La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

07/06/2022 | FRANCE | N°20/10472

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 3 - chambre 5, 07 juin 2022, 20/10472


Copies exécutoiresREPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 3 - Chambre 5



ARRET DU 07 JUIN 2022



(n° , 4 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/10472 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CCDZK



Décision déférée à la Cour : Jugement du 26 Septembre 2019 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 15/06733





APPELANTE



Madame [M] [G] née le 4 décembre 1979 à [Localité 5

] (Algérie),



[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Localité 1] (ALGERIE)



représentée par Me Stéphanie CALVO, avocat au barreau de PARIS, toque : A0599



(bénéficie d'une AIDE JURIDICTI...

Copies exécutoiresREPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 3 - Chambre 5

ARRET DU 07 JUIN 2022

(n° , 4 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/10472 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CCDZK

Décision déférée à la Cour : Jugement du 26 Septembre 2019 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 15/06733

APPELANTE

Madame [M] [G] née le 4 décembre 1979 à [Localité 5] (Algérie),

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Localité 1] (ALGERIE)

représentée par Me Stéphanie CALVO, avocat au barreau de PARIS, toque : A0599

(bénéficie d'une AIDE JURIDICTIONNELLE TOTALE numéro 2019/061798 du 20/01/2020 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de PARIS)

INTIME

LE MINISTERE PUBLIC pris en la personne de MONSIEUR LE PROCUREUR GENERAL - SERVICE CIVIL

[Adresse 2]

[Localité 3]

représenté à l'audience par Mme M.-D. PERRIN, substitut général

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 21 avril 2022, en audience publique, l' avocat de l'appelante et le ministère public ne s'y étant pas opposés, devant M. François MELIN, conseiller, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :

Mme Hélène FILLIOL, présidente de chambre

M. François MELIN, conseiller

Mme Marie-Catherine GAFFINEL, conseillère

Greffier, lors des débats : Mme Mélanie PATE

ARRET :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Mme Hélène FILLIOL, présidente de chambre et par Mme Mélanie PATE greffière, présente lors de la mise à disposition.

Vu le jugement rendu le 26 septembre 2019 par le tribunal de grande instance de Paris qui a constaté que le récépissé prévu à l'article 1043 du code de procédure civile a été délivré, déclaré Mme [M] [G], se disant née le 4 décembre 1979 à [Localité 5] (Algérie), irrecevable à faire la preuve qu'elle a par filiation la nationalité française, jugé qu'elle est réputée avoir perdu la nationalité française le 4 juillet 2012, ordonné la mention prévue par l'article 28 du code civil et l'a condamnée aux dépens dans les conditions prévues en matière d'aide juridictionnelle';

Vu la déclaration d'appel du 23 juillet 2020 et les conclusions notifiées le 22 décembre 2020 de Mme [M] [G] qui demande à la cour de dire que l'appel est recevable et fondé, d'infirmer le jugement, de juger qu'elle est recevable à faire la preuve qu'elle est française par filiation, d'ordonner la mention prévue par l'article 28 du code civil et mettre les dépens à la charge du ministère public ;

Vu les conclusions notifiées le 22 mars 2021 par le ministère public qui demande à la cour, à titre principal, de constater que le récépissé prévu à l'article 1043 du code de procédure civile n'a pas été délivré et dire en conséquence que la déclaration d'appel est caduque et les conclusions irrecevables, à titre subsidiaire de confirmer le jugement, de dire que Mme [M] [G] est irrecevable à faire la preuve qu'elle a par filiation la nationalité française et qu'elle est réputée avoir perdu la nationalité française le 4 juillet 2012, à titre infiniment subsidiaire de dire qu'elle n'est pas française, d'ordonner la mention prévue par l'article 28 du code civil, et de statuer ce que de droit sur les dépens ;

MOTIFS

Il est justifié de l'accomplissement de la formalité prévue par l'article 1043 du code de procédure civile par la production du récépissé du ministère de la Justice en date du 20 avril 2022. La déclaration d'appel n'est donc pas caduque.

Mme [M] [G], se disant née le 4 décembre 1979 à [Localité 5] (Algérie), soutient qu'elle est française pour être née de Mme [H] [J], épouse [G], née le 6 juin 1949 à [Localité 5], qui a été jugée française par un jugement du tribunal de grande instance de Marseille du 8 avril 2015.

En application de l'article 30 alinéa 1er du code civil, il appartient à celui qui revendique la nationalité française d'en rapporter la preuve, lorsqu'il n'est pas titulaire d'un certificat de nationalité française délivré à son nom, conformément aux dispositions des articles 31 et suivants du code civil. N'étant pas personnellement titulaire d'un certificat de nationalité française, il appartient à Mme [M] [G] en application de l'article 30 du code civil de rapporter la preuve qu'il réunit les conditions requises par la loi pour l'établissement de sa nationalité française.

Le ministère public lui oppose les dispositions de l'article 30-3 du code civil. Ce dernier dispose que': « Lorsqu'un individu réside ou a résidé habituellement à l'étranger, où les ascendants dont il tient par filiation la nationalité sont demeurés fixés pendant plus d'un demi-siècle, cet individu ne sera plus admis à faire la preuve qu'il a, par filiation, la nationalité française si lui-même et celui de ses père et mère qui a été susceptible de la lui transmettre n'ont pas eu la possession d'état de Français.

Le tribunal doit dans ce cas constater la perte de la nationalité française dans les termes de l'article 23-6 du code civil en déterminant la date à laquelle la nationalité française a été perdue.'»

La présomption irréfragable de perte de la nationalité française par désuétude édictée par l'article 30-3 du code civil suppose que les conditions prévues par le texte précité soient réunies de manière cumulative.

L'application de l'article 30-3 du code civil est en conséquence, subordonnée à la réunion des conditions suivantes : l'absence de résidence en France pendant plus de 50 ans du parent français, l'absence de possession d'état de l'intéressé et de son parent, le demandeur devant en outre résider ou avoir résidé habituellement à l'étranger.

L'article 30-3 du code civil interdit, dès lors que les conditions qu'il pose sont réunies, de rapporter la preuve de la transmission de la nationalité française par filiation, en rendant irréfragable la présomption de perte de celle-ci par désuétude. Édictant une règle de preuve, l'obstacle qu'il met à l'administration de celle-ci ne constitue pas une fin de non-recevoir au sens de l'article 122 du code de procédure civile, de sorte qu'aucune régularisation sur le fondement de l'article 126 du même code ne peut intervenir (Civ 1ère, 13 juin 2019, pourvoi n°18-16.838).

Contrairement à ce que soutient Mme [M] [G], chaque Etat disposant du droit de déterminer ses nationaux, le fait d'instituer une présomption irréfragable de non transmission de la nationalité française par filiation lorsque les conditions strictes et cumulatives posées par l'article 30-3 du code civil sont réunies, ne saurait être interprété comme portant atteinte au droit à un procès équitable et au droit à un recours effectif garantis par l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme, dès lors que l'intéressé dispose du droit de contester l'application de ce texte au regard de sa situation personnelle, en apportant la preuve que lui-même ou l'ascendant dont il dit tenir sa nationalité française, a conservé un lien effectif avec la France pendant la période de 50 ans, soit en fixant sa résidence en France, soit en établissant une possession d'état de Français.

S'il est constant que le tribunal de grande instance de Marseille a jugé le 8 avril 2015, suite à une assignation du 14 octobre 2013, que Mme [H] [J], épouse [G], née le 6 juin 1949 à [Localité 5], mère revendiquée de Mme [M] [G], est française, il n'en demeure pas moins qu'à la date de l'assignation, le délai de cinquante ans prévu par l'article 30-3 du code civil était expiré. Par ailleurs, les éléments de possession d'état de Française que Mme [M] [G] invoque à l'égard de sa mère sont postérieurs, ainsi qu'elle l'indique elle-même (conclusions p. 8), au jugement du 8 avril 2015 et sont donc eux aussi postérieurs à l'expiration du délai de 50 ans.

Concernant Mme [M] [G], il est constant qu'elle est domiciliée en Algérie. Par ailleurs, elle n'allègue pas avoir déjà résidé en France et ne fait état d'aucun élément de possession d'état de Française.

Ainsi, comme l'a retenu le jugement du 26 septembre 2019 par des motifs exacts et pertinents que la cour adopte, les conditions prévues par l'article 30-3 du code civil sont réunies.

Le jugement sera cependant infirmé en ce qu'il a déclaré Mme [M] [G] irrecevable à faire la preuve, qu'elle a par filiation, la nationalité française, l'article 30-3 du code civil n'édictant pas une fin de non-recevoir.

Mme [M] [G] ne peut pas soutenir utilement qu'elle serait victime d'une atteinte disproportionnée à son droit au respect à la vie privée et familiale garanti par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme en ce qu'elle n'aurait pas la possibilité de s'intaller en France auprès des membres de sa famille jouissant de la nationalité française. Il lui est en effet possible, indépendamment de sa nationalité, de solliciter l'obtention d'un titre de séjour en France.

Il y a lieu de juger que Mme [M] [G] n'est pas admise à faire la preuve qu'elle a, par filiation, la nationalité française et qu'elle est réputée l'avoir perdue à la date du 4 juillet 2012.

Les dépens seront supportés par Mme [M] [G] qui succombe en ses prétentions, dans les conditions prévues en matière d'aide juridictionelle.

PAR CES MOTIFS

Constate que le récépissé prévu par l'article 1043 du code de procédure civile a été délivré,

Dit que la déclaration d'appel n'est pas caduque,

Confirme le jugement en ce qu'il a constaté que les conditions de l'article 30-3 du code civil sont remplies à l'égard de Mme [M] [G],

L'infirme pour le surplus,

Statuant à nouveau :

Dit que Mme [M] [G], se disant née le 4 décembre 1979 à [Localité 5] (Algérie), n'est pas admise à faire la preuve qu'elle a, par filiation, la nationalité française,

Dit que Mme [M] [G] est réputée avoir perdu la nationalité française le 4 juillet 2012,

Ordonne la mention prévue par l'article 28 du code civil,

Condamne Mme [M] [G] aux dépens.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 3 - chambre 5
Numéro d'arrêt : 20/10472
Date de la décision : 07/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-07;20.10472 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award