La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

30/06/2022 | FRANCE | N°19/18029

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 9 - a, 30 juin 2022, 19/18029


Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 9 - A



ARRÊT DU 30 JUIN 2022



(n° , 12 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/18029 - N° Portalis 35L7-V-B7D-CAWIA



Décision déférée à la Cour : Jugement du 31 juillet 2019 - Tribunal d'Instance de PARIS - RG n° 11-17-02-0006





APPELANTE



La société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE, société anonym

e prise en la personne de son représentant légal, venant aux droits de BANQUE SOLFEA aux termes de cession de créance en date du 28 février 2017

N° SIRET : 542 097 902 04319

[Adr...

Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 9 - A

ARRÊT DU 30 JUIN 2022

(n° , 12 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/18029 - N° Portalis 35L7-V-B7D-CAWIA

Décision déférée à la Cour : Jugement du 31 juillet 2019 - Tribunal d'Instance de PARIS - RG n° 11-17-02-0006

APPELANTE

La société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE, société anonyme prise en la personne de son représentant légal, venant aux droits de BANQUE SOLFEA aux termes de cession de créance en date du 28 février 2017

N° SIRET : 542 097 902 04319

[Adresse 1]

[Localité 6]

représentée par Me Edgard VINCENSINI, avocat au barreau de PARIS, toque : B0496

substitué à l'audience par Me Laurent BONIN, avocat au barreau de PARIS, toque : B0496

INTIMÉS

Monsieur [E] [W]

né le 4 avril 1984 à [Localité 9] (941)

[Adresse 3]

[Localité 4]

représenté par Me Schmouel HABIB de la SELEURL HERACLES, avocat au barreau de PARIS, toque : E1511

Madame [K] [Y]

née le 15 janvier 1984 à [Localité 8] (27)

[Adresse 2]

[Localité 4]

représentée par Me Schmouel HABIB de la SELEURL HERACLES, avocat au barreau de PARIS, toque : E1511

La SELARLU [S] MJ prise en la personne de Maître [S] en qualité de mandataire liquidateur de la société NOUVELLE RÉGIE DES JONCTIONS DES ÉNERGIES DE FRANCE exerçant sous l'enseigne GROUPE SOLAIRE DE FRANCE

N° SIRET : 821 325 941 00010

[Adresse 5]

[Localité 7]

DÉFAILLANTE

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 18 mai 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Fabienne TROUILLER, Conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. Christophe BACONNIER, Président de chambre

Mme Fabienne TROUILLER, Conseillère

Mme Laurence ARBELLOT, Conseillère

Greffière, lors des débats : Mme Camille LEPAGE

ARRÊT :

- RÉPUTÉ CONTRADICTOIRE

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par M. Christophe BACONNIER, Président et par Mme Camille LEPAGE, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Suivant bon de commande signé le 16 juillet 2012 à leur domicile, M. [E] [W] et Mme [K] [Y] ont conclu avec la société Nouvelle régie des jonctions des énergies de France exerçant sous l'enseigne Groupe solaire de France (la société GSF) un contrat d'achat et de pose de douze panneaux photovoltaïques. Cette opération a été financée au moyen d'un contrat de crédit auprès de la société Banque Solfea contracté par M. [W] et Mme [Y] le même jour, portant sur un montant de 18 800 euros remboursable en 169 mensualités de 190,68 euros.

Le matériel a été installé le 26 juillet 2012, la facture a été remise le 27 juillet 2012 et les fonds ont été débloqués le 13 août 2012. L'installation a été raccordée et est productive d'électricité depuis le 30 avril 2013. La première échéance a été prélevée le 5 août 2013.

Par jugement en date du 12 novembre 2014 le tribunal de commerce de Bobigny a placé la société GSF en liquidation judiciaire et Maître [M] [S] a été désigné liquidateur, l'ouverture de la procédure collective datant du 18 juin 2014. La Selarlu [S] MJ a été nommée liquidateur par ordonnance du 1er septembre 2016.

Saisi le 10 janvier 2017 par M. [W] et Mme [Y] d'une demande tendant principalement à l'annulation des contrats de vente et de crédit affecté, le tribunal d'instance de Paris, par un jugement réputé contradictoire rendu le 31 juillet 2019 auquel il convient de se reporter, a :

- donné acte à la société BNPPPF de son intervention aux droits de la société Banque solfea,

- déclaré recevables les demandes de M. [W] et Mme [Y],

- débouté la société BNPPPF de ses demandes,

- prononcé la nullité du contrat de vente,

- prononcé la nullité du contrat de crédit affecté conclu le même jour,

- dit que M. [W] et Mme [Y] sont déchargés de leur obligation de remboursement du capital restant dû à la société BNPPPF,

- condamné la société BNPPPF à rembourser à M. [W] et Mme [Y] l'intégralité des sommes versées à la date du jugement,

- condamné la société BNPPPF à leur payer la somme de 12 966,24 euros au titre des sommes déjà réglées,

- débouté les parties de leurs autres demandes.

Après avoir contrôlé la recevabilité de l'action, le tribunal a retenu que le bon de commande ne mentionnait pas de désignation précise des biens vendus, ni le délai de livraison, ni le nom du vendeur, qu'il omettait ainsi de nombreuses mentions imposées par les articles L. 121-23, R. 121-3 et R. 121-5 du code de la consommation justifiant son annulation. Il a relevé qu'il n'y a pas eu de confirmation tacite du contrat entaché de nullité puisque les acheteurs n'ont pas eu connaissance des vices entachant la forme du contrat, que le contrat de prêt était nul et que le prêteur avait commis une faute en finançant un contrat nul, laquelle la privait de son droit à restitution du capital prêté.

Par une déclaration en date du 20 septembre 2019, la société BNP Paribas personal finance (la société BNPPPF) a relevé appel de cette décision.

Aux termes de conclusions remises le 29 avril 2020, l'appelante demande à la cour :

- d'infirmer en toutes ses dispositions le jugement dont appel,

- de déclarer irrecevables les demandes de M. [W] et Mme [Y] en annulation des contrats,

- de condamner M. [W] et Mme [Y] à poursuivre l'exécution du contrat de crédit jusqu'à son complet remboursement,

- d'ordonner à M. [W] et Mme [Y] de produire, sous astreinte de 100 euros par jour l'original du bon de commande, ou à tout le moins des conditions générales de vente adossées au contrat de vente, leurs avis d'imposition 2012 à 2016 afin de déterminer s'ils ont bénéficié d'un crédit d'impôt « dépenses environnementales de l'habitation principale » et, le cas échéant, le montant du crédit d'impôt et l'ensemble des factures établies en application de l'article 5 du « contrat d'achat de l'énergie électrique produite par les installations utilisant l'énergie radiative du soleil et bénéficiant de l'obligation d'achat d'électricité »,

- subsidiairement au fond, si le contrat de crédit était annulé, de condamner solidairement M. [W] et Mme [Y] à lui restituer la somme de 18 800 euros au titre du capital emprunté, avec intérêts au taux légal à compter de la remise des fonds, soit le 13 août 2012,

- de dire quelle n'a commis aucune faute,

- de débouter M. [W] et Mme [Y] de l'ensemble de leurs demandes tendant à être dispensés de restituer le capital emprunté et à la condamnation de la Banque au paiement de dommages et intérêts,

- très subsidiairement, si une faute était retenue, de dire que le montant du préjudice de M. [W] et Mme [Y] ne peut être égal au montant du capital prêté et le réduire à de plus justes proportions et débouter M. [W] et Mme [Y] de toutes leurs demandes de dommages et intérêts supplémentaires,

- en tout état de cause, de débouter M. [W] et Mme [Y] de l'intégralité de leurs demandes,

- de condamner in solidum M. [W] et Mme [Y] au paiement de la somme de 3 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Visant l'article L. 622-21 du code de commerce, l'appelante soutient que les demandes d'annulation des contrats litigieux sont irrecevables en l'absence de déclaration par les intimés de leur créance à la procédure collective de la société GSF. La banque dénonce le rejet injustifié par le premier juge de sa demande de communication de pièces et réitère sa demande.

Elle soutient la conformité du bon de commande avec les dispositions de l'article L. 121-23 du code de la consommation avant de relever que la preuve du dol allégué par les emprunteurs n'est pas rapportée. Elle conteste n'avoir émis aucune promesse quant à la rentabilité ou l'autofinancement de l'installation et relève que les intimés n'établissent pas que le rendement de l'installation ait été déterminant de leur consentement.

Visant notamment l'article 1338 du code civil, elle relève que la signature des conditions générales de vente- lesquelles reproduisaient la réglementation applicable- emporte présomption de connaissance du vice et soutient que les emprunteurs ont confirmé l'acte entaché de nullité en acceptant la livraison du matériel et son installation, en raccordant la centrale au réseau EDF et en vendant l'électricité ainsi qu'en honorant les échéances du prêt litigieux.

La banque conteste toute méconnaissance des dispositions de l'article L. 311-13 du code de la consommation et rappelle que la mise à disposition des fonds vaut agrément. Elle souligne que le maintien du contrat de vente entraîne le maintien du contrat de crédit. En cas d'annulation du bon de commande, elle conteste n'avoir commis aucune faute en rappelant qu'elle n'est pas tenue, en tant que tiers au contrat, de contrôler la conformité du bon de commande avec les dispositions du code de la consommation.

Elle conteste avoir manqué à son devoir de conseil ou de mise en garde avant de soutenir qu'elle n'est pas responsable de l'accréditation du vendeur ni de la formation du personnel. Après avoir rappelé le principe de non-immixtion du banquier dans les affaires de ses clients, l'appelante souligne que les acquéreurs ont librement contracté, qu'ils ne démontrent pas le caractère ruineux de l'opération tel qu'allégué, et conteste toute participation à un dol par complicité. Elle poursuit en contestant tout manquement à ses obligations précontractuelles prévues au titre des articles L. 311-6 et L. 311-8 du code de la consommation.

La banque indique avoir délivré les fonds au vu d'une attestation de fin de travaux sans réserve prouvant l'exécution du contrat, relève que le raccordement au réseau public n'était pas à la charge de la venderesse et indique que les emprunteurs ne rapportent pas la preuve d'un préjudice ni d'un lien de causalité avec un fait lui étant imputable. Elle précise que même si une faute lui était imputable, la privation de sa créance de restitution est une sanction disproportionnée, méconnaissant les dispositions de l'article 1 protocole 1 de la CEDH et les articles 2 et 17 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789. Elle souligne la mauvaise foi des intimés et réclame à ce titre le paiement de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral et financier.

Par des conclusions remises le 22 février 2022, les intimés demandent à la cour :

- de confirmer en toutes ses dispositions le jugement dont appel,

- de débouter la société BNPPPF de toutes ses demandes, fin et conclusions,

- d'ordonner le remboursement par la banque des sommes qu'ils lui ont été versées, soit la somme de 14 873,04 euros arrêtée au mois de février 2020, outre les mensualités postérieures acquittées, avec intérêts à taux légal à compter de la décision,

- subsidiairement, de condamner la société BNPPPF à leur payer la somme de 14 900 euros, sauf à parfaire, à titre de dommage et intérêts, du fait de la négligence fautive de la banque,

- en tout état de cause, de condamner la banque à leur payer les sommes de 4 554 euros au titre des frais de désinstallation et de remise de la toiture dans son état initial, 5 000 euros au titre de leur préjudice financier et du trouble de jouissance, 2 000 euros au titre de leur préjudice moral,

- à titre infiniment subsidiaire si la cour rejetait leurs demandes, de dire qu'ils reprendront le paiement des échéances de leur prêt,

- de condamner la banque à leur payer la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Au visa des articles L. 621-40 et L. 622-21 du code de commerce, les intimés indiquent que leur action tend à l'annulation du contrat de vente, et non à la condamnation du vendeur à quelque somme que ce soit, de sorte qu'elle est recevable.

À titre principal, ils allèguent au visa des articles L. 121-23 à L. 121-25 du code de la consommation des violations de dispositions impératives régissant le bon de commande, notamment en ce qui concerne la description du matériel promis, les conditions et délais d'exécution des prestations, les éléments relatifs au paiement, le nom du démarcheur ou encore le droit de rétractation.

Ils dénoncent des abstentions malicieuses, la référence mensongère à un partenariat avec la société EDF, une présentation fallacieuse de la rentabilité prévisible de l'installation et une dénomination trompeuse de l'acte qui ont affecté la validité de leur consentement au sens des anciens articles 1108, 1109 et 1116 du code civil.

Ils contestent toute confirmation de l'acte entaché de nullité en se prévalant de leur qualité de consommateurs profanes et en relevant que la seule reproduction des dispositions du code de la consommation ne permet pas de présumer de la connaissance du vice. Les intimés relèvent que l'annulation du contrat de vente entraînera de plein droit celle du contrat de crédit.

Ils soutiennent que la banque est tenue de vérifier la régularité du contrat principal, et qu'elle a commis une faute en n'y procédant pas et en finançant un contrat nul puis en libérant les fonds sans que les travaux aient été achevés, de sorte qu'elle doit être privée de sa créance de restitution et être condamnée à prendre en charge les frais de remise en état.

Ils font état d'un préjudice financier, d'un trouble de jouissance ainsi que d'un préjudice moral dont ils réclament réparation

La déclaration d'appel et les conclusions d'appelant ont été signifiées par acte d'huissier délivré à personne morale le 4 décembre 2019 conformément aux dispositions de l'article 658 du code de procédure civile. La Selarlu [S] MJ représentée par Maître [M] [S] en qualité de mandataire liquidateur de la société GSF n'a pas constitué avocat. Les conclusions d'intimés lui ont été signifiée à personne morale le 24 février 2020 et les conclusions récapitulatives d'appelant lui ont été signifiées le 4 mai 2020.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 22 mars 2022 et l'affaire a été appelée à l'audience le 18 mai 2022.

MOTIFS DE LA DÉCISION

À titre préliminaire, il convient de souligner que la recevabilité de l'intervention volontaire de la société BNPPPF venue aux droits de la société Banque solfea, n'est pas contestée en appel.

Sur la recevabilité des demandes

L'appelante invoque l'irrecevabilité des demandes de M. [W] et Mme [Y] en l'absence de déclaration de créance dans la procédure collective de la société GSF, estimant que leurs demandes tendent indirectement au paiement d'une somme d'argent.

Alors que les dispositions de l'article L. 622-21 du code de commerce n'interdisent que les actions qui tendent à la condamnation d'un débiteur sous le coup d'une procédure collective au paiement d'une somme d'argent ou à la résolution d'un contrat pour défaut de paiement d'une somme d'argent, force est de constater que l'action de M. [W] et Mme [Y] à l'encontre de la société GSF en liquidation judiciaire n'entre pas dans le champ de ces dispositions dès lors qu'elle tend uniquement à l'annulation du contrat de vente.

Sans qu'il y ait lieu de suivre l'appelante dans ses plus amples développements relatifs aux conséquences nécessaires d'une éventuelle annulation de ce contrat, en l'absence de toute demande en paiement formée dans le cadre de la présente instance à l'encontre de la société GSF, le jugement est confirmé en ce qu'il a déclaré recevables les demandes de M. [W] et Mme [Y].

Sur la demande de communication de pièces

L'appelante demande qu'il soit ordonné aux intimés de produire, sous astreinte de 100 euros par jour l'original du bon de commande, ou à tout le moins des conditions générales de vente adossées au contrat de vente, leur avis d'imposition 2012 à 2016 afin de déterminer s'ils ont bénéficié d'un crédit d'impôt et l'ensemble des factures établies en application du contrat d'achat de l'énergie électrique.

Elle fait valoir que cette demande est justifiée pour permettre l'évaluation du préjudice en cas d'annulation des contrats.

Les intimés n'ont pas répondu à cette demande et n'ont pas communiqué les pièces réclamées.

L'instruction et les débats étant désormais clos, cette demande est devenue sans objet, les intimés prenant à leurs risques judiciaires le fait de ne pas produire en justice les pièces réclamées par la partie adverse et de se trouver en incapacité de justifier un fait qu'ils invoquent.

Partant, le jugement est confirmé en ce qu'il a débouté la banque de sa demande de communication.

Sur la demande de nullité du bon de commande

Sur le moyen tiré des mentions obligatoires

Il est constant que le contrat de vente et de prestation de services litigieux est soumis aux dispositions des articles L. 121-21 ancien et suivants du code de la consommation dans leur rédaction en vigueur au 16 juillet 2012, dès lors qu'il a été conclu dans le cadre d'un démarchage à domicile.

Quatre ans et demi après la signature du bon de commande, M. [W] et Mme [Y] ont entendu soulever la nullité du contrat de vente signé le 16 juillet 2012. Ils n'ont produit qu'une photocopie du recto du bon de commande et ne peuvent donc invoquer l'absence des conditions générales de vente ni l'absence de formulaire détachable de rétractation dont la preuve n'est pas rapportée.

L'article L. 121-23 dispose : 'Les opérations visées à l'article L. 121-21 doivent faire l'objet d'un contrat dont un exemplaire doit être remis au client au moment de la conclusion de ce contrat et comporter, à peine de nullité, les mentions suivantes :

1° Noms du fournisseur et du démarcheur ;

2° Adresse du fournisseur ;

3° Adresse du lieu de conclusion du contrat ;

4° Désignation précise de la nature et des caractéristiques des biens offerts ou des services proposés ;

5° Conditions d'exécution du contrat, notamment les modalités et le délai de livraison des biens, ou d'exécution de la prestation de services ;

6° Prix global à payer et modalités de paiement ; en cas de vente à tempérament ou de vente à crédit, les formes exigées par la réglementation sur la vente à crédit, ainsi que le taux nominal de l'intérêt et le taux effectif global de l'intérêt déterminé dans les conditions prévues à l'article L. 313-1 ;

7° Faculté de renonciation prévue à l'article L. 121-25, ainsi que les conditions d'exercice de cette faculté et, de façon apparente, le texte intégral des articles L. 121-23, L. 121-24, L. 121-25 et L. 121-26'.

En application de l'article 9 du code de procédure civile, il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention. L'absence d'utilisation de la faculté de rétractation ne fait pas obstacle à l'action tendant à l'annulation du contrat. L'action en annulation d'un contrat n'est pas davantage subordonnée à la démonstration d'un préjudice.

Comme le relève à juste titre le premier juge, il apparaît effectivement que le bon de commande remis à l'en-tête de la société GSF, mentionne un descriptif particulièrement sommaire des matériels vendus.

Les caractéristiques essentielles des biens offerts auraient dû figurer dans le contrat de vente, conformément au 4° du texte susvisé dans la mesure où elles ne permettaient pas aux acheteurs de comparer utilement les produits proposés avec d'autres produits présents sur le marché et ne leur permettaient pas de vérifier la complète installation des éléments avant de signer l'attestation de fin de travaux.

La non-conformité alléguée du bordereau de rétractation n'est cependant pas susceptible d'entraîner une nullité, cette sanction n'étant prévue par aucun texte.

Il est également manifeste que ce bon de commande ne précise aucun délai de livraison et d'exécution. Partant, le bon de commande n'est pas conforme au 5° de l'article L. 121-23 précité.

Le contrat encourt donc l'annulation.

Il est admis que la nullité formelle résultant du texte précité est une nullité relative à laquelle la partie qui en est bénéficiaire peut renoncer par des actes volontaires explicites dès lors qu'elle avait connaissance des causes de nullité.

Selon l'article 1338 du code civil dans sa version applicable au litige, l'acte de confirmation ou ratification d'une obligation contre laquelle la loi admet l'action en nullité n'est valable que lorsqu'on y trouve la substance de cette obligation, la mention du motif de l'action en nullité, et l'intention de réparer le vice sur lequel cette action est fondée.

À défaut d'acte de confirmation ou ratification, il suffit que l'obligation soit exécutée volontairement après l'époque à laquelle l'obligation pouvait être valablement confirmée ou ratifiée.

La confirmation, ratification, ou exécution volontaire dans les formes et à l'époque déterminées par la loi, emporte la renonciation aux moyens et exceptions que l'on pouvait opposer contre cet acte, sans préjudice néanmoins du droit des tiers.

Dans le rôle qu'elle reconnaît au juge national dans l'application d'une réglementation d'ordre public de protection, la Cour de justice de l'union européenne impose un examen in concreto qui implique notamment que le juge apprécie la cohérence entre les griefs émis par une partie et la réalité de ses prétentions et motivations.

M. [W] et Mme [Y] n'ont pas entendu faire valoir leur droit de rétractation.

M. [W] a accepté la livraison du matériel commandé et les travaux sur sa toiture, il a signé le 26 juillet 2012 une attestation de fin de travaux, mentionnant sans que cela ne soit contredit, que le vendeur atteste que les travaux objets du financement (qui ne couvrent pas le raccordement au réseau éventuel et autorisations administratives éventuelles) sont terminés et sont conformes au devis. Dans cette attestation, M. [W] a demandé la réduction du délai de rétractation.

Les acheteurs ont reçu la facture du matériel installé, le Consuel et la déclaration d'achèvement et de conformité des travaux en date du 26 juillet 2012. Ils ont ensuite donné leur accord pour le raccordement et la mise en service de leur installation, intervenue le 30 avril 2013 et ont, le 12 novembre 2013, conclu un contrat d'achat avec EDF afin de vendre leur production d'électricité. Ils n'ont pas contesté avoir perçu un crédit d'impôt à la suite de leur acquisition et ont remboursé 78 échéances de crédit entre le mois d'août 2013 et le mois de février 2020 (soit 14 873,04 euros).

Si l'installation de la centrale photovoltaïque est intervenue 10 jours après la signature du bon de commande, M. [W] et Mme [Y] ne justifient d'aucune doléance émise à l'encontre de la société prestataire et n'ont émis aucun grief sur le fonctionnement de l'équipement. Ils ne justifient d'aucun dysfonctionnement et ils exploitent l'installation photovoltaïque et revendent l'électricité ainsi produite comme en atteste le contrat d'achat signé le 12 novembre 2013.

Ces actes positifs non équivoques caractérisent une volonté effective réitéré et non équivoque de renoncer aux moyens et exception qu'ils auraient pu opposer, de purger les vices du contrat de vente et de percevoir les avantages attendus des contrats, confirmée même après introduction de l'instance, qui exclut que M. [W] et Mme [Y] puissent se prévaloir d'une nullité tirée de l'irrégularité formelle du bon de commande.

L'action judiciaire engagée par M. [W] et Mme [Y] quatre ans et demi après la signature du bon de commande résulte d'une déception sur le montant de la vente d'électricité rapporté au coût du crédit et non des défauts d'information inhérents au texte du bon de commande.

Partant, il est retenu que M. [W] et Mme [Y] ont renoncé en toute connaissance à se prévaloir des irrégularités formelles affectant le bon de commande et qu'ils ne peuvent se prévaloir de la nullité formelle du bon de commande.

Sur le moyen tiré du vice du consentement

L'article 1116 devenu 1137 du code civil prévoit que : « Le dol est une cause de nullité de la convention lorsque les man'uvres pratiquées par l'une des parties sont telles, qu'il est évident que, sans ces man'uvres, l'autre partie n'aurait pas contracté. Il ne se présume pas, et doit être prouvé ».

Le document contractuel est intitulé « Bon de commande » ; il mentionne « panneau photovoltaïque garantie de rendement à hauteur de 90 % pendant 25 ans ».

Cette mention contractualise le rendement des panneaux photovoltaïques, lequel n'est pas critiqué, mais aucunement le rendement financier de l'installation photovoltaïque.

En l'espèce, M. [W] et Mme [Y] soutiennent avoir été victimes d'un dol parce qu'ils n'étaient pas suffisamment renseignés sur les caractéristiques essentielles des biens vendus ni sur les modalités d'installation de la centrale solaire. Ils affirment avoir été victimes d'une présentation fallacieuse sur la rentabilité de l'installation. Selon eux, ces man'uvres frauduleuses auraient vicié leur consentement.

Cependant, l'information insuffisante sur les caractéristiques de l'équipement vendu mentionnée ci-dessus et sur laquelle M. [W] et Mme [Y] ont décidé de passer outre ne saurait constituer une man'uvre dolosive en elle-même.

Les intimés ne caractérisent pas de manière circonstanciée les fraudes qu'ils dénoncent relatives notamment à une présentation fallacieuse de la rentabilité de l'opération ni que cet élément aurait été déterminant de leur consentement. Ils ne démontrent pas, par ailleurs, que l'existence d'un partenariat avec la société EDF était un élément déterminant de leur consentement, ni un engagement contractuel de rentabilité. Or, le seul caractère incomplet du bon de commande tel que retenu ci-dessus ne saurait suffire à caractériser une fraude.

Enfin, les intimés ne peuvent faire accroire qu'ils ne comprenaient pas la portée de leur engagement et le réduire à une simple « candidature », alors que concomitamment au contrat de vente, ils ont signé le contrat de crédit affecté pour financer l'installation commandée, étant rappelé que le bon de commande, qui s'intitule comme tel sur le document y afférent, précise le mode de règlement du financement par crédit.

M. [W] et Mme [Y] ne prouvent pas, par conséquent, un comportement malicieux de la part du représentant de la société GSF, qui aurait égaré leur connaissance de la portée de leur engagement, et partant, leur consentement.

Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que M. [W] et Mme [Y] sont mal fondés en leur demande d'annulation du contrat de vente.

Il n'y a donc lieu à annulation du contrat principal et il n'y a pas lieu de faire application de l'article L. 311-32 du code de la consommation.

En conséquence, le jugement est infirmé en ce qu'il a prononcé l'annulation des deux contrats et la cour déboute M. [W] et Mme [Y] de leurs demandes d'annulation du contrat de vente et du contrat de crédit affecté.

Sur la responsabilité de la banque

En application des dispositions de l'article 9 du code de procédure civile, il incombe à chaque partie de prouver les faits nécessaires au succès de sa prétention, en particulier l'existence d'un fait générateur de responsabilité, du préjudice en découlant et donc d'un lien de causalité entre le préjudice et la faute.

Les dispositions de l'article L. 311-51 du même code en leur version applicable au litige prévoient que le prêteur est responsable de plein droit à l'égard de l'emprunteur de la bonne exécution des obligations relatives à la formation du contrat de crédit, que ces obligations soient à exécuter par le prêteur qui a conclu ce contrat ou par des intermédiaires de crédit intervenant dans le processus de formation du contrat de crédit, sans préjudice de son droit de recours contre ceux-ci.

Il incombe donc au prêteur de vérifier que l'attestation de fin de travaux suffit à déterminer que la prestation promise a été entièrement achevée.

En revanche, il n'appartient pas au prêteur de s'assurer par lui-même de l'exécution des prestations et l'appelante fait valoir à juste titre que l'obligation de plein droit à l'égard de l'emprunteur mise à sa charge par l'article L. 311-51 du code de la consommation ne concerne que le contrat de crédit et ne saurait la rendre garante de l'exécution du contrat principal.

Sur la responsabilité de la société Banque solfea pour avoir financé un contrat nul ou participé au dol commis par la société GSF.

L'exécution du contrat de crédit ne fait pas obstacle à ce que l'emprunteur recherche la responsabilité du prêteur de deniers dans les obligations spécifiques qui lui incombent dans le cadre d'une opération économique unique.

Les motifs qui précèdent suffisent à écarter les griefs émis par M. [W] et Mme [Y] à l'encontre du prêteur de deniers aux motifs que celui-ci aurait commis une faute en finançant un contrat nul ou en participant au dol commis par la société GSF.

Sur la responsabilité de la société Banque Solfea dans la libération des fonds

M. [W] et Mme [Y] font aussi grief à la société Banque Solfea d'avoir décaissé les fonds alors que l'installation n'était que partiellement installée sur la présentation par le vendeur d'une attestation de fin de travaux signée le 26 juillet 2012 à une date où les travaux ne pouvaient être terminés. Ils dénoncent ainsi le déblocage des fonds alors que le raccordement au réseau et l'obtention des autorisations administratives ne pouvaient pas être finalisés.

Il ressort cependant du document intitulé "Attestation de fin de travaux" que M. [W] a signé le 26 juillet 2012 que ce document qui mentionne, sans que cela ne soit contredit, qu'il « atteste que les travaux, objets du financement visé ci-dessus (qui ne couvrent pas le raccordement au réseau éventuel et autorisations administratives éventuelles) sont terminés et conformes au devis » et qu'il a en conséquence demandé à la banque de « procéder au déblocage des fonds au profit du vendeur après avoir demandé la réduction du délai de rétractation ».

Les fonds ont été débloqués le 13 août à l'appui de cette attestation dès lors que M. [W] a attesté que la prestation a bien été réalisée et a lui-même disposé des fonds en donnant l'ordre de paiement.

À l'examen des pièces produites et des moyens débattus, la cour retient que M. [W] et Mme [Y] sont mal fondés à rechercher la responsabilité de la société Banque Solfea lors du déblocage des fonds au motif que le document intitulé "Attestation de fin de travaux" est conforme au contrat d'achat et mentionne la réalisation des travaux prévus, à l'exclusion des autorisations administratives et du raccordement au réseau qui ne relèvent pas des obligations à la charge du vendeur comme cela ressort d'ailleurs des mandats donnés à la société GSF de s'occuper des démarches auprès de la mairie et de ERDF.

Aucune faute ne peut donc être retenue à l'encontre de la banque qui n'a pas à vérifier sur site la réalité de l'achèvement des travaux promis.

Partant, la demande de dispense de remboursement du crédit affecté et les demandes indemnitaires sont rejetées.

Au demeurant, il doit être relevé que les intimés ne contestent pas que leur installation est raccordée, fonctionnelle et productrice d'électricité. Ils ne justifient d'aucun préjudice résultant des griefs allégués et imputés à la banque.

Compte tenu de ce que la responsabilité de la société Banque Solfea n'a pas été retenue par la cour, le jugement est confirmé en ce qu'il a rejeté les demandes d'indemnisation de M. [W] et Mme [Y] au titre de la remise en état de la toiture, du trouble de jouissance, du préjudice financier et du préjudice moral.

Sur l'exécution du contrat de crédit

Il ressort des motifs qui précèdent que M. [W] et Mme [Y] sont tenus de rembourser le crédit litigieux de sorte que les sommes qu'ils ont acquittées de ce chef ne sont pas dépourvues de cause et qu'ils sont mal fondés en leur demande de restitution.

À la date du présent arrêt, M. [W] et Mme [Y] sont donc redevables des mensualités échues jusqu'en juin 2022, conformément aux stipulations contractuelles et devront reprendre le remboursement du crédit à compter de l'échéance du mois de juillet 2022.

Il convient de rappeler que les intimés sont en outre redevables de plein droit du remboursement des sommes qu'ils ont perçues en exécution du jugement qui est infirmé, soit la somme de 12 966,24 euros.

Les motifs qui précèdent rendent sans objet les prétentions et moyens subsidiaires des parties.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant après débats en audience publique, en dernier ressort, par arrêt réputé contradictoire, par mise à disposition au greffe,

Infirme le jugement dont appel en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il a donné acte à la société BNPPPF de son intervention aux droits de la société Banque Solfea, en ce qu'il a déclaré M. [E] [W] et Mme [K] [Y] recevables en leurs demandes, en ce qu'il les a déboutés de leurs demandes indemnitaires et en ce qu'il a débouté la banque de sa demande de communication de pièces ;

Statuant à nouveau des chefs infirmés,

Déboute M. [E] [W] et Mme [K] [Y] de leurs demandes de nullité des contrats de vente et de crédit affecté et de leurs demandes d'indemnisation du fait de la négligence fautive de la banque ;

Dit que M. [E] [W] et Mme [K] [Y] devront poursuivre l'exécution du contrat de prêt conformément aux stipulations contractuelles et reprendre le remboursement du crédit ;

Rappelle que M. [E] [W] et Mme [K] [Y] sont redevables de plein droit du remboursement des sommes perçues en exécution du jugement qui est infirmé ;

Déboute les parties de toute autre demande ;

Y ajoutant,

Condamne in solidum M. [E] [W] et Mme [K] [Y] aux dépens de première instance et d'appel, ces derniers pouvant être recouvrés directement par Me Edgard Vincensini, avocat conformément à l'article 699 du code de procédure civile ;

Condamne in solidum M. [E] [W] et Mme [K] [Y] à payer à la société BNP Paribas personal finance la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

La greffièreLe président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 9 - a
Numéro d'arrêt : 19/18029
Date de la décision : 30/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-30;19.18029 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award