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16/06/2022 | FRANCE | N°19/21333

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 9 - a, 16 juin 2022, 19/21333


Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 9 - A



ARRÊT DU 16 JUIN 2022



(n° , 7 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/21333 - N° Portalis 35L7-V-B7D-CBARU



Décision déférée à la Cour : Jugement du 3 octobre 2019 - Tribunal d'Instance de PARIS - RG n° 11-19-007181





APPELANTE



La SARL ARTPLUS agissant en la personne de ses représentants

légaux domiciliés en cette qualité audit siège

N° SIRET : 532 091 949 00018

[Adresse 1]

[Localité 4]



représentée par Me Nathalie LESENECHAL, avocat au barreau de PARIS, to...

Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 9 - A

ARRÊT DU 16 JUIN 2022

(n° , 7 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/21333 - N° Portalis 35L7-V-B7D-CBARU

Décision déférée à la Cour : Jugement du 3 octobre 2019 - Tribunal d'Instance de PARIS - RG n° 11-19-007181

APPELANTE

La SARL ARTPLUS agissant en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

N° SIRET : 532 091 949 00018

[Adresse 1]

[Localité 4]

représentée par Me Nathalie LESENECHAL, avocat au barreau de PARIS, toque : D2090, assistée de Me Olivier LHOMME de la SELARL LHOMME OLIVIER, avocat au barreau de VERSAILLES, toque : 489

substitué à l'audience par Me Sébastien CROMBEZ, avocat au barreau de VERSAILLES, toque : 61

INTIMÉE

Madame [Y] [D]

[Adresse 2]

[Localité 3]

représentée par Me Christophe BORÉ de la SELARL A.K.P.R., avocat au barreau de VAL-DE-MARNE, toque : PC 19

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 13 avril 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Fabienne TROUILLER, Conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. Christophe BACONNIER, Président de chambre

Mme Fabienne TROUILLER, Conseillère

Mme Laurence ARBELLOT, Conseillère

Greffière, lors des débats : Mme Camille LEPAGE

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par M. Christophe BACONNIER, Président et par Mme Camille LEPAGE, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Suivant devis d'un montant de 32 157,40 euros accepté et signé le 8 mars 2017, Mme [Y] [D], accompagnée de Mme [K] de la société Or et Beton, architecte d'intérieur, a confié à la société Artplus la réalisation de travaux de rénovation entre le 15 mars et le 29 mai 2017.

Mme [D] a payé une somme totale de 25 725,92 euros et a refusé de régler le solde des travaux d'un montant de 6 431,48 euros ainsi que les travaux supplémentaires d'un montant de 1 403,17 euros.

Deux procès-verbaux de réception des travaux ont été dressés le 31 mai 2017. De nombreuses réserves ont été émises. Mme [D] a réclamé la restitution de ses clés puis a refusé l'accès au chantier pour la levée des réserves.

Estimant que les travaux comportaient des malfaçons et des désordres graves, Mme [D] a effectué une déclaration de sinistre entre les mains de son assureur qui a mandaté M. [L] en qualité d'expert technique. Un rapport a été établi le 10 octobre 2017 après une réunion contradictoire le 26 septembre 2017.

Saisi le 12 mars 2019 par la société Artplus d'une demande tendant principalement à la condamnation de Mme [D] au paiement d'une somme de 6 226,78 euros au titre du solde des travaux, le tribunal d'instance de Paris, par un jugement contradictoire rendu le 3 octobre 2019 auquel il convient de se reporter, a débouté la demanderesse et rejeté la demande d'expertise formulée par la défenderesse.

Le tribunal a principalement retenu que la société Artplus ne justifiait pas de la somme réclamée et que les éléments étaient insuffisants pour ordonner une expertise judiciaire qui ne peut suppléer la carence des parties.

Par une déclaration en date du 19 novembre 2019, la société Artplus a relevé appel de cette décision.

Aux termes de conclusions remises le 24 août 2021, la société Artplus demande à la cour :

- d'infirmer le jugement en toutes ses dispositions,

- de condamner Mme [D] à lui payer sans délai la somme de 6 226,78 euros,

- d'ordonner à Mme [D] de lui permettre d'effectuer les travaux nécessaires à la levée des réserves,

- de condamner Mme [D], une fois les réserves levées, à lui payer la somme de 1 607,87 euros,

- à titre subsidiaire, de désigner un expert lequel aura pour mission de :

- se rendre sur les lieux des travaux exécutés par la société Artplus,

- entendre toutes les parties, ainsi que tout sachant,

- examiner les travaux réalisés par la société Artplus, dire si ces travaux sont conformes aux dispositions contractuelles des parties,

- dans la négative, décrire non-conformités et non-finitions,

- décrire et évaluer les travaux nécessaires pour procéder à la reprise desdites non-conformités et non-finitions,

- proposer un compte entre les parties,

- mettre les parties en mesure de faire valoir leurs observations,

- du tout dresser un rapport qui devra être déposé dans les 6 mois,

- de débouter Mme [D] de toute demande plus ample ou contraire,

- de condamner Mme [D] à lui payer la somme de 3 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

L'appelante soutient que le premier juge a ignoré l'accord intervenu entre les parties, lequel constituait un procès-verbal de réception prévoyant la poursuite des travaux après paiement. Elle relève que les malfaçons dont se prévaut l'intimée ont fait l'objet d'un accord amiable ' une réserve de 5 % sur le prix à payer. La société Artplus soutient que le rapport d'expertise produit par l'intimée n'a pas de force probatoire en ce qu'il n'était pas contradictoire.

Si l'accord invoqué ne suffisait pas à établir le bien-fondé de sa créance, elle demande à ce que soit ordonnée une expertise judiciaire et conteste s'être opposée à une telle mesure en première instance. Elle conteste tout caractère abusif de l'action engagée et souligne la mauvaise foi de l'intimée.

Par des conclusions remises le 12 mai 2020, Mme [D] demande à la cour :

- de confirmer le jugement dont appel en toutes ses dispositions,

- de débouter la société Artplus de ses demandes,

- de condamner la société Artplus à lui payer la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

L'intimée soutient que la société Artplus ne rapporte pas la preuve de sa créance au moyen d'une autre pièce qu'une facture ni même la preuve de la conclusion d'un contrat portant sur des réalisations complémentaires. Elle fait valoir que les factures versées par l'appelante ont été dressées de manière arbitraire, sans qu'elle les ait sollicitées ou acceptées.

Concernant le paiement du solde de la facture établie au titre du devis accepté, l'intimée se prévaut des désordres et malfaçons causés ultérieurement par les travaux, dont le montant excède la réserve de 5 % initialement convenue. Elle soutient que ces désordres lui ont causés d'important préjudices, relève qu'une expertise serait aujourd'hui inutile eu égard au temps écoulé, et se prévaut du rapport établi par M. [L], expert technique désigné par son assureur, pour en établir la matérialité.

Elle soutient que l'appelante a été convoquée à l'expertise en question. Elle fait état d'un préjudice moral causé par cette affaire et ses développements contentieux avant de dénoncer les pratiques douteuses de la société Artplus qui lui a facturé un prix des matériaux bien supérieur à leur coût réel, rendant contestable le solde de la facture présentée tant dans son montant que dans son exigibilité.

Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions des parties, il est renvoyé aux écritures de celles-ci conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 8 mars 2022 et l'affaire a été appelée à l'audience le 13 avril 2022.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la demande en paiement d'une somme de 6 431,48 euros au titre du solde des travaux

L'appelante produit à l'appui de sa demande le devis initial accepté, la facture FA0000784 du 30 mai 2017, les échanges de mails, la LRAR de mise en demeure du 30 juin 2017 et le procès-verbal de réception signé par les deux parties.

Pour s'opposer au paiement, Mme [D] invoque l'existence de réserves mais aussi de désordres et malfaçons dont le montant excéderait largement une garantie limitée à 5 % du prix total des travaux. Elle invoque également des anomalies dans le devis, des surfacturations manifestes et les facturations émises. Elle estime que le solde de la facture, après déduction des surfacturations dénoncées, devait se limiter à la somme de 5 859,48 euros et non 6 431,48 euros.

Elle souligne que l'appelante aurait refusé l'expertise en première instance et qu'une telle expertise ne paraissait plus pouvoir être efficacement ordonnée au regard du temps passé.

En application de l'article 1103 du code civil, dans sa version applicable au litige, les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits. Ils doivent être négociés, formés et exécutés de bonne foi.

Aux termes de l'article 1353 du code civil, celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver, celui qui s'en prétend libéré doit justifier le fait qui a produit l'extinction de son obligation.

Ainsi, la charge de la preuve de l'existence d'un contrat incombe à celui qui s'en prévaut et nul ne peut se constituer une preuve à lui-même.

L'article 9 du code de procédure civile rappelle qu'il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention.

En premier lieu, il convient de relever que seul le procès-verbal de réception produit par l'appelante a été signé par les deux parties. Celui rédigé et produit par Mme [D] et son compagnon n'a pas été signé par l'entrepreneur, ce qui le rend sujet à caution.

Le procès-verbal mentionne trois réserves pour les travaux du salon, trois réserves pour la salle à manger, quatre réserves pour l'entrée et neuf réserves pour la cuisine. S'agissant de la salle de bain, il est mentionné concernant la plomberie qu'un compte-rendu est en attente.

Les parties ont entendu préciser dans le procès-verbal qu'elles convenaient que les travaux nécessités par les réserves exposées seraient réalisés dans un délai à définir une fois le chèque du solde effectué moins 5 % (réserves).

Une lecture des réserves permet de constater qu'il s'agissait de travaux de finition, de nettoyage, de petites réparations ou de retouches de peinture.

Les pièces produites établissent qu'il n'y a pas eu de refus de restitution de clés mais que l'entrepreneur ne les avait pas le jour de la réception. Mme [D] ne conteste pas qu'elle a ensuite refusé l'accès à son appartement pour la levée des réserves.

Ainsi, les parties étaient convenues que le solde des travaux devait être réglé sauf une retenue de 5 % pour les réserves.

Pour s'affranchir de cette obligation, Mme [D] produit un rapport d'expertise diligentée par son assureur et rédigé à la suite d'une réunion organisée contradictoirement le 26 septembre 2017.

L'appelante conteste son caractère contradictoire, soulignant qu'il n'a pas été transmis de pré-rapport pour observations des parties et que l'expert n'a donc pas pu apporter de réponses aux dires des parties.

L'intimée se contente d'affirmer que M. [L] a listé « de nombreux désordres répertoriés 5.1 à 5.15 auxquels il est renvoyé pour leur détail » tout en admettant qu'il n'a pas été en mesure de faire le compte entre les parties.

Un examen attentif de ce rapport n° 2 du 10 octobre 2017 permet de comprendre que la liste effectuée n'a pas été établie en fonction des travaux mentionnés dans le devis initial. Aucune photo exploitable n'a été transmise à la cour. De plus, certains descriptifs de désordres concernent l'état de l'appartement avant la rénovation ou ne concernent pas les travaux et certains travaux auraient été effectués hors marché avec des propositions de dépose. Enfin, le rapport produit est incomplet et inachevé.

Le conseil de l'appelante a, dans un courrier officiel du 26 juin 2018, répondu aux points 5.1 à 5.15 mentionnés par M. [L] et proposé de remédier à certains d'entre eux ou de procéder à des déposes ou modifications tout en maintenant sa volonté de lever les réserves émises. Il n'est produit aucune réponse à ces observations qui n'ont pas été intégrées au rapport. La demande d'expertise, à laquelle la société Artplus ne s'était pas opposée en première instance, n'est plus maintenue à hauteur d'appel.

Dès lors, il est constaté que Mme [D], ne rapporte nullement la preuve des désordres et des malfaçons qu'elle mentionne sans plus de précision pour refuser le paiement. À cet égard, le devis du 9 décembre 2017 d'un montant de 22 133,07 euros, ne suffit pas à caractériser les manquements reprochés.

De la même façon, les pièces produites n°4, 5 et 6 pour revendiquer des surfacturations, ne suffisent aucunement à les démontrer. Il est au demeurant relevé que dans le courrier du 9 décembre 2017, le conseil de la société Artplus indique expressément que toute erreur de facturation sera rectifiée.

En définitive, le jugement est infirmé en toutes ses dispositions et il est jugé que la société Artplus justifie de la réalité de sa créance et qu'en l'état des pièces produites, Mme [D] s'est soustraite au paiement du prix convenu, n'a pas permis la levée des réserves et est donc redevable d'une somme de 4 823,61 euros (6 431,48 ' 1 607,87 représentant 5 %) outre les intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 30 juin 2017.

Sur la demande en paiement d'une somme de 1'403,17 euros au titre des travaux supplémentaires

L'appelante soutient que ces travaux ont été demandés par Mme [D], qu'ils n'ont jamais été contestés, que l'existence de plusieurs factures fait suite à la discussion entre les parties et que ces travaux ne font pas doublon avec le devis initial. Elle produit la facture FA0000773 du 26 avril 2017 d'un montant de 1 403,17 euros.

Pour s'opposer au paiement, Mme [D] soutient qu'il n'y a eu aucun devis accepté, qu'il y a eu deux factures avec des montants totalement différents (869 euros et 1 843,17 euros), que des prises RJ45 ont été facturées deux fois et qu'elle n'a jamais accepté ces travaux.

Il ressort des pièces produites et des débats que la prise RJ45 ne fait pas l'objet d'un doublon puisqu'il s'agit d'une prise supplémentaire, que l'appelante admet qu'elle n'aurait pas été posée et mentionnée dans les réserves. La facture concerne essentiellement la dépose de la cuvette dans les WC et des travaux d'électricité concernant des prises qui ne sont pas sérieusement contestés. L'existence de deux factures intermédiaires sur des ajouts finalement non retenus relève de pratiques courantes et ces travaux n'ont pas été contestés lors de la réception du 31 mai 2017, ni même postérieurement avant d'être réclamés en justice.

Partant, ils sont dus et Mme [D] est également condamnée au paiement de cette facture.

Sur la demande de levée des réserves et de condamnation au paiement du solde des travaux

Il ressort des débats que Mme [D] s'est, dès la réception des travaux, opposée à ce que la société Artplus accède à son appartement pour procéder à la levée des réserves signalées le 31 mai 2017.

Si l'existence de réserves n'est pas contestée par la société Artplus, il est manifeste que plus de cinq ans après la réalisation des travaux, la demande d'injonction apparaît désormais illusoire et sans fondement.

Cette demande est par conséquent rejetée.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant après débats en audience publique, par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe, rendu en dernier ressort,

Infirme le jugement en toutes ses dispositions ;

Statuant de nouveau,

Condamne Mme [Y] [D] à payer à la société Artplus la somme de 6 226,78 euros au titre du solde des travaux, outre les intérêts au taux légal à compter du 30 juin 2017 ;

Rejette toute autre demande ;

Y ajoutant,

Condamne Mme [Y] [D] aux entiers dépens, de première instance et d'appel ;

Condamne Mme [Y] [D] à payer la société Artplus la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La greffièreLe président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 9 - a
Numéro d'arrêt : 19/21333
Date de la décision : 16/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-16;19.21333 ?
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