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27/05/2022 | FRANCE | N°19/14455

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 9 - a, 27 mai 2022, 19/14455


Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 9 - A



ARRÊT DU 27 MAI 2022



(n° , 10 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/14455 - N° Portalis 35L7-V-B7D-CALKZ



Décision déférée à la Cour : Jugement du 17 avril 2019 - Tribunal d'Instance de SENS - RG n° 11-19-000075





APPELANTE



La société CREATIS, société anonyme agissant poursuites et d

iligences de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

N° SIRET : 419 446 034 00128

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Localité 3]



représentée par Me Olivier HASCO...

Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 9 - A

ARRÊT DU 27 MAI 2022

(n° , 10 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/14455 - N° Portalis 35L7-V-B7D-CALKZ

Décision déférée à la Cour : Jugement du 17 avril 2019 - Tribunal d'Instance de SENS - RG n° 11-19-000075

APPELANTE

La société CREATIS, société anonyme agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

N° SIRET : 419 446 034 00128

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Localité 3]

représentée par Me Olivier HASCOET de la SELARL HAUSSMANN-KAINIC-HASCOET-HELAI, avocat au barreau de l'ESSONNE

INTIMÉS

Monsieur [J] [V]

né le [Date naissance 1] 1966 à [Localité 8]

[Adresse 5]

[Adresse 5]

[Localité 6]

DÉFAILLANT

Madame [S] [V] née [W]

née le [Date naissance 2] 1960 à [Localité 7]

[Adresse 5]

[Adresse 5]

[Localité 6]

DÉFAILLANTE

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 16 mars 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant M. Christophe BACONNIER, Président, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. Christophe BACONNIER, Président de chambre

Mme Fabienne TROUILLER, Conseillère

Mme Laurence ARBELLOT, Conseillère

Greffière, lors des débats : Mme Camille LEPAGE

ARRÊT :

- DÉFAUT

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par M. Christophe BACONNIER, Président et par Mme Camille LEPAGE, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Par acte sous seing privé du 2 février 2012, M. [J] [V] et Mme [S] [W] ont souscrit un contrat de regroupement de crédits auprès de la société Creatis. Le crédit a été consenti pour un montant de 41 400 euros remboursable en 120 mois avec un taux d'intérêt nominal de 7,85 % l'an (TEG de 10,08 % l'an) et des mensualités de 499,08 euros.

Deux cessions des rémunérations ont été mises en place le 3 février 2012 pendant une période de 120 mois à compter du 31 mars 2021 avec des mensualités de 214,19 euros pour M. [V] et de 284,83 euros pour Mme [W].

M. [V] et Mme [W] ont bénéficié d'un moratoire de 13 mois suite à un plan conventionnel de redressement ayant reçu force exécutoire par ordonnance du tribunal de céans le 20 juin 2016.

Par décision du 8 février 2017, la Commission de surendettement des particuliers de l'Yonne a déclaré leur nouveau dépôt de dossier irrecevable en raison du non-respect du plan précédent, décision confirmée par le jugement du présent tribunal en date du 6 février 2018.

La société Creatis a adressé une mise en demeure préalable à la déchéance du terme le 27 mars 2018, puis une seconde le 14 septembre 2018 après la déchéance du terme.

Saisi le 29 janvier 2019 par la société Creatis d'une demande tendant principalement à la condamnation de M. [V] et Mme [W] au paiement des sommes dues au titre du solde du contrat de regroupement de crédits, le tribunal d'instance de Sens, par un jugement réputé contradictoire du 17 avril 2019 auquel il convient de se reporter, a rendu la décision suivante :

« DÉCLARE recevable le décompte actualité produit par la société Creatis le 21 février 2019,

REJETTE la fin de non-recevoir tirée de la prescription des moyens relevés d'office,

DÉCLARE recevable l'action en paiement de la société Creatis,

CONDAMNE solidairement M. [V] et Mme [W] à payer à la société Creatis la somme de 21 462,01 euros à titre du solde de prêt,

DIT que cette somme sera assortie des intérêts au taux légal à compter du 20 septembre 2018,

ORDONNE la capitalisation de ces intérêts,

REJETTE la demande de délai de paiement de Mme [W],

REJETTE la demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

REJETTE le surplus des demandes,

CONDAMNE solidairement M. [V] et Mme [W] aux dépens,

DIT n'y avoir lieu à exécution provisoire ».

Le tribunal a principalement retenu que la société Creatis, n'ayant pas respecté la police de caractère prescrite pour l'offre préalable, encourt la déchéance de son droit aux intérêts (art. L. 311-18 et R. 311-5 du code de la consommation) et qu'en revanche, le capital restant dû sera assorti de l'indemnité de 8 % ainsi que de la capitalisation des intérêts.

Par une déclaration en date du 12 juillet 2019, la société Creatis a relevé appel de cette décision.

Aux termes de conclusions remises le 10 octobre 2019, l'appelante demande à la cour de :

« Voir déclarer la société Creatis recevable et bien fondée en ses demandes, fins et conclusions d'appel,

Y faire droit,

Voir infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a prononcé la déchéance du droit aux intérêts, a minoré ainsi la créance de la société Creatis et rejeté la demande d'article 700 du code de procédure civile,

Statuant à nouveau,

Voir dire n'y avoir lieu à déchéance du droit aux intérêts, moyen irrecevable comme prescrit et, en tout état de cause, infondé,

Voir condamner solidairement M. et Mme [V] à payer à la société Creatis à titre principal au titre du prêt 100000123502 au règlement de la somme de 32 827,40 euros, avec intérêts au taux contractuel de 7,85 % l'an, à compter des mises en demeure du 14 septembre 2018,

Voir condamner M. et Mme [V] à payer à la société Creatis la somme de 1 200 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Voir condamner solidairement les intimés aux entiers dépens qui pourront être recouvrés par l'avocat soussigné conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ».

La société Creatis soutient que :

- est irrecevable le moyen tiré de la déchéance du droit aux intérêts, soulevé d'office par le premier juge, en ce qu'il est prescrit (art. L. 110-4 du code de commerce),

- à titre subsidiaire, si le moyen était recevable, il est mal fondé en ce qu'elle a respecté les règles de rédaction de l'offre préalable puisque c'est bien le corps de l'offre de prêt et non les petites mentions légales sur l'identité du prêteur qu'il faut prendre en compte, celui-ci étant parfaitement lisible. En outre, le premier juge n'a pas inclus les espaces entre les lettres dans la mesure des caractères.

La déclaration d'appel et les conclusions d'appel de la société Creatis ont été régulièrement signifiées à M. [V] et Mme [W] par procès-verbal de remise à étude délivré le 14 octobre 2019 ; M. [V] et Mme [W] n'ont pas constitué avocat.

Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions de l'appelante, il est renvoyé aux écritures de celle-ci conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 25 janvier 2022.

L'affaire a été appelée en audience le 16 mars 2022.

Lors de l'audience, l'affaire a été examinée et mise en délibéré à la date du 27 mai 2022 par mise à disposition de la décision au greffe (Art. 450 CPC).

MOTIFS DE LA DÉCISION

Il résulte de l'article 954 dernier alinéa du code de procédure civile que la partie qui ne conclut pas ou qui, sans énoncer de nouveaux moyens, demande la confirmation du jugement est réputée s'en approprier les motifs.

Sur la recevabilité du moyen tiré de la déchéance du droit aux intérêts

En application de l'article 23 de la Directive 2008/48 du Parlement européen et du Conseil concernant les contrats de crédit à la consommation transposée par la loi précitée, il appartient aux États membres de prendre toutes mesures nécessaires pour faire en sorte que les sanctions applicables en cas de violation des dispositions nationales adoptées conformément à cette directive soient effectives, proportionnées et dissuasives.

L'article L. 141-4 devenu R. 632-1 du code de la consommation dispose que le juge peut relever d'office toutes les dispositions du présent code dans les litiges nés de son application, tandis qu'il lui impose d'écarter d'office, après avoir recueilli les observations des parties, l'application d'une clause dont le caractère abusif ressort des éléments du débat.

Ce texte de droit interne traduit le rôle attribué au juge par la directive précitée dans sa lecture par la Cour de justice de l'Union européenne dans le respect des dispositions d'un ordre public économique européen.

En revanche, il ne pose aucune restriction à l'exercice des prérogatives ainsi conférées au juge pour autant que l'irrégularité résulte des faits litigieux dont l'allégation comme la preuve incombent aux parties.

Par ailleurs, si la notion de prescription s'attache à une action ou à une demande formulée par voie d'exception, il est admis qu'elle est sans effet sur l'invocation d'un moyen qui tend non pas à l'octroi d'un avantage, mais seulement à mettre en échec une prétention adverse.

C'est ainsi que défendant à une action en paiement du solde d'un crédit à la consommation, l'emprunteur peut opposer tout moyen tendant à faire rejeter tout ou partie des prétentions du créancier par application d'une disposition du code de la consommation prévoyant la déchéance du droit aux intérêts, sans se voir opposer la prescription pour autant qu'il n'entende pas en obtenir un autre avantage tel le remboursement d'intérêts indûment acquittés.

Il s'induit que dans le rôle qui lui est conféré tant par la loi et le règlement internes que par le droit européen, le juge peut soulever d'office toute irrégularité heurtant une disposition d'ordre public et sanctionnée par la déchéance d'un droit qui fonde la demande d'une partie sans être enfermé dans quelque délai.

C'est donc à bon droit que le premier juge, en respectant le principe de contradiction, a examiné la conformité du contrat aux articles L. 312-1 et suivants du code de la consommation et a fait application des articles L. 341-1 à L. 341-9 du même code.

Sur la demande en paiement

Le présent litige est relatif à un crédit soumis aux dispositions de la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010 de sorte qu'il sera fait application des articles du code de la consommation dans leur rédaction en vigueur après le 1er mai 2011 et leur numérotation antérieure à l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 et au décret n° 2016-884 du 29 juin 2016.

L'article L. 141-4 (R. 632-1 dans la nouvelle numérotation) du code de la consommation permet au juge de relever d'office tous les moyens tirés de l'application des dispositions du code de la consommation, sous réserve de respecter le principe du contradictoire. Il a été fait application de cette disposition par le premier juge, étant rappelé qu'en ce qu'il tend à faire rejeter comme non justifiée la demande en paiement du prêteur ayant consenti un crédit à la consommation, le moyen tiré de la déchéance du droit aux intérêts opposé par l'emprunteur, ou soulevé d'office par le juge, constitue une défense au fond et n'est donc pas soumis à la prescription (article 72 du code de procédure civile et Avis n° 15014 du 18 septembre 2019 de la première chambre civile de la Cour de cassation).

L'article L. 311-24 (L. 312-39 dans la nouvelle numérotation) du code de la consommation prévoit qu'en cas de défaillance de l'emprunteur, le prêteur peut exiger le remboursement immédiat du capital restant dû, majoré des intérêts échus mais non payés. Jusqu'à la date du règlement effectif, les sommes restant dues produisent les intérêts de retard à un taux égal à celui du prêt. En outre, le prêteur peut demander à l'emprunteur défaillant une indemnité qui, dépendant de la durée restant à courir du contrat et sans préjudice de l'application des articles 1152 et 1231 (dans leur rédaction alors applicable) du code civil, est fixée suivant un barème déterminé par décret. L'article D. 311-6 (D. 312-16 dans la nouvelle numérotation) du même code précise que lorsque le prêteur exige le remboursement immédiat du capital restant dû en application de l'article L. 311-24 (L. 312-39 dans la nouvelle numérotation), il peut demander une indemnité égale à 8 % du capital restant dû à la date de la défaillance.

Ce texte n'a toutefois vocation à être appliqué au titre du calcul des sommes dues qu'après vérification de l'absence de forclusion de la créance, de ce que le terme du contrat est bien échu et de l'absence de déchéance du droit aux intérêts conventionnels.

Sur la forclusion

La recevabilité de l'action de la société Cofidis au regard de la forclusion, vérifiée par le premier juge, ne fait pas l'objet de contestation.

Sur la déchéance du terme

Aux termes de l'article 1315 (devenu l'article 1353) du code civil, celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver.

Par ailleurs, selon l'article 1134 (devenu l'article 1103) du code civil, les conventions légalement formées engagent leurs signataires et en application de l'article 1184 (devenu l'article 1224) du même code, lorsque l'emprunteur cesse de verser les mensualités stipulées, le prêteur est en droit de se prévaloir de la déchéance du terme et de demander le remboursement des fonds avancés soit en raison de l'existence d'une clause résolutoire soit en cas d'inexécution suffisamment grave. L'article 1184 (devenu l'article 1225) précise qu'en présence d'une clause résolutoire, la résolution est subordonnée à une mise en demeure infructueuse s'il n'a pas été convenu que celle-ci résulterait du seul fait de l'inexécution.

En matière de crédit à la consommation en particulier, il résulte des dispositions de l'article L. 311-24 devenu L. 312-39 du code de la consommation, que si le contrat de prêt d'une somme d'argent peut prévoir que la défaillance de l'emprunteur non commerçant entraînera la déchéance du terme, celle-ci ne peut sauf disposition expresse et non équivoque, être déclarée acquise au créancier sans la délivrance d'une mise en demeure restée sans effet, précisant le délai dont dispose le débiteur pour y faire obstacle.

En l'espèce, le contrat de prêt contient une clause d'exigibilité anticipée en cas de défaut de paiement (défaillance de l'emprunteur) et une mise en demeure préalable au prononcé de la déchéance du terme de payer la somme de 1 471,89 euros précisant le délai de régularisation (de 30 jours) a bien été envoyée le 27 mars 2018 ainsi qu'il en ressort de l'avis de recommandé produit (l'avis de réception ayant été par ailleurs signé le 28 mars 2018) de sorte qu'en l'absence de régularisation dans le délai, ainsi qu'il en ressort de l'historique de compte, la société Creatis a pu régulièrement prononcer la déchéance du terme le 23 juillet 2018 étant précisé que la déchéance du terme a elle-même été notifiée avec une mise en demeure de payer le solde dû le 14 septembre 2018.

Sur la déchéance du droit aux intérêts contractuels

La société Creatis produit :

- l'offre de contrat de crédit « prêt de regroupements de crédits »,

- la fiche d'informations précontractuelles européennes normalisées,

- la fiche de solvabilité,

- la notice d'assurance,

- la fiche d'explications et de mise en garde « regroupements de crédits »,

- le justificatif de consultation du fichier des incidents de paiement,

- le tableau d'amortissement,

- l'historique de prêt,

- un décompte de créance.

Il appartient au créancier qui réclame des sommes au titre d'un crédit à la consommation de justifier du strict respect du formalisme informatif prévu par le code de la consommation, en produisant des documents contractuels conformes, ainsi que la copie des pièces nécessaires, et notamment, à peine de déchéance totale du droit aux intérêts (article L. 311-48 devenu L. 341-1 du code de la consommation) :

- la fiche d'informations précontractuelles -FIPEN- (article L. 311-6 devenu L. 312-12),

- la notice d'assurance comportant les conditions générales (article L. 311-19 devenu L. 312-29)'

- la justification de la consultation du fichier des incidents de paiements -FICP- (article L. 311-9 devenu L. 312-16),

- la justification, quel que soit le montant du crédit, de la vérification de la solvabilité de l'emprunteur au moyen d'un nombre suffisant d'informations, y compris des informations fournies par ce dernier à la demande du prêteur (article L. 311-9 devenu L. 312-16),

- la justification de la fourniture à l'emprunteur des explications lui permettant de déterminer si le contrat de crédit proposé est adapté à ses besoins et à sa situation financière et attirant son attention sur les caractéristiques essentielles du ou des crédits proposés et sur les conséquences que ces crédits peuvent avoir sur sa situation financière, y compris en cas de défaut de paiement (article L. 311-8 devenu L. 312-14),

L'article R. 311-5 ancien (devenu R. 312 -10) du code de la consommation dispose que le contrat de crédit est rédigé en caractères dont la hauteur ne peut être inférieure à celle du corps huit, et qu'il comporte de manière claire et lisible les indications nécessaires et mentionnées à cet article.

Il résulte de cet article que le corps est la mesure standard du caractère d'imprimerie, exprimée en points et délimitée par l'extrémité supérieure de la plus haute ascendante et l'extrémité inférieure de la plus basse descendante, que le corps huit correspond à 3 mm en points Didot, et qu'il suffit pour s'assurer du respect de cette prescription réglementaire, de diviser la hauteur en millimètres d'un paragraphe (mesuré du haut des lettres montantes de la première ligne au bas des lettres descendantes de la dernière ligne) par le nombre de lignes qu'il contient ; le quotient ainsi obtenu doit être au moins égal à 3 mm.

L'article L. 341-4 du code de la consommation prévoit que le prêteur qui accorde un crédit sans remettre à l'emprunteur un contrat satisfaisant notamment aux conditions fixées par l'article L. 312-28 dont le texte réglementaire est l'article R. 312-10, (L. 311-28 ancien dont le texte réglementaire est l'article R. 311-5), est déchu du droit aux intérêts.

En l'espèce c'est à tort que le premier juge a retenu que le contrat n'était pas conforme à l'article R. 311-5 précité du fait que la hauteur des caractères est de 2,66 mm au motif que la cour mesure 3,22 mm par exemple pour les 22 lignes du paragraphe I-1 intitulé « conditions d'acceptation ou de rétractation du crédit » qui occupe une largeur de 71 mm, soit 3,22 une fois divisé cette mesure par 22 lignes.

Par ailleurs la cour constate que la société Creatis produit la FIPEN, la notice assurance, le justificatif de la consultation du FICP et suffisamment d'éléments de preuve pour justifier qu'elle a effectué la vérification de la solvabilité de l'emprunteur exigée par la loi.

Compte tenu de ce qui précède la cour dit que la sanction de la déchéance du droit aux intérêts n'est pas encourue.

Le jugement déféré est donc infirmé en ce qu'il a prononcé la déchéance du droit aux intérêts.

Sur le montant de la créance

La cour constate que la somme demandée à hauteur de 32 827,40 euros se décompose notamment en :

- 2 104,76 euros au titre des échéances échues impayées,

- 28 290,98 euros au titre du capital à échoir restant dû,

- 2 431,66 euros au titre de l'indemnité légale de 8 %.

En application de l'article L. 311-24 devenu L. 312-39 du code de la consommation et au regard du décompte de créance, du tableau d'amortissement et de l'historique de compte, il résulte qu'à la date de la déchéance du terme, il est dû à la société Creatis :

- 2 104,76 euros au titre des échéances échues impayées, avec intérêts au taux contractuel à compter du 14 septembre 2018,

- 28 290,98 euros au titre du capital à échoir restant dû, avec intérêts au taux contractuel à compter du 14 septembre 2018.

Le contrat de prêt prévoit une indemnité forfaitaire due au prêteur en cas de prononcé de la déchéance du terme égale à 8 % du capital dû à la date de la défaillance, soit la somme de 2 263,27 euros calculée comme suit : 8 % x 28 290,98 ; cependant, en application de l'article 1152 devenu 1231-5 du code civil, le juge peut réduire d'office le montant de la clause pénale par le juge si elle est manifestement excessive. En l'espèce, la clause pénale de 8 % du capital dû à la date de la défaillance contenue au contrat de prêt est manifestement excessive compte tenu de ce que des indemnités ont déjà été retenues lors de l'opération de regroupement des crédits, du préjudice réellement subi par la société Creatis et du taux d'intérêt pratiqué ; elle sera donc réduite à la somme de 100 euros.

M. [V] et Mme [W] sont ainsi tenus au paiement de la somme totale de 30 495,74 euros (2 104,76 + 28 290,98 + 100) avec intérêts au taux contractuel de 7,85 % l'an portant sur la somme de 30 395,74 euros (2 104,76 + 28 290,98) à compter du 14 septembre 2018 et au taux légal pour le surplus.

Le jugement déféré est donc infirmé en ce qu'il a condamné M. [V] et Mme [W] à payer à la société Creatis la somme de 21 462,01 euros avec intérêts au taux légal à compter du 14 septembre 2018 au titre du crédit impayé, et statuant à nouveau de ce chef, la cour condamne solidairement M. [V] et Mme [W] à payer à la société Creatis la somme de 30 495,74 euros avec intérêts au taux contractuel de 7,85 % l'an portant sur la somme de 30 395,74 euros à compter du 14 septembre 2018 et au taux légal pour le surplus.

Sur la capitalisation des intérêts

La capitalisation des intérêts, dit encore anatocisme, est prohibée concernant les crédits à la consommation, matière dans laquelle les sommes qui peuvent être réclamées sont strictement et limitativement énumérées. En effet, l'article L. 311-23 devenu L. 312-38 du code de la consommation rappelle qu'aucune indemnité ni aucuns frais autres que ceux mentionnés aux articles L. 311-24 et L. 311-25 devenus L. 312-39 et L. 312-40 ne peuvent être mis à la charge de l'emprunteur dans les cas de défaillance prévus par ces articles.

La demande par confirmation du jugement de capitalisation sera par conséquent rejetée.

Le jugement déféré est donc infirmé en ce qu'il a ordonné la capitalisation des intérêts et statuant à nouveau de ce chef, la cour débouté la société Creatis de sa demande de capitalisation des intérêts.

Sur les autres demandes

La cour condamne in solidum M. [V] et Mme [W] aux dépens de la procédure d'appel en application de l'article 696 du code de procédure civile.

Le jugement déféré est confirmé en ce qui concerne l'application de l'article 700 du code de procédure civile.

Il apparaît équitable, compte tenu des éléments soumis aux débats, de condamner in solidum M. [V] et Mme [W] à payer à la société Creatis la somme de 150 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure d'appel.

L'ensemble des autres demandes plus amples ou contraires formées en demande ou en défense est rejeté, leur rejet découlant des motifs amplement développés dans tout l'arrêt.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant par arrêt rendu par défaut et en dernier ressort, mis à disposition au greffe,

Infirme le jugement mais seulement en ce qu'il a :

- condamné solidairement M. [J] [V] et Mme [S] [W] à payer à la société Creatis la somme de 21 462,01 euros à titre du solde de prêt,

- dit que cette somme sera assortie des intérêts au taux légal à compter du 20 septembre 2018,

- ordonné la capitalisation de ces intérêts ;

Statuant à nouveau sur les chefs infirmés, dans les limites de l'appel, et ajoutant,

Condamne solidairement M. [J] [V] et Mme [S] [W] à payer à la société Creatis la somme de 30 495,74 euros avec intérêts au taux contractuel de 7,85 % l'an portant sur la somme de 30 395,74 euros à compter du 14 septembre 2018 et au taux légal pour le surplus ;

Déboute la société Creatis de sa demande de capitalisation des intérêts ;

Condamne in solidum M. [J] [V] et Mme [S] [W] à payer à la société Creatis la somme de 150 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure d'appel ;

Condamne in solidum M. [J] [V] et Mme [S] [W] aux dépens.

La greffièreLe président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 9 - a
Numéro d'arrêt : 19/14455
Date de la décision : 27/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-27;19.14455 ?
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