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27/05/2022 | FRANCE | N°19/15368

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 9 - a, 27 mai 2022, 19/15368


Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 9 - A



ARRÊT DU 27 MAI 2022



(n° , 11 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/15368 - N° Portalis 35L7-V-B7D-CAOTK



Décision déférée à la Cour : Jugement du 1er juillet 2019 - Tribunal d'Instance de PARIS - RG n° 11-15-02-0327





APPELANTE



La société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE, société anonym

e prise en la personne de son représentant légal, venant aux droits de la Banque SOLFEA aux termes de cession de créance en date du 28 février 2017

N° SIRET : 542 097 902 04319

[...

Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 9 - A

ARRÊT DU 27 MAI 2022

(n° , 11 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/15368 - N° Portalis 35L7-V-B7D-CAOTK

Décision déférée à la Cour : Jugement du 1er juillet 2019 - Tribunal d'Instance de PARIS - RG n° 11-15-02-0327

APPELANTE

La société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE, société anonyme prise en la personne de son représentant légal, venant aux droits de la Banque SOLFEA aux termes de cession de créance en date du 28 février 2017

N° SIRET : 542 097 902 04319

[Adresse 1]

[Localité 5]

représentée et assistée de Me Edgard VINCENSINI, avocat au barreau de PARIS, toque : B0496

INTIMÉS

Monsieur [H] [M]

né le 11 novembre 1969 à [Localité 7] (31)

[Adresse 2]

[Localité 3]

représenté par Me Ariane VENNIN de la SELEURL A7 AVOCAT, avocat au barreau de PARIS, toque : C1186

Madame [J] [L] épouse [M]

née le 26 novembre 1969 à LYON (69)

[Adresse 2]

[Localité 3]

représentée par Me Ariane VENNIN de la SELEURL A7 AVOCAT, avocat au barreau de PARIS, toque : C1186

La SELARL [C] M.J. en qualité de mandataire liquidateur de la société NOUVELLE RÉGIE DES JONCTIONS DES ÉNERGIES DE FRANCE exerçant sous l'enseigne GROUPE SOLAIRE DE FRANCE

N° SIRET : 821 325 941 00010

[Adresse 4]

[Localité 6]

DÉFAILLANTE

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 15 mars 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Fabienne TROUILLER, Conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. Christophe BACONNIER, Président de chambre

Mme Fabienne TROUILLER, Conseillère

Mme Laurence ARBELLOT, Conseillère

Greffière, lors des débats : Mme Camille LEPAGE

ARRÊT :

- RÉPUTÉ CONTRADICTOIRE

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par M. Christophe BACONNIER, Président et par Mme Camille LEPAGE, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Par acte sous seing privé en date du 27 décembre 2011, M. [H] [M] et Mme [J] [L] épouse [M] ont, à la suite d'un démarchage à domicile, acheté auprès de la société Nouvelle Régie des Jonctions des Énergies de France exerçant sous l'enseigne Groupe solaire de France (la société GSF) une centrale photovoltaïque comprenant douze panneaux photovoltaïques, au prix de 21 500 euros.

Le même jour, par acte sous seing privé, M. et Mme [M] ont contracté auprès de la société Banque solfea aux droits de qui se trouve la société BNP Paribas personal finance (la société BNPPPF) un contrat de crédit affecté d'un montant de 21 500 euros au taux contractuel de 5,13 % l'an remboursable sur une durée de 187 mois visant à financer l'achat de l'installation.

Le matériel a été installé le 14 janvier 2012, la facture a été éditée le 17 janvier et les fonds ont été débloqués le 19 janvier 2012. L'installation a été raccordée et est productive d'électricité depuis le 21 novembre 2012. La première échéance a été prélevée le 10 janvier 2013.

Par jugement en date du 12 novembre 2014 le tribunal de commerce de Bobigny a placé la société GSF en liquidation judiciaire et Maître [G] [C] a été désigné liquidateur, l'ouverture de la procédure collective datant du 18 juin 2014. La SELARLU [C] MJ a été nommée liquidateur par ordonnance du 1er septembre 2016.

Saisi le 24 novembre 2015 par M. et Mme [M] d'une demande tendant à l'annulation des contrats de vente et de crédit affecté, le tribunal d'instance de Paris, par un jugement réputé contradictoire rendu le 1er juillet 2019 auquel il convient de se reporter, a :

- débouté la société BNPPPF de sa demande de communication de pièces,

- déclaré les demandes M. et Mme [M] recevables,

- prononcé l'annulation du contrat de vente et l'annulation de plein droit du contrat de prêt,

- dit que la société BNPPPF venant aux droits de la société Banque solfea a manqué à ses obligations lors de la souscription du contrat de crédit et lors de la libération des fonds et que ces fautes la privent du droit de demander à M. et Mme [M] le remboursement du capital emprunté,

- débouté la société BNPPPF de sa demande en restitution du capital emprunté,

- condamné la société BNPPPF à rembourser à M. et Mme [M] les sommes déjà versées en exécution du contrat de prêt,

- condamné la société BNPPPF à procéder à la désinscription de M. et Mme [M] du fichier FICP de la Banque de France,

- condamné la société BNPPPF à payer à M. et Mme [M] la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- ordonné l'exécution provisoire du jugement.

Pour statuer ainsi, le tribunal a principalement retenu qu'en application de l'article L. 622-21 I du code de commerce, le jugement d'ouverture interrompt ou interdit toute action en justice de la part de tous les créanciers dont la créance n'est pas mentionnée au I de l'article L. 622-17 du même code, M. et Mme [M] n'étaient pas contraints de déclarer leur créance et que leurs demandes étaient donc recevables.

Concernant le contrat de vente litigieux, le tribunal a considéré qu'il était imprécis sur le matériel acheté, que les modalités de livraison et du crédit n'étaient pas précisées, que la nullité du bon de commande n'avait pas été couverte car seul M. [M] avait signé le bon de commande et que la confirmation supposait la connaissance du vice.

Il a estimé qu'en application de l'article L. 311-32 devenu L. 312-55 du code de la consommation, le contrat de crédit affecté était annulé de plein droit, les contrats étant interdépendants. Il a retenu que la banque avait commis une faute en s'abstenant de vérifier la régularité du contrat principal alors qu'elle était tenue de vérifier si le bon de commande était conforme aux dispositions légales régissant le démarchage à domicile.

Par une déclaration en date du 24 juillet 2019, la société BNPPPF a relevé appel de cette décision.

Aux termes de conclusions remises le 19 mars 2020, l'appelante demande à la cour :

- d'infirmer le jugement en toutes ses dispositions,

- de déclarer irrecevables les demandes en annulation ou en résolution des contrats,

- de dire que l'exécution des contrats doit être poursuivie,

- de condamner M. et Mme [M] à la reprise de l'exécution du contrat de crédit conformément au tableau d'amortissement à compter de l'arrêt à intervenir,

- de condamner M. et Mme [M] à rembourser les échéances des prêts restituées en exécution du jugement,

- d'ordonner le report des échéances des prêts suspendues le temps de la présente procédure,

- de dire que la preuve d'un dol ou de la violation des articles L. 121-21 et suivants n'est pas rapportée, que les causes éventuelles de nullité du bon de commande ont été couvertes par des actes postérieurs de M. et Mme [M], que l'inexécution n'est pas caractérisée par l'absence de rentabilité de leur installation photovoltaïque,

- de débouter M. et Mme [M] de leurs demandes en annulation ou en résolution judiciaire des contrats,

- subsidiairement en cas d'annulation ou de résolution, de condamner solidairement M. et Mme [M] à lui restituer la somme de 21 500 euros au titre du capital emprunté, avec intérêts au taux légal à compter du 19 janvier 2012,

- de dire et juger qu'elle n'a pas commis de faute, que les préjudices éventuellement subis ne sont pas caractérisés et pas imputables à la banque, que la preuve d'un préjudice équivalant au montant du capital emprunté n'est pas rapportée,

- très subsidiairement si une faute était retenue, de dire que le montant du préjudice de M. et Mme [M] ne peut être égal au montant du capital prêté et le réduire à de plus justes proportions,

- à titre reconventionnel, de condamner in solidum M. et Mme [M] au paiement de la somme de 3 000 euros au titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,

- si une faute était retenue, ordonner au emprunteurs de produire sous astreinte de 100 euros par jour l'ensemble des factures au titre du contrat d'achat d'énergie pour les années 2016, 2017 et 2018,

- en tout état de cause, de débouter M. et Mme [M] de l'intégralité de leurs demandes et les condamner in solidum à lui payer une somme de 3 500 euros au titre des frais irrépétibles.

L'appelante indique que les demandes de M. et Mme [M] ne sont pas recevables compte tenu de l'objet de leur action du fait de la liquidation de la société GSF et en l'absence de déclaration de leur créance.

Elle affirme que ce bon de commande n'est pas nul et répond aux exigences de l'article L. 121-23 du code de la consommation, que la preuve du dol n'est pas rapportée et que la nullité a été confirmée.

En outre, l'appelante indique que le contrat de crédit ne doit pas suivre le sort de la nullité du contrat principal, que la banque Solfea n'a pas commis de faute car il n'appartient pas au prêteur de s'assurer de la conformité du bon de commande au code de la consommation. De plus, elle affirme ne pas avoir commis de faute dans le déblocage des fonds en précisant d'une attestation de fin de travaux a été signées sans réserves. Ainsi, elle énonce que le préjudice subi n'est pas certain et n'est pas réparable.

Aux termes de conclusions remises le 3 janvier 2020, M. et Mme [M] demandent à la cour :

- de juger infondé l'appel formé par la banque BNPPPF,

- de débouter la banque BNPPPF de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

- de confirmer le jugement dont appel,

- à titre subsidiaire, de prononcer la résolution judiciaire pour inexécution du contrat de vente et en conséquence celle du crédit affecté, qui a pour effet de priver la banque BNPPPF de son droit aux intérêts dudit contrat,

- de leur donner acte de ce qu'ils mettront à disposition du liquidateur de la société GSF, l'ensemble des matériels vendus au titre du bon de commande résolu, et qu'ils les lui restitueront à sa simple demande,

- en tout état de cause, de confirmer le jugement dont appel,

- de condamner la banque BNPPPF à leur payer la somme de 3 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Les intimés affirment, au visa de l'article L. 622-21 du code de commerce, que leurs demandes sont recevables puisqu'ils demandent l'annulation du contrat de vente seulement pour obtenir l'annulation du contrat de crédit affecté et que la dépose du matériel se fera à leurs frais.

Ainsi, ils affirment ne pas avoir entrepris une procédure abusive. De plus, ils indiquent que le prêt n'a pas été débloqué à l'échéance comme il était stipulé dans le contrat de prêt.

Ils font valoir l'annulation du bon de commande en application de l'article L. 121-23 du code de la consommation en ce qu'il ne contient pas plusieurs des mentions légales obligatoires.

De plus, ils précisent qu'il n'y a pas eu de confirmation des nullités puisqu'en tant que consommateurs profanes, ils n'avaient pas conscience des causes de nullités affectant le bon de commande. En outre, selon eux, la société GSF a commis un dol en leur promettant un autofinancement et en leur faisant remplir un dossier de candidature. De plus, ils affirment que la BNPPPF n'a pas produit un original de l'attestation de fin de travaux qui a été trafiquée.

En application des articles L. 311-1 et L. 311-12 du code de la consommation, ils affirment que les contrats sont interdépendants et que la nullité de l'un entraîne la nullité de l'autre.

A titre subsidiaire, ils demandent, au visa de l'article 1184 du code civil, la résolution judiciaire du contrat de vente pour inexécution suffisamment grave des obligations du vendeur, en l'espèce l'absence d'autofinancement auquel s'est engagé le vendeur.

Ils considèrent enfin que la banque a commis une faute en acceptant de financer un bon de commande présentant treize causes de nullité et une faute dans le déblocage des fonds au vu d'une attestation falsifiée signée 18 jours après le bon de commande, qui l'a privée de sa créance de restitution.

La déclaration d'appel et les conclusions d'appelant ont été régulièrement signifiées par actes d'huissier délivrés le 10 octobre 2019 à personne morale et le 19 mars 2020 à étude. La SELARLU [C] M.J, en qualité de liquidateur de la société GSF n'a pas constitué avocat. Les conclusions d'intimés lui ont été signifiées sous les mêmes formes le 31 décembre 2019.

Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions des parties, il est renvoyé aux écritures conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 25 janvier 2022 et l'affaire a été appelée à l'audience du 15 mars 2022.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Il est rappelé que la cour n'est pas tenue de statuer sur des demandes de : « dire et juger » qui ne sont pas des prétentions juridiques.

Sur la recevabilité des demandes

L'appelante invoque l'irrecevabilité des demandes de M. et Mme [M] en l'absence de déclaration de créance dans la procédure collective de la société GSF, estimant que leurs demandes, introduites postérieurement aux jugements de redressement puis de liquidation judiciaire de la société GSF tendent indirectement au paiement d'une somme d'argent.

Alors que les dispositions de l'article L. 622-21 du code de commerce n'interdisent que les actions qui tendent à la condamnation d'un débiteur sous le coup d'une procédure collective au paiement d'une somme d'argent ou à la résolution d'un contrat pour défaut de paiement d'une somme d'argent, force est de constater que l'action de M. et Mme [M] à l'encontre de la société GSF en liquidation judiciaire n'entre pas dans le champ de ces dispositions dès lors qu'elle tend uniquement à l'annulation du contrat de vente.

Sans qu'il y ait lieu de suivre l'appelante dans ses plus amples développements relatifs aux conséquences nécessaires d'une éventuelle annulation de ce contrat, en l'absence de toute demande en paiement formée dans le cadre de la présente instance à l'encontre de la société GSF, les prétentions de M. et Mme [M] sont recevables de ce chef.

Sur la demande de nullité du bon de commande

Il est constant que le contrat de vente et de prestation de services litigieux est soumis aux dispositions des articles L. 121-21 ancien et suivants du code de la consommation dans leur rédaction en vigueur au 27 décembre 2011, dès lors qu'il a été conclu dans le cadre d'un démarchage à domicile.

M. et Mme [M] invoquent l'absence de renseignements relatifs à la marque des panneaux et de l'onduleur, aux prix unitaires, à l'identité du commercial, aux conditions de paiement et aux modalités de livraison. Ils ajoutent que les prestations sont insuffisamment stipulées.

L'article L. 121-23 dispose : « Les opérations visées à l'article L. 121-21 doivent faire l'objet d'un contrat dont un exemplaire doit être remis au client au moment de la conclusion de ce contrat et comporter, à peine de nullité, les mentions suivantes :

1° Noms du fournisseur et du démarcheur ;

2° Adresse du fournisseur ;

3° Adresse du lieu de conclusion du contrat ;

4° Désignation précise de la nature et des caractéristiques des biens offerts ou des services proposés ;

5° Conditions d'exécution du contrat, notamment les modalités et le délai de livraison des biens, ou d'exécution de la prestation de services ;

6° Prix global à payer et modalités de paiement ; en cas de vente à tempérament ou de vente à crédit, les formes exigées par la réglementation sur la vente à crédit, ainsi que le taux nominal de l'intérêt et le taux effectif global de l'intérêt déterminé dans les conditions prévues à l'article L. 313-1 ;

7° Faculté de renonciation prévue à l'article L. 121-25, ainsi que les conditions d'exercice de cette faculté et, de façon apparente, le texte intégral des articles L. 121-23, L. 121-24, L. 121-25 et L. 121-26 ».

En application de l'article 9 du code de procédure civile, il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention.

En l'espèce, le bon de commande, signé le 27 décembre 2011 à l'occasion d'un démarchage à domicile et produit en original, décrit l'objet de la vente comme suit :

- Centrale Photovoltaïque 12 modules de 250 Wc total 3 000 Wc

Total TTC 21 500 € (TVA 5,5%)

Fourniture, livraison, pose, mise en service et essai.

Garantie pièces, main d''uvre et déplacements

- étude de faisabilité à la charge de GSF

Démarches administratives à la charge de GSF

- chèque éco de 679 € remis à l'installation

Garantie de 20 ans par le constructeur

Garantie décennale

Garantie de 90 % la production sur les 20 ans

Caduc si refus administratifs.

Contrairement à ce qui est invoqué, le bon de commande mentionne bien le prix global à payer, conformément au 6° de l'article précité. Si les modalités du financement ne sont pas précisées, il convient de relever que le contrat de prêt souscrit le même jour par les acheteurs auprès de la banque Solfea porte mention de l'organisme prêteur, du taux débiteur fixe, du taux annuel effectif global ainsi que du coût total du crédit de sorte que l'ensemble des éléments d'information nécessaire au crédit et exigé par l'alinéa précité a été porté à la connaissance des emprunteurs.

Néanmoins, comme le relève à juste titre le premier juge, il apparaît effectivement que le bon de commande remis à l'en-tête de la société GSF, mentionne un descriptif particulièrement sommaire des matériels vendus. Si l'absence de plans techniques n'est pas une cause de nullité du contrat, la description de la centrale photovoltaïque promise est incomplète dès lors qu'aucune indication n'est donnée sur les éléments de l'équipement ni sur le nombre de panneaux. En outre, ces dispositions n'indiquent pas si les accessoires nécessaires à l'installation (disjoncteur, parafoudre, câblage, travaux éventuellement requis pour permettre le raccordement au réseau public...) sont inclus. Elles ne satisfont pas le 4° de l'article précité dans la mesure où elles ne permettaient pas à M. et Mme [M] de comparer utilement les produits proposés avec d'autres produits présents sur le marché et ne leur permettaient pas de vérifier la complète installation des éléments avant de signer l'attestation de fin de travaux.

Au surplus, le bon de commande ne comporte aucune indication du nom du démarcheur ni sur le délai de livraison et les modalités d'exécution des travaux, alors que le contrat portait non seulement sur une vente mais aussi sur une prestation de services. Partant, le bon de commande n'est pas conforme au 1° et 5° de l'article L. 121-23 précité.

Le contrat encourt donc l'annulation.

Il est admis que la nullité formelle résultant du texte précité est une nullité relative à laquelle la partie qui en est bénéficiaire peut renoncer par des actes volontaires explicites dès lors qu'elle avait connaissance des causes de nullité.

Selon l'article 1338 du code civil dans sa version applicable au litige, l'acte de confirmation ou ratification d'une obligation contre laquelle la loi admet l'action en nullité n'est valable que lorsqu'on y trouve la substance de cette obligation, la mention du motif de l'action en nullité, et l'intention de réparer le vice sur lequel cette action est fondée.

À défaut d'acte de confirmation ou ratification, il suffit que l'obligation soit exécutée volontairement après l'époque à laquelle l'obligation pouvait être valablement confirmée ou ratifiée.

La confirmation, ratification, ou exécution volontaire dans les formes et à l'époque déterminées par la loi, emporte la renonciation aux moyens et exceptions que l'on pouvait opposer contre cet acte, sans préjudice néanmoins du droit des tiers.

Dans le rôle qu'elle reconnaît au juge national dans l'application d'une réglementation d'ordre public de protection, la Cour de justice de l'union européenne impose un examen in concreto qui implique notamment que le juge apprécie la cohérence entre les griefs émis par une partie et la réalité de ses prétentions et motivations.

En l'espèce, le bon de commande remis à M. et Mme [M] reproduit très clairement le texte des articles L. 121-23 à L. 121-26 du code de la consommation dont la simple lecture suffit à informer une personne normalement avisée des exigences de la réglementation en matière de démarchage à domicile et plus particulièrement des mentions nécessaires à la validité du bon de commande.

Le seul fait que les acquéreurs n'aient pas souhaité, le cas échéant, prendre connaissance des dispositions que la loi impose pour leur protection, ne saurait justifier que la reproduction des articles précités soit sans portée quant à la capacité des acquéreurs à apprécier les irrégularités formelles du bon de commande.

Le contrat de vente est assorti d'un formulaire d'annulation de la commande dont M. et Mme [M] n'ont pas souhaité user.

Il est en revanche avéré que le 14 janvier 2012 M. [M] a signé sans réserve une attestation de fin de travaux mentionnant que les travaux étaient achevés et conformes au devis à l'exception du raccordement et des éventuelles autorisations administratives, qu'il a demandé à la banque de payer la somme de 21 500 euros représentant le montant du crédit à l'ordre du vendeur et qu'il a demandé la réduction du délai de rétractation. A cet égard, il convient de souligner que l'exemplaire remis à la banque ne comporte aucune réserve. Il n'est par ailleurs pas contesté que les fonds ont été débloqués, que l'installation a été raccordée et mise en service et qu'elle est productrice d'électricité depuis le 21 novembre 2012. M. et Mme [M] ont également procédé à l'exécution effective du contrat de crédit en remboursant leurs échéances.

Ils ne justifient d'aucune doléance émise à l'encontre de la société prestataire et n'ont émis aucun grief sur le fonctionnement de l'équipement.

Ces actes positifs non équivoques caractérisent une volonté de percevoir les avantages attendus des contrats, confirmée même après introduction de l'instance, qui exclut que M. et Mme [M] puissent se prévaloir d'une nullité tirée de l'irrégularité formelle du bon de commande et plus particulièrement d'une irrégularité tenant à l'absence de mention de la date de livraison de l'équipement.

L'action judiciaire engagée par M. et Mme [M] résulte d'une déception sur le montant de la vente d'électricité rapporté au coût du crédit et non des défauts d'information inhérents au texte du bon de commande.

Partant, il est retenu que M. et Mme [M] ont renoncé en toute connaissance à se prévaloir des irrégularités formelles affectant le bon de commande et qu'ils ne peuvent se prévaloir, près de trois ans après la signature du bon de commande, de la nullité formelle du bon de commande.

L'article 1116 devenu 1137 du code civil prévoit que : « Le dol est une cause de nullité de la convention lorsque les man'uvres pratiquées par l'une des parties sont telles, qu'il est évident que, sans ces man'uvres, l'autre partie n'aurait pas contracté. Il ne se présume pas, et doit être prouvé ».

Si M. et Mme [M] imputent à la société GSF une tromperie dans la présentation commerciale de son offre de contrat et des man'uvres frauduleuses qui auraient vicié leur consentement, force est de constater qu'au-delà de la reproduction des textes, ils ne caractérisent pas de manière circonstanciée les fraudes qu'ils dénoncent relatives notamment à une présentation fallacieuse de la rentabilité de l'opération. Ils ne démontrent pas, par ailleurs, que l'existence d'un partenariat avec la société EDF était un élément déterminant de leur consentement, ni un engagement contractuel de rentabilité. Or, le seul caractère incomplet du bon de commande tel que retenu ci-dessus ne saurait suffire à caractériser une fraude.

Les intimés ne prouvent pas un comportement malicieux de la part du représentant de la société GSF, qui aurait égaré leur connaissance de la portée de leur engagement, et partant, leur consentement.

Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que M. et Mme [M] sont mal fondés en leur demande d'annulation du contrat de vente.

Il n'y a donc lieu à annulation du contrat principal et il n'y a pas lieu de faire application de l'article L. 311-32 du code de la consommation. En conséquence, le jugement dont appel est infirmé en toutes ses dispositions sur le fond.

Sur la demande de résolution des contrats de vente

En application de l'article 1134 (devenu 1103 et 1104) du code civil, les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits. Ils ne peuvent être révoqués que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi autorise. Ils doivent être exécutés de bonne foi.

La condition résolutoire étant toujours sous-entendue dans les contrats synallagmatiques, le juge peut prononcer au vu des dispositions de l'article 1184 (devenu 1217) du code civil, la résiliation de tout contrat synallagmatique dès lors qu'il peut être imputé à l'un des cocontractants, un manquement suffisamment grave, qui justifie la rupture des relations entre les parties. La partie lésée peut en demander la résolution avec dommages et intérêts.

Après avoir invoqué l'absence de raccordement en première instance, les appelants revendiquent à hauteur d'appel la résolution des contrats aux motifs que la société GSF s'est obligée à vendre une installation autofinancée.

Ils ne produisent aucun justificatif à l'appui de cette allégation.

En l'espèce, il résulte des pièces produites que l'installation a été raccordée et est productive d'électricité.

Le bon de commande ne précise aucun engagement contractuel au titre d'un autofinancement ou d'une rentabilité de l'installation, la garantie ne portant que sur le matériel livré.

Ainsi, les époux [M] ne rapportent pas la preuve d'une inexécution suffisamment grave pour justifier la résolution du contrat de vente d'une installation qui produit de l'électricité.

Leur demande de résolution de contrat de vente est rejetée.

En l'absence d'annulation des contrats de vente et de crédit affecté, la demande en dispense de restitution du capital emprunté est sans objet.

En l'absence de demande indemnitaire, il n'y a pas lieu d'examiner les moyens tirés de la faute de la banque la privant de son droit à restitution.

Partant, en l'absence d'annulation du contrat de crédit, les intimés devront poursuivre l'exécution du contrat de prêt, conformément aux stipulations contractuelles, étant précisé que les échéances suspendues durant l'instance seront reportées en fin de prêt et qu'ils devront rembourser les échéances perçues, restituées par la banque en exécution du jugement infirmé.

Sur la demande reconventionnelle pour procédure abusive

L'exercice d'une action en justice constitue un droit et ne dégénère en abus pouvant donner naissance à des dommages et intérêts que dans le cas de malice, de mauvaise foi ou d''erreur grossière équipollente au dol.

En l'espèce, la société BNPPPF ne rapporte pas la preuve d'une telle faute, le jugement ne faisant pas état des allégations contestées par l'appelante.

Le jugement est par conséquent confirmé en ce qu'il l'a déboutée de sa demande de dommages et intérêts.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant après débats en audience publique, par arrêt réputé contradictoire mis à disposition au greffe,

Infirme jugement en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il a déclaré recevables les demandes de M. [H] [M] et Mme [J] [L] épouse [M] et en ce qu'il a débouté la société BNP Paribas personal Finance de sa demande de dommages-intérêts pour procédure abusive ;

Statuant de nouveau,

Déboute M. [H] [M] et Mme [J] [L] épouse [M] de leur demande d'annulation des contrats de vente et de crédit souscrits le 27 décembre 2011 ;

Déboute M. [H] [M] et Mme [J] [L] épouse [M] de leur demande de résolution du contrat de vente ;

Dit que le contrat de crédit se poursuit selon le tableau d'amortissement, à compter de l'arrêt à intervenir ;

Condamne M. [H] [M] et Mme [J] [L] épouse [M] à reprendre le paiement des échéances suivant le tableau d'amortissement ;

Condamne M. [H] [M] et Mme [J] [L] épouse [M] à rembourser à la société BNP Paribas personal Finance venue aux droits de la société Banque solfea les échéances de prêts restituées en exécution du jugement ;

Ordonne le report des échéances de prêts suspendues le temps de la présente instance, du fait de l'annulation du contrat de crédit avec exécution provisoire, en fin de prêt ;

Condamne la société BNP Paribas personal Finance à rembourser à M. [H] [M] et Mme [J] [L] épouse [M] les intérêts payés depuis la conclusion du contrat ;

Rejette toute autre demande ;

Condamne in solidum M. [H] [M] et Mme [J] [L] épouse [M] aux dépens de première instance et d'appel, ces derniers pouvant être directement recouvrés par Me Edgar Vincensini, avocat, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ;

Condamne in solidum M. [H] [M] et Mme [J] [L] épouse [M] à payer à la société BNP Paribas Personal Finance une somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

La greffièreLe président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 9 - a
Numéro d'arrêt : 19/15368
Date de la décision : 27/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-27;19.15368 ?
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