La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

14/06/2022 | FRANCE | N°19/08862

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 4, 14 juin 2022, 19/08862


Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 4



ARRÊT DU 14 JUIN 2022



(n° , 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/08862 - N° Portalis 35L7-V-B7D-B72HF



Décision déférée à la Cour : Jugement du 28 Janvier 2019 -Tribunal d'Instance de JUVISY-SUR-ORGE - RG n° 11-17-000492





APPELANTE



Madame [T] [Z]

Née le 4 avril 1964 à [LocalitÃ

© 5] (MALI)

[Adresse 2]

[Localité 3]



représentée par Me Naïma HADDADI, avocat au barreau D'ESSONNE



(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2019/022751 du 27/05/2019...

Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 4

ARRÊT DU 14 JUIN 2022

(n° , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/08862 - N° Portalis 35L7-V-B7D-B72HF

Décision déférée à la Cour : Jugement du 28 Janvier 2019 -Tribunal d'Instance de JUVISY-SUR-ORGE - RG n° 11-17-000492

APPELANTE

Madame [T] [Z]

Née le 4 avril 1964 à [Localité 5] (MALI)

[Adresse 2]

[Localité 3]

représentée par Me Naïma HADDADI, avocat au barreau D'ESSONNE

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2019/022751 du 27/05/2019 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de PARIS)

INTIMES

Monsieur [U] [J] [G]

Né le 27 avril 1960 à [Localité 6]

[Adresse 1]

[Localité 4]

Madame [F] [L] [D] épouse [G]

Née le 6 mars 1963 à [Localité 4] (92)

[Adresse 1]

[Localité 4]

représentés par Me Dominique POLION, avocat postulant au barreau D'ESSONNE

ayant pour avocat plaidant Me Emmanuel STENE, avocat au barreau de Paris, toque : G117

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 21 Mars 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Mme Marie MONGIN, Conseiller, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. Michel CHALACHIN, président de chambre

Mme Marie MONGIN, conseiller

M. François BOUYX, conseiller

Qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Mme Cynthia GESTY

ARRÊT : contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Mme Marie MONGIN, conseiller faisant fonction de président et par Mme Cynthia GESTY, Greffière, présente lors de la mise à disposition.

******

M. [U], [J] [G] et Mme [F], [L] [D] épouse [G] sont propriétaires de plusieurs logements dans l'ensemble immobilier '[Localité 3] II' dont dépend l'appartement situé [Adresse 2].

Par contrat de bail meublé en date du 14 décembre 2011, M. [G] a donné à bail à Mme [T] [Z] une pièce à usage d'habitation, décrite comme un studio comprenant une partie privative (cuisine, salle de bains et loggia) et une partie commune (WC et cuisine) dans un appartement partagé en 5 colocations. L'avenant au contrat meublé, signé le même jour, fixe le loyer mensuel révisable à 530 euros outre une provision pour charges de 100 euros par mois et un dépôt de garantie de 1 500 euros.

Par acte sous seing privé du 14 décembre 2011, M. [O] [I] s'est porté caution solidaire de Mme [Z].

Par acte d'huissier du 12 décembre 2016, M. et Mme [G] ont fait délivrer à Mme [Z] un commandement de payer la somme en principal de 18 336,23 euros au titre des loyers et charges impayés.

Ce commandement a été dénoncé à la caution le 16 décembre 2016.

Par acte d'huissier délivré le 27 février 2017, M. et Mme [G] ont fait assigner Mme [Z] et M. [I] devant le tribunal d'instance de Juvisy-sur-Orge afin d'obtenir la constatation de la résiliation du bail par l'effet de la clause résolutoire ou, subsidiairement, son prononcé, l'expulsion de Mme [Z] et la condamnation solidaire de Mme [Z] et M. [I] à leur verser le solde de l'arriéré locatif ainsi qu'une indemnité d'occupation mensuelle.

Par jugement du 28 janvier 2019, cette juridiction a ainsi statué :

Dit que le bail consenti à Mme [Z] le 14 décembre 2011 concerne la location d'un local meublé,

Constate l'acquisition de la clause résolutoire du bail conclu entre les parties le 14 décembre 2011 à la date du 12 février 2017,

Ordonne l'expulsion de Mme [Z] et de tous occupants de son chef, du local d'habitation, situé [Adresse 2], avec le concours de la force publique et d'un serrurier, passé le délai de deux mois suivant la délivrance d'un commandement d'avoir à quitter les lieux, conformément aux dispositions des articles L. 412-1 et suivants, R. 411-1 et suivants, R. 412-1 et suivants du code des procédures civiles d'exécution,

Dit que le sort des meubles sera réglé conformément aux articles L. 433-1 et suivants et R. 433-1 et suivants du code des procédures civiles d'exécution,

Rejette la demande de suppression du délai de deux mois prévu aux articles L. 412-1 et suivants du code des procédures civiles d'exécution,

Fixe l'indemnité mensuelle d'occupation à compter du 13 février 2017 jusqu'à la libération effective des lieux à la somme de 441 euros,

Condamne Mme [Z] au paiement d'une indemnité mensuelle d'occupation à compter du terme d'octobre 2018 et jusqu'à la libération effective des lieux,

Condamne Mme [Z] à payer à M. et Mme [G] la somme de 28 117,23 euros au titre des loyers, charges et indemnités d'occupation arrêtés au terme de septembre 2018 inclus,

Condamne M. et Mme [G] à payer à Mme [Z] la somme de 15 309 euros au titre du préjudice de jouissance,

Ordonne la compensation de ces créances et en conséquence condamne :

Mme [Z], seule, à payer à M. et Mme [G] la somme de 8 668,57 euros,

solidairement Mme [Z] et M. [I], en sa qualité de caution, la somme de 4 139,73 euros avec intérêts au taux légal à compter de la présente décision,

Déboute Mme [Z] de sa demande au titre du préjudice moral,

Ordonne à M. et Mme [G] de remettre à Mme [Z] les quittances de loyer ou reçus des sommes versées au titre de règlement partiel des loyers et charges, sous astreinte de 10 euros par jour de retard et pendant 90 jours à compter du 15ème jour suivant la signification du présent jugement,

Dit que le tribunal se réserve le droit de liquider l'astreinte,

Déboute Mme [Z] de sa demande d'exécution de travaux,

Dispense Mme [Z] et M. [I] d'avoir à payer à M. et Mme [G] une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Dit que chaque partie supportera la charge des dépens qu'elle a engagés dans la présente instance,

Dit n'y avoir lieu à exécution provisoire,

Dit que la présente décision sera transmise par les soins du greffe au représentant de l'État dans le département en vue de la prise en compte de la demande de relogement de l'occupant dans le cadre du plan départementale d'action pour le logement des personnes défavorisées prévu par la loi n°90-449 du 31 mai 1990 visant la mise en oeuvre du droit au logement.

Par déclaration reçue au greffe le 19 avril 2019, Mme [Z] a interjeté appel de cette décision et, dans ses conclusions notifiées le 6 août 2019, elle demande à la cour de :

Recevoir Mme [Z] en ses demandes, fins et conclusions et l'en dire bien fondée,

En conséquence,

Infirmer le jugement en toutes ses dispositions,

Dire et juger que les sommes demandées au titre des loyers impayés entre janvier 2012 et décembre 2013 sont prescrites,

À titre principal,

Condamner solidairement M. et Mme [G] à payer à Mme [Z] la somme de 25 000 euros au titre du trouble de jouissance,

Condamner solidairement M. et Mme [G] à restituer la somme de 6 000 euros avec intérêts au taux légal à compter du 29 janvier 2018 au titre de restitution des provisions pour charges indûment payées,

Condamner solidairement M. [G] à payer à Mme [Z], la somme de 2 500 euros à titre de dommages et intérêts en raison de son préjudice moral,

Condamner solidairement M. et Mme [G] à la remise des quittances depuis son entrée dans les lieux et ce sous astreinte de 10 euros par jour de retard,

Condamner solidairement M. et Mme [G] à la réalisation des travaux de remise en état et ce sous astreinte de 100 euros par jour de retard,

À titre subsidiaire, dans l'hypothèse où la cour d'appel de Paris considérerait la demande comme fondée,

Condamner M. et Mme [G] à payer à Mme [Z] la somme de 25 000 euros au titre du trouble de jouissance,

Ordonner la compensation entre les sommes demandées au titre des loyers, charges et indemnités d'occupation,

En tout état de cause,

Ordonner l'exécution provisoire conformément à l'article 515 du code de procédure civile,

Ordonner la capitalisation annuelle des intérêts dus, conformément à l'article 1343-2 du code de procédure civile,

Condamner solidairement M. [G] à payer à Mme [Z] la somme de 2 000 euros conformément aux dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991,

Condamner aussi solidairement M. et Mme [G] aux entiers dépens lesquels comprendront notamment le coût du commandement de payer les loyers du 12 décembre 2016.

M. et Mme [G] ont déposé des conclusions le 28 avril 2020 qui ont été jugées irrecevables par ordonnance rendue par le conseiller de la mise en état le 7 décembre 2021.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 8 mars 2022.

SUR CE,

Sur la qualification du logement meublé

Considérant que c'est à juste titre que le premier juge a retenu la qualification de logement meublé prévue au bail dès lors qu'était jointe au contrat la liste des meubles, ustensiles et vaisselles, liste signée par Mme [Z] ;

Que celle-ci ne peut utilement affirmer qu'elle ne parle ni ne comprend le français et ne sait ni lire ni écrire, alors qu'il résulte du procès-verbal de son audition par les services de police qu'elle verse aux débats ( pièce n°14), qu'elle est entendue sans l'assistance d'un interprète et qu'elle indique avoir un niveau d'études secondaires ;

Sur la résiliation du bail

Considérant, comme l'a relevé le tribunal, que la somme de 18 336,23 euros réclamée dans le commandement de payer délivré le 12 décembre 2016 n'a pas été réglée dans le délai de deux mois ;

Que c'est donc à juste titre que le premier juge a constaté la résiliation du bail de plein droit le 17 février 2017 ;

Sur les sommes dues par Mme [Z]

Considérant que l'appelante sollicite la restitution des sommes versées au titre des charges à défaut de régularisation ;

Que cependant l'article 25-10 de la loi du 6 juillet 1989 prévoit, s'agissant des locations meublées, que le contrat peut prévoir une récupération des charges par un forfait qui ne peut donner lieu à complément ou régularisation ultérieure ;

Que le jugement sera donc confirmé sur ce point ;

Considérant que Mme [Z] invoque devant la cour la prescription des demandes relatives aux loyers impayés entre les mois de janvier 2012 et décembre 2013 ;

Qu'il doit être rappelé qu'avant l'entrée en vigueur de la loi du 24 mars 2014 dite Alur, l'action en paiement des loyers était soumise à la prescription quinquennale de droit commun de l'article 2224 du code civil.

Que l'article 7-1 de la loi du 6 juillet 1989, créé par la loi du 24 mars 2014, dispose désormais que : « Toutes actions dérivant d'un contrat de bail sont prescrites par trois ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d'exercer ce droit. » ; que si cette disposition n'a pas été déclarée immédiatement applicable aux baux en cours par la loi du 24 mars 2014, la loi du 6 août 2015 dite Macron, a indiqué dans son article 82 II 2°, que l'article 7-1 de la loi du 6 juillet 1989 était immédiatement applicable aux baux en cours, dans les conditions de l'article 2222 du code civil ; que néanmoins ce n'est qu'à compter du 7 août 2015 que ce texte est devenu immédiatement applicable aux baux en cours ;

Que l'alinéa 2 de l'article 2222 du code civil prévoit qu'en « cas de réduction de la durée du délai de prescription ou du délai de forclusion, ce nouveau délai court à compter du jour de l'entrée en vigueur de la loi nouvelle, sans que la durée totale puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure. »

Qu'ainsi, s'agissant des actions dérivant d'un contrat de bail, la prescription triennale s'est substituée à la prescription quinquennale à compter du jour de l'entrée en vigueur la loi du 6 août 2015, soit le 7 août 2015, sans que la durée totale puisse excéder cinq années ;

Qu'en l'espèce, le bailleur ayant saisi le tribunal d'instance par assignation délivrée le 27 février 2017, seules les demandes portant sur les loyers impayés antérieurs au 27 février 2012 peuvent être atteintes par la prescription ;

Que le premier impayé figurant sur le décompte joint au commandement de payer porte sur le loyer de juillet 2012, de sorte qu'aucun des loyers réclamés par le bailleur n'est prescrit;

Que la fin de non-recevoir sera rejetée ;

Que le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a retenu le solde d'arriéré de loyers, charges et indemnités d'occupation, arrêté au terme de septembre 2018 à la somme de 28 117,23 euros ;

Que c'est également à bon droit que le jugement entrepris a fixé l'indemnité d'occupation mensuelle due par l'appelante à la somme de 630 euros diminuée de 30% , soit 441 euros;

Sur les préjudices allégués par Mme [Z]

Considérant que c'est par des motifs pertinents que la cour adopte que le tribunal a évalué le préjudice de jouissance de Mme [Z] à 30% du loyer qui aurait dû être versé du mois de février 2011 au mois de septembre 2018, soit la somme de 15 309 euros et a ordonné la compensation des sommes dues par chacune des parties ;

Que c'est également à bon droit que le premier juge a débouté l'appelante de sa demande de réparation d'un préjudice moral distinct du préjudice de jouissance, faute pour celle-ci de rapporter la preuve de ses allégations quant au comportement agressif et menaçant de son bailleur ;

Sur les demandes relatives aux quittances et travaux

Considérant que le premier juge a condamné, sous astreinte, le bailleur à remettre des quittances à la locataire ; qu'il n' y a donc pas lieu d'infirmer le jugement sur ce point, l'appelante se bornant à solliciter ce qui a été accordé par le tribunal ;

Que Mme [Z] étant occupante sans droit ni titre, le premier juge l'a justement déboutée de sa demande tendant à ordonner la réalisation de travaux ;

Que le jugement sera donc également confirmé de ces chefs ;

Sur les mesures accessoires

Considérant que Mme [Z] qui succombe en son appel sera condamnée aux dépens et déboutée de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

statuant publiquement par mise à disposition au greffe de l'arrêt contradictoire,

Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

- Rejette la fin de non-recevoir fondée sur la prescription soulevée par Mme [T] [Z],

- Déboute Mme [T] [Z] de ses demandes plus amples ou contraires,

- Condamne Mme [T] [Z] aux dépens d'appel.

Le greffier, Pour le président empêché,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 4
Numéro d'arrêt : 19/08862
Date de la décision : 14/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-14;19.08862 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award