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30/06/2022 | FRANCE | N°19/18774

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 9 - a, 30 juin 2022, 19/18774


Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 9 - A



ARRÊT DU 30 JUIN 2022



(n° , 12 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/18774 - N° Portalis 35L7-V-B7D-CAYL6



Décision déférée à la Cour : Jugement du 31 juillet 2019 - Tribunal d'Instance de PARIS - RG n° 11-16-02-0296





APPELANTE



La société BANQUE SOLFEA, société anonyme prise en la p

ersonne e son représentnat légal domicilié en cette qualité audit siège

N° SIRET : 562 059 832 00138

[Adresse 1]

[Localité 5]



représentée par Me Edgard VINCENSINI, avocat au ...

Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 9 - A

ARRÊT DU 30 JUIN 2022

(n° , 12 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/18774 - N° Portalis 35L7-V-B7D-CAYL6

Décision déférée à la Cour : Jugement du 31 juillet 2019 - Tribunal d'Instance de PARIS - RG n° 11-16-02-0296

APPELANTE

La société BANQUE SOLFEA, société anonyme prise en la personne e son représentnat légal domicilié en cette qualité audit siège

N° SIRET : 562 059 832 00138

[Adresse 1]

[Localité 5]

représentée par Me Edgard VINCENSINI, avocat au barreau de PARIS, toque : B0496

substitué à l'audience par Me Laurent BONIN, avocat au barreau de PARIS, toque : B0496

INTIMÉES

Madame [Z] [B]

née le 30 avril 1954 à [Localité 7] (54)

[Adresse 2]

[Localité 4]

représentée par Me Schmouel HABIB de la SELEURL HERACLES, avocat au barreau de PARIS, toque : E1511

La SELARLU [J] MJ prise en la personne de Maître [J] en qualité de mandataire liquidateur de la société NOUVELLE RÉGIE DES JONCTIONS DES ÉNERGIES DE FRANCE exerçant sous l'enseigne GROUPE SOLAIRE DE FRANCE

N° SIRET : 821 325 941 00010

[Adresse 3]

[Localité 6]

DÉFAILLANTE

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 18 mai 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Fabienne TROUILLER, Conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. Christophe BACONNIER, Président de chambre

Mme Fabienne TROUILLER, Conseillère

Mme Laurence ARBELLOT, Conseillère

Greffière, lors des débats : Mme Camille LEPAGE

ARRÊT :

- RÉPUTÉ CONTRADICTOIRE

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par M. Christophe BACONNIER, Président et par Mme Camille LEPAGE, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Suivant bon de commande signé le 26 octobre 2011 à son domicile, Mme [Z] [B] a conclu avec la société Nouvelle régie des jonctions des énergies de France exerçant sous l'enseigne Groupe solaire de France (la société GSF) un contrat d'achat et de pose de panneaux photovoltaïques. Cette opération a été financée au moyen d'un contrat de crédit auprès de la société banque Solfea contracté par Mme [B] le même jour, portant sur un montant de 21 000 euros remboursable en 169 mensualités de 127,10 puis 218,10 euros.

Le matériel a été installé le 16 novembre 2011, la facture a été remise le même jour et les fonds ont été débloqués le 17 novembre 2011. L'installation a été raccordée et est productive d'électricité depuis le 3 avril 2012. La première échéance a été prélevée le 5 novembre 2012. Mme [B] a intégralement remboursé le prêt le 21 avril 2015.

Par jugement en date du 12 novembre 2014, le tribunal de commerce de Bobigny a placé la société GSF en liquidation judiciaire et Maître [U] [J] a été désigné liquidateur, l'ouverture de la procédure collective datant du 18 juin 2014. La Selarlu [J] MJ a été nommée liquidateur par ordonnance du 1er septembre 2016.

Saisi le 25 octobre 2016 d'une demande tendant principalement à l'annulation des contrats de vente et de crédit affecté, le tribunal d'instance de Paris, par un jugement réputé contradictoire rendu le 31 juillet 2019 auquel il convient de se reporter, a':

- déclaré recevables les demandes de Mme [B],

- débouté la banque Solfea de sa demande en communication de pièces,

- prononcé la nullité du contrat de vente,

- prononcé la nullité du contrat de crédit affecté conclu le même jour,

- dit que Mme [B] est déchargée de son obligation de remboursement du capital restant dû à compter de ce jour à la banque Solfea,

- condamné la banque Solfea à rembourser à Mme [B] l'intégralité des sommes versées à la date du jugement,

- condamné la banque Solfea à leur payer la somme de 25 375 euros au titre des sommes déjà réglées,

- débouté les parties de leurs autres demandes.

Après avoir contrôlé la recevabilité de l'action, le tribunal a retenu que le bon de commande ne mentionnait pas de désignation précise des biens vendus, ni le délai de livraison, ni le nom du vendeur, qu'il omettait ainsi de nombreuses mentions imposées par les articles L. 121-23, R. 121-3 et R. 121-5 du code de la consommation justifiant son annulation. Il a relevé qu'il n'y a pas eu de confirmation tacite du contrat entaché de nullité puisque les acheteurs n'ont pas eu connaissance des vices entachant la forme du contrat, que le contrat de prêt était nul et que le prêteur avait commis une faute en finançant un contrat nul, laquelle la privait de son droit à restitution du capital prêté.

Par une déclaration en date du 7 octobre 2019, la société banque Solfea a relevé appel de cette décision.

Aux termes de conclusions remises le 29 mai 2020, l'appelante demande à la cour :

- d'infirmer en toutes ses dispositions le jugement dont appel,

- de déclarer irrecevables les demandes de Mme [B] en annulation des contrats,

- de constater que Mme [B] a remboursé par anticipation le contrat de prêt et l'autoriser à conserver les sommes versées par elle, soit la somme de 24 254,90 euros,

- d'ordonner à Mme [B] de produire, sous astreinte de 100 euros par jour, l'original du bon de commande, ou à tout le moins des conditions générales de vente adossées au contrat de vente,

- subsidiairement, si le contrat de crédit était annulé, de dire qu'elle ne doit restituer que la différence entre le capital prêté et la somme remboursée, soit 3 254,90 euros, et de la condamner à lui restituer cette somme,

- de débouter Mme [B] de l'ensemble de ses demandes tendant à être dispensée de restituer le capital emprunté et à la condamnation de la Banque au paiement de dommages et intérêts,

- très subsidiairement, si une faute était retenue, de dire que le montant du préjudice de Mme [B] ne peut être égal au montant du capital prêté et le réduire à de plus justes proportions et débouter Mme [B] de toutes ses demandes de dommages et intérêts supplémentaires,

- en tout état de cause, de débouter Mme [B] de l'intégralité de ses demandes,

- de condamner in solidum Mme [B] au paiement de la somme de 3 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Visant l'article L. 622-21 du code de commerce, l'appelante soutient que les demandes d'annulation des contrats litigieux sont irrecevables en l'absence de déclaration par l'intimée de sa créance à la procédure collective de la société GSF.

Elle soutient la conformité du bon de commande avec les dispositions de l'article L. 121-23 du code de la consommation avant de relever que la preuve du dol allégué par l'emprunteuse n'est pas rapportée. Elle conteste n'avoir émis aucune promesse quant à la rentabilité ou l'autofinancement de l'installation et relève que l'intimée n'établit pas que le rendement de l'installation ait été déterminant de son consentement. Elle ajoute au visa de l'article 1131 du code civil que l'objet du contrat n'est pas impossible, et la cause n'est ni fausse ni illicite.

Visant notamment l'article 1338 du code civil, elle relève que la signature des conditions générales de vente- lesquelles reproduisaient la réglementation applicable -emporte présomption de connaissance du vice et soutient que l'intimée a confirmé l'acte entaché de nullité en acceptant la livraison du matériel et son installation, en raccordant la centrale au réseau ERDF et en vendant l'électricité ainsi qu'en honorant les échéances du prêt litigieux.

La banque conteste toute méconnaissance des dispositions des articles L. 311-13 et L. 311-35 du code de la consommation et rappelle que la mise à dispositions des fonds vaut agrément. Elle souligne que le maintien du contrat de vente entraîne le maintien du contrat de crédit.

En cas d'annulation du bon de commande, elle conteste n'avoir commis aucune faute en rappelant qu'elle n'est pas tenue, en tant que tiers au contrat, de contrôler la conformité du bon de commande avec les dispositions du code de la consommation.

Elle conteste avoir manqué à son devoir de conseil ou de mise en garde avant de soutenir qu'elle n'est pas responsable de l'accréditation du vendeur ni de la formation du personnel. Après avoir rappelé le principe de non-immixtion du banquier dans les affaires de ses clients, l'appelante souligne que l'acheteuse a librement contracté, qu'elle ne démontre pas le caractère ruineux de l'opération tel qu'allégué, et conteste toute participation à un dol par complicité. Elle poursuit en contestant tout manquement à ses obligations prévues au titre des articles L. 311-6 et L. 311-8 du code de la consommation.

La banque indique avoir délivré les fonds au vu d'une attestation de fin de travaux sans réserve prouvant l'exécution du contrat, relève que le raccordement au réseau public n'était pas à la charge de la venderesse et indique que l'emprunteuse ne rapporte pas la preuve d'un préjudice ni d'un lien de causalité avec un fait lui étant imputable. Elle précise que même si une faute lui était imputable, la privation de sa créance de restitution est une sanction disproportionnée, méconnaissant les dispositions de l'article 1 protocole 1 de la CEDH et les articles 2 et 17 de la déclaration des droits de l'Homme et du citoyen de 1789.

L'appelante relève que l'intimée va conserver, en plus du capital prêté, l'installation photovoltaïque, dénonce sa mauvaise foi, relève que les préjudices qu'elle allègue ne sont aucunement étayés et ne lui sont en tout état de cause pas imputables.

Par des conclusions remises le 16 mars 2022, l'intimée demande à la cour :

- de confirmer en toutes ses dispositions le jugement dont appel,

- de débouter la société banque Solfea de toutes ses demandes, fin et conclusions,

- de condamner la société banque Solfea à lui payer la somme de 3 000 euros au titre de son préjudice financier et du trouble de jouissance et 3 000 euros au titre de son préjudice moral,

- de condamner la société banque Solfea à lui payer la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Au visa des articles L. 621-40 et L. 622-21 du code de commerce, l'intimée indique que son action tend à l'annulation du contrat conclu avec la société GSF, et non à la condamnation de celle-ci à quelque somme que ce soit, de sorte qu'elle est recevable.

À titre principal, elle allègue au visa des articles L. 121-23 à L. 121-25 du code de la consommation des violations de dispositions impératives régissant le bon de commande, notamment en ce qui concerne la description du matériel promis, les conditions et délais d'exécution des prestations, les éléments relatifs au paiement, ou encore le droit de rétractation.

Elle dénonce des abstentions malicieuses, la référence mensongère à un partenariat avec la société EDF, une présentation fallacieuse de la rentabilité prévisible de l'installation et une dénomination trompeuse de l'acte qui ont affecté la validité de son consentement au sens des articles 1108, 1109 et 1116 du code civil.

Elle conteste toute confirmation de l'acte entaché de nullité en se prévalant de sa qualité de consommatrice profane et en relevant que la seule reproduction des dispositions du code de la consommation ne permet pas de présumer de la connaissance du vice.

L'intimée relève que l'annulation du contrat de vente entraînera de plein droit celle du contrat de crédit, puis ajoute que celui-ci encoure également la nullité en raison d'une violation par la banque des prescriptions des articles L. 311-13 et L. 311-35 du code de la consommation.

Elle fait valoir que la banque est tenue de vérifier la régularité du contrat principal, et qu'elle a commis une faute en n'y procédant pas et en finançant un contrat nul puis en libérant les fonds sans que les travaux aient été achevés, de sorte qu'elle doit être privée de sa créance de restitution et être condamnée à prendre en charge les frais de remise en état.

L'intimée se prévaut enfin d'un préjudice financier, d'un trouble de jouissance ainsi que d'un préjudice moral dont elle réclame réparation.

La déclaration d'appel et les conclusions d'appelant ont été signifiées par acte d'huissier délivré à personne morale le 11 décembre 2019 conformément aux dispositions de l'article 658 du code de procédure civile. La Selarlu [J] MJ représentée par Maître [U] [J] en qualité de mandataire liquidateur de la société GSF n'a pas constitué avocat. Les conclusions d'intimés lui ont été signifiée à personne morale le 11 mars 2020 et les conclusions récapitulatives d'appelant lui ont été signifiées le 3 juin 2020.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 22 mars 2022 et l'affaire a été appelée à l'audience le 18 mai 2022.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Il est rappelé que la cour n'est pas tenue de statuer sur des demandes de : « dire et juger » qui ne sont pas des prétentions juridiques.

Sur la recevabilité des demandes

L'appelante invoque l'irrecevabilité des demandes de Mme [B] en l'absence de déclaration de créance dans la procédure collective de la société GSF, estimant que ses demandes tendent indirectement au paiement d'une somme d'argent.

Alors que les dispositions de l'article L. 622-21 du code de commerce n'interdisent que les actions qui tendent à la condamnation d'un débiteur sous le coup d'une procédure collective au paiement d'une somme d'argent ou à la résolution d'un contrat pour défaut de paiement d'une somme d'argent, force est de constater que l'action de Mme [B] à l'encontre de la société GSF en liquidation judiciaire n'entre pas dans le champ de ces dispositions dès lors qu'elle tend uniquement à l'annulation du contrat de vente.

Sans qu'il y ait lieu de suivre l'appelante dans ses plus amples développements relatifs aux conséquences nécessaires d'une éventuelle annulation de ce contrat, en l'absence de toute demande en paiement formée dans le cadre de la présente instance à l'encontre de la société GSF, le jugement est confirmé en ce qu'il a déclaré recevables les demandes de Mme [B].

Sur la demande de communication de pièces

L'appelante demande qu'il soit ordonné à l'intimée de produire, sous astreinte de 100 euros par jour l'original du bon de commande, ou à tout le moins des conditions générales de vente adossées au contrat de vente.

La Cour constate que l'original du bon de commande est produit aux débats. Cette demande est par conséquent sans objet.

Sur la demande de nullité du bon de commande

Sur le moyen tiré des mentions obligatoires

Il est constant que le contrat de vente et de prestation de services litigieux est soumis aux dispositions des articles L. 121-21 ancien et suivants du code de la consommation dans leur rédaction en vigueur au 16 juillet 2012, dès lors qu'il a été conclu dans le cadre d'un démarchage à domicile.

La veille de la prescription quinquennale, Mme [B] a entendu soulever la nullité du contrat de vente signé le 26 octobre 2011. Elle invoque l'absence de renseignements relatifs à la marque des panneaux et de l'onduleur, aux prix unitaires, à l'identité du commercial, aux conditions de paiement et aux modalités de livraison. Elle ajoute que les prestations sont insuffisamment stipulées.

L'article L. 121-23 dispose : 'Les opérations visées à l'article L. 121-21 doivent faire l'objet d'un contrat dont un exemplaire doit être remis au client au moment de la conclusion de ce contrat et comporter, à peine de nullité, les mentions suivantes :

1° Noms du fournisseur et du démarcheur ;

2° Adresse du fournisseur ;

3° Adresse du lieu de conclusion du contrat ;

4° Désignation précise de la nature et des caractéristiques des biens offerts ou des services proposés ;

5° Conditions d'exécution du contrat, notamment les modalités et le délai de livraison des biens, ou d'exécution de la prestation de services ;

6° Prix global à payer et modalités de paiement ; en cas de vente à tempérament ou de vente à crédit, les formes exigées par la réglementation sur la vente à crédit, ainsi que le taux nominal de l'intérêt et le taux effectif global de l'intérêt déterminé dans les conditions prévues à l'article L. 313-1 ;

7° Faculté de renonciation prévue à l'article L. 121-25, ainsi que les conditions d'exercice de cette faculté et, de façon apparente, le texte intégral des articles L. 121-23, L. 121-24, L. 121-25 et L. 121-26'.

En application de l'article 9 du code de procédure civile, il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention. L'absence d'utilisation de la faculté de rétractation ne fait pas obstacle à l'action tendant à l'annulation du contrat. L'action en annulation d'un contrat n'est pas davantage subordonnée à la démonstration d'un préjudice.

Contrairement à ce qui est invoqué, le bon de commande mentionne bien le prix global à payer, conformément au 6° de l'article précité. Si les modalités du financement ne sont pas précisées, il convient de relever que le contrat de prêt souscrit le même jour par Mme [B] auprès de la société Banque Solfea porte mention de l'organisme prêteur, du taux débiteur fixe, du taux annuel effectif global ainsi que du coût total du crédit de sorte que l'ensemble des éléments d'informations nécessaires au crédit et exigé par l'alinéa précité a été porté à la connaissance des emprunteurs.

Il est également soutenu que le formulaire détachable de rétractation ferait partie intégrante du bon de commande et qu'il ne pourrait en être séparé sans endommager le contrat. L'original produit permet d'infirmer cette allégation dépourvue de tout fondement. Au demeurant, la non-conformité alléguée du bordereau de rétractation n'est cependant pas susceptible d'entraîner une nullité, cette sanction n'étant prévue par aucun texte.

Néanmoins, comme le relève à juste titre le premier juge, il apparaît effectivement que le bon de commande remis à l'en-tête de la société GSF, mentionne un descriptif particulièrement sommaire des matériels vendus. Si l'absence de plans techniques n'est pas une cause de nullité du contrat, la description de la centrale photovoltaïque promise est incomplète dès lors qu'aucune indication n'est donnée sur les éléments de l'équipement ni sur le nombre de panneaux. En outre, ces dispositions n'indiquent pas si les accessoires nécessaires à l'installation (disjoncteur, parafoudre, câblage, travaux éventuellement requis pour permettre le raccordement au réseau public...) sont inclus. Elles ne satisfont pas le 4° de l'article précité dans la mesure où elles ne permettaient pas à Mme [B] de comparer utilement les produits proposés avec d'autres produits présents sur le marché et ne lui permettaient pas de vérifier la complète installation des éléments avant de signer l'attestation de fin de travaux.

Au surplus, le bon de commande ne comporte aucune indication sur le délai de livraison et les modalités d'exécution des travaux, alors que le contrat portait non seulement sur une vente mais aussi sur une prestation de services. Les conditions générales produites ne précisent pas les modalités de livraison. Partant, le bon de commande n'est pas conforme au 5° de l'article L. 121-23 précité.

Le contrat encourt donc l'annulation.

Il est admis que la nullité formelle résultant du texte précité est une nullité relative à laquelle la partie qui en est bénéficiaire peut renoncer par des actes volontaires explicites dès lors qu'elle avait connaissance des causes de nullité.

Selon l'article 1338 du code civil dans sa version applicable au litige, l'acte de confirmation ou ratification d'une obligation contre laquelle la loi admet l'action en nullité n'est valable que lorsqu'on y trouve la substance de cette obligation, la mention du motif de l'action en nullité, et l'intention de réparer le vice sur lequel cette action est fondée.

À défaut d'acte de confirmation ou ratification, il suffit que l'obligation soit exécutée volontairement après l'époque à laquelle l'obligation pouvait être valablement confirmée ou ratifiée.

La confirmation, ratification, ou exécution volontaire dans les formes et à l'époque déterminées par la loi, emporte la renonciation aux moyens et exceptions que l'on pouvait opposer contre cet acte, sans préjudice néanmoins du droit des tiers.

Dans le rôle qu'elle reconnaît au juge national dans l'application d'une réglementation d'ordre public de protection, la Cour de justice de l'union européenne impose un examen in concreto qui implique notamment que le juge apprécie la cohérence entre les griefs émis par une partie et la réalité de ses prétentions et motivations.

En l'espèce, le bon de commande litigieux reproduit très clairement le texte des articles L. 121-23 à L. 121-26 du code de la consommation dont la simple lecture suffit à informer une personne normalement avisée des exigences de la réglementation en matière de démarchage à domicile et plus particulièrement des mentions nécessaires à la validité du bon de commande.

Mme [B] n'a pas entendu faire valoir son droit de rétractation.

Il est en revanche avéré que Mme [B] a accepté la livraison du matériel commandé et les travaux sur sa toiture, qu'elle a signé le 16 novembre 2011 une attestation de fin de travaux, mentionnant sans que cela ne soit contredit, que le vendeur atteste que les travaux objets du financement (qui ne couvrent pas le raccordement au réseau éventuel et autorisations administratives éventuelles) sont terminés et sont conformes au devis. Dans cette attestation, Mme [B] a demandé la réduction du délai de rétractation.

Par la suite, Mme [B] a reçu la facture du matériel installé en date du 16 novembre 2011. Elle a ensuite donné son accord pour le raccordement et la mise en service de son installation, intervenue le 3 avril 2012 et a, le 21 mai 2012, conclu un contrat d'achat avec EDF afin de vendre sa production d'électricité. Plus encore, Mme [B] a également procédé à l'exécution effective du contrat de crédit en procédant au remboursement anticipé complet de son crédit le 21 avril 2015.

Si l'installation de la centrale photovoltaïque est intervenue 21 jours après la signature du bon de commande, Mme [B] ne justifie d'aucune doléance émise à l'encontre de la société prestataire et n'a émis aucun grief sur le fonctionnement de l'équipement. Elle ne justifie d'aucun dysfonctionnement et elle exploite l'installation photovoltaïque et revend l'électricité ainsi produite comme en atteste le contrat d'achat signé le 21 mai 2012 et les factures émises pour les années 2013, 2014, 2015, 2016, 2017, 2018 et 2019.

Ces actes positifs caractérisent une volonté effective, réitérée et non équivoque de renoncer aux moyens et exceptions qu'elle aurait pu opposer, de purger les vices du contrat de vente et de percevoir les avantages attendus des contrats, confirmée même après introduction de l'instance, qui exclut que Mme [B] puisse se prévaloir d'une nullité tirée de l'irrégularité formelle du bon de commande.

L'action judiciaire engagée par Mme [B] la veille de la prescription quinquennale résulte d'une déception sur le montant de la vente d'électricité rapporté au coût du crédit et non des défauts d'informations inhérents au texte du bon de commande.

Partant, il est retenu que Mme [B] a renoncé en toute connaissance à se prévaloir des irrégularités formelles affectant le bon de commande et qu'elle ne peut se prévaloir de la nullité formelle du bon de commande.

Sur le moyen tiré du vice du consentement

L'article 1116 devenu 1137 du code civil prévoit que : « Le dol est une cause de nullité de la convention lorsque les man'uvres pratiquées par l'une des parties sont telles, qu'il est évident que, sans ces man'uvres, l'autre partie n'aurait pas contracté. Il ne se présume pas, et doit être prouvé ».

En l'espèce, Mme [B] soutient avoir été victime d'un dol parce qu'elle n'était pas suffisamment renseignée sur les caractéristiques essentielles des biens vendus ni sur les modalités d'installation de la centrale solaire. Elle affirme avoir été victime d'une présentation fallacieuse sur la rentabilité de l'installation. Selon elle, ces man'uvres frauduleuses auraient vicié son consentement.

Le document contractuel est intitulé « Bon de commande ». Il ne contractualise aucun rendement des panneaux photovoltaïques ni rendement financier de l'installation photovoltaïque.

La brochure catalogue des produits de la société GSF contient à la page 6 présentant les panneaux photovoltaïques le paragraphe suivant « Un système d'autofinancement a été pensé, avec notre partenaire, la Banque Solfea, pour vous aider à financer et à amortir votre projet, sans que cela ne s'en ressente dans votre budget au quotidien. Cet autofinancement se fait d'une part, par le biais d'aides octroyées par l'État, lesquelles se manifestent par un crédit d'impôt, et d'autre part, par le biais des revenus générés par la vente, à EDF, de l'électricité que vous produirez ».

Cependant cette brochure n'est pas un document contractuel et aucun autofinancement de l'installation photovoltaïque n'a donc été contractualisé.

L'information insuffisante sur les caractéristiques de l'équipement vendu mentionnée ci-dessus et sur laquelle Mme [B] a décidé de passer outre ne saurait constituer une man'uvre dolosive en elle-même.

L'intimée ne caractérise pas de manière circonstanciée les fraudes qu'elle dénonce relatives notamment à une présentation fallacieuse de la rentabilité de l'opération ni que cet élément aurait été déterminant de son consentement. Elle ne démontre pas, par ailleurs, que l'existence d'un partenariat avec la société EDF était un élément déterminant de son consentement, ni un engagement contractuel de rentabilité. Or, le seul caractère incomplet du bon de commande tel que retenu ci-dessus ne saurait suffire à caractériser une fraude.

Enfin, l'intimée ne peut faire accroire qu'elle ne comprenait pas la portée de son engagement et le réduire à une simple « candidature », alors que concomitamment au contrat de vente, elle a signé le contrat de crédit affecté pour financer l'installation commandée, étant rappelé que le bon de commande, qui s'intitule comme tel sur le document y afférent, précise le mode de règlement du financement par crédit.

Mme [B] ne prouve pas, par conséquent, un comportement malicieux de la part du représentant de la société GSF, qui aurait égaré sa connaissance de la portée de son engagement, et partant, son consentement.

Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que Mme [B] est mal fondée en sa demande d'annulation du contrat de vente.

Il n'y a donc lieu à annulation du contrat principal et il n'y a pas lieu de faire application de l'article L. 311-32 du code de la consommation.

En conséquence, le jugement est infirmé en ce qu'il a prononcé l'annulation des deux contrats et la cour déboute Mme [B] de ses demandes d'annulation du contrat de vente et du contrat de crédit affecté.

Sur la responsabilité de la banque

En application des dispositions de l'article 9 du code de procédure civile, il incombe à chaque partie de prouver les faits nécessaires au succès de sa prétention, en particulier l'existence d'un fait générateur de responsabilité, du préjudice en découlant et donc d'un lien de causalité entre le préjudice et la faute.

Les dispositions de l'article L. 311-51 du même code en leur version applicable au litige prévoient que le prêteur est responsable de plein droit à l'égard de l'emprunteur de la bonne exécution des obligations relatives à la formation du contrat de crédit, que ces obligations soient à exécuter par le prêteur qui a conclu ce contrat ou par des intermédiaires de crédit intervenant dans le processus de formation du contrat de crédit, sans préjudice de son droit de recours contre ceux-ci.

Il incombe donc au prêteur de vérifier que l'attestation de fin de travaux suffit à déterminer que la prestation promise a été entièrement achevée.

En revanche, il n'appartient pas au prêteur de s'assurer par lui-même de l'exécution des prestations et l'appelante fait valoir à juste titre que l'obligation de plein droit à l'égard de l'emprunteur mise à sa charge par l'article L. 311-51 du code de la consommation ne concerne que le contrat de crédit et ne saurait la rendre garante de l'exécution du contrat principal.

Sur la responsabilité de la société Banque Solfea pour avoir financé un contrat nul ou participé au dol commis par la société GSF.

L'exécution du contrat de crédit ne fait pas obstacle à ce que l'emprunteur recherche la responsabilité du prêteur de deniers dans les obligations spécifiques qui lui incombent dans le cadre d'une opération économique unique.

Les motifs qui précèdent suffisent à écarter les griefs émis par Mme [B] à l'encontre du prêteur de deniers aux motifs que celui-ci aurait commis une faute en finançant un contrat nul ou en participant au dol commis par la société GSF.

Sur la responsabilité de la société Banque Solfea dans la libération des fonds

Mme [B] fait aussi grief à la société Banque Solfea d'avoir décaissé les fonds alors que l'installation n'était que partiellement installée sur la présentation par le vendeur d'une attestation de fin de travaux signée le 16 novembre 2011 à une date où les travaux ne pouvaient être terminés. Elle dénonce ainsi le déblocage des fonds alors que le raccordement au réseau et l'obtention des autorisations administratives ne pouvaient pas être finalisés.

Il ressort cependant du document intitulé "Attestation de fin de travaux" que Mme [B] a signé le 16 novembre 2011 que ce document qui mentionne, sans que cela ne soit contredit, qu'il « atteste que les travaux, objets du financement visé ci-dessus (qui ne couvrent pas le raccordement au réseau éventuel et autorisations administratives éventuelles) sont terminés et conformes au devis » et qu'elle a conséquence demandé à la banque de « procéder au déblocage des fonds au profit du vendeur après avoir demandé la réduction du délai de rétractation ».

Les fonds ont été débloqués le 17 novembre à l'appui de cette attestation dès lors que Mme [B] a attesté que la prestation a bien été réalisée et a elle-même disposé des fonds en donnant l'ordre de paiement.

À l'examen des pièces produites et des moyens débattus, la cour retient que Mme [B] est mal fondée à rechercher la responsabilité de la société Banque Solfea lors du déblocage des fonds au motif que le document intitulé "Attestation de fin de travaux" est conforme au contrat d'achat et mentionne la réalisation des travaux prévus, à l'exclusion des autorisations administratives et du raccordement au réseau qui ne relèvent pas des obligations à la charge du vendeur comme cela ressort d'ailleurs des mandats donnés à la société GSF de s'occuper des démarches auprès de la mairie et de ERDF.

Aucune faute ne peut donc être retenue à l'encontre de la banque qui n'a pas à vérifier sur site la réalité de l'achèvement des travaux promis.

Partant, la demande de dispense de remboursement du crédit affecté et les demandes indemnitaires sont rejetées.

Au demeurant, il doit être relevé que l'intimée qui produit de nombreux courriers sans lien avec le litige, ne conteste pas que son installation est raccordée, fonctionnelle et productrice d'électricité. Elle ne justifie d'aucun préjudice résultant des griefs allégués.

Compte tenu de ce que la responsabilité de la société Banque Solfea n'a pas été retenue par la cour, le jugement est confirmé en ce qu'il a rejeté les demandes d'indemnisation de Mme [B] au titre de la remise en état de la toiture, du trouble de jouissance, du préjudice financier et du préjudice moral.

Le jugement déféré est par ailleurs infirmé en ce qu'il a condamné la société Banque Solfea à payer à Mme [B] la somme de 25 375 euros au titre des sommes déjà réglées, et Mme [B] est déboutée de sa demande d'indemnisation du fait de la négligence fautive de la banque.

Les motifs qui précèdent rendent sans objet les prétentions et moyens subsidiaires des parties.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant après débats en audience publique, en dernier ressort, par arrêt réputé contradictoire, par mise à disposition au greffe,

Infirme le jugement dont appel en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il a déclaré Mme [Z] [B] recevable en ses demandes et en ce qu'il l'a déboutée de ses demandes indemnitaires ;

Statuant à nouveau des chefs infirmés,

Dit que la demande de communication de pièces sous astreinte est devenue sans objet ;

Déboute Mme [Z] [B] de ses demandes de nullité des contrats de vente et de crédit affecté et de ses demandes d'indemnisation du fait de la négligence fautive de la banque ;

Rappelle que Mme [Z] [B] est redevable de plein droit du remboursement des sommes perçues en exécution du jugement qui est infirmé ;

Déboute les parties de toute autre demande ;

Y ajoutant,

Condamne Mme [Z] [B] aux dépens de première instance et d'appel, ces derniers pouvant être recouvrés directement par Me Edgard Vincensini, avocat conformément à l'article 699 du code de procédure civile ;

Condamne Mme [Z] [B] à payer à la société Banque Solfea la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

La greffièreLe président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 9 - a
Numéro d'arrêt : 19/18774
Date de la décision : 30/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-30;19.18774 ?
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