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21/06/2022 | FRANCE | N°19/19336

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 4, 21 juin 2022, 19/19336


RÉPUBLIQUE FRAN'AISE

AU NOM DU PEUPLE FRAN'AIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 4 - Chambre 4



ARRÊT DU 21 JUIN 2022



(n° , 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/19336 - N° Portalis 35L7-V-B7D-CA2LX



Décision déférée à la Cour : Jugement du 29 Août 2019 -Tribunal de Grande Instance de d'EVRY RG n° 16/01987





APPELANTE



SCI DES MARAIS

agissant poursuites et diligences de son gérant domicilié en cette quali

té audit siège

[Adresse 1]

[Localité 2]



Représentée par Me Marie-Hélène DUJARDIN, avocat postualant au barreau de Paris, toque : D2153



Ayant pour avocat plaidant Me Christelle CAPLOT, ...

RÉPUBLIQUE FRAN'AISE

AU NOM DU PEUPLE FRAN'AIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 4

ARRÊT DU 21 JUIN 2022

(n° , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/19336 - N° Portalis 35L7-V-B7D-CA2LX

Décision déférée à la Cour : Jugement du 29 Août 2019 -Tribunal de Grande Instance de d'EVRY RG n° 16/01987

APPELANTE

SCI DES MARAIS

agissant poursuites et diligences de son gérant domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentée par Me Marie-Hélène DUJARDIN, avocat postualant au barreau de Paris, toque : D2153

Ayant pour avocat plaidant Me Christelle CAPLOT, avocat au barreau de l'Essonne

INTIMEE

Association CROIX ROUGE FRANÇAISE

Prise en la personne de son Président domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 4]

[Localité 3]

Représentée par Me Jean-Philippe AUTIER, avocat postulant au barreau de Paris, toque: L0053

Ayant pour avocat plaidant Me Amélie VATIER, avocat au barreau de Paris, toque : R280

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 17 Mai 2022, en audience publique, devant la Cour composée de :

M. Michel CHALACHIN, Président de chambre

Mme Marie MONGIN, Conseillère

M. François BOUYX, Conseiller

qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l'audience par Monsieur [N] dans les conditions prévues par l'article 804 du code de procédure civile.

Greffier, lors des débats : Mme Cynthia GESTY

ARRET : contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par M. Michel CHALACHIN, Président de chambre et par Mme Cynthia GESTY, Greffière, présente lors de la mise à disposition.

*****

FAITS ET PROCÉDURE

L'association Croix-Rouge française a pris à bail plusieurs chambres situées dans un hôtel appartenant à la société civile immobilière du Marais et situé au [Adresse 1]) avec pour objectif de les sous-louer à des personnes en difficulté.

Par acte d'huissier du 28 janvier 2015, la société des Marais a fait assigner la Croix-Rouge française devant le tribunal de grande instance d'Évry afin d'obtenir paiement, à titre principal, de la somme de 215 330 euros au titre des loyers et charges impayés, outre 636 527,83 euros au titre des dépenses engagées pour restaurer les locaux et 85 413,29 euros en réparation des dégradations commises par les sous-locataires.

Par jugement du 29 août 2019, cette juridiction a ainsi statué :

Dit n'y avoir lieu à écarter des débats la pièce n°1 de la société des Marais,

Condamne la Croix-Rouge française à payer à la société des Marais la somme de 25 830 euros au titre du loyer du mois de septembre 2013,

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la Croix-Rouge française aux dépens, avec distraction au profit de l'avocat qui en a fait la demande,

Ordonne l'exécution provisoire de la présente décision,

Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

Le 16 octobre 2019, la société des Marais a interjeté appel de cette décision par déclaration reçue au greffe par la voie électronique.

Par conclusions notifiées par la voie électronique le 13 avril 2022, elle demande à la cour de :

- confirmer le jugement rendu par le tribunal de grande d'instance d'Évry en ce qu'il a condamné la Croix-Rouge française à lui payer la somme de 25 830 euros au titre des loyers du mois de septembre 2013,

- infirmer le jugement pour le surplus et en conséquence,

- condamner la Croix-Rouge française à lui payer la somme de 189 500 euros à titre des charges impayées,

- la condamner à lui payer la somme de 636 527,83 euros au titre des dommages et intérêts pour dépenses engagées pour la restauration et l'amélioration des locaux du bail,

- condamner la Croix-Rouge française à lui payer la somme de 85 413,29 euros à titre de dommages et intérêts en réparation des dégradations commises par les sous-locataires de la Croix-Rouge française.

- reconventionnellement, débouter la Croix-Rouge française de l'ensemble de ses demandes reconventionnelles,

- en tout état de cause, condamner la Croix-Rouge française à payer la somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la Croix-Rouge française aux entiers dépens.

Par conclusions notifiées par la voie électronique le 4 avril 2022, la Croix-Rouge française demande à la cour de :

- infirmer le jugement du tribunal de grande instance d'Évry en ce qu'il a jugé que le bail du 1er août 2009 faisait foi entre les parties,

- en conséquence, écarter la nouvelle pièce adverse 1 des débats,

- dire et juger qu'elle n'est débitrice d'aucun arriéré de charges,

- subsidiairement, confirmer le jugement en ce qu'il a débouté la société des Marais de sa demande de paiement de charges au motif qu'elles ne sont pas justifiées,

- infirmer le jugement du tribunal de grande instance d'Évry en ce qu'il l'a condamnée au paiement du loyer de septembre qui avait déjà été réglé,

- en conséquence, condamner la société des Marais à lui rembourser la somme de 25 830 euros, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard à compter de la signification de l'arrêt à intervenir,

- infirmer le jugement en ce qu'il l'a condamnée au paiement des dépens,

- confirmer le jugement pour le surplus,

- en conséquence, dire et juger qu'elle n'a commis aucune faute dans l'exercice de son droit de résiliation,

- dire et juger que la société des Marais ne rapporte pas la preuve de la réalité de dégradations commises par les sous-locataires ou pendant la durée des baux consentis à la Croix-Rouge française,

- dire et juger que la société des Marais ne justifie d'aucun préjudice,

- subsidiairement, dire et juger que la société des Marais est prescrite pour toute action portant sur des réclamations de charges échues antérieurement au 28 janvier 2010,

- condamner la société des Marais à lui payer la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- la condamner aux entiers dépens, en ce compris les dépens de première instance, qui seront recouvrés selon les formes prescrites à l'article 699 du code de procédure civile,

L'ordonnance de clôture a été rendue le 19 avril 2022.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur les dispositions contractuelles applicables

La société des Marais fonde ses demandes en paiement sur un contrat du 1er août 2009 prévoyant le paiement d'un loyer mensuel de 40 euros TTC par chambre et par jour outre les charges (eau, électricité, entretien), la participation aux frais de gardiennage dans la proportion de 2 500 euros hors taxe ainsi qu'un préavis de trois mois pour donner congé, la durée du bail étant d'un an renouvelable à compter du jour de sa signature.

La Croix-Rouge française rétorque qu'il s'agit d'un faux grossier, la société des Marais ayant d'abord reconnu qu'il n'était pas signé de son cocontractant pour ensuite produire le document litigieux revêtu d'une signature illisible qui est un copié-collé de celle qui figure sur l'un des 21 baux signés le 1er janvier 2009 qui, eux seuls, engagent les parties, ces derniers prévoyant un loyer de 1 500 euros TTC, mais aucune charge, et un préavis de trois mois pour donner congé, la durée du bail étant d'un an renouvelable à compter du jour de sa signature.

Elle demande que la convention du 1er août 2009 soit en conséquence écartée des débats, ce que le tribunal a refusé de faire, jugeant que la signature figurant sur le contrat litigieux était identique à celles portées sur les conventions du 1er janvier 2009.

La cour observe que, malgré la sommation délivrée par sa contradictrice, la société des Marais ne produit qu'une copie du contrat de bail du 1er août 2009, de sorte qu'il est impossible de vérifier qu'il s'agit, ou non, d'un montage, le tampon et la signature du représentant de l'association Croix-Rouge française pouvant tout autant avoir été apposés spontanément ou copié-collé de façon frauduleuse.

Par ailleurs, elle a reconnu dans ses conclusions de première instance que le bail 'bien que non signé par les parties... a (avait) été accepté par les parties', pour ensuite indiquer que le gérant l'avait retrouvé fortuitement en vidant sa cave à la suite des inondations du printemps 2018, soit plus de 9 ans après sa signature et dans le cadre de la procédure judiciaire.

Lorsque la locataire a donné congé, elle a visé les 21 baux du 1er janvier 2009 et non le bail du 1er août 2009 lequel, au contraire des premiers, n'est pas paraphé.

Il résulte de ces éléments que seul les contrats du 1er janvier 2009 font foi entre les parties, le jugement étant infirmé en ce sens sans qu'il soit cependant nécessaire d'écarter des débats la pièce n°1 constituée par le contrat du 1er août 2009.

Sur le loyer de septembre 2013 et les charges locatives

La Croix-Rouge française conteste à juste titre devoir le loyer de septembre 2013 puisqu'elle en justifie le versement en produisant l'extrait de son compte bancaire faisant apparaître au débit le montant d'un chèque de 32 354,14 euros correspondant pour partie au montant du loyer litigieux s'élevant à 25 830 euros au titre de la facture n° 118/0913 étant observé que cette somme lui a été, à tort, réclamée à nouveau selon facture n° 119/0913.

La décision du premier juge, qui ne disposait que de la copie du chèque n° 8052 du 5 septembre 2013, sera infirmée en ce que l'intimée a été condamnée à régler la somme de 25 830 euros.

La Croix-Rouge française n'est cependant pas fondée à demander le remboursement de cette somme, l'ayant réglée deux fois compte tenu de l'exécution provisoire attachée au jugement critiqué, l'infirmation prononcée entraînant en elle-même obligation à restitution.

Elle conteste encore justement devoir les charges arrêtées à la somme de 189 500 euros TTC au 30 septembre 2013, les conventions du 1er janvier 2009 ne prévoyant pas le versement de charges, étant observé qu'aucune somme ne lui a jamais été ni facturée ni réclamée à ce titre avant 2014.

Le jugement sera donc confirmé sur ce point, étant encore observé, en admettant que l'on retienne l'application du contrat du 1er août 2009, que les charges alléguées au titre de la consommation d'eau et d'électricité et des frais d'entretien ne sont établies par aucun document (factures, relevés de consommation etc...) comme l'a justement indiqué le tribunal pour fonder le rejet de la prétention de la société des Marais.

Sur les travaux d'aménagement réalisés dans l'immeuble

La société des Marais réclame paiement de la somme de 636 527,83 euros au titre de l'aménagement de 11 chambres supplémentaires sollicité par sa locataire, laquelle a abusivement mis un terme au contrat les unissant quatre ans seulement après sa signature, manquant ainsi à l'obligation de bonne foi contractuelle en lui faisant supporter une charge financière considérable ayant pour effet de rompre l'équilibre contractuel.

Cependant, la Croix-Rouge française rétorque à juste titre :

- qu'elle a n'a jamais demandé la réalisation des travaux litigieux, la lettre du 7 août 2007 sur laquelle se fonde l'appelante manifestant uniquement son intérêt pour la location de l'ensemble de l'hôtel en ce compris 11 nouvelles chambres,

- que le coût des travaux n'est pas justifié, aucune facture n'étant versée aux débats, pas plus que ne l'est le lien causal des prêts souscrits par la bailleresse en 2005, 2006 et 2012 avec les baux litigieux, seuls les tableaux d'amortissement étant produits, ce qui ne permet pas de s'assurer de la destination du financement accordé par la banque, étant précisé que l'on ne voit pas en quoi le prêt souscrit en 2012 pour 460 000 euros pourrait avoir un lien quelconque avec les baux signés trois ans auparavant,

- qu'ils ont été effectués dans le cadre de l'obligation de délivrance incombant au bailleur.

La locataire a également exécuté de bonne foi et sans abus les conventions en sollicitant la résiliation des baux conformément aux dispositions contractuelles, dispositions dont les termes ont été fixés d'un commun accord.

La cour observe en outre que les travaux n'ont pas été réalisés en pure perte comme le soutient à tort la société du Marais puisqu'ils ont nécessairement augmenté la valeur vénale de l'immeuble lui appartenant et qu'ils lui permettent de louer 11 chambres supplémentaires à d'autres partenaires ou clients.

C'est donc à bon droit que la demande indemnitaire de l'appelante a été rejetée par le tribunal.

Sur les dommages causés par les sous-locataires

La société des Marais réclame paiement de la somme de 85 413,29 euros sur le fondement de l'article 1735 du code civil en réparation des dégâts commis par les occupants des chambres données à bail par la locataire et de l'indisponibilité des lieux pendant la durée des travaux de reprises des dégradations.

La Croix Rouge française conteste cependant à juste titre la réalité des dégradations, de simples photographies, non datées, non contradictoires, et dont on ignore même si elles ont été prises dans l'hôtel, ne suffisant pas à en rapporter la preuve, la demande en paiement étant en outre formée deux ans après la restitution des chambres alors que l'état des lieux de sortie contradictoire, 'obligatoirement dressé', dans lequel doivent être consignés les frais de réparation et de remise en état de chaque local en vertu de l'article IV des baux litigieux, n'a pas été réalisé.

Enfin, l'indisponibilité des lieux pendant deux mois n'est établie en aucune façon.

C'est donc à bon droit que la demande indemnitaire formée par la société des Marais a été rejetée par le tribunal.

Sur les autres demandes

Il est équitable d'allouer à la Croix Rouge française somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et la société des Marais, qui succombe en son appel, sera condamnée aux dépens.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par mise à disposition au greffe, contradictoirement,

Infirme le jugement entrepris sauf en ce qu'il a dit n'y avoir lieu à écarter des débats la pièce n°1 de la société des Marais, rejeté les demandes indemnitaires de la société des Marais ainsi que sa demande en paiement de charges locatives, et ordonné l'exécution provisoire de la décision,

Statuant à nouveau dans la limite de l'infirmation partielle et y ajoutant :

Rejette la demande de la société des Marais tendant au paiement de la somme de 25 830 euros au titre du loyer de septembre 2013,

Condamne la société des Marais à verser à l'association Croix-Rouge française la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Déboute les parties de leurs prétentions plus amples ou contraires,

Condamne la société des Marais aux dépens de première instance et d'appel lesquels pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Le greffier, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 4
Numéro d'arrêt : 19/19336
Date de la décision : 21/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-21;19.19336 ?
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