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17/05/2022 | FRANCE | N°20/07477

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 3 - chambre 5, 17 mai 2022, 20/07477


Copies exécutoiresREPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 3 - Chambre 5



ARRET DU 17 MAI 2022



(n° , 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/07477 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CB4DI



Décision déférée à la Cour : Jugement du 22 mai 2020 rendu par le tribunal judiciaire de Paris - RG n° 19/01561





APPELANTS



Monsieur [J] [W] né le 13 avril 1989 à [Localité 1] (Al

gérie),



[Adresse 4]

[Localité 1]

ALGÉRIE



représenté par Me Sabine SULTAN DANINO, avocat au barreau de PARIS, toque : B0488





Monsieur [T] [K] [W] né le 1er février 1991 ...

Copies exécutoiresREPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 3 - Chambre 5

ARRET DU 17 MAI 2022

(n° , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/07477 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CB4DI

Décision déférée à la Cour : Jugement du 22 mai 2020 rendu par le tribunal judiciaire de Paris - RG n° 19/01561

APPELANTS

Monsieur [J] [W] né le 13 avril 1989 à [Localité 1] (Algérie),

[Adresse 4]

[Localité 1]

ALGÉRIE

représenté par Me Sabine SULTAN DANINO, avocat au barreau de PARIS, toque : B0488

Monsieur [T] [K] [W] né le 1er février 1991 à [Localité 1] (Algérie),

[Adresse 4]

[Localité 1]

ALGÉRIE

représenté par Me Sabine SULTAN DANINO, avocat au barreau de PARIS, toque : B0488

Monsieur [Y] [E] [W] né le 20 janvier 1993 à [Localité 1] (Algérie),

[Adresse 4]

[Localité 1]

ALGÉRIE

représenté par Me Sabine SULTAN DANINO, avocat au barreau de PARIS, toque : B0488

INTIME

LE MINISTERE PUBLIC pris en la personne de MONSIEUR LE PROCUREUR GENERAL - SERVICE CIVIL

[Adresse 2]

[Localité 3]

représenté à l'audience par Mme M.-D. PERRIN, substitut général

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 11 mars 2022, en audience publique, l'avocat des appelants et le ministère public ne s'y étant pas opposés, devant M. François MELIN, conseiller, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :

Mme Hélène FILLIOL, présidente de chambre

M. François MELIN, conseiller

Mme Marie-Catherine GAFFINEL, conseillère

Greffier, lors des débats : Mme Mélanie PATE

ARRET :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Mme Hélène FILLIOL, présidente de chambre et par Mme Mélanie PATE, greffière présente lors de la mise à disposition.

Vu le jugement rendu le 22 mai 2020 par le tribunal judiciaire de Paris qui a constaté que les formalités de l'article 1043 du code de procédure civile ont été respectées, déclaré irrecevables les demandes de M. [J] [W], né le 13 avril 1989, M. [T] [K] [W], né le 1er février 1991 et M. [Y] [E] [W], né le 20 janvier 1993 tous à [Localité 1] (Algérie) tendant à voir infirmer les décisions rendues à leur encontre le 7 juin 2016 par le service de la nationalité des Français nés et établis hors de France et le 20 juillet 2018 par le ministère de la Justice ainsi qu'à faire la preuve qu'ils ont, par filiation, la nationalité française, jugé qu'ils sont réputés, s'ils l'ont eue, avoir perdu la nationalité française le 4 juillet 2012, ordonné la mention prévue par l'article 28 du code civil, rejeté le surplus des demandes des parties, les a déboutés de leur demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile et les a condamnés in solidum ;

Vu la déclaration d'appel en date du 17 juin 2020 et les dernières conclusions notifiées le 4 septembre 2020 par M. [J] [W], M. [T] [K] [W] et M. [Y] [E] [W] qui demandent à la cour de les juger recevables et bien fondés en toutes leurs demandes, fins et conclusions, d'infirmer le jugement, à titre principal, de les déclarer français et subsidiairement, de dire que la désuétude ne s'applique pas pour M. [T] [K] [W] et de constater qu'il est Français, d'ordonner la mention prévue par l'article 28 du code civil et de condamner l'intimé au paiement de la somme de 3000 € ;

Vu les dernières conclusions notifiées le 4 décembre 2020 par le ministère public qui demande à la cour de confirmer le jugement, de déclarer les appelants irrecevables à faire la preuve qu'ils ont la nationalité française, de dire qu'ils ont perdu la nationalité française le 4 juillet 2012 et d'ordonner la mention prévue par l'article 28 du code civil ;

MOTIFS

Il est justifié de l'accomplissement de la formalité prévue par l'article 1043 du code de procédure civile par la production de la preuve de la demande de délivrance du récépissé prévu par cet article.

M. [J] [W], né le 13 avril 1989 à [Localité 1] (Algérie), M. [T] [K] [W], né le 1er février 1991 à [Localité 1], et M. [Y] [E] [W], né le 20 janvier 1993 à [Localité 1], soutiennent que leur arrière-grand-père, [C] [D], né en 1861, a été admis à la citoyenneté française par un décret du 13 octobre 1891 et que leur mère, Mme [A] [D], née le 23 mars 1961 à Ain Beida (Algérie), est donc française, ayant conservé la nationalité française à l'indépendance de l'Algérie. Ils en déduisent qu'ils sont eux mêmes français, par filiation.

Le tribunal judiciaire de Paris a fait application des dispositions de l'article 30-3 du code civil, selon lesquelles « Lorsqu'un individu réside ou a résidé habituellement à l'étranger, où les ascendants dont il tient par filiation la nationalité sont demeurés fixés pendant plus d'un demi-siècle, cet individu ne sera plus admis à faire la preuve qu'il a, par filiation, la nationalité française si lui-même et celui de ses père et mère qui a été susceptible de la lui transmettre n'ont pas eu la possession d'état de Français ».

Le tribunal doit dans ce cas constater la perte de la nationalité française dans les termes de l'article 23-6 du code civil en déterminant la date à laquelle la nationalité française a été perdue.

Le délai d'un demi-siècle de résidence à l'étranger s'apprécie au jour de l'introduction de l'action déclaratoire de nationalité française.

La présomption irréfragable de perte de la nationalité française par désuétude édictée par l'article 30-3 du code civil suppose que les conditions prévues par le texte précité soient réunies de manière cumulative.

L'application de l'article 30-3 du code civil est en conséquence, subordonnée à la réunion des conditions suivantes : l'absence de résidence en France pendant plus de 50 ans du parent français, l'absence de possession d'état de l'intéressé et de son parent français, le demandeur devant en outre résider ou avoir résidé habituellement à l'étranger.

La résidence habituelle à l'étranger s'entend d'une résidence hors du territoire national. Lorsque l'ascendant direct de celui qui revendique la nationalité française est né avant la date de l'indépendance, la condition d'absence de résidence en France pendant plus d'un demi-siècle ne doit être appréciée que dans la personne de l'ascendant direct de l'intéressé.

L'article 30-3 du code civil interdit, dès lors que les conditions qu'il pose sont réunies, de rapporter la preuve de la transmission de la nationalité française par filiation, en rendant irréfragable la présomption de perte de celle-ci par désuétude. Edictant une règle de preuve, l'obstacle qu'il met à l'administration de celle-ci ne constitue pas une fin de non-recevoir au sens de l'article 122 du code de procédure civile, de sorte qu'aucune régularisation sur le fondement de l'article 126 du même code ne peut intervenir.

La 1ère chambre civile de la Cour de cassation a dit en conséquence, dans son arrêt rendu le 13 juin 2019 (pourvoi n°18-16.838, publié), que la solution retenue par l'arrêt du 28 février 2018 (1ère Civ., pourvoi n° 17-14.239) dont la solution est invoquée par l'appelante doit, donc, être abandonnée.

Cet article empêche l'intéressé, si les conditions qu'il pose sont réunies, de rapporter la preuve de la transmission de la nationalité française par filiation.

En l'espèce, il n'est pas allégué que Mme [A] [D] a déjà résidé en France ni qu'elle a disposé de la possession d'état de française avant le 4 juillet 2012. Les appelants indiquent certes qu'elle s'est vue délivrer un certificat de nationalité française le 19 mars 2013 par le service de la nationalité des Français nés et établis hors de France ainsi qu'une carte nationalité d'identité française le 27 août 2014 par la préfecture du Rhône. Toutefois, ainsi que l'a retenu le jugement, ces éléments sont inopérants car ils sont intervenus postérieurement à l'expiration du délai de cinquante ans prévu par l'article 30-3.

Concernant MM. [J] et [Y] [E] [W], qui sont nés et domiciliés à [Localité 1], il n'est pas non plus allégué qu'ils ont résidé en France ni qu'ils disposent de la possession d'état de français.

M. [T] [K] [W] indique quant à lui qu'il a épousé une ressortissante française, Mme [X] [G], le 25 décembre 2017 et qu'il réside en France depuis le 16 mars 2018. Toutefois, ces éléments sont postérieurs à l'expiration du délai de cinquante ans de l'article 30-3. Par ailleurs, il n'allègue pas jouir de la possession d'état de français.

Il en résulte que les conditions de l'article 30-3 sont remplies à l'égard des trois appelants, ainsi que l'ont constaté à juste titre les premiers juges.

Le jugement sera cependant infirmé en ce qu'il les a déclarés irrecevables à faire la preuve, qu'ils ont par filiation, la nationalité française, l'article 30-3 du code civil n'édictant pas une fin de non-recevoir.

Il y a lieu de juger qu'ils ne sont pas admis à faire la preuve qu'ils ont, par filiation, la nationalité française, qu'ils sont réputés l'avoir perdue à la date du 4 juillet 2012 et de constater leur extranéité.

Les appelants, qui succombent, sont condamnés in solidum aux dépens. Leur demande, tendant à la condamnation du ministère public à payer la somme de 3 000 euros, formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile est rejetée.

PAR CES MOTIFS

Constate que le récépissé prévu par l'article 1043 du code de procédure civile a été délivré,

Confirme le jugement en ce qu'il a constaté que les conditions de l'article 30-3 du code civil sont remplies à l'égard de M. [J] [W], né le 13 avril 1989 à [Localité 1] (Algérie), M. [T] [K] [W], né le 1er février 1991 à [Localité 1], et M. [Y] [E] [W], né le 20 janvier 1993 à [Localité 1] ;

L'infirme pour le surplus,

Statuant à nouveau :

Dit que M. [J] [W], né le 13 avril 1989 à [Localité 1] (Algérie), n'est pas admis à faire la preuve qu'il a, par filiation, la nationalité française,

Dit que M. [J] [W] est réputé avoir perdu la nationalité française le 4 juillet 2012,

Dit que M. [T] [K] [W], né le 1er février 1991 à [Localité 1] (Algérie), n'est pas admis à faire la preuve qu'il a, par filiation, la nationalité française,

Dit que M. [T] [K] [W] est réputé avoir perdu la nationalité française le 4 juillet 2012,

Dit que M. [Y] [E] [W], né le 20 janvier 1993 à [Localité 1] (Algérie), n'est pas admis à faire la preuve qu'il a, par filiation, la nationalité française,

Dit que M. [Y] [E] est réputé avoir perdu la nationalité française le 4 juillet 2012,

Ordonne la mention prévue par l'article 28 du code civil,

Rejette la demande de M. [J] [W], M. [T] [K] [W], et M. [Y] [E] [W] au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne in solidum M. [J] [W], M. [T] [K] [W], et M. [Y] [E] [W] aux dépens.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 3 - chambre 5
Numéro d'arrêt : 20/07477
Date de la décision : 17/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-17;20.07477 ?
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