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09/06/2022 | FRANCE | N°19/08661

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 9 - a, 09 juin 2022, 19/08661


Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 9 - A



ARRÊT DU 09 JUIN 2022



(n° , 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/08661 - N° Portalis 35L7-V-B7D-B7ZTZ



Décision déférée à la Cour : Jugement du 18 mars 2019 - Tribunal d'Instance de PARIS - RG n° 11-19-000259





APPELANTE



La société DIFENDIS SA, société anonyme prise en personne de

son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

N° SIRET : 433 692 324 00083

[Adresse 2]

[Adresse 2]



représentée par Me Frédéric TROJMAN de la SELEURL CABINET ...

Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 9 - A

ARRÊT DU 09 JUIN 2022

(n° , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/08661 - N° Portalis 35L7-V-B7D-B7ZTZ

Décision déférée à la Cour : Jugement du 18 mars 2019 - Tribunal d'Instance de PARIS - RG n° 11-19-000259

APPELANTE

La société DIFENDIS SA, société anonyme prise en personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

N° SIRET : 433 692 324 00083

[Adresse 2]

[Adresse 2]

représentée par Me Frédéric TROJMAN de la SELEURL CABINET TROJMAN, avocat au barreau de PARIS, toque : C0767

INTIMÉS

Monsieur [P] [K]

né le 1er octobre 1971 à [Localité 3]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

représenté par Me Antoine BENOIT-GUYOD, avocat au barreau de PARIS, toque : D0035

Madame [R] [K]

née le 12 septembre 1977 à ETTERBECK (BELGIQUE)

[Adresse 1]

[Adresse 1]

représentée par Me Antoine BENOIT-GUYOD, avocat au barreau de PARIS, toque : D0035

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 1er février 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant M. Benoît DEVIGNOT, Conseiller, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. Christophe BACONNIER, Présidente de chambre

Mme Fabienne TROUILLER, Conseillère

M. Benoît DEVIGNOT, Conseiller

Greffière, lors des débats : Mme Camille LEPAGE

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par M. Christophe BACONNIER, Président et par Mme Camille LEPAGE, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Selon bon n° 222530417 établi le 1er mai 2018 lors du salon de [Localité 4], M. [P] [K] a commandé à la société Difendis (exerçant sous l'enseigne « Veneta Cucine »), au prix de 22 000 euros TTC, une cuisine aménagée incluant des meubles, un plan de travail, un évier, de la robinetterie et la réalisation du chantier.

M. [K] a versé un acompte de 8 000 euros, à raison de 4 000 euros par carte bancaire et 4 000 euros par un chèque qui n'a jamais été encaissé.

Il a par ailleurs acheté, le même jour, à une autre entreprise un réfrigérateur Bosch pour un montant de 825,49 euros TTC.

Estimant que la cuisine commandée n'était pas compatible avec la configuration des lieux et que l'acompte devait leur être remboursé, M. [P] [K] et son épouse, Mme [R] [K], ont fait assigner, par acte d'huissier du 18 décembre 2018, la société Difendis devant le tribunal d'instance de Paris qui, par jugement réputé contradictoire du 18 mars 2019, a :

- débouté Mme [K] de l'ensemble de ses demandes ;

- dit que le vente conclue le 1er mai 2018 n'était pas une vente parfaite ;

- condamné, en conséquence, le vendeur à rembourser à M. [K] la somme de 4 000 euros ;

- ordonné la restitution par le vendeur du chèque de banque remis par M. [K] le 1er mai 2018 ;

- débouté M. [K] de sa demande de dommages-intérêts ;

- condamné la « société Veneta Cucine » aux dépens ;

- rejeté la demande présentée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Pour statuer ainsi, après avoir estimé que Mme [K] n'était pas partie contractante et rejeté ses demandes, le tribunal a relevé que le bon de commande d'un montant de 22 000 euros renvoyait à un descriptif du mobilier et des éléments intérieurs, qui mentionnait un prix différent (22 254,66 euros) avec une précision selon laquelle le vendeur se réservait de modifier le prix. Il a aussi estimé que l'acheteur n'avait pas obtenu une information précontractuelle sur les conditions de la livraison, telle que prévue à l'article R. 111-1 du code de la consommation. Le premier juge en a déduit qu'à défaut de vente parfaite au sens de l'article 1583 du code civil, la restitution du prix versé lors de la signature du bon devait être ordonnée. Le premier juge a ajouté que M. [K] ne démontrait pas de faute imputable à la société Difendis justifiant une indemnisation pour l'achat d'un réfrigérateur devenu inutile.

Le 18 avril 2019, la société Difendis a interjeté appel.

Dans ses conclusions d'appel déposées par voie électronique le 15 juillet 2019, la société Difendis (exerçant sous l'enseigne « Veneta Cucine ») requiert la cour d'infirmer le jugement puis statuant à nouveau :

- de débouter M. et Mme [K] de l'ensemble de leurs demandes à son encontre ;

- d'enjoindre à M. et Mme [K] de récupérer la cuisine commandée à compter de la décision à intervenir ;

- de condamner M. et Mme [K] à lui payer la somme de 18 200 euros TTC au titre du solde de la cuisine commandée ;

- de condamner M. et Mme [K] à lui payer la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

À l'appui de ses prétentions, elle expose que le bon de commande, clair et explicite, répond aux exigences de l'article R. 111-1 du code de la consommation. Elle souligne que ce bon et la description de l'aménagement ont été établis selon les mesures et un plan fournis par le client. Elle souligne que M. et Mme [K] ont manifesté leur intention d'être liés par le contrat en portant la mention manuscrite « Lu et approuvé ; bon pour commande », puis en signant. La conclusion du contrat étant intervenue lors de la foire de [Localité 4], l'appelante en déduit que M. et Mme [K] ne peuvent pas se prévaloir des règles du droit de la consommation, notamment celles relatives au droit de rétractation.

Elle estime que la somme de 8 000 euros qui a été versée revêt la nature d'un acompte et ne peut donc pas donner lieu à remboursement.

Elle considère que les parties sont convenues d'un prix déterminé, ce qui est confirmé par un mail du 7 mai 2018 de M. [K] indiquant que le prix initialement affiché de 34 000 euros a été ramené à 22 000 euros.

Elle fait valoir que le bon de commande mentionnait un délai de livraison ou de mise à disposition limité à la fin du mois de juillet 2018, mais que ce délai ne pouvait plus être respecté en raison des modifications demandées par M. et Mme [K].

Dans leurs conclusions déposées par voie électronique le 25 septembre 2019, M. et Mme [K] sollicite que la cour :

- confirme le jugement, en ce qu'il a dit que la vente n'était pas parfaite, en ce qu'il a condamné en conséquence « Veneta Cucine » à rembourser à M. [K] la somme de 4 000 euros et en ce qu'il a ordonné la restitution du chèque remis par celui-ci ;

- infirme le jugement pour le surplus ;

statuant à nouveau,

- condamne « Veneta Cucine » à verser'à M. [K] la somme de 825,49 euros en réparation du préjudice subi ;

- condamne « Veneta Cucine » à leur payer la somme de 1 000 euros au titre de la résistance abusive, ainsi que la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Ils exposent que le bon de commande a été établi au nom de M. [P] [K], mais que celui-ci ne l'a pas signé et que la mention « lu et approuvé, bon pour commande » qui y figure n'est pas de sa main. Ils en déduisent que l'acte juridique ne peut pas être parfait.

Ils affirment que la vendeuse ne leur a jamais indiqué par oral que toute vente était définitive. Ils ajoutent que le bon de commande ne comporte pas l'encadré spécifique devant mentionner, en tête de l'offre de contrat, l'absence de délai de rétractation.

Subsidiairement, ils estiment que le bon de commande est nul du fait de la violation par le professionnel de l'article L. 112-1 du code de la consommation.

Très subsidiairement, ils affirment que ce même professionnel a caché une information déterminante, en indiquant par oral que la vente ne serait ferme qu'après venue du métreur, tout en ne mentionnant pas par écrit l'absence de délai de rétractation. Ils en concluent que la vente serait nulle pour dol.

Ils soulignent que le bon de commande indique un prix de 22 000 euros et une livraison à la fin du mois de juillet 2018, mais le détail de la commande un prix de 22 254,66 euros et une livraison le 1er mai 2018, le même document ajoutant que « le montant définitif sera celui indiqué dans la confirmation de commande émise par Veneta Cucine ». Ils déduisent de cette divergence que les parties ne sont pas convenues d'un prix déterminé ou déterminable.

Ils considèrent que le cuisiniste n'a pas donné le délai d'installation, en violation de l'article R. 111-1 du code de la consommation.

Ils estiment qu'en l'absence de métré préalablement effectué, le professionnel ne pouvait pas faire signer un devis valant commande.

Ils soulignent la disparité des plans dont la modification a été demandée, selon eux, par « Veneta Cucine ».

Ils exposent que, s'ils avaient su que la cuisine envisagée ne « tiendra(it) » pas chez eux, ils n'auraient pas acquis un nouveau réfrigérateur qui ne leur servirait finalement à rien.

Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions des parties, il est renvoyé aux écritures de celles-ci, conformément à l'article 455 du code de procédure civile.

Le 23 novembre 2021, la clôture de l'instruction a été prononcée par le magistrat chargé de la mise en état.

L'affaire a été appelée à l'audience du 1er février 2022.

Il n'a été donné aucune suite à deux messages de la cour adressés pendant le délibéré les 21 avril puis 10 mai 2022 à l'avocat de la société Difendis afin que celui-ci produise par voie électronique, dans les meilleurs délais, puis le 18 mai 2022 au plus tard, la pièce n° 3 (mail du 7 mai 2018) manquante dans le dossier déposé.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur l'absence de vente parfaite

Il ressort de l'article 1583 du code civil que la vente est parfaite entre les parties et la propriété est acquise de droit à l'acheteur à l'égard du vendeur, dès lors qu'on est convenu de la chose et du prix, quoique la chose n'ait pas encore été livrée ni le prix payé.

L'article L. 111-1 du code de la consommation, dans sa version alors applicable, dispose que :

« Avant que le consommateur ne soit lié par un contrat de vente de biens ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, les informations suivantes :

(...)

2° Le prix du bien ou du service, en application des articles L. 112-1 à L. 112-4' (...) ».

En l'espèce, le bon de commande litigieux fait apparaître M. [K] seul comme cocontractant.

La signature qui figure à la fin après la mention manuscrite « lu et approuvé. Bon pour commande » n'est manifestement pas la sienne, au vu de son passeport qui est antérieur (1er juillet 2015), d'un autre spécimen de signature (15 décembre 2015) et d'un bon de commande du même jour avec un tiers (1er mai 2018).

Au surplus, alors que le bon de commande du 1er mai 2018 mentionne un prix de 22 000 euros TTC, le détail de commande qui a été établi par ailleurs à la même date indique un prix de 22 254,66 euros et surtout « Le montant définitif sera celui indiqué dans la confirmation de commande émise par Veneta Cucine ».

Il n'est donc pas démontré, comme l'a relevé le premier juge, que les parties sont convenues d'un prix déterminé ou déterminable.

Dès lors, il n'y a pas eu de vente et la restitution de l'acompte doit être ordonnée.

En conséquence, le jugement est confirmé, en ce qu'il a condamné la société à rembourser à M. [K] la somme de 4 000 euros et à restituer à celui-ci le chèque de banque remis pour le même montant.

Sur les dommages-intérêts liés à l'achat d'un réfrigérateur

A la lecture du mail du 4 juin 2018, le métreur de la société n'est pas intervenu au domicile de M. [K] avant le 23 mai 2018.

À l'instar du premier juge, la cour relève que M. [K] ne saurait reprocher à la société Difendis d'avoir dû acheter le 1er mai 2018 un appareil électroménager à une société tierce, alors que l'intimé ne disposait alors que de mesures qu'il avait lui-même prises et qu'aucun élément du dossier ne démontre que le cuisiniste lui avait conseillé de procéder à cette acquisition.

En conséquence, la demande de dommages-intérêts est rejetée.

Sur les dommages-intérêts pour résistance abusive

Il résulte du dernier alinéa de l'article 1231-6 du code civil que le créancier auquel son débiteur en retard a causé, par sa mauvaise foi, un préjudice indépendant de ce retard, peut obtenir des dommages et intérêts distincts de l'intérêt moratoire.

En l'espèce, M. et Mme [K] ne justifient d'aucun préjudice indépendant du retard.

En conséquence, la demande de dommages-intérêts pour résistance abusive est rejetée.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant après débats en audience publique, par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe,

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions, sous cette seule réserve que l'exacte dénomination de la société condamnée est société Difendis (exerçant sous l'enseigne « Veneta Cucine ») ;

Y ajoutant,

Rejette la demande présentée par M. [P] [K] et Mme [R] [K] de dommages-intérêts pour procédure abusive ;

Condamne la société Difendis (exerçant sous l'enseigne « Veneta Cucine ») aux dépens d'appel, ainsi qu'à payer à M. [P] [K] et Mme [R] [K] pris ensemble la somme de 1 200 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais exposés en cause d'appel.

La greffièreLe président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 9 - a
Numéro d'arrêt : 19/08661
Date de la décision : 09/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-09;19.08661 ?
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