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12/05/2022 | FRANCE | N°20/03819

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 9 - a, 12 mai 2022, 20/03819


Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 9 - A



ARRÊT DU 12 MAI 2022



(n° , 12 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/03819 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CBRKK



Décision déférée à la Cour : Jugement du 19 novembre 2019 - Tribunal d'Instance de PARIS - RG n° 11-16-09-631





APPELANTES



La société DOMOFINANCE, société anonyme à conseil d'ad

ministration, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

N° SIRET : 450 275 490 00057

1, boulevard Haussmann

75009 PARI...

Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 9 - A

ARRÊT DU 12 MAI 2022

(n° , 12 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/03819 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CBRKK

Décision déférée à la Cour : Jugement du 19 novembre 2019 - Tribunal d'Instance de PARIS - RG n° 11-16-09-631

APPELANTES

La société DOMOFINANCE, société anonyme à conseil d'administration, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

N° SIRET : 450 275 490 00057

1, boulevard Haussmann

75009 PARIS

représentée et assistée de Me Sébastien MENDES GIL de la SELAS CLOIX & MENDES-GIL, avocat au barreau de PARIS, toque : P0173

La société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE, société anonyme à conseil d'administration, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège, venant aux droits de la société SYGMA BANQUE

N° SIRET : 542 097 902 04319

1, boulevard Haussmann

75009 PARIS

représentée et assistée de Me Sébastien MENDES GIL de la SELAS CLOIX & MENDES-GIL, avocat au barreau de PARIS, toque : P0173

INTIMÉS

Monsieur [G] [F]

né le 8 décembre 1946 à CAEN (14)

4, rue du Moulin à Papier

27290 PONT-AUTHOU

représenté par Me Ariane VENNIN de la SELEURL A7 AVOCAT, avocat au barreau de PARIS, toque : C1186

Madame [J] [N]

née le 22 août 1955 à PARIS (75)

4, rue du Moulin à Papier

27290 PONT-AUTHOU

représentée par Me Ariane VENNIN de la SELEURL A7 AVOCAT, avocat au barreau de PARIS, toque : C1186

La société AGENCE FRANCE ECOLOGIE, société à responsabilité limitée, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

N° SIRET : 528 543 390 00033

14, rue Davoust

93500 PANTIN

DÉFAILLANTE

La SELARLU BALLY MJ en qualité de liquidateur judiciaire de la société AGENCE FRANCE ÉCOLOGIE (SARL)

69, rue d'Anjou

93000 BOBIGNY

DÉFAILLANTE

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 9 mars 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Fabienne TROUILLER, Conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. Christophe BACONNIER, Président de chambre

Mme Fabienne TROUILLER, Conseillère

Mme Laurence ARBELLOT, Conseillère

Greffière, lors des débats : Mme Camille LEPAGE

ARRÊT :

- DÉFAUT

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par M. Christophe BACONNIER, Président et par Mme Ophanie KERLOC'H, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Par deux actes sous seing privé en date du 19 mars 2015 signés à domicile, M. [G] [F] a acquis auprès de la société Agence France écologie (la société AFE) une installation photovoltaïque pour un montant de 20 500 euros ainsi que des portes et fenêtres pour un montant de 24 000 euros.

Le même jour, M. [F] et Mme [J] [N] ont souscrit auprès de la société Domofinance un crédit portant sur la somme de 24 000 euros remboursable en 120 mensualités de 238,46 euros chacune, et au taux débiteur de 3,31 %.

Par acte du 2 avril 2015, M. [F] et Mme [N] ont souscrit auprès de la société Sygma Banque un prêt d'un montant de 20 500 euros, remboursable en 108 mensualités de 290,09 euros chacune, au taux débiteur de 5,76 %.

Les fenêtres et portes fenêtres ont été livrées et posées le 16 mai 2015 et les douze panneaux photovoltaïques ont été installés le 21 mai 2015. Les fonds ont été débloqués le 27 et le 29 mai 2015.

L'installation photovoltaïque a été raccordée et mise en service le 22 octobre 2015.

Saisi les 18 et 19 février 2016 par M. [F] et Mme [N] d'une demande tendant à l'annulation des contrats de vente et de crédit affectés, le tribunal d'instance de Paris, par un jugement réputé contradictoire rendu le 19 novembre 2019 auquel il convient de se reporter, a :

- déclaré recevable l'action de M. [F] et Mme [N],

- prononcé la nullité du contrat de vente conclu le 19 mars 2015 portant sur une installation photovoltaïque,

- prononcé en conséquence la nullité du contrat de crédit affecté conclu le 2 avril 2015 avec la société Sygma banque,

- prononcé la nullité du contrat de vente conclu le 19 mars 2015 portant sur des fenêtres et portes fenêtres,

- prononcé en conséquence la nullité du contrat de crédit affecté conclu le 19 mars 2015 avec la société Domofinance,

- dit que M. [F] et Mme [N] devront tenir à la disposition de la société MJ Bally en sa qualité de mandataire liquidateur de la société AFE l'ensemble des matériels posés à leur domicile, pendant un délai de 6 mois, et que passé ce délai M. [F] et Mme [N] devront les porter dans un centre de tri sans pouvoir en retirer aucun profit,

- condamné les sociétés Domofinance et BNPPPF à restituer à M. [F] et Mme [N] les sommes versées au titre des contrats de crédit des 19 mars et 2 avril 2015,

- débouté les sociétés Domofinance et BNPPPF de leurs demandes de dommages et intérêts et de paiement des sommes dues au titre des contrats de crédit.

Le premier juge a retenu que l'action ne tendant pas au paiement d'une somme d'argent de sorte qu'elle ne se heurtait pas au principe d'arrêt des poursuites de l'article L. 622-21 du code de commerce. Il a constaté que les bons de commande méconnaissaient les prescriptions des articles L. 111-1 du code de la consommation en ce qu'ils ne mentionnaient pas la date de livraison et la marque des panneaux. Il a relevé que les acquéreurs n'avaient pas entendu couvrir la nullité, a prononcé l'annulation de plein droit des contrats de crédit et a retenu que les prêteurs avaient commis une faute en octroyant un crédit sur la base d'un contrat nul, laquelle les privaient de leur créance de restitution. Il a considéré enfin que les emprunteurs subissent un préjudice puisqu'ils devraient rembourser les sommes prêtées pour des installations restituées et que les banques invoquaient une faute sans lien avec le préjudice allégué.

La société AFE a été placée en liquidation judiciaire par jugement du tribunal de commerce de Bobigny en date du 8 février 2017.

Le 19 avril 2017, la société BNPPPF a déclaré sa créance pour une somme de 27 804,60 euros auprès de la SELARLU Bally désignée liquidateur judiciaire.

Par une déclaration en date du 20 février 2020, les sociétés Domofinance et BNP Paribas Personal Finance (la société BNPPPF) ont relevé appel de cette décision.

Aux termes de conclusions remises le 22 novembre 2021, les appelantes demandent à la cour :

- d'infirmer le jugement en toutes ses dispositions,

- de déclarer irrecevables les demandes de M. [F] et Mme [N], ou à tout le moins les en débouter,

- de constater que la déchéance du terme du contrat de crédit conclu avec la société Domofinance a été prononcée, et à défaut de prononcer la résiliation judiciaire du contrat de crédit du fait des impayés avec effet au 12 septembre 2016 et condamner M. [F] et Mme [N] à payer à la société Domofinance la somme de 26 149,40 euros avec les intérêts au taux contractuel de 3,31 % l'an à compter du 13 septembre 2016 sur la somme de 24 327,51 euros et au taux légal pour le surplus en remboursement du crédit accepté le 19 mars 2015,

- de constater que la déchéance du terme du contrat de crédit conclu avec la société Sygma banque a été prononcée, et à défaut de prononcer la résiliation judiciaire du contrat de crédit du fait des impayés avec effet au 17 novembre 2016 et condamner M. [F] et Mme [N] à payer à la société BNPPPF la somme de 24 033,71 euros avec les intérêts au taux contractuel de 5,76 % l'an à compter du 6 avril 2017 sur la somme de 22 360,58 euros et au taux légal pour le surplus en remboursement du crédit accepté le 2 avril 2015,

- subsidiairement en cas de nullité des contrats, de déclarer irrecevables les demandes de M. [F] et Mme [N] visant à la décharge de l'obligation de restituer les capitaux prêtés, ou à tout le moins les en débouter et de condamner in solidum M. [F] et Mme [N] à payer à la société Domofinance la somme de 24 000 euros en restitution du capital prêté au titre du contrat conclu le 19 mars 2015 et à la société BNPPPF la somme de 20 500 euros en restitution du capital prêté au titre du contrat conclu le 2 avril 2015,

- très subsidiairement de limiter la réparation qu'elles devraient eu égard au préjudice effectivement subi par les emprunteurs, et limiter la décharge à concurrence du préjudice subi, à charge pour les emprunteurs d'en justifier,

- à titre infiniment subsidiaire, en cas de décharge de l'obligation de l'emprunteur, de condamner in solidum M. [F] et Mme [N] à payer à la société Domofinance la somme de 24 000 euros au titre du capital perdu à titre de dommages et intérêts en réparation de leur légèreté blâmable et les condamner in solidum à payer à la société BNPPPF la somme de 20 500 euros sur le même fondement,

- d'enjoindre M. [F] et Mme [N] de restituer à leur frais le matériel posé chez eux à la société Bailly MJ ès-qualités dans un délai de 15 jours à compter de la signification de l'arrêt, et dire qu'à défaut de restitution ils seront tenus du remboursement du capital prêté,

- subsidiairement de priver M. [F] et Mme [N] de leur créance en restitution des sommes réglées du fait de leur légèreté blâmable,

- en cas de nullité des contrats, de dire que la société AFE est garante du remboursement de l'emprunteur du capital prêté, et de la condamner en conséquence à garantir la restitution du capital prêté à la société Domofinance à hauteur de la somme de 24 000 euros et à la société BNPPPF à hauteur de 20 500 euros,

- subsidiairement, la condamner à ces sommes sur le fondement de la répétition de l'indu, et à défaut sur le fondement de la responsabilité,

- condamner la société AFE à payer à la société Domofinance la somme de 4 615,20 euros et de payer à la société BNPPPF la somme de 7 304,60 euros de dommages et intérêts au titre des intérêts perdus du fait de l'annulation des contrats,

- de fixer les créances correspondantes à la procédure collective de la société AFE,

- de condamner in solidum M. [F] et Mme [N] à leur payer la somme de 2 000 euros chacune au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Les appelantes soutiennent l'irrecevabilité du moyen tiré de la nullité des contrats et contestent toute méconnaissance des dispositions de l'article L. 121-23 du code de la consommation.

Elles précisent qu'en réceptionnant sans réserve les travaux, en utilisant les matériels achetés, en payant le prix à la venderesse puis en poursuivant l'exécution des contrats, les acquéreurs ont ratifié les contrats et couvert la nullité potentiellement encourue. Elles indiquent que les contrats de crédit sont réguliers et produisent un décompte de leurs créances.

Subsidiairement les appelantes rappellent que l'annulation des contrats de crédit emporterait obligation de restitution par les emprunteurs des capitaux prêtés.

Visant notamment les articles L. 311-31 et L. 311-51 du code de la consommation, elles contestent toute obligation de contrôler la validité du bon de commande, toute faute dans la vérification du bon de commande, de l'exécution de la prestation qui ne leur incombe pas ou dans la délivrance des fonds sur la base d'un mandat de payer donné par les clients (en rappelant les obligations du mandataire). Elles soulignent que toutes les demandes des emprunteurs à leur encontre sont vaines dès lors que les intéressés ne justifient pas du moindre préjudice ni d'un lien causal entre celui-ci et un fait imputable à la banque.

Elles rappellent que le maintien du contrat obligera les intimés à restituer le capital perçu au titre de l'exécution provisoire du jugement attaqué et subsidiairement que la nullité du contrat de crédit emporterait obligation pour les emprunteurs de restituer le capital emprunté.

Elles relèvent que l'évaluation d'un éventuel préjudice doit prendre en compte la valeur du bien que les acquéreurs conserveront et soulignent que la légèreté blâmable avec laquelle les emprunteurs ont signé l'attestation de fin de travaux constitue une faute occasionnant un préjudice correspondant au capital prêté dont elle serait privée. Elles demandent plus subsidiairement au visa de l'article L. 311-33 du code de la consommation que soit appelée en garantie la venderesse en raison de sa faute ayant entraîné l'annulation du contrat de crédit.

Par des conclusions remises le 18 août 2020, M. [F] et Mme [N] demandent à la cour :

- de dire infondé l'appel formé par les sociétés Domofinance et BNPPPF,

- de débouter les sociétés Domofinance et BNPPPF de l'ensemble de leurs demandes,

- de confirmer en toutes ses dispositions le jugement dont appel,

- de condamner les sociétés Domofinance et BNPPPF à leur payer la somme de 3 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Les intimés indiquent qu'ils ne demandent l'annulation du contrat de vente que pour obtenir l'annulation du contrat de crédit affecté, et que la dépose du matériel se fera à leurs frais, de sorte que leur action ne se heurte pas au principe de l'arrêt des poursuites de l'article L. 622-21 du code de commerce.

Ils font valoir la nullité du bon de commande relatif à l'installation photovoltaïque au regard des articles L. 121-18-1 et suivants du code de la consommation, dans leur rédaction applicable à la cause, notamment en ce qu'il ne mentionne pas les caractéristiques essentielles du bien, les délais de livraison ni les conditions de financement, puis indiquent que le bon de commande relatif aux fenêtres et portes fenêtres viole les dispositions précitées en ne comportant ni la désignation précise des matériaux ni les délais de livraison.

Les intimés contestent avoir couvert la nullité du contrat, se prévalent de leur qualité de consommateurs profanes et font valoir que la reproduction des articles afférents dans le bon de commande étant incomplète, illisible elle ne permet pas de présumer de leur connaissance du vice affectant l'acte. Ils ajoutent que cette reproduction figure dans les conditions générales de vente et ne mentionne aucunement l'article L. 121-18-1 du code de la consommation. Ils précisent avoir agi en annulation des contrats dès leur découverte du vice, avoir interrompu l'exécution des contrats de crédit de sorte qu'aucune confirmation de l'acte ne saurait être caractérisée.

Ils indiquent au visa de l'article L. 311-31 ancien du code de la consommation que les contrats de crédits sont nuls de plein droit, réclament une remise en état antérieur des parties avant de soutenir que les banques ont commis des fautes les privant de leur créance de restitution.

Les emprunteurs exposent que les sociétés BNPPPF et Domofinance ont commis une faute en débloquant les fonds sur la base de contrats intrinsèquement nuls, sans que les travaux aient été achevés et malgré deux attestations de fin de travaux irrégulières, incohérentes et incomplètes, remplies par la venderesse et non par les consommateurs. Ils font valoir que ces manquements leur ont causé un préjudice justifiant la privation des banques de leur créance de restitution des capitaux prêtés et se prévalent subsidiairement de l'article 1235 du code civil pour obtenir la restitution des sommes versées en exécution du contrat de crédit.

La déclaration d'appel et les conclusions ont été signifiées par acte d'huissier délivré le 23 juillet 2020 conformément aux dispositions des articles 656 et 658 du code de procédure civile, à personne morale. La société Bally MJ ès-qualités n'a pas constitué avocat.

Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions des parties, il est renvoyé aux écritures de celles-ci conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 11 janvier 2022 et l'affaire a été appelée à l'audience le 9 mars 2022.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Il n'est pas discuté que la société BNPPPF est venue aux droits et obligations de la société Sygma Banque.

Il est rappelé que la cour n'est pas tenue de statuer sur des demandes de : « dire et juger » qui ne sont pas des prétentions juridiques.

Comme l'a retenu à juste titre le premier juge, les contrats de vente conclus entre M. [F] et la société AFE, après démarchage à domicile, sont soumis aux dispositions des articles L. 121-18 et suivants du code de la consommation dans leur rédaction issue de la loi n° 2014-344 du 17 mars 2014 applicable à compter du 13 juin 2014 et les contrats de crédit conclus avec la société Sygma Banque et la société Domofinance sont des contrats affectés au sens de l'article L. 311-19 du code de la consommation, dans sa rédaction issue de la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010.

Sur la recevabilité des demandes

Les appelantes invoquent l'irrecevabilité des demandes de M. [F] et Mme [N].

La cour relève que la recevabilité des demandes de M. [F] et Mme [N] ne fait l'objet d'aucune contestation sérieuse, les appelantes n'ayant développé aucune fin de non-recevoir et se contentant de souligner leur mauvaise foi à remettre en cause les contrats au-delà du délai de rétractation. Le jugement est par conséquent confirmé en ce qu'il a déclaré leur action recevable.

Si les appelantes sollicitent que des prétentions des intimés soient déclarées 'irrecevables', force est de constater qu'elles ne soulèvent en réalité aucune fin de non-recevoir ou exception de procédure à l'appui, de sorte qu'il n'y a pas lieu de statuer sur cette prétention au-delà de l'examen de la contestation élevée par les banques sur le fond.

Sur la demande d'annulation des contrats de vente et de crédit

L'article L. 121-18-1 devenu L. 221-9 du code de la consommation, impose, à peine de nullité au professionnel, de fournir au consommateur un exemplaire daté du contrat conclu hors établissement, sur papier signé par les parties ou, avec l'accord du consommateur, sur un autre support durable, confirmant l'engagement exprès des parties, le contrat comprenant, à peine de nullité, toutes les informations mentionnées au I de l'article L. 121-17.

L'article L. 121-17 devenu L. 221-5 prévoit que préalablement à la conclusion d'un contrat de vente ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, les informations suivantes :

1° les informations prévues aux articles L. 111-1 et L. 111-2 ;

2° lorsque le droit de rétractation existe, les conditions, le délai, les modalités d'exercice de ce droit ainsi que le formulaire type de rétractation, dont les conditions de présentation et les mentions qu'il contient sont fixées par décret en conseil d'État ;

6° les informations relatives aux coordonnées du professionnel, le cas échéant au coût de l'utilisation de la technique de communication à distance, à l'existence de code de bonne conduite, le cas échéant aux cautions et garanties, aux modalités de résiliation, aux modes de règlement des litiges et aux autres conditions contractuelles, dont la liste et le contenu sont fixées par décret en conseil d'État.

L'article L. 111-1 du code de la consommation dispose que : « Avant que le consommateur ne soit lié par un contrat de vente de biens ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, notamment les informations suivantes :

1° Les caractéristiques essentielles du bien ou du service, compte tenu du support de communication utilisé et du bien ou service concerné ;

2° Le prix du bien ou du service, en application des articles L. 113-3 et L. 113-3-1;

3° En l'absence d'exécution immédiate du contrat, la date ou le délai auquel le professionnel s'engage à livrer le bien ou à exécuter le service ;

4° Les informations relatives à son identité, à ses coordonnées postales, téléphoniques électroniques à ses activités, pour autant qu'elles ne ressortent pas du contexte, ainsi que, s'il y a lieu, celles relatives aux garanties légales, aux fonctionnalités du contenu numérique et, le cas échéant, à son interopérabilité, à l'existence et aux modalités de mise en 'uvre des garanties et aux autres conditions contractuelles ».

Le bon de commande doit désormais comporter les caractéristiques essentielles du bien ou du service.

L'article L. 111-1 n'exige nullement que la dimension, le poids, l'aspect des panneaux soient précisés dans le bon de commande.

En l'espèce, le bon de commande n° 60327 porte sur l'installation :

- d'une centrale photovoltaïque, d'une puissance globale de 3 000 Wc, comprenant

- 12 panneaux photovoltaïques certifiés NF EN 61215 Classe II de type Thomson,

- système d'intégration au bâti - onduleur ' coffret de protection ' disjoncteur ' coffrets parafoudre,

- forfait d'installation de l'ensemble

- la mise en service, le Consuel et le tirage de câbles entre le compteur et l'onduleur sont inclus

- Démarches administratives (Mairie, ERDF, Consuel etc.)

- Frais de raccordement au réseau ERDF à la charge de la société AFE

- Garantie constructeur longue durée onduleur 20 ans

sous réserve de validation financière et technique

au prix TTC de 20 500 euros TTC.

Le bon de commande n° 56858 porte sur l'achat de fenêtres et portes fenêtres au prix de 24 000 euros TTC.

M. [F] et Mme [N] soutiennent que le bon de commande n° 60327 est irrégulier pour ne pas comporter la désignation précise de la nature et des caractéristiques des biens vendus, notamment le modèle des panneaux et l'onduleur, pour ne pas indiquer les conditions d'exécution du contrat et les délais de livraison, pas plus que le détail du coût de l'installation et ils ajoutent que les prestations ne sont pas suffisamment précisées.

Concernant le bon de commande n° 56858, ils estiment qu'il est extrêmement lacunaire sans aucune précision, ni sur le nombre ni sur le délai de livraison

Comme le relève à juste titre le premier juge, il apparaît effectivement que le bon de commande n° 56858 ne mentionne aucune caractéristique essentielle des fenêtres et portes fenêtres vendus, en violation du 1° du texte susvisé.

Si les deux bons de commande mentionnent expressément le prix global à payer, les dispositions légales précitées n'imposent pas la mention du prix de chaque composant de l'équipement, ni le développement détaillé des modalités techniques de pose des matériels conformément au 2° de l'article précité.

Par ailleurs, aucun des deux contrats ne précise le délai de livraison, en dépit l'alinéa 5° susvisé.

Le juge a donc retenu à bon droit que les deux bons de commande n'étaient pas suffisamment détaillés et encouraient une nullité.

L'article 1338 devenu 1182 du code civil, alinéas 2 et 3 dispose qu' : « A défaut d'acte de confirmation ou ratification, il suffit que l'obligation soit exécutée volontairement après l'époque à laquelle l'obligation pourrait être valablement confirmée ou ratifiée. La confirmation, ratification, ou exécution volontaire dans les formes et à l'époque déterminées par la loi, emporte la renonciation aux moyens et exceptions que l'on pouvait opposer contre cet acte, sans préjudice néanmoins du droit des tiers ».

Dans le rôle qu'elle reconnaît au juge national dans l'application d'une réglementation d'ordre public de protection, la Cour de justice de l'union européenne impose un examen in concreto qui implique notamment que le juge apprécie la cohérence entre les griefs émis par une partie et la réalité de ses prétentions et motivations.

En l'espèce, les contrats versés en original aux débats par M. [F] et Mme [N] reproduisent in extenso les dispositions des articles L. 121-17, L. 111-1, L. 111-2, L. 121-21, L. 121-21-1 à L. 121-21-8 du code de la consommation dont la simple lecture ne pouvait qu'alerter un profane sur les omissions des bons de commande concernant, en l'occurrence, les caractéristiques essentielles des biens vendus ou le délai de livraison. Contrairement à ce que soutiennent les intimés, aucun texte n'impose la reproduction de l'article L. 121-18-1.

Les deux contrats de vente sont assortis de formulaires d'annulation de la commande dont M. [F] et Mme [N] n'ont pas souhaité user dans le délai fixé.

Il ressort également des pièces produites que M. [F] a accepté la livraison du matériel commandé, la pose des fenêtres et portes fenêtres et les travaux sur sa toiture, il a signé sans réserve le 16 mai une fiche de réception des travaux pour les fenêtres et le 21 mai un certificat de livraison et de fourniture de services, mentionnant sans que cela ne soit contredit, que le vendeur atteste que les travaux objets du financement sont terminés et sont conforme au devis. Il n'est nullement établi que les fenêtres n'auraient pas toutes été posées le 16 mai, comme le prétendent sans preuve les intimés. Dans ces attestations, M. [F] a demandé la mise à disposition des fonds au vendeur et signé un mandat de prélèvement.

Les acheteurs ont ensuite donné leur accord pour le raccordement et la mise en service de leur installation, intervenue le 22 octobre 2015 et ont commencé à rembourser leurs échéances de crédit.

Si l'installation de la centrale photovoltaïque est intervenue deux mois après la signature des bons de commande, M. [F] et Mme [N] ne justifient d'aucune doléance émise à l'encontre de la société prestataire et n'ont émis aucun grief sur le fonctionnement de l'équipement. Ils ne justifient d'aucun dysfonctionnement.

Ces actes positifs non équivoques caractérisent une volonté de percevoir les avantages attendus des contrats, confirmée même après introduction de l'instance, qui exclut que M. [F] et Mme [N] puissent se prévaloir d'une nullité tirée de l'irrégularité formelle du bon de commande.

L'action judiciaire engagée par M. [F] et Mme [N] onze mois après la signature des contrats résulte d'une déception sur le montant de la vente d'électricité rapporté au coût du crédit et non des défauts d'information inhérents au texte du bon de commande puisqu'ils avaient parfaitement connaissance des moyens de nullité qu'ils invoquent aujourd'hui.

Partant, il est retenu que M. [F] et Mme [N] ont renoncé en toute connaissance à se prévaloir des irrégularités formelles affectant le bon de commande et qu'ils ne peuvent se prévaloir de la nullité formelle du bon de commande, étant relevé que ceux-ci bénéficient à ce jour de fenêtres sans défaut avéré et d'une installation fonctionnelle raccordée au réseau ERDF.

Par application des dispositions de l'article L. 311-32 du code de la consommation, les contrats de crédit ne sont donc pas non plus annulés et le jugement est infirmé en toutes ses dispositions.

En l'absence d'annulation des contrats de vente et de crédit qui leur sont affectés, la demande en dispense de restitution du capital emprunté est sans objet.

En l'absence de demande indemnitaire, il n'y a pas lieu d'examiner les moyens tirés des fautes des banques les privant de leur droit à restitution.

Sur les demandes reconventionnelles en paiement

La société Domofinance fait valoir que les emprunteurs ont cessé leurs règlements à compter du 5 avril 2016 et qu'elle a été contrainte de prononcer la déchéance du terme le 2 septembre 2016. Elle réclame leur condamnation solidaire au paiement d'une somme de 26 149,40 euros, outre les intérêts au taux contractuel de 3,31 % à compter du 13 septembre 2016 sur la somme de 24 327,51 euros et au taux légal pour le surplus.

La société BNPPPF fait valoir que les emprunteurs ont cessé leurs règlements à compter du 5 juillet 2016 et qu'elle a été contrainte de prononcer la déchéance du terme le 17 novembre 2016. Elle réclame leur condamnation solidaire au paiement d'une somme de 24 033,71 euros, outre les intérêts au taux contractuel de 5,76 % à compter du 6 avril 2017 sur la somme de 22 360,58 euros et au taux légal pour le surplus.

Les intimés n'ont fait valoir aucun moyen sur cette demande.

La société Domofinance justifie avoir, par lettre recommandée du 2 septembre 2016, mis en demeure les emprunteurs de régler la somme de 26 149,40 euros.

La société BNPPPF n'a produit aucune lettre de mise en demeure.

Aucune des deux banques ne justifie avoir procéder à une mise en demeure préalable de payer les échéances impayées.

En application des articles 1134, 1147 et 1184 du code civil, dans leur version applicable au litige, il est désormais acquis que si le contrat de prêt d'une somme d'argent peut prévoir que la défaillance de l'emprunteur non commerçant entraînera la déchéance du terme, celle-ci ne peut, sauf stipulation expresse et non équivoque, être déclarée acquise au créancier sans la délivrance d'une mise en demeure restée sans effet, précisant le délai dont dispose le débiteur pour y faire obstacle.

Les appelantes ne sont en conséquence pas fondées à se prévaloir de la déchéance du terme irrégulièrement prononcée le 2 septembre et le 17 novembre 2016 et ne peuvent réclamer que le paiement des mensualités échues à ces dates.

Elles ont subsidiairement réclamé la résiliation judiciaire des contrats de crédit.

En application de l'article 1184 du code civil, dans sa version applicable aux contrats, la condition résolutoire est toujours sous-entendue dans les contrats synallagmatiques pour le cas où l'une des deux parties ne satisfait pas à son engagement.

Si les conditions posées par le contrat n'ont pas été respectées, empêchant la clause résolutoire de jouer et de produire ses effets de plein droit, rien n'interdit au créancier de demander en justice le terme du contrat.

En l'espèce, en réclamant aux intimés le paiement des soldes du prêt après déchéance du terme, les appelantes ont manifesté clairement leur volonté de ne pas poursuivre les contrats alors que ceux-ci n'étaient pas arrivés à leur terme juridique.

Les pièces du dossier établissent que M. [F] et Mme [N] n'ont réglé aucune mensualité du prêt à compter du 5 juillet 2016, mettant ainsi en échec le paiement de leur crédit. L'inexécution est suffisamment grave pour justifier le prononcé de la résiliation des deux contrats au 19 septembre 2019, date à laquelle la demande a été formulée à l'audience.

En conséquence, M. [F] et Mme [N] sont solidairement condamnés à payer à la société Domofinance la somme non contestée de 26 149,40 euros, outre les intérêts au taux contractuel de 3,31 % à compter du 19 septembre 2019 sur la somme de 24 327,51 euros et au taux légal pour le surplus et à payer à la société BNPPPF la somme non contestée de 24 033,71 euros, outre les intérêts au taux contractuel de 5,76 % à compter du 19 septembre 2019 sur la somme de 22 360,58 euros et au taux légal pour le surplus.

L'infirmation du jugement oblige par ailleurs de plein droit M. [F] et Mme [N] à rembourser à la société BNPPPF et à la société Domofinance les sommes qu'ils ont reçues en exécution du jugement dont appel.

Conformément à la demande de l'appelante, ces condamnations réciproques seront payées par compensation entre elles à concurrence.

Les motifs qui précèdent rendent sans objet les prétentions et moyens subsidiaires des parties.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant après débats en audience publique, en dernier ressort, par arrêt rendu par défaut, par mise à disposition au greffe,

Infirme le jugement dont appel en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il a déclaré recevable l'action de M. [G] [F] et Mme [J] [N] en son intervention volontaire ;

Statuant à nouveau des chefs infirmés,

Déboute M. [G] [F] et Mme [J] [N] de leurs demandes de nullité des contrats de vente et de crédit affecté ;

Condamne solidairement M. [G] [F] et Mme [J] [N] à payer à la société Domofinance la somme de 26 149,40 euros, outre les intérêts au taux contractuel de 3,31 % à compter du 19 septembre 2019 sur la somme de 24 327,51 euros et au taux légal pour le surplus ;

Condamne solidairement M. [G] [F] et Mme [J] [N] à payer à la société BNP Paribas personal finance venant aux droits de la société Sygma Banque la somme de 24 033,71 euros, outre les intérêts au taux contractuel de 5,76 % à compter du 19 septembre 2019 sur la somme de 22 360,58 euros et au taux légal pour le surplus ;

Dit que M. [G] [F] et Mme [J] [N] devront restituer à la société BNP Paribas personal finance et à la société Domofinance les sommes versées en exécution du premier jugement ;

Déboute les parties de toute autre demande ;

Condamne in solidum M. [G] [F] et Mme [J] [N] aux dépens de première instance et d'appel, ces derniers pouvant être recouvrés directement par la SELAS Cloix & Mendès-Gil, avocats conformément à l'article 699 du code de procédure civile ;

Condamne in solidum M. [G] [F] et Mme [J] [N] à payer à la société BNP Paribas personal finance et à la société Domofinance la somme de 800 euros chacune en application de l'article 700 du code de procédure civile.

La greffièreLe président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 9 - a
Numéro d'arrêt : 20/03819
Date de la décision : 12/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-12;20.03819 ?
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