La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

27/05/2022 | FRANCE | N°19/10966

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 9 - a, 27 mai 2022, 19/10966


Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 9 - A



ARRÊT DU 27 MAI 2022



(n° , 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/10966 - N° Portalis 35L7-V-B7D-CAAZP



Décision déférée à la Cour : Jugement du 3 avril 2019 - Tribunal d'Instance de MEAUX - RG n° 11-18-001297





APPELANTE



La société BRED BANQUE POPULAIRE, société anonyme coopérativ

e de banque populaire agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

N° SIRET : 552 091 795 00492

[Adresse 1]

[Adresse 1]



r...

Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 9 - A

ARRÊT DU 27 MAI 2022

(n° , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/10966 - N° Portalis 35L7-V-B7D-CAAZP

Décision déférée à la Cour : Jugement du 3 avril 2019 - Tribunal d'Instance de MEAUX - RG n° 11-18-001297

APPELANTE

La société BRED BANQUE POPULAIRE, société anonyme coopérative de banque populaire agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

N° SIRET : 552 091 795 00492

[Adresse 1]

[Adresse 1]

représentée par Me François MEURIN de la SCP TOURAUT ET ASSOCIES, avocat au barreau de MEAUX

INTIMÉE

Madame [L] [T] [F]

née le [Date naissance 2] 1993 à [Localité 4] (GUADELOUPE)

[Adresse 3]

[Adresse 3]

[Adresse 3]

DÉFAILLANTE

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 1er mars 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant M. Benoît DEVIGNOT, Conseiller, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. Christophe BACONNIER, Président de chambre

M. Benoît DEVIGNOT, Conseiller

Mme Laurence ARBELLOT, Conseillère

Greffière, lors des débats : Mme Camille LEPAGE

ARRÊT :

- DÉFAUT

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par M. Christophe BACONNIER, Président et par Mme Camille LEPAGE, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Selon offre préalable de crédit acceptée le 14 décembre 2012, la société BRED Banque populaire a consenti à Mme [L] [T] [F] -qui disposait déjà d'un compte dans la même banque- un prêt personnel (crédit étudiant) d'un montant de 10 400 euros remboursable, après une période de franchise en capital de 24 mois, en 48 mensualités de 241,21 euros incluant les intérêts au taux nominal de 3,90 % l'an et l'assurance.

Par courrier du 15 novembre 2017, la société BRED Banque populaire a prononcé la déchéance du terme.

Par acte d'huissier du 9 mars 2018, la banque a fait assigner Mme [F] devant le tribunal d'instance de Basse-Terre qui, le 25 juillet 2018, s'est déclaré incompétent au profit du tribunal d'instance de Meaux.

Par jugement contradictoire du 3 avril 2019, cette juridiction de renvoi a notamment :

- déclaré recevable l'action de la société BRED Banque populaire ;

- condamné Mme [F] à payer à la société BRED Banque populaire :

* au titre du compte courant, la somme de 2 189,71 euros ;

* au titre du prêt personnel, la somme de 813,51 euros ;

- dit que ces sommes ne porteraient pas intérêt au taux légal ;

- autorisé Mme [F] à s'acquitter de sa dette en vingt-quatre fois, en procédant à vingt-trois versements de 125 euros et une vingt-quatrième égal au solde de la dette, sauf meilleur accord entre les parties ;

- débouté la société BRED Banque populaire de sa demande fondée sur le l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné Mme [F] aux dépens.

Pour statuer ainsi s'agissant du prêt personnel, le tribunal, après avoir vérifié la recevabilité de la demande, a estimé qu'aucune mise en demeure préalable n'avait été adressée à Mme [F], de sorte que la déchéance du terme avait été prononcée indûment. Le premier juge a relevé que la société BRED Banque populaire ne justifiait pas de la remise de la fiche précontractuelle d'informations et en a déduit que l'organisme de crédit était déchu du droit aux intérêts contractuels. La juridiction a écarté l'application de l'article 1231-6 du code civil et dit que la somme due ne porterait pas intérêt au taux légal.

Le 24 mai 2019, la société BRED Banque populaire a interjeté appel.

Dans ses conclusions déposées par voie électronique le 12 août 2019, la société BRED Banque populaire requiert la cour de :

- réformer le jugement, en ce qu'il a limité la condamnation de Mme [F] au titre du personnel à un montant de 813,51 euros ;

- condamner Mme [F], au titre du solde du prêt, à lui payer la somme de 7 594,79 euros, outre les intérêts au taux contractuel de 3,9 % à compter du 30 décembre 2017, date de l'arrêté de compte ;

- condamner Mme [F] à lui payer la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

À l'appui de ses prétentions, elle expose que les parties n'ont pas été appelées par le tribunal à fournir leurs explications sur les moyens soulevés d'office. Elle soutient que la déchéance du terme du 15 novembre 2017 n'a été prononcée qu'après de multiples courriers de demande de régularisation. Elle ajoute que l'offre de prêt était parfaitement régulière.

Par actes signifiés en l'étude d'huissier, la société BRED Banque populaire a fait délivrer à Mme [F] le 9 août 2019 sa déclaration d'appel, puis le 21 août 2019 ses conclusions d'appel.

Mme [F] n'a pas constitué avocat.

Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions de l'appelante, il est renvoyé aux écritures de celle-ci, conformément à l'article 455 du code de procédure civile.

Le 7 décembre 2021, le magistrat chargé de la mise en état a prononcé la clôture de l'instruction.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Il résulte du dernier alinéa de l'article 954 du code de procédure civile que la partie qui ne conclut pas ou qui, sans énoncer de nouveaux moyens, demande la confirmation du jugement est réputée s'en approprier les motifs.

A titre liminaire, la cour constate que l'appel ne porte ni sur le solde du compte au titre duquel Mme [F] a été condamnée à payer un montant de 2 189,71 euros ni sur les délais de paiement.

Le prêt personnel ayant été conclu le 14 décembre 2012, il convient de faire application des dispositions du code de la consommation dans leur version antérieure à l'entrée en vigueur au 1er juillet 2016 de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016.

Le tribunal a déclaré recevable, par de justes motifs, l'action de la banque, étant observé que cette disposition du jugement n'est pas contestée en cause d'appel.

Sur la déchéance du terme

Aux termes de l'article 1315 du code civil, dans sa version applicable au litige, celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver.

Par ailleurs, selon l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction alors applicable, les conventions légalement formées engagent leurs signataires.

En matière de crédit à la consommation, si le contrat de prêt d'une somme d'argent peut prévoir que la défaillance de l'emprunteur non commerçant entraînera la déchéance du terme, celle-ci ne peut, sauf disposition expresse et non équivoque, être déclarée acquise au créancier sans la délivrance d'une mise en demeure restée sans effet, précisant le délai dont dispose le débiteur pour y faire obstacle.

En l'espèce, les parties ont stipulé qu'« En cas de défaillance de l'Emprunteur dans ses remboursements (') le Prêteur pourra, huit jours après l'envoi d'une mise en demeure effectuée par lettre recommandée avec demande d'avis de réception restée sans effet, exiger le remboursement immédiat du capital restant dû, majorés des intérêts échus mais non payés. (...) ».

Par courrier du 19 mai 2017, le créancier, après avoir constaté que la position débitrice du compte à hauteur de 2 304,05 euros avait entraîné un arriéré d'un montant de 260,51 euros sur le prêt, a mis en demeure Mme [F] de régler « sous huitaine » la totalité des sommes dues. La lettre ajoutait qu'à défaut de régularisation, le service recouvrement serait susceptible de procéder « à l'exigibilité de l'intégralité des sommes dues au titre du prêt ».

Dans un courrier ultérieur du 25 juillet 2017, la banque rappelait, outre le solde débiteur du compte, le montant de l' « échéance impayée » (521,02 euros) et celui du capital restant dû (6 262,53 euros) du prêt. Elle menaçait Mme [F], passé une durée de trente jours, d'une inscription au Fichier national des incidents de remboursement des crédits aux particuliers (FICP).

Il résulte de ces deux courriers que la débitrice a reçu injonction de régulariser, dans un délai déterminé, un arriéré dont le montant était rappelé.

Mme [F] a donc bien été destinataire d'au moins une mise en demeure préalable.

Celle-ci étant restée infructueuse, la déchéance du terme a été régulièrement prononcée, ce dont la débitrice a été informée par une lettre du 15 novembre 2017.

Sur la déchéance du droit aux intérêts contractuels

Il résulte de l'ancien article L. 311-6 du code de la consommation que, préalablement à la conclusion du contrat de crédit, le prêteur donne à l'emprunteur, par écrit ou sur un autre support durable, les informations nécessaires à la comparaison de différentes offres lui permettant d'appréhender clairement l'étendue de son engagement.

Ces dispositions sont issues de la transposition par la France de la directive 2008/48/CE du Parlement européen et du Conseil du 28 avril 2008 concernant les contrats de crédit aux consommateurs et abrogeant la directive 87/102/CEE.

Par arrêt du 18 décembre 2014 (CA Consumer Finance C449/13), la Cour de justice de l'Union européenne a dit pour droit que les dispositions de la directive précitée doivent être interprétées en ce sens qu'elles s'opposent à ce qu'en raison d'une clause type, le juge doive considérer que le consommateur a reconnu la pleine et correcte exécution des obligations précontractuelles incombant au prêteur, cette clause entraînant ainsi un renversement de la charge de la preuve de l'exécution desdites obligations de nature à compromettre l'effectivité des droits reconnus par la directive.

L'arrêt de la Cour précise qu'une clause type figurant dans un contrat de crédit ne compromet pas l'effectivité des droits reconnus par la directive si, en vertu du droit national, elle implique seulement que le consommateur atteste de la remise qui lui a été faite de la fiche d'informations européennes normalisées. Il ajoute qu'une telle clause constitue un indice qu'il incombe au prêteur de corroborer par un ou plusieurs éléments de preuve pertinents et que le consommateur doit toujours être en mesure de faire valoir qu'il n'a pas été destinataire de cette fiche ou que celle-ci ne permettait au prêteur de satisfaire aux obligations d'informations précontractuelles lui incombant. Selon le même arrêt, si une telle clause type emportait, en vertu du droit national, la reconnaissance par le consommateur de la pleine et correcte exécution des obligations précontractuelles incombant au prêteur, elle entraînerait un renversement de la charge de la preuve de l'exécution desdites obligations de nature à compromettre l'effectivité des droits reconnus par la directive.

Il s'ensuit qu'il incombe au prêteur de rapporter la preuve de ce qu'il a satisfait à ses obligations précontractuelles et que la signature par l'emprunteur d'une fiche explicative et de l'offre préalable de crédit comportant chacune une clause selon laquelle il reconnaît que le prêteur lui a remis la fiche précontractuelle d'informations normalisées européennes constitue seulement un indice qu'il incombe à celui-ci de corroborer par un ou plusieurs éléments complémentaires.

En l'espèce, l'offre préalable acceptée le 14 décembre 2012 contient une clause pré-imprimée dans laquelle l'emprunteur a indiqué « Avant d'avoir reçu la FIP, j'ai indiqué au prêteur que le crédit sollicité n'a pas pour objet une opération de regroupement de crédits ».

Aucun élément complémentaire ne corrobore cette remise de la FIPEN qui n'est, au demeurant, pas produite par l'appelante.

En conséquence, le jugement est confirmé sur le fondement de l'ancien article L. 311-48 du code de la consommation, en ce qu'il a prononcé la déchéance du droit aux intérêts contractuels.

Sur le montant de la créance

Au vu :

- du contrat de prêt du 14 décembre 2012 ;

- du tableau d'amortissement ;

- de l'historique des remboursements ;

Mme [F] reste devoir à la société BRED Banque populaire :

10 400 euros de capital

- 4 642,18 euros de versements effectués

soit un solde de 5 757,82 euros.

Sur les intérêts au taux légal

Il résulte de l'article L. 313-3 du code monétaire et financier qu'en cas de condamnation pécuniaire par décision de justice, le taux de l'intérêt légal est majoré de cinq points à l'expiration d'un délai de deux mois à compter du jour où la décision de justice est devenue exécutoire, fût-ce par provision.

L'article ajoute que, toutefois, le juge de l'exécution peut, à la demande du débiteur ou du créancier, et en considération de la situation du débiteur, exonérer celui-ci de cette majoration ou en réduire le montant.

En l'espèce, il n'appartenait pas au tribunal d'instance de statuer sur l'exonération ou la réduction du montant de la majoration, alors qu'il n'était saisi d'aucune demande en ce sens, laquelle relevait de la compétence du juge de l'exécution.

Au surplus, en privant le créancier de tout intérêt au taux légal, le tribunal est allé au-delà de la faculté ouverte par l'article L. 313-3 précité.

En tout état de cause, la suppression totale des intérêts contractuels depuis l'origine du contrat constituait déjà une sanction suffisante et effective de l'irrégularité commise par l'organisme prêteur.

En conséquence, le jugement est infirmé, en ce qu'il a privé la banque des intérêts au taux légal sur le solde du prêt personnel.

La condamnation ci-dessus est donc assortie des intérêts au taux légal à compter du 30 décembre 2017, faute pour le créancier de solliciter un point de départ antérieur.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant par arrêt rendu par défaut et en dernier ressort, mis à disposition au greffe,

Infirme le jugement déféré, mais uniquement sur le montant de la condamnation au titre du solde du prêt ;

Statuant à nouveau du chef infirmé et y ajoutant,

Condamne Mme [L] [T] [F] à payer à la société BRED Banque populaire, au titre du solde du prêt personnel, la somme de 5 757,82 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter du 30 décembre 2017 ;

Condamne Mme [L] [T] [F] aux dépens d'appel, ainsi qu'à payer à la société BRED Banque populaire la somme de 600 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais exposés en cause d'appel.

La greffièreLe président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 9 - a
Numéro d'arrêt : 19/10966
Date de la décision : 27/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-27;19.10966 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award