Copies exécutoiresREPUBLIQUE FRANCAISE
délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 3 - Chambre 5
ARRET DU 29 JUIN 2022
(n° , 4 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 18/22989 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B6TIW
Décision déférée à la Cour : Jugement du 05 Septembre 2018 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 16/12150
APPELANTE
Madame [X] [E] [D] [B] née le 3 avril 1983 à [Localité 5] (Togo),
[Adresse 1]
[Localité 4]
représentée par Me Michel LANGA, avocat au barreau de PARIS, toque : G0557
INTIME
LE MINISTERE PUBLIC pris en la personne de MONSIEUR LE PROCUREUR GENERAL - SERVICE CIVIL
[Adresse 2]
[Localité 3]
représenté à l'audience par Mme M.-D. PERRIN, substitut général
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 02 juin 2022, en audience publique, l'avocat de l'appelante et le ministère public ne s'y étant pas opposés, devant Mme Marie-Catherine GAFFINEL, conseillère, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :
Mme Hélène FILLIOL, présidente de chambre
M. François MELIN, conseiller
Mme Marie-Catherine GAFFINEL, conseillère,
Greffier, lors des débats : Mme Mélanie PATE
ARRET :
- contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Mme Hélène FILLIOL, présidente de chambre et par Mme Mélanie PATE, greffière présente lors de la mise à disposition.
Vu le jugement rendu le 5 septembre 2018 par le tribunal de grande instance de Paris qui a constaté que le récépissé prévu par l'article 1043 du code de procédure civile a été délivré, dit que Mme [X] [B], se disant née le 3 avril 1983 à [Localité 5] (Togo), n'est pas de nationalité française, ordonné la mention prévue par l'article 28 du code civil et l'a condamnée aux dépens ;
Vu la déclaration d'appel en date du 25 octobre 2018 et les dernières conclusions notifiées le 8 novembre 2021 par Mme [X] [B] qui demande à la cour de réformer le jugement, de dire que son acte de naissance est régulier comme étant établi dans les formes usitées au Togo, de dire qu'elle est de nationalité française par filiation paternelle, d'ordonner la délivrance de son certificat de nationalité française, d'ordonner la mention prévue par l'article 28 du code civil et de statuer ce que de droit sur les dépens ;
Vu les dernières conclusions notifiées le 25 novembre 2021 par le ministère public qui demande à la cour de constater que le récépissé prévu par l'article 1043 du code de procédure civile a été délivré, de confirmer le jugement et d'ordonner la mention prévue par l'article 28 du code civil ;
Vu l'ordonnance de clôture du 30 novembre 2021 ;
MOTIFS :
Il est justifié de l'accomplissement de la formalité prévue par l'article 1043 du code de procédure civile par la production du récépissé délivré le 7 janvier 2022 par le ministère de la Justice.
Mme [X] [B], se disant née le 3 avril 1983 à [Localité 5] (Togo), soutient qu'elle est française par filiation paternelle, son grand-père ayant été reconnu français, comme l'indique la mention de transcription d'arrêt reconnaissant sa qualité de citoyen français sur son acte de naissance.
Elle s'est vue refuser la délivrance d'un certificat de nationalité française le 23 février 2015 au motif que son acte de naissance, dressé un dimanche n'était pas probant au sens de l'article 47 du code civil.
N'étant pas personnellement titulaire d'un certificat de nationalité française, il lui appartient en application de l'article 30 du code civil de rapporter la preuve qu'elle réunit les conditions requises par la loi pour l'établissement de sa nationalité française en justifiant d'une chaîne de filiation légalement établie entre elle et son grand-père dont elle dit tenir la nationalité française au moyen d'actes d'état civil fiables et probants au sens de l'article 47 du code civil selon lequel « Tout acte de l'état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité. Celle-ci est appréciée au regard de la loi française ».
Lors de sa demande de certificat de nationalité française et en première instance, Mme [X] [B] avait produit la copie certifiée conforme du volet n°1 de son acte de naissance n°508 dressé le dimanche 3 avril 1983 selon lequel elle était née le même jour à [Localité 5] de [B] [H] [F] [N], 43 ans, comptable et de [R] [Y] [P] [G], 45 ans, la naissance ayant été déclarée par le père.
A la suite du refus de délivrance du certificat de nationalité française, Mme [X] [B] soutenant qu'une erreur administrative avait été commise sur son acte de naissance, a saisi par requête le tribunal de première instance d'Atakpamé et obtenu le 17 novembre 2015 un jugement de reconstitution d'acte de naissance aux termes duquel elle est née le 3 avril 1983 à [Localité 5] de [B] [H] [F] [N], 43 ans, comptable et de [R] [Y] [P] [G], 45 ans. Il ressort des motifs que « la déclaration de naissance ayant été faite un jour férié, l'authenticité de l'acte est mis en cause et l'acte devient irrégulier. » (pièce 10 de l'appelante). A la suite de cette décision, un nouvel acte de naissance n°584 figurant au registre de l'année 2015 a été établi. (pièce 6).
En appel, à la suite de la motivation retenue par le tribunal, Mme [X] [B] se prévaut d'une part, d'un nouveau jugement rendu le 9 octobre 2018 par le tribunal de première instance d'Atakpamé annulant son acte de naissance n°508 et « l'autorisant à se faire établir un jugement supplétif tenant lieu d'acte de naissance consécutif à l'annulation avec les coordonnées identitaires de l'acte annulé », et d'autre part, d'un jugement sur requête tenant lieu d'acte de naissance rendu le 6 novembre 2018 par le tribunal de première instance de deuxième classe d'Atakpamé déclarant que [X] [B] est née le 3 avril 1983 à [Localité 5] de [B] [H] [F] [N] et de [R] [Y] [P] [G]. (pièce 17 et 18 de l'appelante). En exécution de ce jugement, un nouvel acte de naissance n°89 figurant au registre de l'année 2019 a été dressé (pièces 19 et 20 de l'appelante).
Comme le relève justement le ministère public, il résulte de ces éléments en premier lieu, que Mme [X] [B] dispose de deux actes de naissance différents, l'acte de naissance n°584 dressé le 29 décembre 2015 en exécution du jugement de reconstitution du 17 novembre 2015 n'ayant pas été annulé. Or, la coexistence de deux actes de naissance ôte toute force probante à l'un quelconque de ces actes.
En second lieu, il ressort des jugements du 9 octobre 2018 et 6 novembre 2018 que Mme [X] [B] a dissimulé au juge gabonais l'existence de l'acte n° 584 dressé le 29 décembre 2015 en exécution du jugement de reconstitution du 17 novembre 2015 afin de pouvoir obtenir un nouveau jugement supplétif d'acte de naissance, alors qu'elle disposait déjà de deux actes de naissance (acte n°508 et acte n°584). Comme l'a relevé le ministère public, le jugement a ainsi été obtenu par fraude et il est donc contraire à la conception française de l'ordre public international.
En conséquence, ces décisions ne sont pas opposables en France au sens de l'article 37 de la convention judiciaire franco-togolaise et l'acte dressé en exécution de ces jugements est dépourvu de force probante.
Mme [X] [B] ne disposant pas d'un état civil fiable et probant, son extranéité est constatée. Le jugement est confirmé.
Les dépens seront supportés par Mme [X] [B] qui succombe en ses prétentions.
PAR CES MOTIFS
Constate que le récépissé prévu par l'article 1043 du code de procédure civile a été délivré,
Confirme le jugement,
Ordonne la mention prévue par l'article 28 du code civil,
Condamne Mme [X] [B] aux dépens.
LA GREFFIERE LA PRESIDENTE