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23/06/2022 | FRANCE | N°19/21820

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 9 - a, 23 juin 2022, 19/21820


Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 9 - A



ARRÊT DU 23 JUIN 2022



(n° , 2 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/21820 - N° Portalis 35L7-V-B7D-CBB7W



Décision déférée à la Cour : Jugement du 30 juillet 2019 - Tribunal d'Instance de CHARENTON - RG n° 11-19-000109





APPELANTE



La société MERCEDES-BENZ FINANCIAL SERVICES FRANCE, soc

iété anonyme agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés audit siège

N° SIRET : 304 974 249 00373

[Adresse 2]

[Localité 4]



représentée par Me C...

Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 9 - A

ARRÊT DU 23 JUIN 2022

(n° , 2 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/21820 - N° Portalis 35L7-V-B7D-CBB7W

Décision déférée à la Cour : Jugement du 30 juillet 2019 - Tribunal d'Instance de CHARENTON - RG n° 11-19-000109

APPELANTE

La société MERCEDES-BENZ FINANCIAL SERVICES FRANCE, société anonyme agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés audit siège

N° SIRET : 304 974 249 00373

[Adresse 2]

[Localité 4]

représentée par Me Carole JOSEPH WATRIN, avocat au barreau de PARIS, toque : E0791

INTIMÉ

Monsieur [S] [N]

né le [Date naissance 1] 1977 à [Localité 6] (75)

[Adresse 3]

[Localité 5]

représenté par Me Simon MESLATI, avocat au barreau de PARIS, toque : E1841

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 20 avril 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant M. Christophe BACONNIER, Président, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. Christophe BACONNIER, Président de chambre

Mme Fabienne TROUILLER, Conseillère

Mme Laurence ARBELLOT, Conseillère

Greffière, lors des débats : Mme Camille LEPAGE

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par M. Christophe BACONNIER, Président et par Mme Camille LEPAGE, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Par acte sous seing privé en date du 26 août 2016, M. [S] [N] a contracté auprès de la société Mercedes-Benz Financial Services France (la société Mercedes-Benz) un crédit affecté d'un montant de 20 971 euros visant à financer l'acquisition d'un véhicule neuf Smart Fortwo (453) cabriolet prime, moyennant le remboursement de 60 échéances de 461,45 euros au taux de 6,90 %.

Le véhicule a été livré le 2 septembre 2016, M. [N] ayant demandé à être livré immédiatement.

À la suite d'impayés à compter de juin 2017, une mise en demeure a été adressée le 18 octobre 2017 et le contrat a été résilié par courrier du 11 décembre 2017 réclamant la restitution du véhicule. En vain.

Saisi le 17 février 2019 par la société Mercedes-Benz Financial Services France d'une demande tendant principalement à la condamnation de l'emprunteur au paiement du solde restant dû, le tribunal d'instance de Charenton, par un jugement contradictoire rendu le 30 juillet 2019 auquel il convient de se reporter, a :

- annulé le contrat de crédit,

- condamné M. [N] à payer à la société Mercedes-Benz Financial Services France la somme de 17 822,51 euros, outre les intérêts au taux légal à compter de la signification du jugement,

- débouté les parties de leurs autres demandes.

Le tribunal a retenu que le prêteur avait débloqué les fonds le 26 août 2016, soit avant l'expiration du délai de 7 jours prévu par l'article L. 311-12 et suivants du code de la consommation.

Par une déclaration en date du 27 novembre 2019, la société Mercedes-Benz Financial Services France a relevé appel de cette décision.

Aux termes de conclusions remises le 28 janvier 2021, elle demande à la cour :

- de réformer le jugement en toutes ses dispositions,

- de dire que le contrat de crédit souscrit le 26 août 2016 par M. [N] est valable,

- de condamner M. [N] à lui payer la somme de 20 924,91 euros TTC,

- à titre subsidiaire, d'ordonner la restitution du véhicule entre les mains de la société Mercedes-Benz Financial Services France,

- de condamner M. [N] à restituer le véhicule sous peine d'une astreinte de 500 euros par jour de retard,

- de l'autoriser à appréhender le véhicule en tous lieux et en toutes mains, où qu'il se trouve,

- de condamner M. [N] à lui payer la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

L'appelante rappelle qu'aux termes des articles L. 311-35 et L. 311-36 du code de la consommation, l'emprunteur peut renoncer au bénéfice du délai légal de rétractation, indique que tel a été le souhait de l'intimé puis relève que le véhicule a bien été livré à l'expiration du délai de rétractation.

Par des conclusions remises le 22 juillet 2020, M. [N] demande à la cour de confirmer le jugement en toutes ses dispositions et de débouter l'appelante de toutes ses demandes, plus amples ou contraires.

L'intimé soutient que le décaissement des fonds a été sollicité le jour de la signature des contrats de vente et de crédit affecté, en violation des dispositions des articles L. 311-12 et L. 311-14 du code de la consommation. Il indique que la livraison du véhicule a été antidatée, est intervenue le 7 septembre et non le 2 septembre et relève au surplus l'illisibilité de l'offre de crédit qui ne respecte pas les prescriptions de l'article L. 211-1 du même code.

Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions des parties, il est renvoyé aux écritures de celles-ci conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 8 mars 2022 et l'affaire a été appelée à l'audience le 20 avril 2022.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Le contrat ayant été conclu le 26 août 2016, il est fait application des dispositions du code de la consommation dans leur rédaction postérieure à l'entrée en vigueur de la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010 et postérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016.

L'article L. 141-4 devenu R. 632-1 du code de la consommation dispose que le juge peut relever d'office toutes les dispositions du présent code dans les litiges nés de son application.

Il incombe au prêteur de rapporter la preuve de ce qu'il a satisfait à ses obligations précontractuelles et d'établir qu'il a satisfait aux formalités d'ordre public prescrites par le code de la consommation.

Sur la recevabilité de la demande

'''''''''''En application de l'article 125 du code de procédure civile, il appartient au juge saisi d'une demande en paiement de vérifier d'office même en dehors de toute contestation sur ce point et même en cas de non-comparution du défendeur que l'action du prêteur s'inscrit bien dans ce délai.

'

''''''''''Aux termes de l'article R. 312-35 du code de la consommation, les actions en paiement engagées devant le tribunal d'instance à l'occasion de la défaillance de l'emprunteur, doivent être formées dans les deux ans de l'événement qui leur a donné naissance à peine de forclusion. Cet événement est notamment caractérisé par le non-paiement des sommes dues à la suite de la résiliation du contrat ou de son terme ou le premier incident de paiement non régularisé.

'''''''''''En l'espèce, il ressort de l'historique du compte de M. [N] que celui-ci a cessé d'honorer les échéances à compter du 1er juin 2017.

''

'''''''''Ayant fait assigner le débiteur par un acte délivré le 17 février 2019, la société Mercedes-Benz a agi dans un délai utile. Son action est recevable.

Sur la validité de la mise à disposition des fonds

Aux termes de l'article L. 312-19 du code de la consommation dans sa version applicable au contrat, l'emprunteur peut se rétracter sans motifs dans un délai de quatorze jours calendaires révolus à compter du jour de l'acceptation de l'offre de contrat de crédit.

En application de l'article L. 312-25, pendant un délai de sept jours à compter de l'acceptation du contrat par l'emprunteur, aucun paiement, sous quelque forme et à quelque titre que ce soit, ne peut être fait pas le prêteur à l'emprunteur ou pour le compte de celui-ci, ni par l'emprunteur au prêteur.

Il est admis que le consommateur ne peut renoncer au bénéfice de ces dispositions qui sont d'ordre public.

Ainsi, pendant un délai de sept jours, aucun paiement sous quelque forme que ce soit, ne peut être fait par le prêteur à l'emprunteur. Une remise prématurée des fonds a nécessairement pour conséquence une atteinte à la faculté de rétractation et, ce faisant, une atteinte à la liberté de consentement du consommateur.

La méconnaissance des dispositions de l'article L. 312-25 est sanctionnée non seulement pénalement, mais également par la nullité du contrat de crédit en vertu de l'article 6 du code civil laquelle peut être relevée d'office.

En l'espèce, M. [N] a accepté l'offre préalable le 26 août 2016 de sorte que le délai légal de sept jours de l'article L. 312-25 expirait le 2 septembre 2016 à 24 heures.

Pour s'opposer au jugement, l'appelante fait valoir qu'elle a respecté ses obligations puisque M. [N] a expressément renoncé à bénéficier du délai légal de rétractation pour être livré immédiatement, qu'il a signé le procès-verbal de réception du véhicule le 2 septembre 2016 et qu'il a remboursé la première échéance du crédit le 1er octobre 2016.

M. [N] soutient de son côté que la livraison n'a pas eu lieu le 2 mais le 7 septembre comme le prouve le mel adressé le 6 septembre 2016 à 14h10 par le vendeur du véhicule lui indiquant : « Veuillez trouver ci-joint la carte grise provisoire de votre nouvelle smart. À demain 15h pour la livraison ». La carte grise provisoire étant datée du 5 septembre 2016.

Néanmoins, il n'est pas contestable que M. [N] et le fournisseur du véhicule ont tous deux signé le procès-verbal de livraison le 2 septembre 2016 et que la facture du véhicule a été établie au 2 septembre 2016. Il n'y a donc pas lieu de mettre en doute la date de livraison au 2 septembre.

De la même façon, l'appelante justifie sans être contestée que M. [N] a, le jour de la signature du contrat, expressément demandé à être livré immédiatement et a accepté que le délai de rétractation de 14 jours soit réduit et arrive à échéance à la date de livraison, sans pouvoir être intérieur à trois jours.

Cette faculté de livraison immédiate avec réduction du délai de rétractation est expressément prévue à l'article L. 312-47 qui concerne les crédits affectés.

Si l'emprunteur a manifestement respecté ses obligations au regard des textes susvisés, la question se pose au regard des obligations du prêteur.

En effet, la demande de livraison immédiate avec réduction du délai de rétractation n'exclut pas l'application du principe d'interdiction de tout paiement, sous quelque forme et à quelque titre que ce soit durant une durée de sept jours imposé au prêteur par l'article L. 312-25.

En l'espèce, la cour constate que l'appelante n'a pas produit en appel de justificatif du déblocage des fonds au profit du vendeur.

Néanmoins, il ressort du tableau d'amortissement établi le 15 octobre 2018, qu'il y est mentionné une date de mise en financement au 2 septembre 2016.

À cette date, M. [N] était encore en mesure de faire usage de son droit de rétractation et la mise à disposition des fonds ne pouvait donc valablement intervenir avant le 3 septembre 0 heure.

C'est donc à juste titre que le premier juge a considéré qu'il y avait eu une mise à disposition prématurée des fonds.

Partant, en l'absence de contestation sur le quantum, le jugement est confirmé en ce qu'il a prononcé l'annulation du contrat de crédit et en ce qu'il a condamné M. [N] à payer à la société Mercedes-Benz la somme de 17 822,51 euros, outre les intérêts au taux légal à compter de la signification du jugement.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant après débats en audience publique, par décision contradictoire mise à disposition au greffe, rendue en dernier ressort,

Confirme le jugement en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant,

Condamne la société Mercedes-Benz Financial Services France aux dépens d'appel ;

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile.

La greffièreLe président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 9 - a
Numéro d'arrêt : 19/21820
Date de la décision : 23/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-23;19.21820 ?
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