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21/04/2022 | FRANCE | N°21/15438

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 9 - a, 21 avril 2022, 21/15438


Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 9 - A



ARRÊT DU 21 AVRIL 2022



(n° , 9 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/15438 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CEITA



Décision déférée à la Cour : Arrêt du 21 janvier 2021 - Cour d'Appel de PARIS - RG n° 18/00120





DEMANDERESSE À L'OPPOSITION



Madame [P] [O] divorcée [S]

née le 1er janvie

r 1970 à MARRAKECH (MAROC)

28, rue Bossuet

Appt 3

13006 MARSEILLE



représentée par Me Maude HUPIN, avocat au barreau de PARIS, toque : G0625





DÉFENDERESSE À L'OPPOSITION



La s...

Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 9 - A

ARRÊT DU 21 AVRIL 2022

(n° , 9 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/15438 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CEITA

Décision déférée à la Cour : Arrêt du 21 janvier 2021 - Cour d'Appel de PARIS - RG n° 18/00120

DEMANDERESSE À L'OPPOSITION

Madame [P] [O] divorcée [S]

née le 1er janvier 1970 à MARRAKECH (MAROC)

28, rue Bossuet

Appt 3

13006 MARSEILLE

représentée par Me Maude HUPIN, avocat au barreau de PARIS, toque : G0625

DÉFENDERESSE À L'OPPOSITION

La société SOGEFINANCEMENT, SNC agissant poursuites et diligences de ses représentants et administrateurs légaux domiciliés ès-qualités audit siège

N° SIRET : 394 352 272 00022

53, rue du Port

CS 90201

92724 NANTERRE CEDEX

représentée par Me Thierry FLEURIER de la SCP REGNIER-SERRE-FLEURIER-FELLAH-GODARD, avocat au barreau de SENS

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 8 mars 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Laurence ARBELLOT, Conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. Christophe BACONNIER, Président de chambre

Mme Fabienne TROUILLER, ConseillèreMme Laurence ARBELLOT, Conseillère

Greffière, lors des débats : Mme Camille LEPAGE

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par M. Christophe BACONNIER, Président et par Mme Camille LEPAGE, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Suivant offre préalable acceptée le 13 février 2013, la société Sogefinancement a consenti à M. [K] [S] et Mme [P] [O] épouse [S] un prêt personnel d'un montant de 30 103 euros, remboursable en 84 mensualités de 460,24 euros chacune hors assurance au taux d'intérêt débiteur annuel de 7,40 %.

Saisi par la société Sogefinancement d'une demande tendant à la condamnation des emprunteurs au paiement du solde restant dû au titre du contrat, le tribunal d'instance de Sens, par un jugement réputé contradictoire du 25 octobre 2017 auquel il convient de se reporter, a principalement :

- déclaré la société Sogefinancement irrecevable à demander le paiement des mensualités postérieures à septembre 2017 et des frais d'assurance,

- condamné solidairement M. et Mme [S] à payer à la société Sogefinancement la somme de 12 949,30 euros selon décompte arrêté le 31 septembre 2017.

Le tribunal a constaté que M. [S] a été déclaré recevable à la procédure de surendettement le 10 mars 2015 et que la première mensualité impayée remontait au 20 mars 2015. Il a également constaté que Mme [O], emprunteur solidaire, ne bénéficiait pas de ce plan. Le tribunal a considéré que la déchéance du terme du contrat était irrégulière et que la banque disposait d'un intérêt né et actuel uniquement pour les mensualités du prêt déjà échues de mars 2015 à septembre 2017, et qu'elle était irrecevable pour le surplus.

Suivant déclaration du 20 décembre 2017, la société Sogefinancement a relevé appel de cette décision.

La Cour d'appel de céans, par un arrêt rendu par défaut le 21 janvier 2021 a :

- confirmé le jugement dont appel en toutes ses dispositions,

- condamné la société Sogefinancement aux dépens d'appel et à payer à M. [S] la somme de 1 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Par une déclaration en date du 4 août 2021, Mme [O] a formé opposition à cet arrêt.

Aux termes de conclusions remises le 23 novembre 2021, l'appelante demande à la cour :

- de la déclarer bien fondée en son opposition et ses demandes,

- d'infirmer le jugement rendu en toutes ses dispositions,

- de débouter la société Sogefinancement de l'intégralité de ses demandes,

- de dire qu'elle n'a jamais signé l'offre de prêt litigieuse et de prononcer la nullité de l'offre de prêt litigieuse et la lui déclarer inopposable,

- de dire que la banque n'a pas valablement prononcé la déchéance du terme du contrat et de dire que la créance n'est pas exigible,

- de prononcer l'annulation de la clause d'intérêt appliquée au prêt et d'ordonner à la banque de procéder au calcul des intérêts au seul taux légal défini périodiquement par la réglementation pendant toute la durée du contrat de prêt,

- de dire et juger que la banque procédera pour la période passée au remboursement du trop-perçu à raison de la différence entre le taux nominal et le taux légal, et ordonner à la banque de présenter le décompte détaillé des intérêts calculés au seul taux légal,

- de dire qu'après compensation, l'amortissement se poursuivra pour la valeur du seul capital, les intérêts étant calculés au taux légal défini périodiquement par la réglementation,

- subsidiairement, de prononcer la déchéance des intérêts contractuels, déchéance à tout le moins partielle et dans la limite de l'application du taux d'intérêt légal défini périodiquement par la réglementation,

- en tout état de cause, de constater que les intérêts contractuels sont calculés par référence à une année de 360 jours et non point par référence à l'année civile, ceci en violation de l'article R. 313-1 du code monétaire et financier,

- d'ordonner la substitution de l'intérêt légal au taux conventionnel à la date de la conclusion du prêt et que pour l'avenir les intérêts seront calculés au seul taux légal et en conséquence dire que pour la période passée les intérêts seraient calculées au seul taux légal et ordonner à la banque de présenter un décompte détaillé distinguant capital et intérêts ainsi recalculés, et ordonner compensation entre le capital restant dû et la différence entre intérêts conventionnels acquittés et aux reconstitués au seul taux légal,

- de prononcer que pour l'avenir les intérêts seront calculés au seul taux légal,

- d'ordonner à l'avenir le calcul des intérêts au seul taux légal et pour le passé d'ordonner à la production d'un décompte des intérêts contractuels reconstitués au seul taux légal et prononcer que la différence entre des intérêts perçus et les intérêts au taux légal se compense avec le capital restant dû,

- de condamner la société Sogefinancement au paiement de dommages et intérêts de 12 949,30 euros correspondant au montant de la créance au 31 septembre 2017 outre les intérêts postérieurs, et ordonner la compensation entre les différentes condamnations à intervenir,

- de condamner la société Sogefinancement au paiement de la somme de 1 000 euros en réparation du préjudice moral au regard des tracas et de la mauvaise foi et de l'obstination abusive de la banque lui ont causés,

- de condamner la société Sogefinancement à lui payer la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Mme [O] soutient que ses conclusions sont recevables sur le fondement des articles 960 et 961 du code de procédure civile car elle a précisé les mentions manquantes dans ses écritures postérieures. Elle estime que la banque ne peut faire état d'aucun grief en ce qu'elle disposait déjà des précisions relatives à son nom, prénoms, profession, domicile, nationalité, date et lieu de naissance.

Elle soulève la nullité du prêt. Elle explique qu'elle a été mariée brièvement à M. [S] dont elle est divorcée et accuse ce dernier d'avoir souscrit frauduleusement l'offre de crédit et signé à sa place et qu'elle ne peut l'appeler en la cause puisqu'il est décédé le 10 octobre 2020.

Elle ajoute qu'il appartient à la banque de démontrer la validité du consentement et la connaissance de l'acte par les emprunteurs.

Elle affirme que la déchéance du terme du contrat est irrégulière en ce sens que l'assignation ne peut valoir déchéance du terme, la clause de déchéance du terme ne lui étant pas opposable.

Elle estime que le taux effectif global est erroné en vertu des articles L. 313-1 et L. 313-2 du code la consommation, les intérêts devant être calculés sur une base de 360 jours et non sur une année civile. Elle demande que l'on substitue au taux effectif global le taux d'intérêt légal et que la banque devra procéder au remboursement du trop-perçu pour la période antérieure.

Elle soutient que la banque a manqué à ses obligations de vérification, de mise en garde et de vigilance en vertu des articles R. 312-2 et L. 561-5 I du code monétaire et financier, ce dont elle demande réparation. Elle reproche à la banque sur ce fondement de ne pas avoir vérifié son identité lors de la souscription du prêt litigieux. Elle soutient qu'en sa qualité de professionnelle avertie, la société Sogefinancement ne pouvait ignorer les nombreuses escroqueries réalisées par le biais d'usurpation d'identité et d'utilisation de faux documents que les équipements modernes permettent aisément d'éditer et qu'elle a manqué à ses obligations de vérification de la réalité de l'identité de son cocontractant.

Elle estime que la banque n'a pas vérifié sa solvabilité puisqu'elle ne s'est même pas donné la peine de vérifier son identité et sa signature et s'est fondée sur les documents remis par M. [S].

Aux termes de conclusions remises le 24 novembre 2021, la société Sogefinancement demande à la cour :

- de déclarer irrecevables les conclusions de Mme [O],

- subsidiairement, dire que l'arrêt rendu par la cour de céans est opposable à Mme [O],

- de débouter Mme [O] de l'ensemble de ses demandes,

- de condamner Mme [O] à payer à la société Sogefinancement la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

La société Sogefinancement soulève l'irrecevabilité des conclusions de Mme [O] pour défaut des mentions exigées par les articles 960 et 961 du code de procédure civile.

A titre subsidiaire, elle estime que Mme [O] commet une inversion de la charge de la preuve et que c'est à elle de démontrer que la signature figurant sur l'offre et sur les différents documents versés aux débats n'est pas la sienne.

Sur le caractère exigible de la créance, elle rappelle que les décisions rendues ont indiqué qu'elle était fondée à réclamer le paiement des seules mensualités échues. Elle estime qu'il convient donc d'écarter l'argumentation tendant à ce que la créance ne serait pas exigible.

S'agissant du caractère erroné du taux annuel effectif global, elle indique qu'en vertu de l'article 1353 du code civil, c'est à l'appelante de prouver que ce taux n'est pas conforme, ce qui n'est pas le cas. Elle rappelle que l'article R. 313-1 du code de la consommation précise que si la différence entre le taux annuel réel et le taux annuel contractuel est inférieure à 0,1 %, l'action contre la banque est dénuée de fondement.

S'agissant des manquements de la banque à ses obligations de vérification et de mise en garde, la société Sogefinancement indique qu'il appartient à l'appelante de démontrer qu'elle n'est pas l'auteur des documents litigieux. Sur la solvabilité, elle indique avoir demandé les ressources des emprunteurs et qu'il ressort des fiches de paie de M. [S] des mois de novembre 2012, décembre 2012 et janvier 2013 que les capacités contributives de l'emprunteur principal étaient suffisantes au regard du montant du prêt.

Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions des parties, il est renvoyé aux écritures de celles-ci conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 14 décembre 2021.

L'affaire a été appelée à l'audience le 8 mars 2022.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la recevabilité de l'opposition

En application de l'article 571 du code de procédure civile, 'l'opposition tend à faire rétracter un jugement rendu par défaut. Elle n'est ouverte qu'au défaillant'.

En l'espèce, la cour de céans a statué par arrêt rendu par défaut le 21 janvier 2021 alors que Mme [O] avait été assignée devant elle selon les modalités de l'article 659 du code de procédure civile et qu'elle n'avait pas comparu.

Formée dans le délai d'un mois à compter de la signification de l'arrêt le 16 juillet 2021, cette opposition est recevable.

Sur la recevabilité des conclusions déposée par Mme [O]

La société Sogefinancement soulève l'irrecevabilité des conclusions de Mme [O] pour non-respect des dispositions des articles 960 et 961 du code de procédure civile.

L'article 960 du code de procédure civile prévoit que : « la constitution d'avocat par l'intimé ou par toute personne qui devient partie en cours d'instance est dénoncée aux autres parties par notification entre avocats. Cet acte indique, si la partie est une personne physique, ses nom, prénoms, profession, domicile, nationalité, date et lieu de naissance ».

L'article 961 du même code dispose que : « les conclusions des parties sont signées par leur avocat et notifiées dans la forme des notifications entre avocats. Elles ne sont pas recevables tant que les indications mentionnées à l'alinéa 2 de l'article précédent n'ont pas été fournies. Cette fin de non-recevoir peut être régularisée jusqu'au jour du prononcé de la clôture ou en l'absence de mise en état, jusqu'à l'ouverture des débats ».

En l'espèce, les conclusions remises par Mme [O] le 29 septembre 2021 contenaient comme seule indication « Pour : Madame [P] [O] divorcée [S], opposant » sans faire apparaître les mentions exigées à l'article 960 susvisé.

Cependant, dans ses conclusions remises le 23 novembre 2021, elle a apporté les précisions suivantes : « Madame [P] [O] divorcée [S], née le 01/01/1970 à MARRAKECH, (MAROC), de nationalité marocaine, exerçant la profession d'aide-ménagère, demeurant 28 rue Bossuet appartement 3 ' 13006 MARSEILLE », en conformité avec les exigences textuelles.

Il s'ensuit qu'eu égard à la régularisation intervenue, la fin de non-recevoir doit être rejetée.

Sur la recevabilité de l'action au regard du délai de forclusion

La recevabilité de l'action, examinée par le premier juge, ne fait pas l'objet de contestation de sorte que le jugement doit être confirmé de ce chef.

Sur la demande de nullité du contrat de crédit

Au regard de la date de conclusion du contrat, il convient de faire application des dispositions du code de la consommation dans leur rédaction postérieure à l'entrée en vigueur de la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010 et antérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 fixée au 1er juillet 2016. Il convient de faire application des dispositions du code civil en leur version antérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats.

Pour solliciter la nullité du contrat ou son caractère inopposable, Mme [O] soutient que sa signature a été imitée pendant une période où elle était déjà séparée de son conjoint et alors qu'elle résidait à Marseille.

La Cour constate que Mme [O] ne fournit aucun fondement juridique à sa demande d'annulation du prêt, se contentant de viser les articles 1128 et suivants du code civil.

Aux termes des dispositions des articles 1323 et 1324 du code civil en leur version applicable au contrat, celui auquel on oppose un acte sous seing privé est obligé d'avouer ou de désavouer formellement son écriture ou sa signature. Dans le cas où la partie désavoue son écriture ou sa signature, et dans le cas où ses héritiers ou ayants cause déclarent ne les point connaître, la vérification en est ordonnée en justice.

L'article 287 du code de procédure civile prévoit notamment, quant à lui, que si l'une des parties dénie l'écriture qui lui est attribuée, le juge vérifie l'écrit contesté à moins qu'il ne puisse statuer sans en tenir compte.

L'offre de prêt validée le 13 février 2013 est établie aux noms de M. [K] [S] et de son épouse Mme [P] [O] épouse [S]. Deux signatures différentes figurent en bas de cette offre et sont apposées avec des encres différentes l'une en noir l'autre en bleu.

Mme [O] ne produit aucun exemplaire de sa signature contemporain de la signature du prêt litigieux permettant d'opérer la vérification de signature.

Elle communique aux débats le jugement de divorce prononcé le 23 décembre 2015 par le tribunal de Marrakech sur requête déposée le 13 décembre 2013, une copie difficilement lisible d'une demande de logement auprès du CCAS du 24 janvier 2014 et une attestation délivrée le 19 novembre 2019 aux termes de laquelle il est indiqué que Mme [O] est salariée au sein de la société O2 services à Marseille depuis le 31 janvier 2014.

L'ensemble de ces éléments ne permettent pas de contredire l'authenticité de la signature de Mme [O] sur l'offre de crédit litigieuse ou de dire qu'elle n'aurait pas consenti à cette offre, étant remarqué qu'il n'appartient pas à la juridiction saisie de pallier la carence des parties dans l'administration de la preuve.

Il en résulte que la demande d'annulation du contrat de crédit doit être rejetée.

Sur la régularité de la déchéance du terme du contrat

En application de l'article L. 311-24 du code de la consommation, en cas de défaillance de l'emprunteur, le prêteur pourra exiger le remboursement immédiat du capital restant dû, majoré des intérêts échus mais non payés. Jusqu'à la date du règlement effectif, les sommes restant dues produisent les intérêts de retard à un taux égal à celui du prêt. En outre, le prêteur pourra demander à l'emprunteur défaillant une indemnité qui, dépendant de la durée restant à courir du contrat et sans préjudice des anciens articles 1152 et 1231 du code civil, sera fixée suivant un barème déterminé par décret.

L'article L. 311-22-2 précise que dès le premier manquement de l'emprunteur à son obligation de rembourser, le prêteur est tenu d'informer celui-ci des risques qu'il encourt au titre de l'article L. 311-24.

En outre, en application des articles 1134, 1147 et 1184 du code civil, dans leur version applicable au litige, il est admis que si le contrat de prêt d'une somme d'argent peut prévoir que la défaillance de l'emprunteur non commerçant entraînera la déchéance du terme, celle-ci ne peut, sauf stipulation expresse et non équivoque, être déclarée acquise au créancier sans la délivrance d'une mise en demeure restée sans effet, précisant le délai dont dispose le débiteur pour y faire obstacle.

Le contrat reprend les termes de l'article L. 311-24 ancien dans son paragraphe 5.6. En revanche, les dispositions contractuelles n'ont prévu aucune dispense expresse et non équivoque de mise en demeure préalable.

La société Sogefinancement ne communique aux débats qu'un courrier recommandé du 10 janvier 2017 mettant les emprunteurs en demeure de payer sous huit jours la somme de 28 469,14 euros correspondant aux mensualités échues et impayées jusqu'au mois de novembre 2016, au capital restant dû, aux pénalités légales et aux intérêts de retard, sans aucun autre avertissement préalable les mettant en demeure de régulariser le montant des échéances impayées sous un certain délai.

C'est donc à bon droit que le premier juge a retenu que le prêteur ne justifiait pas avoir prononcé régulièrement la déchéance du terme du contrat et qu'il n'était fondé à réclamer que le paiement des seules mensualités échues de mars 2015 à septembre 2017.

Sur l'irrégularité de la clause relative au taux annuel effectif global

Pour solliciter l'annulation de la clause d'intérêt appliquée au prêt et la substitution du taux légal au taux conventionnel, Mme [O] affirme que le contrat de prêt litigieux se réfère à un taux effectif global erroné, que les intérêts ont été calculés sur une base de 360 jours et non sur une année civile.

Aux termes de l'article 9 du code de procédure civile, il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention.

En l'espèce, au-delà d'affirmations générales et de reproduction de textes, Mme [O] n'apporte aucun élément de nature à démontrer le caractère erroné du taux annuel effectif global alors que la simple lecture des stipulations contractuelles permet de contredire cette affirmation.

Il en résulte que l'intégralité des demandes formées à ce titre doivent être rejetées.

Sur la déchéance du droit aux intérêts contractuels

Mme [O] sollicite à titre subsidiaire, pour le cas où ne serait pas prononcée l'annulation du contrat, de voir prononcer la déchéance du droit aux intérêts contractuels pour défaut de vérification par la banque de son identité et de sa solvabilité. Elle se fonde sur les articles L. 516-5 et R. 312-2 du code monétaire et financier.

Il est remarqué que dans le corps de ses écritures, elle se fonde sur ce même moyen pour solliciter l'allocation de dommages-intérêts à l'encontre de la société Sogefinancement au regard des fautes commises par elle.

Les articles L. 561-5 et R. 312-2 du code monétaire et financier en leur version applicable au litige prévoient qu'avant d'entrer en relation d'affaires avec leur client ou de l'assister dans la préparation ou la réalisation d'une transaction, les organismes de crédit identifient leur client et, le cas échéant, le bénéficiaire effectif de la relation d'affaires par des moyens adaptés et vérifient ces éléments d'identification sur présentation de tout document écrit probant.

Le banquier doit, préalablement à l'ouverture d'un compte, vérifier le domicile et l'identité du postulant, qui est tenu de présenter un document officiel comportant sa photographie. Le banquier doit recueillir et conserver les informations suivantes : nom, prénoms, date et lieu de naissance du postulant, nature, date et lieu de délivrance du document présenté et nom de l'autorité ou de la personne qui l'a délivré ou authentifié.

Si ces dispositions imposent en effet au banquier de procéder à une vérification de l'identité de son client, le non-respect de ces dispositions n'est pas sanctionné par la déchéance du droit aux intérêts contractuels de sorte que le moyen ne saurait prospérer.

Selon l'article L. 311-9 du code de la consommation, avant de conclure le contrat de crédit, le prêteur vérifie la solvabilité de l'emprunteur à partir d'un nombre suffisant d'informations, y compris des informations fournies par ce dernier à la demande du prêteur.

Lorsque le prêteur n'a pas respecté les obligations fixées aux articles L. 311-8 et L. 311-9, il est déchu du droit aux intérêts, en totalité ou dans la proportion fixée par le juge aux termes des dispositions de l'article L. 311-48 du même code.

En l'espèce, la société Sogefinancement communique la fiche de ressources et charges complétée au moment de l'acceptation de l'offre de crédit faisant apparaître des ressources mensuelles pour le couple de 2 089 euros et des charges de l'ordre de 595 euros.

Les ressources du couple sont corroborées par les bulletins de salaire communiqués concernant M. [S] pour les mois de novembre 2012, décembre 2012 et janvier 2013, M. [S] étant professeur et percevant à ce titre environ 2 090 euros par mois.

Si Mme [O] affirme que la banque n'a vérifié que la solvabilité des emprunteurs, elle se contente d'affirmations, ne fournissant aucun élément sur sa situation personnelle et professionnelle à l'époque de la souscription du crédit, éléments qui permettraient de contredire la fiche de ressources et charges établie sur la base des éléments communiquées par les emprunteurs eux-mêmes.

Il s'ensuit que la société Sogefinancement justifie suffisamment avoir vérifié la solvabilité des emprunteurs au vu d'éléments suffisants dans les conditions requises par l'article L. 311-9 susvisé.

Les demandes de déchéance du droit aux intérêts contractuels et d'indemnisation seront donc rejetées.

La société Sogefinancement ne conteste pas la condamnation à hauteur de 12 949,30 euros correspondant aux mensualités impayées de mars 2015 à septembre 2017, Mme [O] se contentant de soutenir que la créance n'est pas exigible au regard d'une déchéance du terme du contrat irrégulier. Ce moyen ayant été rejeté, il y a lieu de confirmer le jugement sur le quantum de la condamnation.

Le surplus des demandes est rejeté.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant en dernier ressort, après débats en audience publique, par arrêt contradictoire, par décision mise à disposition au greffe,

Déclare Mme [P] [O] recevable en son opposition et met à néant l'arrêt rendu le 21 janvier 2021 par la cour d'appel de Paris ;

Rejette la fin de non-recevoir ;

Confirme le jugement dont appel ;

Y ajoutant,

Déboute Mme [P] [O] de l'intégralité de ses demandes ;

Condamne Mme [P] [O] aux dépens d'appel ;

Condamne Mme [P] [O] à payer à la société Sogefinancement la somme de 800 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

La greffièreLe président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 9 - a
Numéro d'arrêt : 21/15438
Date de la décision : 21/04/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-04-21;21.15438 ?
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