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27/05/2022 | FRANCE | N°19/13592

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 9 - a, 27 mai 2022, 19/13592


Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 9 - A



ARRÊT DU 27 MAI 2022



(n° , 7 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/13592 - N° Portalis 35L7-V-B7D-CAINI



Décision déférée à la Cour : Jugement du 10 mai 2019 - Tribunal d'Instance de PARIS - RG n° 11-18-19-0822





APPELANT



Monsieur [G] [X]

né le [Date naissance 2] 1974 à [Localit

é 7] (MALI)

Chez M. [B] [Z]

[Adresse 3]

[Localité 6]



représenté et assisté de Me Marie-Marthe JESSLEN, avocat au barreau de PARIS, toque : E0067







INTIMÉES



Madame [R] [P]...

Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 9 - A

ARRÊT DU 27 MAI 2022

(n° , 7 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/13592 - N° Portalis 35L7-V-B7D-CAINI

Décision déférée à la Cour : Jugement du 10 mai 2019 - Tribunal d'Instance de PARIS - RG n° 11-18-19-0822

APPELANT

Monsieur [G] [X]

né le [Date naissance 2] 1974 à [Localité 7] (MALI)

Chez M. [B] [Z]

[Adresse 3]

[Localité 6]

représenté et assisté de Me Marie-Marthe JESSLEN, avocat au barreau de PARIS, toque : E0067

INTIMÉES

Madame [R] [P] épouse [X]

née le [Date naissance 1] 1977 à [Localité 8] (MALI)

[Adresse 5]

[Localité 6]

représentée par Me Samuel MAIER, avocat au barreau de PARIS, toque : C1110

La société BOURSORAMA BANQUE, société anonyme agissant poursuites et diligences de son président domicilié en cette qualité audit siège

N° SIRET : 351 058 151 00744

[Adresse 4]

[Adresse 4]

représentée par Me Maurice PFEFFER, avocat au barreau de PARIS, toque : C1373

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 15 mars 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Fabienne TROUILLER, Conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. Christophe BACONNIER, Président de chambre

Mme Fabienne TROUILLER, Conseillère

Mme Laurence ARBELLOT, Conseillère

Greffière, lors des débats : Mme Camille LEPAGE

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par M. Christophe BACONNIER, Président et par Mme Camille LEPAGE, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Par acte sous seing privé du 24 juin 2016 signé par signatures électroniques, M. et Mme [X] ont ouvert un compte joint dans les livres de la société Boursorama banque.

Le 13 juillet 2016, un chèque de 9 426,03 euros émis par la Mutuelle fraternelle d'assurances en règlement d'une indemnité pour un sinistre incendie, libellé à l'ordre de M. [G] [X] a été déposé sur le compte joint du couple.

Le 15 juillet 2016, Mme [R] [P] épouse [X] a effectué un virement de 8 000 euros vers son compte personnel détenu à la Banque postale, laissant le compte joint débiteur.

Le 20 juillet 2017, le chèque est revenu impayé pour le motif « perte ».

Le 31 juillet 2016, le compte joint présentait un découvert de 7 816,42 euros et une mise en demeure a été adressée à Mme [X] de régulariser la situation.

Les époux [X] ont été mis en demeure de régulariser le solde débiteur du compte par lettre recommandée du 25 novembre 2016 puis par sommation de payer du 13 avril 2017.

Par ordonnance d'injonction de payer en date du 5 février 2018 signifiée le 5 avril 2018, il a été enjoint aux époux [X] de payer solidairement à la société Boursorama Banque la somme de 7 816,42 euros avec intérêts au taux légal à compter de sa signification, correspondant au solde débiteur du compte bancaire joint.

Saisi sur opposition de M. et Mme [X] en date du 2 mai et du 7 juin 2018, le tribunal d'instance de Paris, par un jugement contradictoire rendu le 10 mai 2019 auquel il convient de se reporter, a :

- constaté la compétence du tribunal d'instance de Paris pour statuer sur l'opposition,

- déclaré l'opposition recevable,

- mis à néant l'injonction de payer,

- débouté M. [X] de ses demandes,

- condamné solidairement les époux [X] à payer à la société Boursorama banque la somme de 7 816,42 euros, avec intérêts au taux légal à compter de sa signification,

- débouté les parties de leurs demandes de dommages et intérêts,

- ordonné l'exécution provisoire.

Pour statuer, le tribunal a principalement retenu qu'en application de l'article 220 du code civil, la dette devait être considérée comme solidaire.

Par une déclaration en date du 4 juillet 2019, M. [X] a relevé appel de cette décision.

Par ordonnance du 21 janvier 2020, le conseiller de la mise en état a débouté la société Boursorama de sa demande de radiation au visa de l'article 526 du code de procédure civile en estimant que l'exécution du jugement aurait des conséquences manifestement excessives.

Aux termes de conclusions remises le 17 janvier 2020, M. [X] demande à la cour :

- d'infirmer le jugement dont appel,

- d'annuler l'injonction de payer,

- de dire que la société Boursorama a eu un comportement fautif à son égard,

- d'ordonner à la société Boursorama de procéder au défichage de l'inscription faite auprès de la Banque de France et au fichier FICP, sous astreinte de 100 euros par jour de retard courant quinze jours après le prononcé du jugement à intervenir,

- de condamner la société Boursorama à lui payer la somme de 2 000 euros à titre de dommages et intérêts,

- de condamner Mme [X] à lui payer la somme de 2 000 euros à titre de dommages et intérêts, ainsi que la somme de 1 500 euros au titre des frais irrépétibles,

- de condamner Mme [X], à le garantir de toute condamnation prononcée à son encontre.

L'appelant fait valoir que son opposition est recevable, que la solidarité prévue à l'article 220 du code civil ne peut lui être opposée, que l'ouverture d'un compte joint et les raisons de l'impayé ne relèvent pas d'une dette ménagère mais bien d'un détournement opéré par Mme [X].

Il précise avoir déposé plainte le 20 juillet 2016 pour prise du nom d'un tiers après avoir reçu, le 6 juillet 2016 une carte bancaire à son nom sans en avoir fait la demande.

Il affirme que la société Boursorama ne rapporte pas la preuve de manquements aux obligations contractuelles de sa part, qu'elle était informée du détournement et de l'usurpation de son identité par Mme [X] et qu'elle aurait dû en tenir compte. Il indique que le dossier d'ouverture de compte ne comporte aucune signature et qu'il appartenait à la société Boursorama de s'assurer de l'accord des titulaires du compte, qu'en manquant à ses obligations, la banque a permis à Mme [X] d'usurper son identité et d'ouvrir un compte à son nom.

Enfin, l'appelant souligne que son fichage à la Banque de France lui cause des désagréments dans le cadre de son activité professionnelle d'artisan taxi et qu'il est actuellement en instance de divorce.

Aux termes de conclusions remises le 19 mai 2020, Mme [P] épouse [X] demande à la cour :

- de débouter la société Boursorama de ses demandes,

- de condamner M. [X] à payer à la société Boursorama la somme de 7 816,42 euros,

- de condamner M. [X] au paiement de la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Mme [X] explique que le chèque perçu correspond à une indemnisation suite à un incendie survenu au domicile familial, que grâce au virement de 8 000 euros, elle a totalement remeublé l'appartement dans lequel elle vit avec leur cinq enfants, que cet argent était destiné aux besoins du ménage, que l'opposition effectuée par M. [X] a rendu le compte joint débiteur mais que M. [X] a pu obtenir un nouveau chèque suite à son dépôt de plainte, que M. [X] s'est servi de cet argent pour ses besoins personnels à savoir des billets d'avions ainsi que des présents pour sa nouvelle campagne. Selon elle, M. [X] a détourné cet argent et est dans l'incapacité de prouver que la somme allouée a été utilisée dans l'intérêt du foyer.

Elle affirme donc que M. [X] est seul responsable du montant débiteur auprès de la société Boursorama Banque.

Aux termes de conclusions remises le 17 octobre 2019, la société Boursorama banque demande à la cour':

- de déclarer l'appel irrecevable et en tout cas non fondé,

- de confirmer le jugement en toutes ses dispositions,

- de condamner M. [X] à lui payer la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

L'intimée fait valoir que les époux [X] sont redevables du solde débiteur de leur compte joint courant et que les litiges qui opposent M. et Mme [X] l'empêchent de recouvrer sa créance et lui sont préjudiciables.

Elle précise que le couple n'a pas encore divorcé et qu'ils habitent à la même adresse et que l'article 220 du code civil reste applicable.

Elle ajoute qu'on ne peut lui reprocher l'opposition frauduleusement faite par M. [X] et que la demande d'indemnisation n'est pas justifiée.

Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions des parties, il est renvoyé aux écritures conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 11 janvier 2022 et l'affaire a été appelée à l'audience du 15 mars 2022.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Il convient de noter à titre préliminaire que la société réclame dans le dispositif de ses écritures que l'appel soit déclaré irrecevable sans développer de moyen à l'appui de cette demande. En application de l'article 954 du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer sur cette demande.

Il convient également de souligner que Mme [P] épouse [X] n'a pas réclamé l'infirmation du jugement et n'a pas maintenu sa demande d'indemnisation à l'encontre de M. [X].

Enfin, la recevabilité des oppositions n'étant pas discutée en appel, le jugement sera confirmé en ce qu'il a déclaré l'opposition formée par M. et Mme [X] recevable, en application de l'article 1416 du code de procédure civile.

Sur la contestation de l'ouverture du compte joint

M. [X] fait valoir que Mme [X] a ouvert seule le compte joint afin de détourner un chèque. Il ajoute que son numéro de portable est erroné, de même que son adresse électronique et que le compte a été ouvert alors que les conditions de revenus n'étaient pas remplies. Il estime que ni l'apparence ni la solidarité ne peuvent être invoquées, que l'ouverture d'un compte joint et les raisons de l'impayé ne relèvent pas d'une dette ménagère et que Mme [X] ne rapporte pas la preuve de l'utilisation des fonds dans l'intérêt de la famille.

Devant le premier juge, Mme [P] épouse [X] avait fait conclure qu'elle avait encaissé le chèque de l'assurance émis au nom de M. [X] puisque le mobilier se trouvait au domicile familial.

Il résulte de l'article 220 du code civil que chacun des époux a pouvoir pour passer seul les contrats qui ont pour objet l'entretien du ménage ou l'éducation des enfants : toute dette ainsi contractée par l'un oblige l'autre solidairement. La solidarité n'a pas lieu, néanmoins, pour des dépenses manifestement excessives, eu égard au train de vie du ménage, à l'utilité ou à l'inutilité de l'opération, à la bonne ou mauvaise foi du tiers contractant.

La preuve incombe au prêteur qui se prévaut de la solidarité.

Il ressort des pièces du dossier et des débats que l'ouverture du compte joint a été faite en ligne par Mme [P] épouse [X], manifestement dans le but d'encaisser le chèque d'un montant de 9 426,03 euros émis au nom de M. [X] puisque les relevés du compte ne mentionnent pas d'autres opérations, à l'exception du virement de 8 000 euros effectué à la suite du dépôt du chèque.

Il ressort également du dossier que ce chèque correspondait à l'indemnisation d'un sinistre d'incendie intervenu au domicile familial, que le couple avait souscrit un contrat d'assurance multirisques habitation et que M. [X] était soumis à une interdiction de paraître au domicile familial à la suite d'une condamnation du 22 janvier 2016 à 12 mois d'emprisonnement dont quatre mois avec sursis et mise à l'épreuve pendant deux ans à la suite de violences volontaires commises en récidive sur son épouse. Il est manifeste que ce contexte de violences conjugales avérées, dans un couple ayant cinq enfants, a légitimement pu inciter Mme [P] épouse [X] à procéder seule à cette ouverture de compte.

Au demeurant, rien n'établit l'usurpation d'identité invoquée par M. [X], son dépôt de plainte contre X ne suffisant pas à l'établir. De la même façon, les pièces produites ne permettent pas d'identifier l'auteur de l'opposition pour perte émise à l'encontre du chèque litigieux. Enfin, si les époux sont en instance de divorce, ils ne l'étaient pas lors de l'ouverture du compte joint.

Dans ces circonstances et en l'absence de dépense manifestement excessive, l'ouverture de compte effectuée par Mme [P] épouse [X] dans le but d'encaisser le chèque d'indemnisation doit être considérée comme ayant eu pour objet l'entretien du ménage ou l'éducation des enfants, obligeant M. et Mme [X] solidairement.

C'est par conséquent à juste titre que le premier juge a condamné solidairement M. et Mme [X] au paiement de la somme de 7 816,42 euros, somme non contestée par les débiteurs dont les litiges personnels ne sont pas opposables à la banque.

La demande de défichage est en conséquence rejetée.

Sur la demande d'indemnisation à l'encontre de la banque

M. [X] soutient que la banque a manqué à ses obligations puisqu'elle ne s'est pas assuré de son accord pour l'ouverture du compte, qu'elle n'a pas vérifié ses coordonnées, qu'elle n'a pas respecté les conditions de ressources et qu'elle ne justifie pas lui avoir adressé un mel de confirmation. Il estime que la banque a procédé à un fichage intempestif qui lui a occasionné d'importants désagréments dans le cadre de son activité d'artisan taxi.

La société Boursorama a conclu au débouté de la demande non fondée, sans répondre précisément aux reproches formulés. Elle estime qu'en formant opposition, M. [X] a lui-même créé le découvert du compte joint.

Les pièces produites démontrent que la banque a adressé un mel à M. [X] et qu'il a bien été personnellement destinataire de la carte bancaire afférente à l'ouverture de compte.

Au demeurant, M. [X] ne rapporte pas la preuve que les manquements allégués seraient à l'origine du préjudice qu'il invoque. Il n'est pas contestable en revanche que son préjudice résulte directement de l'opposition émise sur le chèque déposé sur le compte joint. Ses allégations relatives à l'opposition formulée par la Mutuelle fraternelle d'assurances ne sont étayées d'aucune pièce justificative. La cour note enfin que M. [X] n'a pas infirmé avoir reçu de l'assureur un nouveau chèque d'indemnisation, comme le précise Mme [P] épouse [X].

Partant, le jugement est confirmé en ce qu'il a rejeté sa demande.

Sur les demandes à l'encontre de Mme [P] épouse [X]

L'appelant réclame enfin une somme de 2 000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation de son préjudice ou subsidiairement une garantie en cas de condamnation.

Il estime que Mme [P] épouse [X] a eu un comportement déloyal « en agissant par des faux » mais ne démontre aucunement ses allégations ni même le préjudice en découlant.

Ces demandes ne sont ni fondées, ni justifiées et le jugement est confirmé en ce qu'il l'a débouté.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant par arrêt contradictoire rendu en dernier ressort, mis à disposition au greffe,

Confirme le jugement en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant,

Condamne M. [G] [X] à payer à la société Boursorama banque la somme de 1 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne M. [G] [X] à payer à Mme [P] épouse [X] la somme de 1 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne M. [G] [X] aux dépens d'appel.

La greffièreLe président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 9 - a
Numéro d'arrêt : 19/13592
Date de la décision : 27/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-27;19.13592 ?
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