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17/05/2022 | FRANCE | N°19/03845

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 16, 17 mai 2022, 19/03845


Copies exécutoiresREPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS





COUR D'APPEL DE PARIS



PÔLE 5 - CHAMBRE 16



ARRET DU 17 MAI 2022



(n° 51 / 2022 , 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/03845 - N° Portalis 35L7-V-B7D-B7LCS



Décision déférée à la Cour :

Sentence du 31 janvier 2019 rendue par le tribunal arbitral de PARIS



DEMANDEUR AU RECOURS :



Monsieur [H] [P]

[Adresse 1]

[Local

ité 2]



représenté par Me Edmond FROMANTIN, avocat postulant du barreau de PARIS, toque: J151 et assisté de Me Gérald MALLE, avocat plaidant du barreau de LILLE





DEFENDERESSE AU RECOU...

Copies exécutoiresREPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

PÔLE 5 - CHAMBRE 16

ARRET DU 17 MAI 2022

(n° 51 / 2022 , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/03845 - N° Portalis 35L7-V-B7D-B7LCS

Décision déférée à la Cour :

Sentence du 31 janvier 2019 rendue par le tribunal arbitral de PARIS

DEMANDEUR AU RECOURS :

Monsieur [H] [P]

[Adresse 1]

[Localité 2]

représenté par Me Edmond FROMANTIN, avocat postulant du barreau de PARIS, toque: J151 et assisté de Me Gérald MALLE, avocat plaidant du barreau de LILLE

DEFENDERESSE AU RECOURS :

Société OWEL-GHIJS NV SA

prise en la personne de ses représentants légaux

Ayant son siège social : [Adresse 3] (BELGIQUE)

représentée par Me Olivier-Henri DELATTRE substituant Me Valérie LEDOUX de la SELARL RACINE, avocat du barreau de PARIS, toque : L0301

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 17 mars 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Hélène FILLIOL, présidente de chambre et M. François MELIN, conseiller, chargés du rapport.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :

Mme Hélène FILLIOL, présidente de chambre

M. François MELIN, conseiller,

Mme Marie-Catherine GAFFINEL, conseillère

Greffier, lors des débats : Mme Mélanie PATE

ARRÊT :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Hélène FILLIOL, présidente de chambre et par Madame Najma EL FARISSI, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

La société Owel-Ghijs, de droit belge, et M. [H] [P], agriculteur exerçant en France, ont conclu en mars 2016 un contrat de vente de 28 tonnes de plants de pommes de terre, pour un prix facturé de 23.946,40 € correspondant au tonnage de plants nécessaire à l'exécution du contrat d'achat du 15 mars 2016 dans le cadre duquel M. [P] s'est engagé à livrer à la société Owel-Ghijs la récolte issue de 20 hectares de production de pommes de terre de variété Lady Claire.

Une procédure de redressement judiciaire a été ouverte à l'encontre de M. [P], devant le tribunal de grande instance de Cambrai le 7 mars 2016. Par un jugement du 13 mars 2017, M. [P] a obtenu un plan de redressement judiciaire.

M. [P] n'ayant pas livré la récolte prévue, la société Owel-Ghijs a, le 10 mai 2017, saisi

la commission d'arbitrage RUCIP (Règles et usages du commerce intereuropéen des

pommes de terre) de [Localité 4] à l'encontre de M. [P] aux fins de voir :

-condamner M. [P] à lui verser la somme de 82.080 € à titre de réparation du préjudice subi du fait de la violation du contrat du 15 mars 2016 ;

- condamner M. [P] à lui verser les intérêts légaux de retard sur la somme due au titre de la réparation du préjudice à compter du 20 avril 2017 ;

- condamner M. [P] au remboursement des frais d'arbitrage qu'elle a provisionnés ;

- condamner M. [P] à lui verser la somme de 536 € au titre de l'attestation de prix que cette dernière s'est vue contrainte de se procurer ;

- condamner M. [P] à verser à la société Owel-Ghijs la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La commission d'arbitrage au premier degré a, le 5 janvier 2018, condamné M. [P] à verser à la société Owel-Ghijs la somme de 82.080 € à titre de dommages et intérêts augmentée des intérêts légaux de retard à compter du 20 avril 2017, la somme de 536 € au titre des attestations de cours, celles de 2.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et de 5.330 € au titre de la provision d'arbitrage.

Le 2 février 2018, M. [P] a saisi la commission d'arbitrage RUCIP au second degré à l'encontre du projet de sentence du 5 janvier 2018.

La commission d'arbitrage au second degré, composée de MM. [S] [B], [C] [V] et [W] [U], président, a, le 31 janvier 2019, constaté la caducité de la demande d'arbitrage au second degré introduite par M. [P] conformément aux demandes de la société Owel-Ghijs. En application du règlement d'arbitrage, elle constatait parallèlement que le projet de sentence du 5 janvier 2018 devenait en conséquence sentence définitive.

Par un arrêt du 28 septembre 2021, cette cour a notamment :

- annulé en toutes ses dispositions la sentence rendue le 31 janvier 2019 par la commission d'arbitrage au second degré,

- renvoyé les parties à conclure au fond,

Par des conclusions notifiées le 2 février 2022, M. [P] demande à la cour de :

- juger le RUCIP 2000 applicable aux relations entre les parties ;

- juger la société Owel-Ghijs irrecevable à solliciter une indemnisation quelconque au titre de l'inexécution du contrat ;

- condamner cette société aux entiers frais et dépens en ce compris le remboursement des frais d'arbitrage pour un montant de 18.210 € ;

- condamner cette société au paiement de la somme de 12.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Par des conclusions notifiées le 18 février 2022, la société Owel-Ghijs demande à la cour de :

- condamner M. [H] [P] à lui verser la somme de 82.080 € à titre de réparation du préjudice subi du fait de la violation du contrat du 15 mars 2016 ;

- le condamner à verser les intérêts légaux de retard sur la somme due au titre de la réparation du préjudice à compter du 20 avril 2017 ;

- le condamner au paiement de la somme de 5.330 € versée par la société Owel-Gihjs au titre de la provision d'arbitrage devant la commission d'arbitrage RUCIP au premier degré en application de l'article 4 du règlement d'arbitrage RUCIP ;

- le condamner à verser la somme de 536 € au titre de l'attestation de prix que cette dernière s'est vue contrainte de se procurer conformément à l'article 25.7 RUCIP ;

- débouter M. [H] [P] de toutes ses demandes, fins et conclusions ;

- le condamner à verser la somme de 2.000 € au titre des frais irrépétibles engagés devant la commission d'arbitrage RUCIP au premier degré, et que celle-ci l'avait condamné à verser ;

- condamner M. [H] [P] à verser la somme de 12.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner M. [H] [P] aux entiers dépens.

***

MOTIFS

Sur la demande d'indemnisation

Moyens des parties

M. [H] [P] soutient que les Règles et usages du commerce intereuropéen des pommes de terre (ci-après les RUCIP) sont applicables dans leur rédaction de l'année 2000, ainsi que cela résulte, selon lui, des conditions générales imprimées au verso du contrat ainsi qu'au verso des annexes 1 et 2 de ce contrat, que la référence à ces règles est claire et qu'en application de l'article 1192 du code civil, il n'y a donc pas à interpréter les stipulations claires et précises du contrat, sauf à les dénaturer. Il ajoute qu'en application de l'article 24.1 des RUCIP, la société Owel-Ghijs aurait dû lui adresser une mise en demeure préalable avant de demander une indemnisation et que faute de l'avoir fait, elle a perdu ses droits indemnitaires.

La société Owel-Ghijs soutient que les conditions générales auxquelles se réfèrent M. [H] [P] sont des conditions générales de vente, ainsi que l'indique leur intitulé 'Algemene verkoops- voorwaarden', qui signifie en français 'Conditions générales de vente'. Elle en déduit qu'elles ne sont donc pas applicables puisque les parties ont conclu un contrat d'achat. Elle indique que ce contrat ne prévoit pas en tout état de cause l'application de conditions générales, qu'elles soient d'achat ou de vente. Elle précise qu'il faut donc uniquement prendre en considération les stipulations des conditions spéciales du contrat, qui prévoient l'application des RUCIP sans indication explicite de la version applicable. En conséquence, il y a lieu de considérer que les RUCIP applicables sont celles en vigueur au jour de la conclusion du contrat soit les RUCIP dans leur rédaction de l'année 2012. Or, dans cette rédaction, la partie lésée n'a pas à établir une mise en demeure mais peut directement formuler une demande indemnitaire en cas de non-respect du contrat, ce que la société Owel-Ghijs a fait.

Stipulations contractuelles

Le contrat d'achat de pommes de terre, du 15 mars 2016, stipule des conditions spéciales rédigées dans les termes suivants :

'RUCIP

Voir annexe 1 et 2 du contrat.

Voir contrat de vente de plants nr 2016-4. 28000 kg Lady Claire A 30/40

En cas d'enlèvement des pommes de terre du champ de l'acheteur, le contractant sera chargé des frais de transport'.

Au verso de ce contrat figurent des conditions générales rédigées en néerlandais et en français et intitulées 'Algemene verkoops- voorwaarden', cet intitulé n'étant pas traduit en français.

Dans la version française, elles stipulent notamment que

'Nos conditions générales ont force de loi pour les parties contractantes, sauf clause écrite, explicitement contraire entre les parties. Indépendamment des dispositions complémentaires et/ou explicatives stipulées ultérieurement, les règles et usages du Commerce Inter-européens des pommes-de-terre 2000 (RUCIP 2000), que les parties concernées déclarent connaître et accepter, font partie intégrante de nos conditions générales de vente et elles sont d'application pour toutes nos conventions d'achat et de vente'.

Les mêmes conditions rédigées sont par ailleurs reproduites au verso de l'annexe 1 et de l'annexe 2 du contrat.

Réponse de la cour

Il résulte des conditions spéciales du contrat que les parties ont entendu se référer aux RUCIP, sans autre précision.

Le contrat et ses deux annexes comportent, au verso, des conditions générales désignant expressément les RUCIP dans leur rédaction de l'année 2000.

Contrairement à ce que soutient la société Owel-Ghijs, ces conditions générales sont bien applicables entre les parties, dès lors qu'elles ont été reproduites, par la société elle-même qui a rédigé le contrat, trois fois, à savoir au verso du contrat, de l'annexe 1 et de l'annexe 2, et dès lors qu'elles stipulent être applicables à la fois aux conventions d'achat et de vente, peu important que leur intitulé, rédigé en néerlandais et non traduit en français, soit : 'Algemene verkoops- voorwaarden'.

Ainsi que le soutient M. [H] [P] au regard des règles d'interprétation du code civil, dont l'application n'est pas contestée par la société, ces stipulations sont claires et précises et ne nécessitent aucune interprétation.

Il en résulte que les relations contractuelles sont soumises aux RUCIP dans leur rédaction de l'année 2000.

L'article 24.1 de ce texte énonce que 'si l'une des parties n'exécute pas le contrat, l'autre doit lui adresser sous peine de perdre ses droits une mise en demeure en lui donnant un délai supplémentaire et en la prévenant qu'à l'expiration de ce délai elle refusera de livrer ou d'accepter la livraison'.

Il est constant que la société Owel-Ghijs n'a pas adressé à une mise en demeure à M. [H] [P] après avoir constaté l'absence de livraison des pommes de terre mais qu'elle a alors directement formé une demande d'indemnisation par un courrier du 20 avril 2017.

La société a donc, en application de cet article 24.1, perdu son droit à indemnisation.

L'ensemble des demandes formées par la société Owel-Ghijs est donc rejeté, y compris celles formées au titre de la provision d'arbitrage devant la commission d'arbitrage RUCIP, au titre de l'attestation de prix et des frais irrépétibles que la commission d'arbitrage RUCIP au premier degré l'a condamnée à verser.

Sur l'article 700 du code de procédure civile

La société Owen-Ghijs, qui succombe, est condamnée à payer à M. [H] [P] la somme de 12.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

La demande qu'elle formule à ce titre est rejetée.

Sur les dépens

La société Owen-Ghijs, qui succombe, est condamnée aux dépens, en ce compris le remboursement des frais d'arbitrage pour un montant de 18.210 euros.

PAR CES MOTIFS

Déboute la société Owel-Ghijs de l'ensemble de ses demandes ;

Condamne la société Owel-Ghijs à payer à M. [H] [P] la somme de 12.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la société Owel-Ghijs aux dépens, en ce compris le remboursement des frais d'arbitrage pour un montant de 18.210 euros.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 16
Numéro d'arrêt : 19/03845
Date de la décision : 17/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-17;19.03845 ?
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