, l'obtention du contrat de rachat de l'électricité produite, les démarches auprès du Consuel (obtention de l'attestation de conformité).

La description du matériel vendu est donc particulièrement sommaire. Le formulaire pré-imprimé prévoit 8 catégories d'installations différentes allant de 12 à 36 panneaux photovoltaïques et de 3000 à 9000 Wc de puissance et précisant pour chaque installation le type, les caractéristiques mécaniques des panneaux, de l'onduleur, du coffret et du kit d'intégration.

Aucune case n'a été cochée sur l'original du bon de commande de sorte que l'acheteur n'est pas en mesure de déterminer de quel type de centrale photovoltaïque il a fait l'acquisition ni ses caractéristiques techniques afin de lui permettre de vérifier la teneur et la complétude de celle qui sera effectivement installée et, le cas échéant de comparer l'offre de la société Groupe solaire de France à des offres concurrentes notamment pendant le délai de rétractation qu'il n'a pas souhaité faire jouer.

Le bon de commande est également taisant quant au délai de livraison des matériels et d'exécution des prestations et il doit être considéré que le vendeur n'a pris aucun engagement de ce chef puisque l'article 3 des conditions générales de vente se contente d'indiquer que la livraison, sauf conditions particulières expresses, s'effectuera dans un délai de 3 mois maximum à compter de la commande ferme et définitive telle que définie à l'article 3.

Le bon de commande ne satisfait donc pas le 4° et 5° de l'article précité et c'est donc à juste titre que premier juge a considéré que ces manquements constituaient une violation des dispositions susvisées et a prononcé la nullité du contrat de vente, sans qu'il soit besoin d'examiner plus en avant les autres griefs tirés d'une violation des dispositions impératives du code de la consommation.

Il est admis que la nullité formelle résultant du texte précité est une nullité relative à laquelle la partie qui en est bénéficiaire peut renoncer par des actes volontaires explicites dès lors qu'elle avait connaissance des causes de nullité par application des dispositions de l'article 1338 du code civil dans sa version applicable au litige.

À défaut d'acte de confirmation ou ratification, il suffit que l'obligation soit exécutée volontairement après l'époque à laquelle l'obligation pouvait être valablement confirmée ou ratifiée. La confirmation, ratification, ou exécution volontaire dans les formes et à l'époque déterminées par la loi, emporte la renonciation aux moyens et exceptions que l'on pouvait opposer contre cet acte, sans préjudice néanmoins du droit des tiers.

Le contrat de vente litigieux reproduit le texte intégral des articles L. 121-23, L. 121-24, L. 121-25 et L.121-26 du code de la consommation tel qu'exigé par les textes susvisés de sorte que l'acquéreur était parfaitement informé de la réglementation applicable et se trouvait par conséquent en mesure d'apprécier les irrégularités formelles du bon de commande.

Le contrat de vente est assorti d'un formulaire d'annulation de la commande conforme dont M. [S] n'a pas souhaité user.

Il est en outre avéré que le 8 mars 2014, M. [S] a signé sans réserve une attestation de fin de travaux mentionnant que les travaux étaient achevés et conformes au devis à l'exception du raccordement et des éventuelles autorisations administratives, qu'il a demandé à la banque de payer la somme de 18 990 euros représentant le montant du crédit à l'ordre du vendeur. Il n'est par ailleurs pas contesté que les fonds ont été débloqués par la banque Solfea.

En outre, il n'est pas contesté que les emprunteurs se sont ensuite acquittés des échéances du crédit en conformité avec l'échéancier prévu.

Si M. [S] prétend que l'installation n'a jamais été raccordée, il n'est produit aucun élément permettant de l'attester. Il n'est justifié en particulier d'aucune démarche auprès de la venderesse au cours des nombreuses années d'utilisation de l'équipement conçu en priorité pour une auto-consommation, pour se plaindre de l'absence de raccordement au réseau électrique corroborant ainsi la pleine acceptation de l'équipement mis en fonction.

Il est au demeurant constaté qu'il résulte d'un courrier en réponse de la société EDF (pièce 12 des intimés) que sur l'interpellation de l'acheteur le 14 octobre 2016 qui faisait part de son mécontentement suite aux promesses commerciales faites par l'installateur de panneaux et s'étonnait de ne pas bénéficier d'un tarif à 36 c€/kWh, que la société EDF confirmait que la demande complète de raccordement avait été effectuée le 30 avril 2015 et que le tarif applicable d'achat par EDF relevait de l'arrêté du 7 janvier 2013 et du contrat d'achat S11M,V2.

Ces actes positifs non équivoques caractérisent une volonté de percevoir les avantages attendus du contrat, confirmée même après introduction de l'instance, qui exclut que M. [S] puisse se prévaloir d'une nullité tirée de l'irrégularité formelle du bon de commande.

Partant, il est retenu que M. [S] a renoncé en toute connaissance à se prévaloir des irrégularités formelles affectant le bon de commande et qu'il ne peut se prévaloir de la nullité formelle du bon de commande.

Sur la nullité pour vice du consentement

M. [S] invoque la nullité du contrat de vente sur le fondement des articles 1109 et 1116 du code civil, dans leur version applicable au litige.

Aux termes de l'article 1109 ancien du code civil, il n'y a point de consentement valable si le consentement n'a été donné que par erreur ou s'il a été extorqué par violence ou surpris par dol.

L'article 1116 du code civil dispose quant à lui que le dol est une cause de nullité de la convention lorsque les man'uvres pratiquées par l'une des parties sont telles, qu'il est évident que, sans ces man'uvres, l'autre partie n'aurait pas contracté. Il ne se présume pas et doit être prouvé.

En l'espèce, M. [S] soutient que le vendeur a fait preuve de réticences dolosives concernant certaines mentions obligatoires du contrat et informations qu'il aurait dû lui communiquer à savoir :

- qu'il faut attendre un délai de plusieurs mois avant de se faire raccorder,

- qu'il y a une capitalisation des intérêts dès le début du contrat de crédit,

- qu'il faut attendre un an avant de percevoir les premiers revenus,

- qu'ils devront commencer à payer le crédit avec leurs propres deniers, et

- que les revenus énergétiques dépendent de la production des photons grâce au soleil,

- le délai de raccordement,

- l'assurance obligatoire à souscrire en cas d'acquisition de tels matériels,

- la location obligatoire d'un compteur de production auprès de la société EDF sur 20 ans,

- la durée de vie des matériels et notamment, celle de l'onduleur électrique.

caractérisant ainsi une intention de tromper.

M. [S] ne produit aucun élément probant au soutien de ses affirmations.

M. [S] estime également que le vendeur a fait état de partenariats mensongers avec EDF pour pénétrer son habitation et a usé de man'uvres dolosives en présentant de manière fallacieuse la rentabilité de l'installation.

Il n'est pas démontré en quoi il serait critiquable pour la société venderesse de faire état de partenariat avec la société EDF dès lors que le raccordement de l'installation et la possibilité de vendre l'électricité produite dépendent d'elle.

Il n'est pas non plus démontré que la société Nouvelle régie a fait état de perspectives de rendement chiffrées qu'elle savait fallacieuses ni qu'elle se serait engagée sur une quelconque rentabilité de l'installation ni sur la performance de son installation photovoltaïque.

M. [S] soutient encore que la société venderesse a faussement présenté l'offre de financement comme étant sans grandes conséquences et que ce n'est qu'après écoulement du droit de rétractation que l'acheteur a pu apprendre le caractère définitif du contrat et connaître formellement les modalités de financement du bon de commande signé.

Ces allégations ne sont nullement étayées. Au demeurant, il est remarqué que le fait de signer le bon de commande et de signer simultanément le contrat de crédit s'y rapportant suffisait à informer une personne normalement avisée qu'elle s'engageait dans une relation contractuelle ferme, sauf exercice du droit de rétractation.

Les prétentions de M. [S] relatives à un dol non démontré sont donc rejetées.

Il n'y a donc pas lieu à annulation du contrat de vente et le contrat de crédit n'est pas nul de plein droit.

Le jugement en ce qu'il a prononcé la nullité des contrats est donc infirmé.

Sur la responsabilité de la société banque Solfea

Si M. [S] invoque une faute de la banque pour avoir consenti un crédit et débloqué les fonds sur la base d'un bon de commande nul, les motifs qui précèdent rendent sans objet ce grief dès lors que le bon de commande n'est pas annulé.

M. [S] soutient que la banque a commis une faute en libérant des fonds avant l'achèvement de l'installation en l'absence de raccordement au réseau électrique et sans s'assurer que le vendeur avait exécuté son obligation. Il soutient qu'aucune étude de faisabilité de l'installation n'a jamais été effectuée, ni même formalisée, que l'installateur n'a pas exécuté son obligation contractuelle et que la banque aurait dû s'informer de la faisabilité du projet. Il estime que le prêteur ne peut se prévaloir de l'attestation de livraison qui ne présume aucunement de l'exécution totale et complète du contrat de vente et de prestation de services.

Selon l'article L. 311-31 du code de la consommation dans sa rédaction applicable au litige, les obligations de l'emprunteur ne prennent effet qu'à compter de la livraison du bien ou de la fourniture de la prestation. En cas de contrat de vente ou de prestation de services à exécution successive, elles prennent effet à compter du début de la livraison ou de la fourniture et cessent en cas d'interruption de celle-ci.

Les dispositions de l'article L. 311-51 du même code en leur version applicable au litige prévoient que le prêteur est responsable de plein droit à l'égard de l'emprunteur de la bonne exécution des obligations relatives à la formation du contrat de crédit, que ces obligations soient à exécuter par le prêteur qui a conclu ce contrat ou par des intermédiaires de crédit intervenant dans le processus de formation du contrat de crédit, sans préjudice de son droit de recours contre ceux-ci.

Il incombe donc au prêteur de vérifier que l'attestation de fin de travaux suffit à déterminer que la prestation promise a été entièrement achevée.

En revanche, il n'appartient pas au prêteur de s'assurer par lui-même de l'exécution des prestations et il ne saurait être garant de l'exécution du contrat principal.

Il est rappelé que le contrat de crédit souscrit prévoir expressément que les fonds sont mis à disposition à la livraison du bien, par virement au bénéficiaire mentionné dans l'attestation de fin de travaux.

M. [S] a validé le 8 mars 2014, sans aucune réserve, une attestation de fin de travaux mentionnant que les travaux étaient achevés et conformes au devis à l'exception du raccordement et des éventuelles autorisations administratives, qu'il a demandé à la banque de payer la somme de 18 990 euros représentant le montant du crédit à l'ordre du vendeur.

C'est sur la base de cette attestation que les fonds ont été débloqués entre les mains du vendeur.

Le certificat de livraison permet d'identifier sans ambiguïté l'opération financée et d'attester de la livraison de l'installation photovoltaïque à la charge de la société venderesse. Cette attestation ne vise que l'installation du matériel hors raccordement au réseau et hors démarches administratives.

Si le bon de commande met en effet à la charge du vendeur ces prestations, le contrôle opéré par la banque ne saurait porter ni sur des autorisations données par des organismes tiers, ni sur la réalisation du raccordement réalisé ultérieurement par ERDF, structure également tiers par rapport à l'ensemble contractuel.

Cette attestation est donc suffisante pour apporter la preuve de l'exécution du contrat principal sans qu'aucune faute ne soit établie à l'encontre de l'organisme financeur.

Il n'est pas non plus expliqué en quoi la banque aurait dû s'informer de la faisabilité du projet.

M. et Mme [S] ne justifient par ailleurs d'aucun préjudice en lien direct avec les conditions de libération du capital de 18 990 euros.

Il s'ensuit que le jugement doit être infirmé en ce qu'il a retenu la responsabilité de banque la privant de son droit à restitution du capital emprunté et la condamnant à restituer aux emprunteurs les sommes versées au titre du contrat de crédit. Le jugement doit cependant être confirmé en ce qu'il a débouté M. et Mme [S] de leurs différentes demandes de dommages et intérêts formées au titre du préjudice financier, du trouble de jouissance et du préjudice moral.

***

Les intimés soutiennent à titre subsidiaire que les manquements de la banque doivent la priver de son droit aux intérêts contractuels. Ils fondent leur demande sur les articles 1134, 1135 et 1147 du code civil dans leur version antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016 et l'article L. 311-8 du code de la consommation, exposant que la banque a manqué à ses devoirs d'information, de mise en garde et de conseil quant à l'opportunité économique du projet et au caractère illusoire des rendements escomptés et en finançant des installations dont elle ne pouvait ignorer le caractère ruineux.

L'appelante soutient que cette demande est irrecevable car formée pour la première fois en cause d'appel mais aussi car elle n'était pas formée dans les premières conclusions d'intimé, ce qui est une cause d'irrecevabilité au regard de l'article 910-4 du code de procédure civile.

Ce moyen de défense tend non pas à l'octroi d'un avantage, mais seulement à mettre en échec les prétentions adverses puisque la société BNPPPF forme des demandes en paiement. Ce moyen susceptible de priver le prêteur de son droit aux intérêts contractuels n'a pas pour effet de conférer à l'emprunteur un avantage autre qu'une minoration de la créance dont le prêteur poursuit le paiement.

Il en résulte qu'il ne s'agit pas d'une prétention présentant au demeurant un caractère nouveau et que la fin de non-recevoir soulevée est rejetée.

Selon l'article L. 311-8 dans sa rédaction applicable au litige, le prêteur ou l'intermédiaire de crédit fournit à l'emprunteur les explications lui permettant de déterminer si le contrat de crédit proposé est adapté à ses besoins et à sa situation financière, notamment à partir des informations contenues dans la fiche mentionnée à l'article L. 311-6. Il attire l'attention de l'emprunteur sur les caractéristiques essentielles du ou des crédits proposés et sur les conséquences que ces crédits peuvent avoir sur sa situation financière, y compris en cas de défaut de paiement. Ces informations sont données, le cas échéant, sur la base des préférences exprimées par l'emprunteur.

Lorsque le crédit est proposé sur un lieu de vente, le prêteur veille à ce que l'emprunteur reçoive ces explications de manière complète et appropriée sur le lieu même de la vente, dans des conditions garantissant la confidentialité des échanges.

La fiche de dialogue signée par M. et Mme [S] mentionne qu'ils n'avaient alors aucune charge d'emprunt, que monsieur est cordonnier au salaire de 1 380 euros par mois, madame est employée au salaire de 840 euros par mois, toutes circonstances rendant très raisonnable une demande de crédit qui prévoyait 132 mensualités de 204 euros, après une période de franchise totale de onze mois.

Il ne saurait être reproché à la banque de n'avoir pas satisfait une obligation générale de mise en garde à laquelle elle n'était pas tenue dès lors que le crédit ne faisait pas naître un risque d'endettement excessif. Il n'appartenait pas au demeurant à la banque de s'immiscer dans les choix de son client et il n'est pas démontré en quoi la banque était tenue d'une obligation particulière de conseil et d'information relative à l'opportunité économique du projet.

Il n'y a donc pas lieu à déchéance du droit aux intérêts contractuels sur ce fondement.

Sur la demande de restitution des sommes versées en exécution du jugement déféré et de résiliation du contrat de crédit

L'appelante indique que les emprunteurs ont cessé de régler les échéances du crédit du fait de l'exécution provisoire qu'ils ont sollicitée, et l'exécution provisoire s'opérant aux risques de celui qui la sollicite, qu'elle n'a d'autre choix que de solliciter le prononcé de la résiliation judiciaire du contrat de crédit avec effet au 24 février 2020 et leur condamnation solidaire au paiement de la somme de 13 328,98 euros correspondant au capital restant dû à cette date et à l'indemnité de résiliation. Elle sollicite en outre la restitution des sommes versées en exécution du jugement ainsi que subsidiairement la condamnation solidaire des emprunteurs aux mensualités échues impayées au jour où la cour statue.

L'appelante produit à l'appui de sa demande une copie de l'offre de crédit, la fiche de dialogue, la notice d'informations relative à l'assurance, le tableau d'amortissement du prêt, un extrait d'historique de compte.

Ces éléments sont insuffisants à établir que M. et Mme [S] sont défaillants dans le remboursement du crédit. L'historique de compte produit sur une seule page A4 mentionne un moratoire au 21 février 2020 d'une durée de 24 mois puis le remboursement client par virement de la somme de 13 511,39 euros le 24 février 2020. Il n'est produit aucun historique des règlements depuis le début du crédit, aucun courrier adressé aux emprunteurs les mettant en demeure d'avoir à régulariser le paiement des échéances.

Ces éléments attestent en revanche du remboursement aux emprunteurs par suite du jugement revêtu de l'exécution provisoire de la somme de 13 511,39 euros.

Il convient donc de rejeter la demande de résiliation du crédit et la demande en paiement.

La société BNPPPF demande que les emprunteurs soient condamnés à la restitution des sommes qu'elle a versées en exécution du jugement déféré assorti de l'exécution provisoire.

Cependant, la cour rappelle que le présent arrêt infirmatif constitue le titre ouvrant droit à la restitution des sommes versées en exécution du jugement, et que les sommes devant être restituées portent intérêt au taux légal à compter de la notification ou de la signification, valant mise en demeure, de la décision ouvrant droit à restitution.

Il s'ensuit qu'il n'y a pas lieu de statuer sur la demande de la société BNPPPF de ce chef.

La demande subsidiaire de règlement des mensualités échues depuis le jugement dont appel et jusqu'à la date du présent arrêt est également rejetée à défaut de tout élément permettant à la cour de vérifier la défaillance des emprunteurs dans le règlement du crédit.

Le surplus des demandes est rejeté.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant en dernier ressort, après débats en audience publique, par arrêt réputé contradictoire, et par mise à disposition au greffe,

Rejette les fins de non-recevoir ;

Infirme le jugement en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il a déclaré recevable l'action de M. [H] [S] et Mme [U] [S] dirigée contre la société Nouvelle régie des jonctions des énergies de France, en ce qu'il a déclaré irrecevable la demande de nullité du contrat de vente formée par Mme [S], et en ce qu'il a débouté M. [H] [S] et Mme [U] [S] de leurs demandes indemnitaires ;

Statuant à nouveau des chefs infirmés, et y ajoutant,

Déboute M. [H] [S] et Mme [U] [S] de l'intégralité de ses demandes ;

Rejette le surplus des demandes ;

Condamne in solidum M. [H] [S] et Mme [U] [S] aux dépens de première instance et d'appel avec distraction au profit de la Selas Cloix & Mendes-Gil ;

Condamne M. [H] [S] et Mme [U] [S] in solidum à verser à la société BNP Paribas personal finance venant aux droits de la société Banque Solfea une somme de 2 000 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

La greffièreLe président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 9 - a
Numéro d'arrêt : 20/04662
Date de la décision : 30/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-30;20.04662 ?
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