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30/06/2022 | FRANCE | N°20/04281

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 9 - a, 30 juin 2022, 20/04281


Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 9 - A



ARRÊT DU 30 JUIN 2022



(n° , 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/04281 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CBSTS



Décision déférée à la Cour : Jugement du 12 décembre 2019 - Tribunal d'Instance de LONGJUMEAU - RG n° 11-19-002503





APPELANTE



La société CREATIS, société anonyme agissant pours

uites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

N° SIRET : 419 446 034 00128

[Adresse 6]

[Adresse 6]

[Localité 3]



représentée par Me Oliv...

Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 9 - A

ARRÊT DU 30 JUIN 2022

(n° , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/04281 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CBSTS

Décision déférée à la Cour : Jugement du 12 décembre 2019 - Tribunal d'Instance de LONGJUMEAU - RG n° 11-19-002503

APPELANTE

La société CREATIS, société anonyme agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

N° SIRET : 419 446 034 00128

[Adresse 6]

[Adresse 6]

[Localité 3]

représentée par Me Olivier HASCOET de la SELARL HAUSSMANN-KAINIC-HASCOET-HELAI, avocat au barreau de l'ESSONNE

INTIMÉ

Monsieur [B] [J]

né le [Date naissance 1] 1976 aux [Localité 5]

[Adresse 2]

[Localité 4]

DÉFAILLANT

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 24 mai 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Laurence ARBELLOT, Conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. Christophe BACONNIER, Président de chambre

Mme Fabienne TROUILLER, Conseillère

Mme Laurence ARBELLOT, Conseillère

Greffière, lors des débats : Mme Camille LEPAGE

ARRÊT :

- DÉFAUT

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par M. Christophe BACONNIER, Président et par Mme Camille LEPAGE, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Suivant offre préalable signée le 27 avril 2012, la société Creatis, a consenti à M. [B] [J] un prêt dans le cadre d'un regroupement de crédits portant sur la somme de 16 900 euros remboursable en 144 mensualités de 187,88 euros chacune, au taux nominal conventionnel de 8,53 % l'an.

M. [J] a saisi la commission de surendettement des particuliers qui a recommandé la suspension du paiement des échéances jusqu'au 18 novembre 2017. M. [J] n'ayant pas repris le paiement des échéances à l'issue de cette période, la déchéance du terme du contrat a été prononcée.

Saisi le 15 juillet 2019 par la société Creatis d'une demande tendant principalement à la condamnation de M. [J] au paiement du solde restant dû au titre du contrat, le tribunal d'instance de Longjumeau, par un jugement contradictoire rendu le 12 décembre 2019 auquel il convient de se reporter, a :

- reçu la société Creatis en ses demandes,

- prononcé la déchéance du droit aux intérêts conventionnels au titre du contrat de crédit,

- condamné M. [J] à payer à la société Creatis la somme de 13 251,94 euros, avec intérêts au taux légal à compter du prononcé de la décision,

- ordonné la capitalisation des intérêts.

Pour prononcer la déchéance du droit aux intérêts conventionnels, le tribunal s'est fondé sur les articles R. 314-19 et R. 314-20 du code de la consommation considérant que le taux débiteur des crédits regroupés n'était pas reproduit au bilan économique.

Par une déclaration remise le 25 février 2020, la société Creatis a relevé appel de cette décision.

Aux termes de conclusions remises le 15 juin 2020, l'appelante demande à la cour :

- d'infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a prononcé la déchéance du droit aux intérêts, a rejeté la demande de capitalisation des intérêts et la demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- de condamner M. [J] à lui payer la somme de 18 655,45 euros avec intérêts au taux contractuel de 8,53 % l'an à compter de la mise en demeure du 17 août 2018,

- d'ordonner la capitalisation annuelle des intérêts par application de l'article 1343-2 du code civil,

- de condamner M. [J] à lui payer la somme de 1 200 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

L'appelante soutient, au visa de l'article L. 110-4 du code de commerce, que l'argument selon lequel elle ne produit pas le taux débiteur des crédits regroupés, qui fonde la déchéance du droit aux intérêts, est prescrit en ce qu'il aurait dû être soulevé avant le 27 avril 2017 alors qu'il ne l'a été par le premier juge que le 10 octobre 2019.

Elle fait valoir que le code de la consommation ne prévoit pas de sanction en cas d'absence ou d'insuffisance du document propre au regroupement de crédits.

Régulièrement assigné par acte d'huissier délivré le 1er juillet 2020 selon les formes prévues à l'article 659 du code de procédure civile, l'intimé n'a pas constitué avocat.

Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions de l'appelante, il est renvoyé aux écritures de celle-ci conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 8 mars 2022 et l'affaire appelée à l'audience du 24 mai 2022.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Il résulte du dernier alinéa de l'article 954 du code de procédure civile que la partie qui ne conclut pas ou qui, sans énoncer de nouveaux moyens, demande la confirmation du jugement est réputée s'en approprier les motifs.

Il convient de constater que si l'appelante sollicite l'infirmation de la décision querellée en ce qu'elle a rejeté sa demande de capitalisation des intérêts, le dispositif du jugement dont appel a en réalité fait droit à cette demande, de sorte qu'en l'absence de contestation sur ce point, il convient de confirmer la décision rendue.

Au regard de sa date de conclusion au 27 avril 2012, le contrat est soumis aux dispositions du code de la consommation dans leur rédaction postérieure à l'entrée en vigueur de la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010 et antérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 fixée au 1er juillet 2016.

La recevabilité de l'action de la société Creatis au regard du délai biennal de forclusion, examinée par le premier juge ne fait pas l'objet de contestation. Le jugement doit être confirmé sur ce point.

Sur la prescription du moyen tiré de l'irrégularité de l'offre préalable

L'appelante soutient que le juge du fond ne pouvait soulever d'office le 10 octobre 2019 le moyen tiré de la déchéance du droit aux intérêts contractuels au regard du délai de prescription quinquennale ayant commencé à courir à la date d'acceptation de l'offre et devant se terminer au 27 avril 2017.

La prescription est sans effet sur l'invocation d'un moyen qui tend non pas à l'octroi d'un avantage, mais seulement à mettre en échec une prétention adverse.

C'est ainsi que, défendant à une action en paiement du solde d'un crédit à la consommation, l'emprunteur peut opposer tout moyen tendant à faire rejeter tout ou partie des prétentions du créancier par application d'une disposition du code de la consommation prévoyant la déchéance du droit aux intérêts, sans se voir opposer la prescription, pour autant qu'il n'entende pas en obtenir un autre avantage tel le remboursement d'intérêts indûment acquittés.

Dans le rôle qui lui est conféré tant par l'article L. 141-4 (devenu R. 632-1) du code de la consommation que par le droit européen, le juge peut relever d'office, sans être enfermé dans un quelconque délai, toute irrégularité qui heurte une disposition d'ordre public de ce code.

En l'espèce, le moyen soulevé d'office par le tribunal d'instance et susceptible de priver le prêteur de son droit aux intérêts contractuels n'a pas pour effet de conférer à l'emprunteur un avantage autre qu'une minoration de la créance dont la société Creatis poursuit le paiement.

Loin de constituer un remboursement des intérêts acquittés par le jeu d'une compensation qui supposerait une condamnation -qui n'est pas demandée- de l'organisme de crédit à payer une dette réciproque, ces moyens ne peuvent avoir pour seul effet que de modifier l'imputation des paiements faits par l'emprunteur.

En conséquence, il convient d'écarter la fin de non-recevoir soulevée par la société Creatis.

Sur la déchéance du droit aux intérêts contractuels

Pour prononcer la déchéance du droit aux intérêts contractuels, le premier juge s'est fondé sur les dispositions des articles R. 314-19 et R. 314-20 du code de la consommation en relevant que le taux débiteur des crédits regroupés n'était pas reproduit au bilan économique.

Cependant, au regard de la date du contrat, les dispositions susvisées ne trouvaient pas à s'appliquer.

L'article L. 313-15 du code de la consommation en sa version en vigueur du 1er septembre 2010 au 1er juillet 2016 applicable au contrat litigieux prévoit que lorsque les crédits mentionnés à l'article L. 311-2 font l'objet d'une opération de crédit destinée à les regrouper, le nouveau contrat de crédit est soumis au chapitre Ier du présent titre et qu'un décret en Conseil d'État précise les modalités selon lesquelles les opérations de crédit mentionnées à cet article sont conclues, afin de garantir la bonne information de l'emprunteur.

Les dispositions décrétales d'application de ce texte et notamment les articles R. 313-12 et R. 313-13 du même code précisent qu'en cas de regroupement de crédits, le prêteur remet à l'emprunteur un document destiné à garantir sa bonne information, établi sur un support durable. Ces articles détaillent les mentions et informations devant y figurer, de manière claire et lisible en caractères dont la hauteur ne peut être inférieure à celle du corps huit.

Le non-respect de ces dispositions n'est toutefois pas sanctionné par la déchéance du droit aux intérêts contractuels.

En outre, ces dispositions nouvelles issues du décret n° 2012-609 du 30 avril 2012 et du décret n° 2012-1159 du 17 octobre 2012 sont applicables aux opérations de regroupement de crédits dont l'offre est émise à compter du 1er janvier 2013 de sorte qu'elles ne trouvent pas application au contrat litigieux souscrit le 27 avril 2012.

C'est donc à tort que le premier juge a prononcé la déchéance du droit aux intérêts contractuels à ce titre. Le jugement doit être infirmé de ce chef.

Sur le bien-fondé de la demande

L'appelante produit à l'appui de sa demande :

- l'offre préalable de crédit acceptée,

- la fiche de dialogue,

- la fiche d'informations précontractuelles européennes normalisées,

- le justificatif de consultation du fichier des incidents de paiement,

- la notice d'information sur l'assurance,

- le tableau d'amortissement,

- les mesures adoptées dans le cadre de la procédure de surendettement,

- l'historique de prêt,

- un décompte de créance.

Pour fonder sa demande de paiement, la société Creatis justifie de l'envoi à l'emprunteur le 27 avril 2018 d'un courrier recommandé avec avis de réception de mise en demeure exigeant le règlement sous trente jours des mensualités impayées à hauteur de 1 014,55 euros, à défaut de quoi la déchéance du terme du contrat sera acquise et l'intégralité des sommes deviendra exigible. La notification de la déchéance du terme du contrat résulte d'un courrier recommandé avec avis de réception adressé à M. [J] le 17 août 2018.

C'est donc de manière légitime que la société Creatis se prévaut de la déchéance du terme du contrat et de l'exigibilité des sommes dues.

En application de l'article L. 311-24 du code de la consommation dans sa version applicable au litige eu égard à la date de conclusion du contrat, en cas de défaillance de l'emprunteur, le prêteur pourra exiger le remboursement immédiat du capital restant dû, majoré des intérêts échus mais non payés. Jusqu'à la date du règlement effectif, les sommes restant dues produisent les intérêts de retard à un taux égal à celui du prêt. En outre, le prêteur pourra demander à l'emprunteur défaillant une indemnité qui, dépendant de la durée restant à courir du contrat et sans préjudice de l'application des articles 1152 et 1231 du code civil, sera fixée suivant un barème déterminé par décret.

L'article D. 311-6 du même code dispose que le prêteur peut demander une indemnité égale à 8 % du capital restant dû à la date de défaillance.

Au vu des pièces justificatives produites, la créance de l'appelante s'établit de la façon suivante :

- échéances impayées : 1 503,04 euros,

- capital restant dû à la date de déchéance du terme du contrat : 15 677,41euros,

- intérêts de retard arrêtés au 17/8/2018 : 173,42 euros

soit la somme totale de 17 353,87 euros.

M. [J] est en conséquence condamné au paiement de cette somme augmentée des intérêts au taux contractuel de 8,53 % l'an à compter du 17 août 2018 sur la somme de 17 180,45 euros et au taux d'intérêt légal pour le surplus.

L'appelante sollicite en outre la somme de 1 301,58 euros au titre de l'indemnité de résiliation.

Selon l'article D. 311-6 du code de la consommation, lorsque que le prêteur exige le remboursement immédiat du capital restant dû en application de l'article L. 311-24, il peut demander une indemnité égale à 8 % du capital restant dû à la date de la défaillance.

Il s'infère de cette disposition que la notion de capital restant dû fait référence au capital rendu exigible par l'effet de la déchéance du terme.

Cette somme peut donc être fixée à 1 254,19 euros. Toutefois, cette somme vient s'ajouter aux sommes déjà perçues par le prêteur s'agissant d'un regroupement de crédits. Il convient donc de la réduire à 300 euros, somme à laquelle est condamné M. [J] augmentée des intérêts au taux légal à compter du 17 août 2018.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant en dernier ressort, après débats en audience publique, par arrêt rendu par défaut, par décision mise à disposition au greffe,

Rejette la fin de non-recevoir ;

Infirme le jugement dont appel en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il a déclaré l'action recevable et en ce qu'il a fait droit à la demande de capitalisation des intérêts ;

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Condamne M. [B] [J] à payer à la société Creatis la somme de 17 353,87 euros augmentée des intérêts au taux contractuel de 8,53 % l'an à compter du 17 août 2018 sur la somme de 17 180,45 euros et au taux d'intérêt légal pour le surplus outre la somme de 300 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter du 17 août 2018 ;

Condamne M. [B] [J] aux dépens de première instance et d'appel ;

Condamne M. [B] [J] à payer à la société Creatis la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

La greffièreLe président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 9 - a
Numéro d'arrêt : 20/04281
Date de la décision : 30/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-30;20.04281 ?
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