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30/06/2022 | FRANCE | N°19/18460

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 9 - a, 30 juin 2022, 19/18460


Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 9 - A



ARRÊT DU 30 JUIN 2022



(n° , 2 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/18460 - N° Portalis 35L7-V-B7D-CAXNA



Décision déférée à la Cour : Jugement du 24 mai 2019 - Tribunal d'Instance de BOBIGNY - RG n° 11-18-002684





APPELANTE



La CAISSE D'ÉPARGNE ET DE PRÉVOYANCE ILE DE FRANCE, société

anonyme à conseil d'administration agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés ès-qualités audit siège

N° SIRET : 382 900 942 00014

[Adresse 2]

[Lo...

Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 9 - A

ARRÊT DU 30 JUIN 2022

(n° , 2 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/18460 - N° Portalis 35L7-V-B7D-CAXNA

Décision déférée à la Cour : Jugement du 24 mai 2019 - Tribunal d'Instance de BOBIGNY - RG n° 11-18-002684

APPELANTE

La CAISSE D'ÉPARGNE ET DE PRÉVOYANCE ILE DE FRANCE, société anonyme à conseil d'administration agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés ès-qualités audit siège

N° SIRET : 382 900 942 00014

[Adresse 2]

[Localité 4]

représentée par Me Sébastien MENDES GIL de la SELAS CLOIX & MENDES-GIL, avocat au barreau de PARIS, toque : P0173

substitué à l'audience par Me Christine LHUSSIER de la SELAS CLOIX & MENDES-GIL, avocat au barreau de PARIS, toque : P0173

INTIMÉ

Monsieur [S] [D]

né le [Date naissance 3] 1978 à [Localité 6]

Chez Madame [P] [J]

[Adresse 1]

[Localité 5]

DÉFAILLANT

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 17 mai 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant M. Christophe BACONNIER, Président, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. Christophe BACONNIER, Président de chambre

Mme Fabienne TROUILLER, Conseillère

M. Benoît DEVIGNOT, Conseiller

Greffière, lors des débats : Mme Camille LEPAGE

ARRÊT :

- RÉPUTÉ CONTRADICTOIRE

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par M. Christophe BACONNIER, Président et par Mme Camille LEPAGE, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Selon offre préalable acceptée le 15 mai 2013, la société Caisse d'épargne et de prévoyance Île-de-France (la Caisse d'épargne) a consenti à M. [S] [D] un prêt personnel d'un montant en capital de 15 000 euros remboursable au taux nominal conventionnel de 10,5 % l'an (soit un TAEG de 11,29 % l'an) en 120 mensualités.

Des échéances étant demeurées impayées, la Caisse d'épargne a fait assigner M. [D] devant le tribunal d'instance de Bobigny, par acte d'huissier en date du 7 novembre 2018, en paiement des sommes suivantes, sous le bénéfice de l'exécution provisoire :

- 12 088,10 euros avec intérêts au taux contractuel à compter de la mise en demeure,

- 400 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

Devant le premier juge, la forclusion et la déchéance du droit aux intérêts contractuels ont été mises dans le débat d'office.

Par jugement réputé contradictoire du 24 mai 2019 auquel la cour se réfère pour l'exposé de la procédure antérieure et des prétentions initiales des parties, le tribunal d'instance de Bobigny a rendu la décision suivante :

« PRONONCE la déchéance du droit aux intérêts de la société Caisse d'Epargne Île-de-France au titre du prêt souscrit par M. [D] le 15 mai 2013, à compter de cette date ;

CONDAMNE M. [D] à payer à la société Caisse d'Epargne Île-de-France la somme de 4 311,07 euros au titre du contrat de crédit du 15 mai 2013, avec intérêts au taux légal à compter du 13 décembre 2017 ;

DÉBOUTE la société Caisse d'Epargne Île-de-France de sa demande d'indemnité au titre de la clause pénale ;

ORDONNE l'exécution provisoire de la présente décision ;

REJETTE la demande formée au titre des frais irrépétibles ;

CONDAMNE M. [D] aux entiers dépens de l'instance ».

Le tribunal a principalement retenu que la déchéance du droit aux intérêts pour irrégularité du formalisme précontractuel doit être prononcée en raison du manquement du prêteur de deniers à ses obligations relatives au formulaire détachable prévu par l'article L. 312-21 du code de la consommation, l'offre de crédit produite aux débats étant dépourvue de formulaire de rétractation.

La Caisse d'épargne a relevé appel de ce jugement par déclaration du 1er octobre 2019.

Par conclusions communiquées par voie électronique en date du 21 mars 2022, la Caisse d'épargne demande à la cour de :

« INFIRMER le jugement rendu par le Tribunal d'instance de Bobigny le 24 mai 2019 en ce qu'il a prononcé la déchéance du droit aux intérêts contractuels, en ce qu'il a prononcé la déchéance du droit aux intérêts de la société Caisse d'Epargne Île-de-France au titre du prêt souscrit par M. [D] le 15 mai 2013, à compter de cette date ; en ce qu'il a limité la condamnation de M. [D] à payer à la société Caisse d'Epargne Île-de-France la somme de 4 311,07 euros au titre du prêt du 15 mai 2013, avec intérêts au taux légal à compter du 13 décembre 2017 ; en ce qu'il a débouté la société Caisse d'Epargne Île-de-France de ses demandes, en ce compris sa demande de condamnation de M. [D] à lui payer la somme de 12 088,10 euros avec intérêts au taux contractuel, sa demande d'indemnité au titre de la clause pénale ; en ce qu'il a rejeté la demande formée au titre des frais irrépétibles ;

Statuant à nouveau sur les chefs critiqués,

DÉCLARER le moyen tiré de la déchéance des intérêts contractuels irrecevable comme prescrit ; subsidiairement, DIRE ET JUGER à tout le moins qu'il n'est pas fondé ; en conséquence, REJETER le moyen et DIRE ET JUGER que la déchéance du droit aux intérêts contractuels n'est pas encourue ;

DIRE ET JUGER que la demande de la société Caisse d'Epargne Île-de-France est bien fondée ;

En tout état de cause, CONDAMNER M. [D] à payer à la société Caisse d'Epargne Île-de-France la somme de 11 488,10 euros outre intérêts au taux contractuel de 10,50 % l'an à compter du 20/07/2017 sur la somme de 10 634,50 euros et au taux légal pour le surplus en remboursement du crédit n° 42281575149001, en deniers ou quittance valable pour les éventuels règlements postérieurs au 13/09/2019 ; subsidiairement, en cas de déchéance du droit aux intérêts contractuels, CONDAMNER M. [D] à payer à la société Caisse d'Epargne Île-de-France la somme de 4 955,50 euros outre intérêts au taux légal en deniers ou quittance valables pour les éventuels règlements postérieurs au 13/09/2019 ;

ORDONNER la capitalisation des intérêts à compter du 07/11/2018, date de l'assignation dans les conditions de l'article 1154 du code civil dans sa rédaction applicable avant le 1er octobre 2016 ;

En tout état de cause, CONDAMNER M. [D] à payer à la société Caisse d'Epargne Île-de-France la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Le CONDAMNER aux entiers dépens avec distraction au profit de la société Cloix & Mendès-Gil en application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ».

L'appelante soutient que :

- le moyen tiré de la déchéance du droit aux intérêts contractuels pour irrégularité du formalisme précontractuel est irrecevable en ce que le délai de prescription de 5 ans encadrant cette action est acquis,

- le moyen tiré de la déchéance du droit aux intérêts contractuels pour irrégularité du formalisme précontractuel est mal fondé en ce qu'il ne pèse pas sur la Caisse d'épargne l'obligation de produire un exemplaire d'offre préalable muni d'un bordereau de rétractation, et que la preuve de cette remise est valable dès lors qu'elle est effectuée par la signature d'une clause au contrat indiquant un tel fait,

- l'emprunteur doit par conséquent être condamné au paiement de la créance avec les intérêts au taux contractuel, soit la somme de 11 488,10 euros,

- subsidiairement, en cas de déchéance du droit aux intérêts contractuels, la Caisse d'épargne reste bien fondée à demander la restitution du capital restant dû, soit la somme de 4 955,50 euros.

Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions de l'appelante, il est renvoyé aux écritures de celle-ci conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

La déclaration d'appel et les conclusions d'appel de la Caisse d'épargne ont été régulièrement signifiées à M. [D] par procès-verbal de remise à personne physique délivré le 23 décembre 2019 pour la première et à étude le 7 janvier 2020 pour les secondes ; M. [D] n'a pas constitué avocat.

L'ordonnance de clôture a été rendue à la date du 19 avril 2022.

L'affaire a été appelée à l'audience du 17 avril 2022.

Lors de l'audience, l'affaire a été examinée et mise en délibéré à la date du 30 juin 2022 par mise à disposition de la décision au greffe (Art. 450 CPC).

MOTIFS DE LA DÉCISION

Il résulte de l'article 954 dernier alinéa du code de procédure civile que la partie qui ne conclut pas ou qui, sans énoncer de nouveaux moyens, demande la confirmation du jugement est réputée s'en approprier les motifs.

Sur la demande en paiement

Le présent litige est relatif à un crédit soumis aux dispositions de la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010 de sorte qu'il sera fait application des articles du code de la consommation dans leur rédaction en vigueur après le 1er mai 2011 et leur numérotation antérieure à l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 et au décret n° 2016-884 du 29 juin 2016.

L'article L. 141-4 (R. 632-1 dans la nouvelle numérotation) du code de la consommation permet au juge de relever d'office tous les moyens tirés de l'application des dispositions du code de la consommation, sous réserve de respecter le principe du contradictoire. Il a été fait application de cette disposition par le premier juge.

L'article L. 311-24 (L. 312-39 dans la nouvelle numérotation) du code de la consommation prévoit qu'en cas de défaillance de l'emprunteur, le prêteur peut exiger le remboursement immédiat du capital restant dû, majoré des intérêts échus mais non payés. Jusqu'à la date du règlement effectif, les sommes restant dues produisent les intérêts de retard à un taux égal à celui du prêt. En outre, le prêteur peut demander à l'emprunteur défaillant une indemnité qui, dépendant de la durée restant à courir du contrat et sans préjudice de l'application des articles 1152 et 1231 (dans leur rédaction alors applicable) du code civil, est fixée suivant un barème déterminé par décret. L'article D. 311-6 (D. 312-16 dans la nouvelle numérotation) du même code précise que lorsque le prêteur exige le remboursement immédiat du capital restant dû en application de l'article L. 311-24 (L. 312-39 dans la nouvelle numérotation), il peut demander une indemnité égale à 8 % du capital restant dû à la date de la défaillance.

Ce texte n'a toutefois vocation à être appliqué au titre du calcul des sommes dues qu'après vérification de l'absence de forclusion de la créance, de ce que le terme du contrat est bien échu et de l'absence de déchéance du droit aux intérêts conventionnels.

Sur la forclusion

La recevabilité de l'action de la Caisse d'épargne au regard de la forclusion, vérifiée par le premier juge, ne fait pas l'objet de contestation.

Sur la déchéance du terme

Aux termes de l'article 1315 (devenu l'article 1353) du code civil, celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver.

Par ailleurs, selon l'article 1134 (devenu l'article 1103) du code civil, les conventions légalement formées engagent leurs signataires et en application de l'article 1184 (devenu l'article 1224) du même code, lorsque l'emprunteur cesse de verser les mensualités stipulées, le prêteur est en droit de se prévaloir de la déchéance du terme et de demander le remboursement des fonds avancés soit en raison de l'existence d'une clause résolutoire soit en cas d'inexécution suffisamment grave. L'article 1184 (devenu l'article 1225) précise qu'en présence d'une clause résolutoire, la résolution est subordonnée à une mise en demeure infructueuse s'il n'a pas été convenu que celle-ci résulterait du seul fait de l'inexécution.

En matière de crédit à la consommation en particulier, il résulte des dispositions de l'article L. 311-24 devenu L. 312-39 du code de la consommation, que si le contrat de prêt d'une somme d'argent peut prévoir que la défaillance de l'emprunteur non commerçant entraînera la déchéance du terme, celle-ci ne peut sauf disposition expresse et non équivoque, être déclarée acquise au créancier sans la délivrance d'une mise en demeure restée sans effet, précisant le délai dont dispose le débiteur pour y faire obstacle.

En l'espèce, le contrat de prêt contient une clause d'exigibilité anticipée en cas de défaut de paiement (article IV-3) et une mise en demeure préalable au prononcé de la déchéance du terme de payer la somme de 919,72 euros précisant le délai de régularisation (de 8 jours) a bien été envoyée le 3 juillet 2017 ainsi qu'il en ressort de l'avis de recommandé produit (l'avis de réception envoyé à l'adresse figurant au contrat de prêt étant revenu pli avisé et non réclamé) de sorte qu'en l'absence de régularisation dans le délai, ainsi qu'il en ressort de l'historique de compte, la Caisse d'épargne a pu régulièrement prononcer la déchéance du terme le 20 juillet 2017 étant précisé que la déchéance du terme a elle-même été notifiée avec une mise en demeure de payer le solde dû.

Sur la recevabilité du moyen tiré de la déchéance du droit aux intérêts

En application de l'article 23 de la Directive 2008/48 du Parlement européen et du Conseil concernant les contrats de crédit à la consommation transposée par la loi précitée, il appartient aux États membres de prendre toutes mesures nécessaires pour faire en sorte que les sanctions applicables en cas de violation des dispositions nationales adoptées conformément à cette directive soient effectives, proportionnées et dissuasives.

L'article L. 141-4 devenu R. 632-1 du code de la consommation dispose que le juge peut relever d'office toutes les dispositions du présent code dans les litiges nés de son application, tandis qu'il lui impose d'écarter d'office, après avoir recueilli les observations des parties, l'application d'une clause dont le caractère abusif ressort des éléments du débat. Ce texte de droit interne traduit le rôle attribué au juge par la directive précitée dans sa lecture par la Cour de justice de l'Union européenne dans le respect des dispositions d'un ordre public économique européen. En revanche, il ne pose aucune restriction à l'exercice des prérogatives ainsi conférées au juge pour autant que l'irrégularité résulte des faits litigieux dont l'allégation comme la preuve incombent aux parties.

Par ailleurs, si la notion de prescription s'attache à une action ou à une demande formulée par voie d'exception, il est admis qu'elle est sans effet sur l'invocation d'un moyen qui tend non pas à l'octroi d'un avantage, mais seulement à mettre en échec une prétention adverse.

C'est ainsi que défendant à une action en paiement du solde d'un crédit à la consommation, l'emprunteur peut opposer tout moyen tendant à faire rejeter tout ou partie des prétentions du créancier par application d'une disposition du code de la consommation prévoyant la déchéance du droit aux intérêts, sans se voir opposer la prescription pour autant qu'il n'entende pas en obtenir un autre avantage tel le remboursement d'intérêts indûment acquittés.

Il s'induit que dans le rôle qui lui est conféré tant par la loi et le règlement internes que par le droit européen, le juge peut soulever d'office toute irrégularité heurtant une disposition d'ordre public et sanctionnée par la déchéance d'un droit qui fonde la demande d'une partie sans être enfermé dans quelque délai.

C'est donc à bon droit que le premier juge, en respectant le principe de contradiction, a examiné la conformité du contrat aux articles L. 311-8 et suivants du code de la consommation et a fait application de l'article L. 311-33 du même code.

La cour dira donc que la Caisse d'épargne est mal fondée à invoquer la prescription du moyen tiré de la déchéance du droit aux intérêts.

Sur la déchéance du droit aux intérêts contractuels

L'article L. 311- 48 (désormais L. 341-1 et L. 341-2) du code de la consommation dispose que le prêteur est déchu du droit aux intérêts, lorsqu'il ne satisfait pas aux conditions d'informations précontractuelles prévues par les articles énumérés et contenues dans le code de la consommation.

L'article L. 311-12 du code de la consommation dans sa version applicable au contrat prévoit que pour permettre l'exercice du droit de rétractation reconnu au débiteur, qui peut, dans un délai de quatorze jours à compter de son acceptation de l'offre, revenir sur son engagement, un formulaire détachable est joint à l'offre préalable.

La présence du bordereau est exigée par les modèles-types d'offres préalables fixés par les articles R. 311-6 et R. 311-7 du même code. Ce formulaire doit, en application de ces articles, comporter un certain nombre de mentions obligatoires, tant au recto qu'au verso.

Il appartient au préteur, s'agissant d'une disposition d'ordre public, de justifier de la régularité du bordereau de rétractation, qui doit comporter les mentions requises.

La cour rappelle que la signature par un consommateur d'une clause-type insérée dans un contrat d'adhésion ne constitue qu'un indice de la remise effective d'un document conforme aux dispositions d'ordre public et qu'il appartient au prêteur de rapporter la preuve qu'il a satisfait ses obligations en corroborant cet indice par tous autres éléments de fait.

Pour justifier de la conformité de son offre, la Caisse d'épargne produit l'offre préalable de prêt acceptée, la fiche d'informations précontractuelles, la fiche dialogue comportant, la notice d'information sur l'assurance, les justificatifs de solvabilité, le justificatif de l'interrogation du FICP.

En l'espèce, il ressort de l'offre de crédit, dont l'exemplaire produit est dépourvu du bordereau de rétractation, que M. [D] a apposé sa signature sous une clause selon laquelle il « déclare (') rester en possession d'un exemplaire de cette offre accompagnée d'un formulaire détachable de rétractation ».

Pour autant, cette clause n'est corroborée par aucun élément de fait permettant de vérifier la conformité du formulaire remis aux dispositions légales.

En l'absence de tout autre élément de fait, cette clause est donc insuffisante à rapporter la preuve qui incombe au prêteur de ce qu'il a effectivement remis une offre de prêt comportant un bordereau de rétractation conforme aux dispositions d'ordre public précitées et cette absence prive la cour d'en vérifier le contenu.

Partant, la Caisse d'épargne ne justifiant pas de l'exécution de son obligation, le jugement est confirmé en ce qu'il a prononcé la déchéance totale du droit aux intérêts contractuels.

Le jugement déféré est donc confirmé en ce qu'il a prononcé la déchéance totale du droit aux intérêts.

Sur le montant de la créance

Aux termes de l'article L. 311-48 devenu L. 341-8 du code de la consommation, lorsque le prêteur est déchu du droit aux intérêts, l'emprunteur n'est tenu qu'au seul remboursement du capital suivant l'échéancier prévu, ainsi que, le cas échéant, au paiement des intérêts dont le prêteur n'a pas été déchu. Les sommes déjà perçues par le prêteur au titre des intérêts, qui sont productives d'intérêts au taux de l'intérêt légal à compter du jour de leur versement, sont restituées par le prêteur ou imputées sur le capital restant dû.

En l'espèce, le prêteur a été déchu du droit aux intérêts de sorte qu'il n'y a pas lieu de faire droit à sa demande formulée au titre des intérêts échus ; les sommes versées au titre des intérêts seront imputées sur le capital restant dû.

Au regard du décompte du prêt, il y a lieu de faire droit à la demande en paiement de la Caisse d'épargne à hauteur de la somme de 4 441 euros au titre du capital restant dû (montant emprunté de 15 000 euros ' les règlements déjà effectués à hauteur de 9 459 + 1 100 euros).

Le jugement déféré est donc infirmé en ce qu'il a condamné M. [D] à payer à la Caisse d'épargne la somme de 4 311,07 euros au titre du crédit impayé, et statuant à nouveau de ce chef, la cour condamne M. [D] à payer à la Caisse d'épargne la somme de 4 441 euros au titre du capital restant dû avec intérêts au taux légal à compter du 20 juillet 2017.

Sur la capitalisation des intérêts

La capitalisation des intérêts, dit encore anatocisme, est prohibée concernant les crédits à la consommation, matière dans laquelle les sommes qui peuvent être réclamées sont strictement et limitativement énumérées. En effet, l'article L. 311-23 devenu L. 312-38 du code de la consommation rappelle qu'aucune indemnité ni aucuns frais autres que ceux mentionnés aux articles L. 311-24 et L. 311-25 devenus L. 312-39 et L. 312-40 ne peuvent être mis à la charge de l'emprunteur dans les cas de défaillance prévus par ces articles.

La demande de capitalisation sera par conséquent rejetée.

Sur les autres demandes

La cour condamne la Caisse d'épargne aux dépens en application de l'article 696 du code de procédure civile au motif que l'établissement de crédit succombe à titre prépondérant en son appel qui n'est pas fondé en ce qui concerne la contestation de la déchéance du droit aux intérêts.

Le jugement déféré est confirmé en ce qui concerne l'application de l'article 700 du code de procédure civile.

Il n'apparaît pas inéquitable, compte tenu des éléments soumis aux débats, de laisser à la charge de la Caisse d'épargne les frais irrépétibles de la procédure d'appel.

L'ensemble des autres demandes plus amples ou contraires formées en demande ou en défense est rejeté, leur rejet découlant des motifs amplement développés dans tout l'arrêt.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant par arrêt réputé contradictoire et en dernier ressort, mis à disposition au greffe,

Déboute la société Caisse d'épargne et de prévoyance Île-de-France de sa demande d'irrecevabilité du moyen tiré de la déchéance du droit aux intérêts ;

Infirme le jugement mais seulement en ce qu'il a condamné M. [S] [D] à payer à la société Caisse d'épargne et de prévoyance Île-de-France la somme de 4 311,07 euros au titre du crédit impayé ;

Statuant à nouveau dans les limites de l'appel, et ajoutant,

Condamne M. [S] [D] à payer à la société Caisse d'épargne et de prévoyance Île-de-France la somme de 4 441 euros au titre du capital restant dû avec intérêts au taux légal à compter du 20 juillet 2017 ;

Déboute la société Caisse d'épargne et de prévoyance Île-de-France de sa demande de capitalisation des intérêts ;

Déboute la société Caisse d'épargne et de prévoyance Île-de-France de sa demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Rejette le surplus des demandes ;

Condamne la société Caisse d'épargne et de prévoyance Île-de-France aux dépens de la procédure d'appel.

La greffièreLe président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 9 - a
Numéro d'arrêt : 19/18460
Date de la décision : 30/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-30;19.18460 ?
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