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17/05/2022 | FRANCE | N°19/13402

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 4, 17 mai 2022, 19/13402


RÉPUBLIQUE FRAN'AISE

AU NOM DU PEUPLE FRAN'AIS





COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 4 - Chambre 4



ARRÊT DU 17 MAI 2022



(n° , 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/13402 - N° Portalis 35L7-V-B7D-CAH4Z



Décision déférée à la Cour : Jugement du 17 Juin 2019 -Tribunal d'Instance de LAGNY SUR MARNE - RG n° 11-18-001866





APPELANTE



Madame [N] [M]

Née le 29 Juillet 1971 à [Localité 6] (CONGO)

Elisant domicile au c

abinet de Maître [U] [H] du fait de la protection judiciaire instituée par le TGI de Meaux



assistée et ayant pour avocat plaidant Me Rocil MATINGOU, avocat au barreau de PARIS, toque : E210...

RÉPUBLIQUE FRAN'AISE

AU NOM DU PEUPLE FRAN'AIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 4

ARRÊT DU 17 MAI 2022

(n° , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/13402 - N° Portalis 35L7-V-B7D-CAH4Z

Décision déférée à la Cour : Jugement du 17 Juin 2019 -Tribunal d'Instance de LAGNY SUR MARNE - RG n° 11-18-001866

APPELANTE

Madame [N] [M]

Née le 29 Juillet 1971 à [Localité 6] (CONGO)

Elisant domicile au cabinet de Maître [U] [H] du fait de la protection judiciaire instituée par le TGI de Meaux

assistée et ayant pour avocat plaidant Me Rocil MATINGOU, avocat au barreau de PARIS, toque : E2106

INTIMES

Monsieur [T] [D] [L]

[Adresse 2]

[Localité 5]

Défaillant

Assignation devant la Cour d'appel de Paris, en date du 18 octobre 2019, remise à personne

SA TROIS MOULINS HABITAT La société anonyme d'habitations à loyer modéré dénommée « TROIS MOULINS HABITAT », immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de Melun sous le numéro 786 150 391, agissant poursuites et diligences de son Directeur Général domicilié en cette qualité audit siège.

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représentée par Me Christian PAUTONNIER de la SELARL PAUTONNIER ET ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0159

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 05 Avril 2022, en audience publique, devant la Cour composée de :

M. Michel CHALACHIN, Président de chambre

Mme Marie MONGIN, Conseillère

M. François BOUYX, Conseiller

qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l'audience par Monsieur CHALACHIN dans les conditions prévues par l'article 804 du code de procédure civile.

Greffier, lors des débats : Mme Cynthia GESTY

ARRET : réputé contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par M. Michel CHALACHIN, Président de chambre et par Mme Cynthia GESTY, Greffière, présente lors de la mise à disposition.

******

EXPOSE DU LITIGE

Par acte sous seing privé du 26 août 2011, la société d'HLM Trois moulins habitat a donné à bail à M. [T] [D] [L] et Mme [N] [M] un logement situé [Adresse 2] à [Localité 5] ; le contrat contenait une clause de solidarité entre les preneurs.

Après avoir bénéficié d'un relogement d'urgence suite aux violences exercées par son compagnon, Mme [M] a écrit à la bailleresse le 30 septembre 2017 en lui demandant de prendre acte de son départ au 31 octobre 2017 et du fait qu'elle ne se considérait plus comme solidaire du paiement des loyers dus par M. [L].

Par lettre du 23 octobre 2017, la bailleresse lui a répondu qu'elle prenait acte de son congé à effet du 6 novembre 2017, à l'issue du préavis d'un mois.

Par jugement du 13 octobre 2017, M. [L] a été condamné par le tribunal correctionnel de Meaux à une peine d'emprisonnement assortie d'un sursis avec mise à l'épreuve pour violences volontaires commises à l'encontre de Mme [M], sa compagne.

M. [L], qui avait interdiction de paraître au domicile de [Localité 5], a quitté les lieux loués, mais les a réintégrés suite au départ de Mme [M].

Le 25 mai 2018, la bailleresse a fait délivrer aux deux locataires un commandement de payer la somme de 4 856,28 euros visant la clause résolutoire du bail.

Par actes d'huissier des 31 août et 7 septembre 2018, la bailleresse a fait assigner les locataires devant le tribunal d'instance de Lagny sur Marne afin de voir constater l'acquisition de la clause résolutoire du bail et obtenir le paiement de l'arriéré de loyers.

Par jugement du 17 juin 2019, le tribunal a :

- constaté que les conditions d'acquisition de la clause résolutoire du bail étaient réunies deux mois et un jour après la date du commandement de payer,

- ordonné l'expulsion des occupants du logement,

- condamné M. [L] au paiement d'une indemnité d'occupation mensuelle égale au montant du loyer et des charges à compter du jour de l'audience et jusqu'à la parfaite libération des lieux,

- condamné solidairement M. [L] et Mme [M] au paiement de la somme de 14 479 euros au titre de l'arriéré de loyers et charges dû au mois d'avril 2019 inclus, en deniers ou quittances valables, et ce avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation,

- condamné M. [L] à payer la somme de 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- ordonné l'exécution provisoire du jugement,

- condamné M. [L] aux dépens.

Par déclaration reçue au greffe de la cour le 3 juillet 2019, Mme [M] a interjeté appel de cette décision en intimant M. [L] et la société Trois moulins habitat.

Par ordonnance du 18 février 2020, le conseiller de la mise en état a constaté la caducité de la déclaration d'appel à l'égard de M. [L], à qui la déclaration d'appel n'avait pas été signifiée dans le délai imparti.

Par dernières conclusions notifiées le 8 mars 2022, l'appelante demande à la cour de :

- lui adjuger le bénéfice de ses précédentes écritures,

- infirmer partiellement le jugement entrepris en ce qu'il valide la clause de solidarité entre les locataires,

- débouter la bailleresse de toutes ses demandes formulées à son encontre,

- constater et arrêter que la clause de solidarité est nulle et de nul effet en ce qu'elle est contraire à l'ordre public,

- arrêter sa mise hors de cause,

- condamner la bailleresse au paiement de la somme de 3 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.

Par dernières conclusions notifiées le 4 février 2022, la société Trois moulins habitat demande à la cour de :

- constater la péremption de l'instance,

- prononcer la nullité de la déclaration d'appel,

- déclarer Mme [M] irrecevable en son appel,

- à titre subsidiaire, la débouter de toutes ses demandes,

- en conséquence, confirmer le jugement en ce qu'il a déclaré valable et applicable la clause de solidarité et condamné Mme [M] solidairement avec M. [L] au paiement de la somme de 14 479 euros, terme du mois d'avril 2019 inclus, en deniers ou quittances valables, au titre des loyers et charges échus et impayés, et ce avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation,

- en tout état de cause, condamner Mme [M] au paiement de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.

Il est fait référence aux écritures ainsi déposées de part et d'autre pour un plus ample exposé des moyens proposés par les parties au soutien de leurs prétentions.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 8 mars 2022.

MOTIFS

Sur la péremption d'instance

L'intimée invoque la péremption d'instance au motif qu'aucune diligence n'aurait été accomplie par les parties entre décembre 2019 et décembre 2021.

Mais les conclusions déposées par l'appelante le 10 juin 2020 ont interrompu le délai de péremption.

La péremption n'était donc pas acquise lorsque le dossier a fait l'objet d'un avis de fixation le 15 novembre 2021.

Sur la régularité de la déclaration d'appel

L'intimée soulève la nullité de la déclaration d'appel au motif que l'appelante avait élu domicile au cabinet de son avocat, Me [H], en invoquant la protection judiciaire instituée par le tribunal de grande instance de Meaux, alors que le jugement rendu par le tribunal correctionnel de Meaux ne contenait pas de protection judiciaire en faveur de Mme [M] ; la bailleresse reproche également à celle-ci d'avoir élu domicile au cabinet d'un autre avocat, Me [K], dans ses premières conclusions d'appelante.

Mais le fait que Mme [M], dans sa déclaration d'appel, ait élu domicile au cabinet de Me [H], avocat chargé de la représenter dans la procédure d'appel, s'explique par l'interdiction faite à M. [L], intimé, de s'approcher du domicile de l'appelante et d'entrer en relation avec elle, dans le cadre du sursis avec mise à l'épreuve qui avait été prononcé par jugement du 13 octobre 2017.

Le fait que, dans ses premières conclusions, elle ait élu domicile au cabinet d'un autre avocat ne cause aucun grief à l'intimée, qui disposait des coordonnées de l'avocat postulant de l'appelante, Me [H], lequel était chargé de la représenter dans la procédure d'appel et qui pouvait donc recevoir tous les actes la concernant.

L'intimée peut d'autant moins se plaindre d'avoir subi le moindre grief que l'appelante, dans ses dernières conclusions, a mentionné son adresse personnelle, à savoir le [Adresse 1] à [Localité 5], levant ainsi tout obstacle à la mise à exécution du présent arrêt.

Dès lors, la déclaration d'appel doit être jugée recevable.

Sur le fond

Le contrat de bail litigieux contient une clause ainsi rédigée : 'Au cas où le présent contrat serait consenti au profit de plusieurs preneurs, ceux-ci seront considérés comme solidaires, tant activement que passivement, de sorte que le bailleur pourra réclamer, si bon lui semble, à l'un d'entre eux l'intégralité des sommes qui lui sont dues, à charge pour celui qui aura payé de se retourner contre le défaillant. Ainsi le co-preneur sortant reste tenu solidairement des loyers et charges 18 mois après son départ, à raison du maintien dans les lieux de l'autre ou des autres co-preneurs. Cette solidarité permettra au bailleur de régler toutes sommes dont il serait redevable à l'égard des preneurs, à l'un de ceux-ci à son choix. Elle jouera pour toutes les obligations générées par le présent bail et ses tacites reconductions. Le congé du logement, pour être opposable à TOUS les preneurs, doit être donné par lettre recommandée avec accusé de réception, et être signé par tous les titulaires du bail'.

Mme [M] soulève la nullité de cette clause au motif que l'article 40 de la loi du 6 juillet 1989 écarte l'application de l'article 8-1 de la même loi relatif à la colocation aux contrats conclus avec un bailleur social.

Mais, s'il est vrai que l'article 8-1 n'est pas applicable en l'espèce, et ce d'autant qu'il n'a été introduit dans la loi de 1989 que par la loi ALUR du 24 mars 2014, postérieure à la conclusion du bail litigieux, ce fait juridique ne rend pas pour autant la clause de solidarité illicite, aucune disposition légale n'interdisant à un bailleur, social ou non, d'introduire une telle clause dans un bail.

De plus, l'appelante se contredit en soutenant, d'une part, que l'article 8-1 n'est pas applicable aux bailleurs sociaux, et d'autre part que le délai de 18 mois prévu dans la clause litigieuse serait contraire aux dispositions de ce texte qui limitent à six mois le délai durant lequel la solidarité peut se poursuivre entre colocataires.

Faute de démontrer que cette clause serait contraire à une disposition d'ordre public de la loi de 1989, Mme [M] doit être déboutée de sa demande de nullité.

Par conséquent, en application de cette clause, l'appelante était bien redevable, solidairement avec M. [L], des loyers et charges ayant couru dans la limite du délai de 18 mois après la date d'effet du congé, soit à compter du 6 novembre 2017.

Toutefois, le commandement de payer délivré aux preneurs le 25 mai 2018 ayant produit effet deux mois après sa délivrance, en application des dispositions de l'article 24 de la loi du 6 juillet 1989, Mme [M] n'est redevable que des loyers et charges ayant couru jusqu'au 26 juillet 2018.

Au vu du décompte produit par la bailleresse, les preneurs étaient redevables à cette date de la somme de 6 879,43 euros ; après déduction des frais non justifiés pour un total de 339,99 euros, les locataires devaient être condamnés à hauteur de la somme de 6 539,44 euros.

Postérieurement à cette date, la bailleresse reconnaît que seul M. [L] occupait les lieux sans droit ni titre, puisque Mme [M] avait régulièrement donné congé par lettre du 30 septembre 2017 ; l'indemnité d'occupation due par celui-ci ne peut donc être mise à la charge de l'appelante, étant rappelé que la clause de solidarité susvisée ne s'applique qu'aux loyers et aux charges.

Le jugement doit donc être confirmé en toutes ses dispositions, sauf à modifier le montant de la dette locative mise à la charge de Mme [M].

Le sens du présent arrêt conduit la cour à laisser à chaque partie la charge de ses propres dépens et frais irrépétibles de la procédure d'appel.

PAR CES MOTIFS :

La cour,

Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions, sauf en ce qui concerne le montant de la dette locative mise à la charge de Mme [N] [M],

Statuant à nouveau sur ce point :

Condamne Mme [N] [M], solidairement avec M. [T] [D] [L], à payer à la société Trois moulins habitat la somme de 6 539,44 euros au titre des loyers et charges dus au 26 juillet 2018, avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation du 7 septembre 2018,

Y ajoutant :

Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,

Laisse à chaque partie la charge de ses propres dépens et frais irrépétibles de la procédure d'appel.

Le greffier, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 4
Numéro d'arrêt : 19/13402
Date de la décision : 17/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-17;19.13402 ?
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