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16/06/2022 | FRANCE | N°19/139387

France | France, Cour d'appel de Paris, G3, 16 juin 2022, 19/139387


Copies exécutoiresREPUBLIQUE FRANCAISE
délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 4 - Chambre 3

ARRET DU 16 JUIN 2022

(no 218 , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : No RG 19/13938 - No Portalis 35L7-V-B7D-CAJRL

Décision déférée à la Cour : Jugement du 09 Mai 2019 -Tribunal d'Instance de MONTREUIL SOUS BOIS - RG no 1118000164

APPELANT

Monsieur [B] [Z]
[Adresse 1]
[Localité 2]

Représenté et assisté par Me Anne SEVIN de la SCP MARTINS SEVIN, avocat au barreau de

SEINE-SAINT-DENIS, toque : PB05

INTIMES

Monsieur [M] [U]
[Adresse 3]
[Localité 4]

Madame [S] [R] épouse [M] [U]
[Adresse...

Copies exécutoiresREPUBLIQUE FRANCAISE
délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 4 - Chambre 3

ARRET DU 16 JUIN 2022

(no 218 , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : No RG 19/13938 - No Portalis 35L7-V-B7D-CAJRL

Décision déférée à la Cour : Jugement du 09 Mai 2019 -Tribunal d'Instance de MONTREUIL SOUS BOIS - RG no 1118000164

APPELANT

Monsieur [B] [Z]
[Adresse 1]
[Localité 2]

Représenté et assisté par Me Anne SEVIN de la SCP MARTINS SEVIN, avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS, toque : PB05

INTIMES

Monsieur [M] [U]
[Adresse 3]
[Localité 4]

Madame [S] [R] épouse [M] [U]
[Adresse 3]
[Localité 4]

Représentés par Me Rosa BARROSO, avocat au barreau de PARIS, toque : E1838
Assistés par Me Ali BENNACER, avocat au barreau du Val d'Oise

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 11 Mai 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Anne-Laure MEANO, Présidente de chambre, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :
François LEPLAT, président de chambre
Anne-Laure MEANO, présidente assesseur
Bérengère DOLBEAU, conseillère

Greffier, lors des débats : Mme Joëlle COULMANCE

ARRET :

- contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par François LEPLAT, Président de chambre et par Joëlle COULMANCE, Greffière, présente lors de la mise à disposition.

*****
EXPOSÉ DU LITIGE

Par acte sous seing privé du 1er août 2015, M. [B] [Z] a donné à bail à M.[M] [U] et Mme [S] [R] un logement situé [Adresse 6] à [Localité 5], d'une surface de 112 m², moyennant un loyer mensuel de 1.500 euros comprenant une provision sur charges de 78,22 euros.

Le 19 décembre 2017, le bailleur a adressé aux locataires un commandement de payer la somme de 11.400 euros au titre de la dette locative.

Par acte d'huissier du 19 février 2018, M.[M] [U] et Mme [S] [R] ont assigné M. [B] [Z] devant le tribunal d'instance de Montreuil sous Bois en opposition à ce commandement de payer.

Par jugement contradictoire entrepris du 9 mai 2019 le tribunal d'instance de Montreuil sous Bois a ainsi statué :

Rejette la demande d'expertise judiciaire ;
Rejette la prétention tendant à l'annulation du commandement de payer ;
Fixe à la somme de 10.125 euros le préjudice de jouissance résultant de l'absence de garde corps dans les parties supérieures du logernent, de la conclusion du bail au mois d'avril 2019 inclus ;
Fixe à la somme de 2.400 euros le préjudice de jouissance résultant des infiltrations d'eau dans le logement, du 24 septembre 2018 au mois d'avril 2019 inclus ;
Fixe à la somme de 1.200 euros le préjudice de jouissance résultant de l'absence de chauffage dans la chambre, du 24 septembre 2018 au mois d'avril 2019 inclus ;
Déclare M. [B] [Z] responsable des trois chefs de préjudice ainsi fixés ;
Fixe à 20.726 euros la somme due par M.[M] [U] et Mme [S] [R] à M. [B] [Z] au titre des loyers et charges arrêtés au mois de novembre 2018 inclus ;
Ordonne la compensation des somrnes dues par les parties ;
Condamne M.[M] [U] et Mme [S] [R] au paiement de 7.001 euros au titre de l'arriéré de loyers et de charges locatives arrêtées au mois de novembre 2018 inclus ;
Précise que cette somme tient compte de la liquidation des chefs de préjudice en raison de la compensation des sommes dues mutuellement par les parties ;
Dit que cette somme portera intérêt au taux légal à compter de la signification du présent jugement ;
Condamne M.[M] [U] et Mme [S] [R] au paiement des dépens, en ce compris le coût du commandement de payer ;
Rejette les demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile ;
Rejette le surplus ;
Dit n'y avoir lieu à exécution provisoire ;
Ordonne la notification de la présente décision au Préfet de la Seine Saint Denis par le greffe.

PRÉTENTIONS DES PARTIES

Vu l'appel interjeté le 9 juillet 2019 par M. [B] [Z] ;

Vu les dernières écritures remises au greffe le 7 mai 2020 par lesquelles M. [B] [Z], appelant, demande à la cour de :

Dire et juger M. [B] [Z] recevable et bien fondé en son appel ;

Infirmer en toutes ses dispositions le jugement du tribunal d'instance de Montreuil du 9 mai 2019 sauf en ce qu'il a rejeté la demande d'expertise judiciaire de M.[M] [U] et Mme [S] [R] ;

Statuant à nouveau,
Constater l'acquisition de la clause résolutoire insérée au bail du 1er mars 2015, corrigé le 1er août 2015, au 18 février 2018 et la résiliation du bail à cette date ;

En conséquence,
Ordonner l'expulsion de M.[M] [U] et Mme [S] [R] ainsi que de tous occupants de leur chef, des biens dont s'agit situés à [Adresse 6] ;
Ordonner l'expulsion immédiate et sans délai M.[M] [U] et Mme [S] [R] ainsi que de tous occupants de leur chef, sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter de la décision à intervenir et ce avec l'assistance de la force publique et d'un serrurier si besoin est, des lieux dont s'agit sis à [Adresse 6] ;
Ordonner la séquestration des meubles et facultés mobilières pouvant se trouver dans les lieux soit dans l'immeuble soit dans un garde-meuble au choix du demandeur aux frais, risques et périls du preneur conformément aux articles L433-1 et suivants, et les articles R433-7, R433-1 et R432-2 du code des procédures civiles d'exécution ;
Condamner solidairement M.[M] [U] et Mme [S] [R] à la somme de 42 441,24 euros au titre des loyers et charges impayés arrêtés au mois de février 2018 inclus outre les indemnités d'occupation et régularisation de charges arrêtées au mois de mai 2020 inclus ;
Les condamner solidairement à payer une indemnité d'occupation à compter du 1er juin 2020 égale au montant du loyer contractuel majoré des charges jusqu'à parfaite libération des lieux ;
Condamner in solidum M.[M] [U] et Mme [S] [R] à payer à M. [B] [Z] la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamner in solidum M.[M] [U] et Mme [S] [R] en tous les dépens dont distraction au profit de la SCP MARTINS -SEVIN Avocat conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Vu les dernières écritures remises au greffe le 9 janvier 2020 au terme desquelles M.[M] [U] et Mme [S] [R], intimés, demandent à la cour de :

Confirmer, le jugement rendu le 9 mai 2019 par le tribunal d'instance de Montreuil ;
En conséquence,
Débouter, M. [B] [Z] de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions ;

Subsidiairement, si par impossible la Cour devait juger qu'il y a lieu à l'acquisition de la clause résolutoire,
Vu l'article 1343-5 et suivants du code civil,
Suspendre, les effets de la clause résolutoire insérée dans le bail ;

En conséquence,
Autoriser, M.[M] [U] et Mme [S] [R] à se libérer de leur dette locative en 24 versements mensuels ;
Condamner, M. [B] [Z] à payer à M.[M] [U] et Mme [S] [R] la somme de 3 000 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamner, M. [B] [Z] aux entiers dépens, dont distraction au profit de Maître BARROSO, et ce par application de l'article 699 du code de procédure civile.

Pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens des parties, la cour, conformément à l'article 455 du code de procédure civile, renvoie aux conclusions qu'elles ont remises au greffe et au jugement déféré.

MOTIFS DE LA DÉCISION

En substance, le premier juge a retenu la validité du commandement de payer et l'existence d'impayés de loyers mais a rejeté la demande de résiliation du bail par acquisition de la clause résolutoire en raison de l'indécence du logement et du manquement du bailleur à son obligation de délivrance, ainsi qu'au visa de l'article 1719 alinéa 1 du code civil.

Sur la résiliation du bail

L'existence d'une clause résolutoire dans le contrat de bail et d'un arriéré de loyers, encore actuel, susceptible d'entraîner sa mise en oeuvre, ainsi que la validité et la portée du commandement de payer du 19 décembre 2017, ne font pas l'objet de contestation et ne sont pas débattus devant la cour.
M. [M] [U] et Mme [S] [R] invoquent seulement le caractère indécent et impropre à l'habitation du logement pour s'opposer à la résiliation du bail, et demandent subsidiairement sa suspension par l'octroi de délais de paiement.

Il résulte des articles 1719 du code civil et 6 de la loi no89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs que le bailleur est obligé de délivrer au preneur la chose louée et, s'il s'agit de son habitation principale, un logement décent, en bon état d'usage et de réparation.
Le décret du 30 janvier 2002 relatif aux caractéristiques du logement décent prévoit que le logement doit satisfaire à un certain nombre de conditions au regard de la sécurité physique et de la santé des locataires.

En application des articles 1728, 2o du code civil et 7 a) de la loi du 06 juillet 1989, le locataire est tenu pour sa part de l'obligation essentielle et primordiale de payer le loyer et les charges au terme convenu sauf à démontrer que le logement est affecté de désordres si importants qu'il y a impossibilité d'utiliser les lieux conformément à leur destination ; des points d'indécence ne sont à cet égard pas suffisants pour caractériser une inhabitabilité et exonérer le locataire de son obligation de payer les loyers.

L'article 1730 du code civil dispose que « S'il a été fait un état des lieux entre le bailleur et le preneur, celui-ci doit rendre la chose telle qu'il l'a reçue, suivant cet état, excepté ce qui a péri ou a été dégradé par vétusté ou force majeure» et l'article 7 d) de la loi du 6 juillet 1989 prévoit que le locataire est obligé de prendre à sa charge l'entretien courant du logement, des équipements mentionnés au contrat et les menues réparations ainsi que l'ensemble des réparations locatives définies par décret en Conseil d'Etat, sauf si elles sont occasionnées par vétusté, malfaçon, vice de construction, cas fortuit ou force majeure.

S'agissant de la charge de la preuve, il appartient au bailleur, tenu de délivrer au preneur la chose louée, de prouver qu'il s'est libéré de son obligation mais celui qui invoque l'exception d'inexécution doit prouver la gravité de cette inexécution justifiant une suspension de l'exécution des obligations.

En l'espèce, l'état des lieux d'entrée effectué contradictoirement le 1er février 2015, indique que :

-dans la cuisine le sol, les murs, une partie du plafond, la ventilation et la hotte sont à l'état neuf ;
-les murs des toilettes sont à l'état d'usage ;
-les murs, sols et plafonds du salon sont à l'état neuf et le chauffage y est en bon état ;
-deux chambres comportent des murs et des plafonds qui sont soit à l'état d'usage soit à rafraîchir ; dans la chambre du rez-de-chaussée les murs et le plafond sont "à repeindre"; chacune des trois chambres comporte un chauffage sur lequel aucune observation n'est faite et qui est noté en bon état
-en observation générale il est indiqué notamment que le garde corps de la chambre au premier étage est à prévoir, que l'entretien de la chaudière à fuel est à la charge des preneurs ; aucune mention relative à sa vétusté ou à son ancienneté n'est inscrite.

Il en résulte que sur ces points les locaux étaient en bon état, voire à l'état neuf, et comportaient les équipements nécessaires, à l'exception des gardes corps de la chambre du premier étage, les mentions relatives aux rafraîchissements de murs à prévoir ne trahissant aucun caractère d'indécence des lieux s'agissant en particulier des conditions de chauffage et de protection contre les infiltrations d'eau.
Les nombreuses attestations et photographies produites par le bailleur confirment d'ailleurs cet état de fait.

Pour justifier du caractère indécent du logement, M. [M] [U] et Mme [S] [R] produisent, comme devant le premier juge, un procès-verbal de constat établi non contradictoirement par huissier de justice, le 24 septembre 2018, qui constate:
-la présence d'auréoles sur les murs de la cuisine, du séjour et d'une chambre, des "dégoulinures sur le mur des toilettes" ainsi que des traces d'humidité et d'infiltrations dans la cuisine et deux chambres ainsi que sous la conduite d'évacuation des fumées du poêle du salon,
-l'absence de radiateur dans la chambre de l'étage.

Aucun élément technique n'est produit permettant d'identifier la cause des traces d'humidité constatées et susceptible d'établir la responsabilité du bailleur, les preneurs ne produisant aucune preuve d'un signalement de désordres au bailleur ni aucune déclaration de sinistre à leur assureur. S'agissant de l'installation électrique, décrite comme ancienne, il n'est pas établi qu'elle soit non conforme "aux normes de sécurité définies par les lois et règlements" ni en mauvais état d'usage et de fonctionnement, au sens de l'article 3 du décret du 30 janvier 2002 précité.

Par ailleurs, ce constat reflète pour le surplus les déclarations des preneurs, qui n'établissent pas avoir invité le bailleur à y participer ; il n'est pas davantage fait état par les preneurs de ce qu'ils auraient exprimé auprès du bailleur des réclamations ou des observations au sujet de l'état de l'appartement.

Les preneurs produisent également des factures de 2017 concernant des réparations de la chaudière, d'où il résulte qu'ils ont procédé à un entretien de celle-ci, sans qu'ils démontrent que ces travaux incombaient au bailleur et ne relevaient pas de leur propre obligation d'entretien courant, étant au demeurant relevé que le bailleur produit également des factures de réparation et d'entretien acquittées par lui courant 2016 et 2017.

Il convient en outre de relever que ce document est postérieur au commandement de payer que le bailleur a fait délivrer aux preneurs alors que le bail était alors en cours depuis plus de deux ans.

Toutefois, il résulte de l'article 2 du décret du 30 janvier 2002 que "Les dispositifs de retenue des personnes, dans le logement et ses accès, tels que garde-corps des fenêtres, escaliers, loggias et balcons" doivent être "dans un état conforme à leur usage".
Or, il résulte du constat précité et des photos qui y sont jointes que les trois portes-fenêtres de la chambre située à l'étage ne comportaient toujours pas de garde corps alors qu'elles sont situées à plus de 2,50 m au-dessus de la terrasse et que ce point était bien noté dans l'état des lieux d'entrée; M. [Z] ne conteste pas spécifiquement ce point ni n'établit avoir été empêché par la force majeure de remplir son obligation de délivrance sur ce point.

Néanmoins, il ne résulte pas de ces éléments qu'il existe une impossibilité d'utiliser les lieux conformément à leur destination, étant relevé que M. [M] [U] et Mme [S] [R] cherchent à s'y maintenir et demandent à ce que le bail se poursuive, d'ailleurs sans solliciter la réalisation de travaux incombant au bailleur, de sorte que l'exception d'inexécution soulevée doit être rejetée ; pour les mêmes motifs, les locaux loués n'étant pas impropres à l'habitation, l'article 1719 alinéa 1 du code civil, aux termes duquel lorsque tel est le cas, le bailleur ne peut se prévaloir de la nullité du bail ou de sa résiliation pour demander l'expulsion de l'occupant, n'a pas vocation a être appliqué.

Il convient donc de constater la résiliation du bail par acquisition de la clause résolutoire, deux mois après le commandement de payer resté infructueux, soit à la date du 19 février 2018, et ce conformément aux dispositions d'ordre public de l'article 24 I de la loi du 6 juillet 1989.

À compter du 19 février 2018, M. [M] [U] et Mme [S] [R], étant devenus occupants sans droit ni titre du logement litigieux, sous réserve des dispositions ci-après relatives à la suspension des effets de la clause résolutoire, sont redevables d'une indemnité d'occupation qu'il convient de fixer à la somme qui aurait été due au titre des loyers et des charges si le bail s'était poursuivi.

Le jugement sera donc infirmé sur ces points.

Sur le trouble de jouissance

Il résulte des éléments précités que le critère d'indécence retenu relatif à l'absence de garde corps a causé un trouble de jouissance à M. [M] [U] et Mme [S] [R], depuis l'origine du bail, lequel a été exactement évalué par le premier juge à la somme de 10.125 euros.
Le jugement sera donc confirmé sur ce point.

Pour les raisons déjà exposées, M. [M] [U] et Mme [S] [R] seront déboutés du surplus de leurs demandes indemnitaires pour trouble de jouissance, le jugement étant infirmé à cet égard.

Sur la dette locative

M. [B] [Z] produit un décompte d'où il résulte que M. [M] [U] et Mme [S] [R] restent lui devoir la somme de 42.441,24 euros au titre des loyers et charges impayés jusqu'au mois de février 2018 inclus et des indemnités d'occupation postérieures, somme arrêtée au mois de mai 2020 inclus.

M. [M] [U] et Mme [S] [R] ne contestent pas ce décompte en ce qui concerne le montant de la dette de loyers, ne soutenant notamment pas avoir fait des versements qui ne seraient pas pris en compte. Ils se bornent à demander la confirmation du jugement en ce qu'il a retenu que la somme de 2.574 euros au titre des provisions sur charges des années 2015, 2017 et 2018, n'était pas justifiée et ne pouvait être prise en compte.

Cependant, devant la cour, M. [B] [Z] produit les pièces justifiant les charges liées à la distribution d'eau potable et à l'évacuation des eaux usées (factures Veolia) ainsi que les avis d'imposition concernant la taxe sur les ordures ménagères, sans que M. [M] [U] et Mme [S] [R] ne les contestent particulièrement ni dans leur principe ni dans leur montant.

Au vu de ces éléments, M. [M] [U] et Mme [S] [R] seront condamnés à payer à M. [B] [Z] la somme précitée.

Il sera fait droit à la demande de compensation des dettes, de sorte que la somme due par M. [M] [U] et Mme [S] [R] à M. [B] [Z] s'élève à 32.316, 24 euros (42.441,24 euros - 10.125 euros), sous réserve des éventuels paiements postérieurs au mois de mai 2020.

Sur la demande de délais de paiement et de suspension des effets de la clause résolutoire

M. [M] [U] et Mme [S] [R] demandent des délais de paiement de 24 mois en application de l'article 1343-5 du code civil et la suspension des effets de la clause de résiliation de plein droit en application de l'article 24, VII, de la loi no89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs.

M. [B] [Z] s'y oppose mais indique dans ses conclusions d'appel que le loyer courant est payé, ce que les conseils des parties ont confirmé à l'audience de plaidoirie.

M. [M] [U] et Mme [S] [R] , qui ont trois enfants mineurs, produisent une attestation de paiement de la caisse d'allocations familiales établissant qu'ils étaient bénéficiaires, en 2018, des allocations familiales avec conditions de ressources, du complément familial et de l'allocation logement pour un montant de 596 euros, ainsi que leurs avis d'imposition respectifs sur les revenus de l'année 2018 , d'où il résulte que le ménage percevait un revenu imposable de 31.301 euros et n'était pas imposable.

Au regard de ces éléments, la situation de M. [M] [U] et Mme [S] [R] est telle qu'il y a lieu d'accorder des délais de paiement d'une durée de deux ans, en 23 mensualités d'au moins 400 euros et une 24ème couvrant le solde de la dette.

Conformément à l'article 24 VII de la loi de 1989 , ces délais suspendront les effets de la clause résolutoire selon les modalités fixées au dispositif de l'arrêt.

Sur l'article 700 du code de procédure civile :

Le sens de la présente décision ne conduit pas à infirmer le jugement en ce qui concerne ces dispositions et les dépens de première instance.

Il est équitable de ne pas faire application de l'article 700 en ce qui concerne l'instance d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire,

Infirme, en ses dispositions frappées d'appel, le jugement entrepris, sauf en ce qu'il a rejeté la demande d'annulation du commandement de payer, fixé à la somme de 10.125 euros la somme due par M. [B] [Z] au titre du trouble de jouissance de M. [M] [U] et Mme [S] [R] et statué sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile ;

Et statuant à nouveau,

Constate la résiliation du bail portant sur le logement situé [Adresse 6] à [Localité 5] au 19 février 2018;

Fixe l'indemnité d'occupation due in solidum par M. [M] [U] et Mme [S] [R] à M. [B] [Z] à un montant égal au montant des loyers et des charges qui auraient été dus si le bail s'était poursuivi, et ce à compter du 19 février 2018

Dit que la somme due par M. [M] [U] et Mme [S] [R] au titre des loyers, charges et indemnités d'occupation est de 42.441,24 euros, arrêtée au mois de mai 2020 inclus ;

Ordonne la compensation de cette dette avec celle de 10.125 euros due par M. [B] [Z] à M. [M] [U] et Mme [S] [R] au titre de leur préjudice de jouissance;

Condamne in solidum M. [M] [U] et Mme [S] [R] à payer à M. [B] [Z] la somme de 32.316, 24 euros, sous réserve des paiements intervenus postérieurement au mois de mai 2020 ;

Rejette toutes demandes plus amples ou contraires,

Et y ajoutant,

Autorise M. [M] [U] et Mme [S] [R] à s‘acquitter de la dette par 23 versements mensuels d'au moins 400 euros et du solde au 24ème versement, payables en plus du loyer courant, et pour la première fois le 15 du mois suivant la signification du présent arrêt, la dernière mensualité couvrant le solde de la dette,

Suspend les effets de la résiliation pendant le cours de ces délais et dit que s'ils sont respectés, la résiliation du bail sera réputée n'avoir jamais été acquise,

Dit qu‘en cas de défaut de paiement d'un seul versement mensuel à son échéance, la totalité de la dette deviendra immédiatement exigible et la résiliation reprendra immédiatement tous ses effets,

Dit en ce cas qu'à défaut par M. [M] [U] et Mme [S] [R] d'avoir libéré les lieux deux mois après la signification du commandement de quitter les lieux prévu par l'article L. 412-1 du code des procédures civiles d‘exécution, M. [B] [Z] pourra procéder à leur expulsion et à celle de tout occupant de leur chef avec l'assistance de la force publique et, si besoin est, au transport des meubles laissés dans les lieux dans tel garde-meubles qu'il plaira au bailleur,

Dit qu'alors M. [M] [U] et Mme [S] [R] devront payer à M. [B] [Z] l'indemnité mensuelle d'occupation fixée;

Condamne M. [M] [U] et Mme [S] [R] aux dépens d'appel, avec droit de recouvrement direct, par application de l'article 699 du code de procédure civile,

Rejette toutes autres demandes.

La Greffière Le Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : G3
Numéro d'arrêt : 19/139387
Date de la décision : 16/06/2022
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2022-06-16;19.139387 ?
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