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23/06/2022 | FRANCE | N°19/18456

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 9 - a, 23 juin 2022, 19/18456


Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 9 - A



ARRÊT DU 23 JUIN 2022



(n° , 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/18456 - N° Portalis 35L7-V-B7D-CAXMW



Décision déférée à la Cour : Jugement du 29 avril 2019 - Tribunal d'Instance de BOBIGNY - RG n° 11-18-002776





APPELANTE



La société DOMOFINANCE, société anonyme à conse

il d'administration, prise en la personne de son représentant légal, domicilié ès-qualités audit siège

N° SIRET : 450 275 490 00057

[Adresse 1]

[Localité 4]



représentée et assistée d...

Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 9 - A

ARRÊT DU 23 JUIN 2022

(n° , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/18456 - N° Portalis 35L7-V-B7D-CAXMW

Décision déférée à la Cour : Jugement du 29 avril 2019 - Tribunal d'Instance de BOBIGNY - RG n° 11-18-002776

APPELANTE

La société DOMOFINANCE, société anonyme à conseil d'administration, prise en la personne de son représentant légal, domicilié ès-qualités audit siège

N° SIRET : 450 275 490 00057

[Adresse 1]

[Localité 4]

représentée et assistée de Me Sébastien MENDES GIL de la SELAS CLOIX & MENDES-GIL, avocat au barreau de PARIS, toque : P0173

INTIMÉ

Monsieur [S] [U]

né le [Date naissance 2] 1965 à [Localité 6] (INDE)

[Adresse 3]

[Localité 5]

DÉFAILLANT

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 10 mai 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Laurence ARBELLOT, Conseillère chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. Christophe BACONNIER, Président de chambre

Mme Fabienne TROUILLER, Conseillère

Mme Laurence ARBELLOT, Conseillère

Greffière, lors des débats : Mme Ophanie KERLOC'H

ARRÊT :

- RÉPUTÉ CONTRADICTOIRE

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Christophe BACONNIER, président et par Camille LEPAGE, greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Par acte sous seing privé du 15 avril 2010, M. [S] [U] a contracté auprès de la société Domofinance un prêt accessoire à la vente d'une pompe à chaleur, d'un montant de 18 000 euros, remboursable en 144 mensualités de 173,68 euros chacune hors assurance moyennant un taux d'intérêts contractuel annuel de 5,37 %.

A la suite d'impayés, la société Domofinance s'est prévalue de la déchéance du terme du contrat.

Saisi le 7 novembre 2018 par la société Domofinance d'une demande tendant à la condamnation de l'emprunteur au paiement du solde restant dû au titre du contrat, le tribunal d'instance de Bobigny, par un jugement réputé contradictoire rendu le 29 avril 2019 auquel il convient de se reporter, a :

- prononcé la déchéance du droit aux intérêts contractuels,

- condamné M. [U] à payer à la société Domofinance la somme de 3 798,65 euros sous déduction à venir des intérêts au taux légal dus par le prêteur,

- dit que la somme due par M. [U] sera réduite du montant des intérêts au taux légal sur les intérêts perçus par le prêteur à compter du jour de leur versement, à charge pour la société Domofinance de procéder à ce calcul,

- ordonné l'exécution provisoire de la décision.

Après avoir contrôlé la recevabilité de l'action, le tribunal a relevé que l'offre de crédit ne mentionnait pas l'identité du vendeur alors que cette mention est exigée par l'article R. 311-6 du code de la consommation. Il a considéré que le prêteur n'établissait pas avoir remis à l'emprunteur un bordereau de rétractation conforme aux prescriptions du code de la consommation, la simple reconnaissance de la remise par une clause type du contrat ne suffisant pas à l'établir. Il a donc conclu à la déchéance de la banque de son droit aux intérêts contractuels.

Par une déclaration remise le 1er octobre 2019, la société Domofinance a relevé appel de cette décision.

Aux termes de conclusions récapitulatives remises le 21 mars 2022, l'appelante demande à la cour :

- d'infirmer en toutes ses dispositions le jugement dont appel,

- de déclarer le moyen tiré de la déchéance du droit aux intérêts irrecevable comme prescrit, ou subsidiairement de dire que celle-ci n'est pas encourue,

- de condamner M. [U] à lui payer la somme de 11 361,51 euros outre intérêts au taux contractuel de 5,37 % l'an à compter du 4 septembre 2017 sur la somme de 10 589,78 euros et au taux légal pour le surplus en remboursement du crédit,

- subsidiairement, en cas de déchéance du droit aux intérêts contractuels, de condamner M. [U] à lui payer la somme de 4 993,58 euros avec intérêts au taux légal à compter du 4 septembre 2017,

- de condamner M. [U] à lui payer la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre les dépens.

L'appelante soutient au visa des articles L. 110-4 du code de commerce et 2222 du code civil que le moyen tiré de la déchéance du droit aux intérêts est irrecevable comme prescrit en ce qu'il aurait dû être soulevé avant le 15 avril 2015 alors que le tribunal l'a soulevé à l'audience du 5 mars 2019.

Subsidiairement elle soutient que l'offre de prêt est conforme aux prescriptions du code de la consommation et relève que le nom du vendeur n'est pas tenu d'y figurer à peine de déchéance du droit aux intérêts contractuels.

Elle fait valoir au visa de l'article L. 311-12 du code de la consommation que le bordereau de rétractation ne fait pas partie de l'offre préalable mais y est joint, de sorte que la règle du double exemplaire ne s'applique pas. Elle indique que la reconnaissance par l'emprunteur de la remise de ce bordereau suffit à prouver la survenance de ce fait juridique et permet de présumer de sa régularité au regard des dispositions de l'article R. 311-7 du même code.

L'appelante indique verser aux débats un exemplaire vierge emprunteur corroborant la clause et comprenant le bordereau litigieux.

Régulièrement assigné par acte d'huissier délivré à personne le 18 décembre 2019, M. [U] n'a pas constitué avocat.

Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions de l'appelante, il est renvoyé aux écritures de celle-ci conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 19 avril 2022 et l'affaire a été appelée à l'audience du 10 mai 2022.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Il résulte de l'article 954 dernier alinéa du code de procédure civile que la partie qui ne conclut pas ou qui, sans énoncer de nouveaux moyens, demande la confirmation du jugement est réputée s'en approprier les motifs.

Le contrat ayant été accepté le 15 avril 2010, il convient de faire application des dispositions du code de la consommation dans leur rédaction antérieure à l'entrée en vigueur de la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010.

La recevabilité de l'action de la société Domofinance vérifiée par le premier juge ne fait l'objet d'aucune contestation de sorte que le jugement doit être confirmé sur ce point.

Sur la prescription du moyen tiré de l'irrégularité de l'offre préalable

La prescription est sans effet sur l'invocation d'un moyen qui tend non pas à l'octroi d'un avantage, mais seulement à mettre en échec une prétention adverse.

C'est ainsi que, défendant à une action en paiement du solde d'un crédit à la consommation, l'emprunteur peut opposer tout moyen tendant à faire rejeter tout ou partie des prétentions du créancier par application d'une disposition du code de la consommation prévoyant la déchéance du droit aux intérêts, sans se voir opposer la prescription, pour autant qu'il n'entende pas en obtenir un autre avantage tel le remboursement d'intérêts indûment acquittés.

Dans le rôle qui lui est conféré tant par l'article L. 141-4 (devenu R. 632-1) du code de la consommation que par le droit européen, le juge peut relever d'office, sans être enfermé dans un quelconque délai, toute irrégularité qui heurte une disposition d'ordre public de ce code.

En l'espèce, le moyen soulevé d'office par le tribunal d'instance et susceptible de priver le prêteur de son droit aux intérêts contractuels n'a pas pour effet de conférer à l'emprunteur un avantage autre qu'une minoration de la créance dont la société Domofinance poursuit le paiement.

Loin de constituer un remboursement des intérêts acquittés par le jeu d'une compensation qui supposerait une condamnation -qui n'est pas demandée- de l'organisme de crédit à payer une dette réciproque, ces moyens ne peuvent avoir pour seul effet que de modifier l'imputation des paiements faits par l'emprunteur.

En conséquence, il convient d'écarter la fin de non-recevoir soulevée par la société Domofinance.

Sur la déchéance du droit aux intérêts contractuels

Pour prononcer la déchéance du droit aux intérêts contractuels, le premier juge a relevé que l'offre ne mentionnait pas l'identité du vendeur et qu'il n'était pas en mesure de contrôler la régularité du formulaire de rétractation non produit.

Aux termes des dispositions de l'article L. 311-33 du code de la consommation en leur version applicable au contrat, le prêteur qui accorde un crédit sans saisir l'emprunteur d'une offre préalable satisfaisant aux conditions fixées par les articles L. 311-8 à L. 311-13 du même code est déchu de son droit aux intérêts.

L'article L. 311-10 dudit code dispose que l'offre préalable doit mentionner notamment l'identité des parties et des cautions (1°) et le cas échéant le bien ou la prestation de service financé (4°).

En l'espèce, le contrat de crédit signé par M. [U] mentionne expressément le nom de l'organisme prêteur et de l'emprunteur et qu'il est destiné à financer les achats ou prestations de services suivants : « PAC AIR EAU ». Ces mentions sont conformes aux exigences textuelles légales susvisées sanctionnées par la déchéance du droit aux intérêts, qui n'imposent pas qu'apparaisse l'identité du vendeur.

Les dispositions de l'article L. 311-15 en leur version applicable au litige prévoient que lorsque l'offre préalable ne comporte aucune clause selon laquelle le prêteur se réserve le droit d'agréer la personne de l'emprunteur, le contrat devient parfait dès l'acceptation de l'offre préalable par l'emprunteur. Toutefois, l'emprunteur peut, dans un délai de sept jours à compter de son acceptation de l'offre, revenir sur son engagement. Pour permettre l'exercice de cette faculté de rétractation, un formulaire détachable est joint à l'offre préalable. L'exercice par l'emprunteur de sa faculté de rétractation ne peut donner lieu à enregistrement sur un fichier.

L'article R. 311-7 du même code impose que le formulaire détachable de rétractation prévu à l'article L. 311-15 soit établi conformément au modèle type joint en annexe.

L'offre de contrat communiquée est dépourvue de formulaire de rétractation privant la cour de tout contrôle quant à sa réalité et sa régularité.

En signant l'offre de crédit, M. [U] a validé la clause se situant juste au-dessus de sa signature dans un encadré, aux termes de laquelle il indique « Après avoir pris connaissance des conditions particulières et générales de l'offre et de la notice comportant les extraits des conditions générales de l'assurance, je reconnais rester en possession d'un exemplaire de cette offre doté d'un formulaire détachable de rétractation et de la notice d'assurance (') ».

Cette clause est toutefois insuffisante à prouver la remise d'un bordereau de rétractation conforme et ne constitue qu'un indice susceptible d'être complété par d'autres éléments. La production d'un exemplaire vierge du pack contractuel emprunteur, non daté et non signé, dans une version correspondant à celle de l'offre de crédit signée par M. [U] comprenant un bordereau de rétractation conforme au modèle-type annexé à l'article R. 311-7 se révèle insuffisante à établir cette remise.

Il s'ensuit que c'est à juste titre que le premier juge a prononcé la déchéance du droit aux intérêts sur ce fondement. Le jugement est confirmé de ce chef.

Sur la demande en paiement

La société Domofinance produit au soutien de sa demande :

- l'offre préalable de crédit acceptée le 15 avril 2010,

- la notice d'assurance,

- la fiche ressources et charges et les éléments d'identité et de solvabilité de l'emprunteur,

- l'attestation de livraison du vendeur établie le 2 juin 2010,

- le tableau d'amortissement du prêt,

- un historique de compte,

- un décompte de créance.

Pour fonder sa demande de paiement, l'appelante justifie de l'envoi à l'emprunteur le 11 août 2017 d'un courrier recommandé de mise en demeure exigeant le règlement sous 10 jours des sommes impayées à hauteur de 1 003,42 euros, à défaut, la déchéance du terme du contrat sera acquise. Un courrier recommandé du 4 septembre 2017 a porté à la connaissance de M. [U] la déchéance du terme du contrat et le met en demeure de régler la somme de 11 361,51 euros.

C'est donc de manière légitime que la société Domofinance se prévaut de l'exigibilité des sommes dues et de la déchéance du terme du contrat.

En application de l'article L. 311-33 du code de la consommation, le prêteur qui accorde un crédit sans saisir l'emprunteur d'une offre préalable satisfaisant aux conditions fixées par les articles L. 311-8 à L. 311-13 est déchu du droit aux intérêts et l'emprunteur n'est tenu qu'au seul remboursement du capital suivant l'échéancier prévu. Les sommes perçues au titre des intérêts, qui sont productives d'intérêts au taux légal à compter du jour de leur versement, seront restituées par le prêteur ou imputées sur le capital restant dû.

Au vu des pièces justificatives produites, il convient de confirmer le jugement en ce qu'il a fixé la créance de la société Domofinance à la somme de 3 798,65 euros (capital emprunté 18 000 euros ' versements effectués 14 201,35 euros), le surplus des demandes liées aux cotisations d'assurance étant rejeté à défaut de justificatif d'un mandat de la compagnie d'assurance.

Le surplus des demandes est rejeté.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant en dernier ressort, après débats en audience publique, par arrêt réputé contradictoire, par décision mise à disposition au greffe,

Rejette la fin de non-recevoir ;

Confirme le jugement ;

Y ajoutant,

Déboute la société Domofinance du surplus de ses demandes ;

Condamne la société Domofinance aux dépens d'appel ;

Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

La greffièreLe président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 9 - a
Numéro d'arrêt : 19/18456
Date de la décision : 23/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-23;19.18456 ?
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