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09/06/2022 | FRANCE | N°19/19422

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 9 - a, 09 juin 2022, 19/19422


Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 9 - A



ARRÊT DU 09 JUIN 2022



(n° , 10 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/19422 - N° Portalis 35L7-V-B7D-CA2UX



Décision déférée à la Cour : Jugement du 5 avril 2019 - Tribunal d'Instance de JUVISY SUR ORGE - RG n° 11-19-000091





APPELANTE



La société SOGEFINANCEMENT, société par actions s

implifiée, prise en la personne de ses représentants légaux, domiciliés ès-qualités audit siège

N° SIRET : 394 352 272 00022

[Adresse 5]

[Adresse 5]

[Localité 4]



représentée...

Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 9 - A

ARRÊT DU 09 JUIN 2022

(n° , 10 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/19422 - N° Portalis 35L7-V-B7D-CA2UX

Décision déférée à la Cour : Jugement du 5 avril 2019 - Tribunal d'Instance de JUVISY SUR ORGE - RG n° 11-19-000091

APPELANTE

La société SOGEFINANCEMENT, société par actions simplifiée, prise en la personne de ses représentants légaux, domiciliés ès-qualités audit siège

N° SIRET : 394 352 272 00022

[Adresse 5]

[Adresse 5]

[Localité 4]

représentée par Me Sébastien MENDES GIL de la SELAS CLOIX & MENDES-GIL, avocat au barreau de PARIS, toque : P0173

substitué à l'audience par Me Nicolas BERTHIER de la SELAS CLOIX & MENDES-GIL, avocat au barreau de PARIS, toque : P0173

INTIMÉ

Monsieur [I] [B] [P] [X]

né le [Date naissance 1] 1980 à [Localité 6] (93)

[Adresse 2]

[Localité 3]

représenté par Me Annie BARLAGUET, avocat au barreau de l'ESSONNE

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 19 avril 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant M. Christophe BACONNIER, Président, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. Christophe BACONNIER, Président de chambre

Mme Fabienne TROUILLER, Conseillère

M. Benoît DEVIGNOT, Conseiller

Greffière, lors des débats : Mme Camille LEPAGE

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par M. Christophe BACONNIER, Président et par Mme Camille LEPAGE, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Selon offre préalable acceptée le 24 mars 2010, la société Sogefinancement a consenti à M. [I] [B] [P] [X] un prêt personnel d'un montant en capital de 21 500 euros remboursable au taux nominal conventionnel de 5,85 % l'an (soit un TAEG de 6,198 % l'an) en 80 mensualités de 337,60 euros, incluant l'assurance.

Selon un avenant de réaménagement du 16 août 2011, la dette de 18 593,17 euros a été rééchelonnée en 120 mensualités de 217,11 euros.

Des échéances étant demeurées impayées, la société Sogefinancement a fait assigner M. [X] devant le tribunal d'instance de Juvisy-sur-Orge par acte d'huissier en date du 10 janvier 2019, en paiement des sommes suivantes, sous le bénéfice de l'exécution provisoire :

- 8 314,63 euros avec intérêts au taux conventionnel de 5,85 % l'an sur la somme de 8 303,43 euros à compter du 3 mai 2018 jusqu'au parfaitement paiement,

- 647,96 euros au titre de l'indemnité légale,

- 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

Sur interpellation du tribunal, le conseil de la société Sogefinancement a indiqué lors de l'audience que son action n'était pas forclose et qu'aucune cause de déchéance du droit aux intérêts n'était encourue.

Par jugement contradictoire du 5 avril 2019 auquel la cour se réfère pour l'exposé de la procédure antérieure et des prétentions initiales des parties, le tribunal d'instance de Juvisy-sur-Orge a rendu la décision suivante :

« PRONONCE la déchéance du droit aux intérêts conventionnels au titre du contrat n°33197628234,

En conséquence,

Déboute la société Sogefinancement de sa demande de condamnation en paiement de M. [X],

CONDAMNE la société Sogefinancement à restituer à M. [X] en deniers ou quittances, la somme de 1 491 euros pour solde du prêt n° 33197628234, arrêté au 17 janvier 2019, avec intérêts au taux légal à compter du présent jugement,

DÉBOUTE la société Sogefinancement de sa demande au titre de l'indemnité légale,

DÉBOUTE la société Sogefinancement de sa demande faite au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE la société Sogefinancement aux dépens de l'instance,

ORDONNE l'exécution provisoire ».

Le tribunal a principalement retenu que la déchéance du droit aux intérêts doit être prononcée pour irrégularité du formalisme précontractuel en ce que le prêteur de deniers échoue à rapporter la preuve qu'il s'est conformé à son obligation de fournir à l'emprunteur, lors de l'offre de crédit, une notice d'assurance comportant les extraits des conditions générales de l'assurance le concernant.

La société Sogefinancement a relevé appel de ce jugement par déclaration du 17 octobre 2019.

Par conclusions communiquées par voie électronique en date du 29 juin 2020, la société Sogefinancement demande à la cour de :

« ANNULER le jugement rendu par le Tribunal d'instance de Juvisy sur Orge le 5 avril 2019 au vu de l'excès de pouvoir commis, le Tribunal ayant statué ultra petita ; à tout le moins, INFIRMER le jugement rendu par le Tribunal d'instance de Juvisy sur Orge le 5 avril 2019 en ce qu'il a prononcé la déchéance du droit aux intérêts conventionnels au titre du contrat n°331.976.282.34 ; en qu'il a débouté la société Sogefinancement de sa demande de condamnation en paiement de M. [X] ; en ce qu'il a condamné la société Sogefinancement à restituer à M. [X] en deniers ou quittances, la somme de 1 491 euros pour solde du prêt n° 331.976.282.34, arrêté au 17 janvier 2019, avec intérêts au taux légal à compter du présent jugement ; en ce qu'il a débouté la société Sogefinancement de l'ensemble de ses demandes, en ce compris sa demande en condamnation de M. [X] au paiement de la somme de la somme de 8 314,63 euros, représentant les mensualités impayées, le capital restant dû et les intérêts échus, augmentée des intérêts de retard courus au taux conventionnel de 5,85 % l'an sur la somme en principal de 8 303,43 euros à compter du 3 mai 2018 jusqu'au jour du parfait paiement, sa demande en paiement de la somme de 647,96 euros au titre de l'indemnité légale de 8 % du capital restant dû et sa demande en paiement de la somme de 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Statuant à nouveau sur les chefs contestés, DIRE ET JUGER que les arguments visant à faire prononcer la déchéance du droit aux intérêts contractuels pour irrégularité du formalisme précontractuel ou contractuel sont prescrits eu égard au délai de prescription quinquennale ; DÉCLARER, en conséquence, le moyen irrecevable ; subsidiairement, CONSTATER que la société Sogefinancement rapporte la preuve de la remise de la notice d'assurance par la clause figurant au contrat, aux termes de laquelle M. [X] a reconnu avoir conservé ladite notice annexée à son exemplaire de l'offre de crédit, et qu'il incombe à l'emprunteur d'apporter la preuve contraire qu'il n'aurait pas reçu ladite notice ou qu'elle serait irrégulière au regard des dispositions du code de la consommation sans que le Juge ne puisse le présumer, étant rappelé qu'il incombe aux parties d'alléguer et établir les faits à l'appui d'une irrégularité ; CONSTATER, en outre, que l'exposante produit en cause d'appel copie de la notice d'assurance remise à l'emprunteur ; DIRE ET JUGER que la déchéance du droit aux intérêts contractuels n'est pas encourue ;

CONSTATER que la déchéance du terme a été prononcée ; subsidiairement, PRONONCER la résiliation judiciaire du contrat de prêt au vu des manquements de l'emprunteur dans son obligation de rembourser les échéances du crédit et fixer la date des effets de la résiliation au 2 mai 2018 ;

En conséquence, et en tout état de cause, CONDAMNER M. [X] à payer à la société Sogefinancement la somme de 8 200,72 euros majorée des intérêts au taux contractuel de 5,85 % l'an à compter du 18 janvier 2019 sur la somme de 7 203,43 euros et au taux légal pour le surplus, en deniers ou quittance valable pour les éventuels règlements postérieurs au 17 janvier 2019, en remboursement du prêt personnel n° 33197628234 ;

DÉBOUTER M. [X] de sa demande reconventionnelle aux fins de désinscription au Fichiers des Incidents de Remboursement des crédits aux Particuliers, ainsi que sa demande de dommages et intérêts pour maintien de l'inscription ; Le DÉBOUTER de toutes ses autres demandes, fins et conclusions ;

En tout état de cause, CONDAMNER M. [X] à payer à la société Sogefinancement la somme de 1 500 euros au titre des frais irrépétibles en application de l'article 700 du code de procédure civile ; le CONDAMNER aux entiers dépens avec distraction au profit de la société Cloix & Mendès-Gil en application de l'article 699 du code de procédure civile ».

L'appelante soutient que :

- le premier juge a commis un excès de pouvoir en statuant ultra petita, le tribunal ne pouvant se prononcer sur la condamnation du prêteur de deniers en dehors de toute demande formée en ce sens par l'emprunteur,

- le moyen tiré de la déchéance du droit aux intérêts contractuels pour irrégularité du formalisme précontractuel ou contractuel est irrecevable en ce que cet argument est prescrit, ce dernier ne pouvant être invoqué que jusqu'au 24 mars 2015, l'offre ayant été conclue le 24 mars 2010,

- le moyen tiré de la déchéance du droit aux intérêts contractuels pour irrégularité du formalisme précontractuel ou contractuel est mal fondé en ce que le prêteur de deniers n'a pas l'obligation de conserver et produire copie de la notice d'assurance, et qu'elle est bien fondée à se prévaloir d'avoir effectué une telle remise dès lors que celui-ci en rapporte la preuve par la clause du contrat par laquelle l'emprunteur atteste de la survenance de ce fait juridique,

- l'emprunteur doit par conséquent être condamné au paiement de la créance avec les intérêts au taux contractuel, soit la somme de 8 200,72 euros,

- subsidiairement, en cas de déchéance du droit aux intérêts contractuels, le tribunal a commis une erreur de calcul de la déchéance du droit aux intérêts contractuels ne faisant nullement ressortir un trop perçu de 1 491 euros, mais un trop perçu s'élevant à 45,73 euros,

- la demande reconventionnelle formée par l'emprunteur tendant à la condamnation de la société Sogefinancement pour maintien d'un fichage abusif est infondée, celui-ci échouant à rapporter la preuve qu'il aurait été fiché de manière injustifiée.

Par conclusions communiquées par voie électronique en date du 27 mars 2020, M. [X] demande à la cour de :

« Voir confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions.

Y ajoutant voir condamner la société Sogefinancement :

- sous astreinte de 100 euros par jour de retard, à procéder à cette désinscription,

- à la somme de 1 000 euros à titre de dommages et intérêts pour le préjudice qu'elle cause à M. [X] en maintenant cette inscription au FICP,

- à la somme de 2 000 euros sur le fondement du code de procédure civile,

- aux entiers dépens ».

M. [X] soutient que :

- le moyen tendant à faire annuler le jugement en ce que le tribunal aurait statué ultra petita n'est pas sérieux au regard des articles 4 et 5 du code de procédure civile et R. 632-1 du code de la consommation, le juge ayant le pouvoir de soulever d'office les moyens relatifs à l'irrégularité de l'offre préalable, que dès lors le tribunal ne pouvait qu'en tirer les conséquences, à savoir la déchéance du taux d'intérêt contractuel et la restitution du trop perçu par le prêteur,

- la possibilité de soulever d'office la déchéance du droit aux intérêts est imprescriptible, s'agissant d'une défense au fond,

- il y a lieu à prononcer la déchéance du droit aux intérêts contractuels, dès lors qu'il n'est pas démontré que l'emprunteur a pris connaissance de la notice d'assurance,

- en vertu de l'exécution provisoire dont a été assorti le jugement de première instance, la société Sogefinancement aurait dû procéder à la désinscription de l'emprunteur au FICP, ce qu'elle n'a pas fait ; que dès lors l'emprunteur est bien fondé à demander la condamnation de la société Sogefinancement au paiement de la somme de 1 000 euros au titre de dommages et intérêts pour le préjudice subi en maintenant l'inscription au FICP, sous astreinte de 100 euros par jour de retard.

Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions des parties, il est renvoyé aux écritures de celles-ci conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été rendue à la date du 22 février 2022.

L'affaire a été appelée à l'audience du 19 avril 2022.

Lors de l'audience, l'affaire a été examinée et mise en délibéré à la date du 9 juin 2022 par mise à disposition de la décision au greffe (Art. 450 CPC).

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la nullité du jugement

La société Sogefinancement demande à la cour d'annuler sur le fondement de l'article 5 du code de procédure civile le jugement au motif que le premier juge a statué ultra petita en la condamnant à payer une somme à M. [X] que ce dernier ne demandait pas et a donc excédé ses pouvoirs.

M. [X] s'oppose à la demande.

À l'examen des moyens débattus, la cour retient que la société Sogefinancement est mal fondée en sa demande au motif qu'une disposition ultra petita n'est pas en soi une cause de nullité de jugement étant précisé que la loi prévoit la possibilité de réparer l'ultra petita par l'action en retranchement de l'article 464 du code de procédure civile ou, accessoirement, par la voie de l'appel. Statuer en dehors de l'objet de litige, en violation de l'article 5 du code de procédure civile par définition, n'est pas en soi non plus un excès de pouvoirs mais une erreur dans l'acte de juger.

Compte tenu de ce qui précède, la cour rejette la demande de nullité du jugement.

Sur la demande en paiement

Le présent litige est relatif à un crédit antérieur à l'entrée en vigueur de la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010 de sorte qu'il sera fait application des articles du code de la consommation dans leur rédaction en vigueur avant le 1er mai 2011.

L'article L. 141-4 du code de la consommation permet au juge de relever d'office tous les moyens tirés de l'application des dispositions du code de la consommation, sous réserve de respecter le principe du contradictoire. Il a été fait application de cette disposition par le premier juge, étant rappelé qu'en ce qu'il tend à faire rejeter comme non justifiée la demande en paiement du prêteur ayant consenti un crédit à la consommation, le moyen tiré de la déchéance du droit aux intérêts opposé par l'emprunteur, ou soulevé d'office par le juge, constitue une défense au fond et n'est donc pas soumis à la prescription (article 72 du code de procédure civile et Avis n° 15014 du 18 septembre 2019 de la première chambre civile de la Cour de cassation).

L'article L. 311-30 du code de la consommation prévoit qu'en cas de défaillance de l'emprunteur, le prêteur peut exiger le remboursement immédiat du capital restant dû, majoré des intérêts échus mais non payés. Jusqu'à la date du règlement effectif, les sommes restant dues produisent les intérêts de retard à un taux égal à celui du prêt. En outre, le prêteur peut demander à l'emprunteur défaillant une indemnité qui, dépendant de la durée restant à courir du contrat et sans préjudice de l'application des articles 1152 et 1231 du code civil (dans leur rédaction alors applicable), est fixée suivant un barème déterminé par décret. L'article D. 311-11 du même code précise que lorsque le prêteur exige le remboursement immédiat du capital restant dû en application de l'article L. 311-30, il peut demander une indemnité égale à 8 % du capital restant dû à la date de la défaillance.

Ce texte n'a toutefois vocation à être appliqué au titre du calcul des sommes dues qu'après vérification de l'absence de forclusion de la créance, de ce que le terme du contrat est bien échu et de l'absence de déchéance du droit aux intérêts conventionnels.

Sur la forclusion

La recevabilité de l'action de la société Cofidis au regard de la forclusion, vérifiée par le premier juge, ne fait pas l'objet de contestation.

Sur la déchéance du terme

Aux termes de l'article 1353 du code civil, celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver.

Par ailleurs, selon l'article 1103 du code civil, les conventions légalement formées engagent leurs signataires et en application de l'article 1224 du même code, lorsque l'emprunteur cesse de verser les mensualités stipulées, le prêteur est en droit de se prévaloir de la déchéance du terme et de demander le remboursement des fonds avancés soit en raison de l'existence d'une clause résolutoire soit en cas d'inexécution suffisamment grave. L'article 1225 précise qu'en présence d'une clause résolutoire, la résolution est subordonnée à une mise en demeure infructueuse s'il n'a pas été convenu que celle-ci résulterait du seul fait de l'inexécution.

En matière de crédit à la consommation en particulier, il résulte des dispositions de l'article L. 311-30 du code de la consommation, applicable à la date du contrat (L. 312-39 aujourd'hui), que si le contrat de prêt d'une somme d'argent peut prévoir que la défaillance de l'emprunteur non commerçant entraînera la déchéance du terme, celle-ci ne peut sauf disposition expresse et non équivoque, être déclarée acquise au créancier sans la délivrance d'une mise en demeure restée sans effet, précisant le délai dont dispose le débiteur pour y faire obstacle.

En l'espèce, le contrat de prêt contient une clause d'exigibilité anticipée en cas de défaut de paiement (article 5 C - défaillance de l'emprunteur) et une mise en demeure préalable au prononcé de la déchéance du terme de payer la somme de 711,44 euros précisant le délai de régularisation (de 15 jours) a bien été envoyée le 9 avril 2018 ainsi qu'il en ressort du justificatif produit de sorte qu'en l'absence de régularisation dans le délai, ainsi qu'il en ressort de l'historique de compte, la société Sogefinancement a pu régulièrement prononcer la déchéance du terme le 3 mai 2018.

Sur la déchéance du droit aux intérêts contractuels

La cour constate que le premier juge a relevé d'office le moyen tiré de la déchéance du droit aux intérêts.

Sur la recevabilité du moyen tiré de la déchéance du droit aux intérêts

En application de l'article L. 141-4 devenu R. 632-1 du code de la consommation, le juge peut relever d'office toutes les dispositions du présent code dans les litiges nés de son application. Il écarte d'office, après avoir recueilli les observations des parties, l'application d'une clause dont le caractère abusif ressort des éléments du débat.

Ce texte confère au juge une simple possibilité de relever d'office toute violation des dispositions d'ordre public du code de la consommation tandis qu'il lui impose d'écarter d'office une clause abusive. En revanche, il ne pose aucune restriction à l'exercice des prérogatives ainsi conférées au juge pour autant que l'irrégularité résulte des faits litigieux dont l'allégation comme la preuve incombent aux parties.

Par ailleurs, au regard de sa date de conclusion, le contrat signé le 26 juin 2013 est soumis aux dispositions du code de la consommation dans leur rédaction postérieure à la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010 qui a porté ratification de la directive 2008/48/CE du Parlement européen et du Conseil du 23 avril 2008, concernant les contrats de crédit aux consommateurs et abrogeant la directive 87/102/CEE du Conseil. Il a été dit pour droit par la Cour de justice de l'Union européenne que les articles 8 et 23 de cette directive doivent être interprétés en ce sens qu'ils imposent à une juridiction nationale d'examiner d'office l'existence d'une violation de l'obligation précontractuelle du prêteur d'évaluer la solvabilité du consommateur, prévue à l'article 8 de cette directive et de tirer les conséquences qui découlent en droit national d'une violation de cette obligation, à condition que les sanctions satisfassent aux exigences dudit article 23.

Il s'en déduit que dans le rôle qui lui est conféré tant par la loi et le règlement internes que par le droit européen, le juge peut soulever d'office toute irrégularité heurtant une disposition d'ordre public et sanctionnée par la déchéance d'un droit qui fonde la demande d'une partie sans être enfermé dans quelque délai.

C'est donc à bon droit que le premier juge, en respectant le principe de contradiction, a examiné la conformité du contrat litigieux à l'article L. 311-12 devenu L. 312-21 et la société Sogefinancement est mal fondée à invoquer la prescription du moyen discuté.

Sur la déchéance du droit aux intérêts tirée du défaut de production de la notice d'assurance

La société Sogefinancement produit :

- l'offre de contrat de crédit,

- la notice d'assurance,

- le tableau d'amortissement,

- l'avenant,

- le tableau d'amortissement afférent à l'avenant,

- l'historique de prêt,

- un décompte de créance du 3 mai 2018, date de la déchéance du terme,

- un décompte de créance du 17 janvier 2019,

- la mise en demeure préalable,

- la mise en demeure du 25 octobre 218 de payer le solde du prêt.

Il appartient au créancier qui réclame des sommes au titre d'un crédit à la consommation de justifier du strict respect du formalisme informatif prévu par le code de la consommation, en produisant la notice d'assurance comportant les conditions générales (article L. 311-12 du code de la consommation, applicable à la date du contrat (L. 312-29 aujourd'hui), à peine de déchéance totale du droit aux intérêts (article L. 311-33 du code de la consommation, applicable à la date du contrat (L. 341-4 aujourd'hui), étant précisé également que la preuve de la remise de la notice et de sa conformité ne sauraient résulter d'une simple clause pré-imprimée selon laquelle l'emprunteur reconnaît la remise, une telle clause ne constitue qu'un indice qu'il incombe au prêteur de corroborer par un ou plusieurs éléments de preuve pertinents, et étant rappelé que la synthèse des garanties ne répond pas à l'exigence légale, le fonctionnement des garanties et les cas particuliers n'y figurant pas.

En l'espèce, à l'examen des pièces produites et des moyens débattus, la cour retient que la société Sogefinancement produit la notice assurance étant précisé que M. [X] a signé une formule qui mentionne qu'il a pris connaissance de la notice d'assurance et qu'un exemplaire de la notice lui a été remis qui est annexé à l'offre de contrat de crédit.

C'est donc en vain que M. [X] demande la confirmation du jugement en ce qui concerne la déchéance du droit aux intérêts au motif que la preuve de la remise de la notice d'assurance et de ce que M. [X] en a pris connaissance et l'a acceptée n'est pas rapportée comme cela ressort de l'absence de signature et de paraphe de l'emprunteur et de l'absence d'élément d'identification la rapportant au dossier de M. [X] ; en effet la loi n'exige pas que la notice d'assurance soit signée de l'emprunteur ou qu'elle comporte des éléments d'identification la rapportant au dossier de l'emprunteur.

Compte tenu de ce qui précède la cour dit que la sanction de la déchéance du droit aux intérêts n'est pas encourue.

Le jugement déféré est donc infirmé en ce qu'il a prononcé la déchéance du droit aux intérêts, et statuant à nouveau de ce chef, la cour dit n'y avoir lieu à prononcer d'office la déchéance du droit aux intérêts.

Sur le montant de la créance

La cour constate que la somme demandée à hauteur de 8'200,72 euros se décompose notamment en :

- 868,44 euros au titre des échéances échues impayées,

- 7'434,99 euros au titre du capital à échoir restant dû,

- 647,96 euros au titre de l'indemnité légale de 8 %,

- 349,33 euros au titre des intérêts conventionnels arrêtés à la date du 17 janvier 2019

- (à déduire) 1'100 euros de versements faits après la déchéance du terme et avant le 17 janvier 2019.

En application de l'article L. 311-24 devenu L. 312-39 du code de la consommation et au regard du décompte de créance, du tableau d'amortissement et de l'historique de compte, il résulte qu'à la date de la déchéance du terme, il est dû à la société Sogefinancement :

- 868,44 euros au titre des échéances échues impayées, avec intérêts au taux contractuel à compter du 18 janvier 2019,

- 7 434,99 euros au titre du capital à échoir restant dû, avec intérêts au taux contractuel à compter du 18 janvier 2019,

- 349,33 euros au titre des intérêts conventionnels arrêtés à la date du 17 janvier 2019.

Le contrat de prêt prévoit une indemnité forfaitaire due au prêteur en cas de prononcé de la déchéance du terme égale à 8 % du capital dû à la date de la défaillance, soit la somme de 594,79 euros calculée comme suit : 8 % x 7 434,99 ; cependant, en application de l'article 1152 devenu 1231-5 du code civil, le juge peut réduire d'office le montant de la clause pénale par le juge si elle est manifestement excessive. En l'espèce, la clause pénale de 8 % du capital dû à la date de la défaillance contenue au contrat de prêt est manifestement excessive compte tenu de ce qu'une indemnité a déjà été retenue lors de l'avenant, du préjudice réellement subi par la société Sogefinancement et du taux d'intérêt pratiqué ; elle sera donc réduite à la somme de 100 euros.

M. [X] est ainsi tenu au paiement de la somme totale de 7 652,76 euros (868,44 + 7 434,99 + 100 + 349,33 ' 1 100) avec intérêts au taux contractuel de 5,85 % l'an portant sur la somme de 7 203,43 euros (868,44 + 7 434,99 ' 1 100) à compter du 18 janvier 2019 et au taux légal pour le surplus.

Le jugement déféré est donc infirmé en ce qu'il a condamné la société Sogefinancement à payer à M. [X] la somme de 1 491 euros, et statuant à nouveau de ce chef, la cour condamne M. [X] à payer à la société Sogefinancement la somme de 7 652,76 euros avec intérêts au taux contractuel de 5,85 % l'an portant sur la somme de 7 203,43 euros à compter du 18 janvier 2019 et au taux légal pour le surplus.

Sur les autres demandes

Les demandes reconventionnelles formulées par M. [X] relatives au fichier des incidents de paiements sont rejetées par voie de conséquence dès lors que l'inscription au fichier des incidents de paiements alléguée à l'encontre de la société Sogefinancement n'est pas abusive ni fautive en l'absence de remboursement intégral du solde dû à la société Sogefinancement.

La cour condamne M. [X] aux dépens de la procédure de première instance et de la procédure d'appel en application de l'article 696 du code de procédure civile.

Le jugement déféré est infirmé en ce qui concerne l'application de l'article 700 du code de procédure civile.

Il apparaît équitable, compte tenu des éléments soumis aux débats, de condamner M. [X] à payer à la société Sogefinancement la somme de 600 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure d'appel.

L'ensemble des autres demandes plus amples ou contraires formées en demande ou en défense est rejeté, leur rejet découlant des motifs amplement développés dans tout l'arrêt.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant par arrêt contradictoire et en dernier ressort, mis à disposition au greffe,

Déboute la société Sogefinancement de sa demande d'annulation du jugement ;

Infirme le jugement en toutes ses dispositions critiquées ;

Statuant à nouveau dans les limites de l'appel, et ajoutant,

Déboute la société Sogefinancement de son exception relative à la prescription du moyen tiré de la déchéance du droit aux intérêts ;

Dit n'y avoir lieu à prononcer d'office la déchéance du droit aux intérêts ;

Condamne M. [I] [B] [P] [X] à payer à la société Sogefinancement la somme de 7 652,76 euros avec intérêts au taux contractuel de 5,85 % l'an portant sur la somme de 7 203,43 euros à compter du 18 janvier 2019 et au taux légal pour le surplus ;

Déboute M. [I] [B] [P] [X] de toutes ses demandes ;

Condamne M. [I] [B] [P] [X] à verser à la société Sogefinancement la somme de 600 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne M. [I] [B] [P] [X] aux dépens de première instance et d'appel dont distraction au profit de la SELAS Cloix et Mendes-Gil pour ceux la concernant en application de l'article 699 du code de procédure civile.

La greffièreLe président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 9 - a
Numéro d'arrêt : 19/19422
Date de la décision : 09/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-09;19.19422 ?
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